L’hypertension artérielle correspond à la principale cause de l’hypertrophie ventriculaire gauche. Il s’agit de l’une des pathologies les plus répandues dans le monde. L’HTA est un puissant facteur de risque (FDR), elle joue un rôle majeur dans la survenue des maladies cardio-vasculaires (MCV). Environ 7 à 8 millions de décès annuels seraient attribuables à l’HTA [17]. Dans notre contexte, l’HTA affecterait 25 à 30% des Sénégalais de plus de 18 ans [68]. Parce qu’elle est associée à une forte morbi-mortalité et à un coût élevé pour la société, l’HTA est un problème de santé publique majeur. La prévention primaire est très importante dans nos pays, vu le coût élevé de la prise en charge de cette maladie (prévention secondaire) et de ses complications (prévention tertiaire). Des données, le plus souvent parcellaires, hospitalières ou plus rarement issues d’enquête de population, suggèrent une augmentation de la fréquence de ce facteur de risque en Afrique. Au Sénégal, en 2005, les maladies cardio-vasculaires représentaient la première cause de décès chez l’adulte selon les statistiques du Ministère de la santé. Dans l’hypertension artérielle, la présence d’une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG), qu’elle soit diagnostiquée par ECG ou par échocardiographie, est fortement prédictive de morbi mortalité cardio-vasculaire indépendamment des niveaux de pression artérielle. L’HVG est fréquente chez le sujet noir hypertendu, et l’HVG concentrique est le type le plus fréquent. Les facteurs favorisants sont l’âge, l’ancienneté et la sévérité de l’HTA [92]. Sa prévalence est très variable selon la méthode diagnostique choisie et la population étudiée. L’objectif principal était d’étudier la prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche à l’électrocardiogramme et à l’échographie cardiaque trans-thoracique chez les patients hypertendus reçus au service de cardiologie de l’hôpital Aristide Le Dantec.
RAPPELS SUR L’HYPERTENSION ARTERIELLE
Définition et classification
Selon les termes de la recommandation 2005 de la Haute Autorité de Santé «HAS», l’HTA est définie de façon consensuelle par une pression artérielle systolique supérieure ou égale à 140 mmHg et /ou une pression artérielle diastolique supérieure ou égale à 90 mmHg mesurées au cabinet médical et confirmées au minimum par 2 mesures par consultation, au cours de 3 consultations successives, sur une période de 3 à 6 mois. En cas de PA supérieure ou égale à 180/110 mmHg, il est recommandé de confirmer l’HTA par 2 mesures par consultation au cours de 2 consultations rapprochées. La HAS décrit également l’HTA systolique isolée appelée aussi HTA systolique pure. Elle est définie par une PA systolique de 140 mmHg ou plus et une PA diastolique inférieure à 90mmHg en mesure clinique [66].
L’HTA peut témoigner de la présence d’une maladie sous-jacente (dite HTA secondaire, 10% des cas). Lorsqu’aucune cause n’est identifiée, on parle d’HTA essentielle [66].
Epidémiologie
Prévalence
La prévalence de l’HTA chez l’adulte augmente avec l’âge, le sexe et la corpulence du sujet. Cependant, pour un même âge et une même corpulence, cette prévalence est différente selon les pays. La prévalence chez les sujets de 35-64ans est de 27,8% aux Etats –Unis, 55,3% en Allemagne, 37,7% en Italie et 46,8% en Espagne [65]. En Grande Bretagne, le non contrôle de la PA chez les patients hypertendus était responsable chaque année de 62000 décès. Le suivi à long terme (23 ans) d’une cohorte de patients hypertendus traités à montrer l’existence d’un sur risque de décès cardio-vasculaire de + 60% (notamment par infarctus) par rapport aux sujets normotendus. La PA moyenne obtenue au cours du suivi dans cette cohorte n’était pas optimale (149/89 mmHg à 10ans et 145 /89mmHg à 15ans) [65]. Environ 7 millions de patients sont traités en France pour une HTA et on estime à plusieurs millions le nombre d’hypertendus non pris en charge [110]. La réduction relative des événements cardio-vasculaires associée à la diminution des chiffres tensionnels est dépendante de la PA initiale mais la réduction absolue de ce risque dépend du risque cardio-vasculaire initial du patient [65].
Morbidité et mortalité
Historiquement, un rôle plus important a été attribué à la pression artérielle diastolique (PAD) qu’à la pression artérielle systolique (PAS) comme prédicteur des événements cardio-vasculaires fatals ou non. Les essais cliniques de l’époque se fondaient pratiquement tous sur les critères d’inclusion des patients relatifs à la pression artérielle diastolique. De nombreuses études observationnelles ont montré que la morbidité et la mortalité cardio-vasculaires ont une relation avec la PAS aussi bien que la PAD. Dans plusieurs régions d’Europe, l’excès de mortalité dû à la pression artérielle élevée est plus élevé pour les événements coronaires que pour l’AVC.
Historique
Historique de l’hypertension artérielle
L’histoire de l’hypertension artérielle n’a pas encore été écrite dans son entier. Seule l’histoire de la mesure tensionnelle a fait l’objet de travaux bien documentés [109]. C’est en 1628 que Harvey découvrit la circulation du sang.
C’est pourtant seulement en 1730 que la pression sanguine fut mesurée pour la première fois par Hales avec un manomètre relié par une canule à l’artère d’un cheval.
Dans les années 1830, les médecins d’assurance soulignaient déjà l’importance des décès par apoplexie et l’on comprend que leur longue attention sur l’artériosclérose les prédisposait à bien reconnaître les facteurs de risque vasculaire. Potain s’intéresse à la mesure de la pression artérielle dès 1836. Multipliant les mesures pendant presque une vingtaine d’années (à partir de 1883), il publie au terme de ce travail son célèbre ouvrage « La Pression Artérielle de l’Homme à l’État Normal et Pathologique » (Paris. 1902. Masson). En 1828, J.L.M. Poiseuille fit les mêmes mesures avec un manomètre à mercure dont les unités (mm ou cm de mercure) sont encore utilisées en pratique médicale, en contradiction avec le système international d’unités. Dès 1903, Janeway, médecin exerçant en clientèle privée, entreprend de mesurer systématiquement la pression artérielle.
La méthode courante en pratique clinique a été inventée en 1905 par N. Korotkoff. Elle consiste à mesurer au manomètre la contre pression exercée sur une artère par un brassard gonflable tout en auscultant l’artère.
Historique de l’électrocardiogramme
Vers 1907, l’ « Elektrocardiogramm » ou EKG (l’électrocardiogramme) est mis au point par Einthoven: le patient met un pied et une main dans une bassine d’eau salée. Les tracés des courbes sont ininterprétables.
En 1920, Pardee décrit le signe ECG de l’infarctus. En 1932 Charles Wolferth et Francis Wood décrivent l’utilisation médicale des dérivations précordiales [92]. En 1949, Sokolow et Lyon proposent des critères diagnostiques de l’hypertrophie ventriculaire gauche [119].
Historique de l’échographie cardiaque
SPALLANZANI le premier en 1794 soupçonna l’existence des ultrasons en observant le vol des chauves-souris. Puis en 1880, CURIE découvre le principe de la piézo-électricité et le moyen de produire des ondes ultrasonores. Il faut attendre la première guerre mondiale avec LANGEVIN pour que l’homme les utilise à la détection des sous-marins en plongée. La première application médicale est due à DUSSIK en 1942 pour la recherche d’une déviation des structures médianes intracrâniennes. Par la suite, suite aux avancées technologiques, l’application de l’échographie s’est étendue aux autres spécialités médicales dont la cardiologie.
Physiopathologie
La pression artérielle est le produit du débit cardiaque par les résistances artérielles systémiques (P = QR). L’élément permanent de l’HTA est lié à une augmentation des résistances périphériques. Les élévations passagères (par exemple à l’occasion d’un effort ou d’une émotion) sont liées à une augmentation du débit cardiaque. Les causes de l’élévation des résistances périphériques sont certainement multiples et font intervenir des facteurs vasculaires, une stimulation sympathique, une stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone, une réduction de la masse néphronique, un excès pondéral, des facteurs endocriniens ou alimentaires (l’HTA est pratiquement inconnue dans les populations qui consomment peu de sel).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I-1- Définition et classification
I-2- Epidémiologie
I-2-1- Prévalence
I-2-2-Morbidité et mortalité
I-3- Historique
I-3-1- Historique de l’hypertension artérielle
I-3-2- Historique de l’électrocardiogramme
I-3-3- Historique de l’échographie cardiaque
I-4- Physiopathologie
I-4-1- Système Rénine-Angiotensine-Aldostérone
I-4-2- Rôle du sodium
I-4-3- Rôle du système nerveux
I-5- Signes cliniques
I-5-1- Interrogatoire
I-5-2- Examen physique
I-5-2-1- Moyens et méthodes de mesure de la pression artérielle
I-5-2-2- Autres paramètres
I-6- Examens complémentaires
I-6-1- Examens de routine
I-6-2 Examens recommandés
I-7- Formes cliniques
I-7-1- Formes évolutives
I-7-1-1- L’hypertension artérielle paroxystique
I-7-1-2- L’hypertension artérielle labile
I-7-1-3- L’hypertension artérielle systolique pure
I-7-1-4- L’hypertension artérielle résistante
I-7-1-5- Urgences hypertensives
I-7-1-6- L’hypertension artérielle maligne
I-7-2- Formes compliquées
I-7-2-1- Complications cardio-vasculaires
I-7-2-2- Complications neurologiques
I-7-2-3 Complications rénales
I-7-2-4 Complications oculaires
I-8- L’évaluation du risque cardio-vasculaire global
I-9- Traitement
I-9-1- Buts
I-9-2- Moyens
I-9-2-1-Traitement non médicamenteux
I-9-2-2- Traitement médicamenteux
I-9-2-2-1- Les diurétiques
II-9-2-2-1-1- Mécanismes de l’action anti hypertensive
II-9-2-2-1-2- Différentes classes de diurétiques
II-9-2-2-1-2-1- Les diurétiques thiazidiques et apparentés
II-9-2-2-1-2-2- Les diurétiques de l’anse
II-9-2-2-1-2-3- Diurétiques bloqueurs de l’aldostérone ou épargneurs potassiques
II-9-2-2-1-2-4- Associations de diurétiques
I-9-2-2-1-3 Modalités d’utilisation et surveillance
II-9-2-2-2- Les béta- bloquants (β bloquants)
II-9-2-2-2-1- Mécanisme d’action anti hypertensive
II-9-2-2-2-2- Classification des β bloquants
II-9-2-2-2-3- Effets secondaires
II-9-2-2-2-4- Contre-indications
II-9-2-2-2-5- Molécules et posologie
II-9-2-2-2-1- Modalités d’utilisation
II-9-2-2-3- Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC)
II-9-2-2-3-1- Mécanismes d’action anti hypertensive
II-9-2-2-3-2- Classification des IEC
II-9-2-2-3-3- Effets secondaires
II-9-2-2-3-4- Précautions d’emploi
II-9-2-2-3-5- Contre-indications
II-9-2-2-3-6- Molécules et posologie
II-9-2-2-3-7- Modalités d’utilisation
II-9-2-2-4- Les antagonistes calciques
II-9-2-2-4-1- Mécanismes d’action
II-9-2-2-4-2- Classification
II-9-2-2-4-3- Effets secondaires
II-9-2-2-4-4- Contre- indications
II-9-2-2-4-5- Molécules et posologie
II-9-2-2-4-6- Modalités d’utilisation
II-9-2-2-5- Les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II
II-9-2-2-5-1- Mécanismes d’action
II-9-2-2-5-2- Effets secondaires
II-9-2-2-5-3- Contre-indications
II-9-2-2-5-4- Molécules et posologie
II-9-2-2-5-5- Modalités d’utilisation
II-9-2-2-6- Les antihypertenseurs centraux
II-9-2-2-6-1- Mécanismes d’action
II-9-2-2-6-2- Effets secondaires
II-9-2-2-6-3- Contre-indications
II-9-2-2-6-4- Molécules et Posologie
II-9-2-2-6-5- Modalités d’utilisation
II-9-2-2-7- Les alpha bloquants
II-9-2-2-7-1- Mécanisme d’action
II-9-2-2-7-2- Effets secondaires
II-9-2-2-7-3- Molécules et posologies
II-9-2-2-7-4- Modalités d’utilisation
I-9-2-2-8- Les vasodilatateurs «directs»
I-9-2-2-9- Associations à doses fixes d’anti hypertenseurs
I-9-2-3- Moyens instrumentaux et chirurgicaux
I-9-2-4- Traitement des facteurs de risque associés
I-9-3- Stratégies thérapeutiques
I-9-3-1- Principes généraux
II-9-3-2- Décision thérapeutique
II-9-3-3- Choix du type de traitement médicamenteux
II-9-3-4- Surveillance
II- RAPPELS SUR L’HYPERTROPHIE VENTRICULAIRE GAUCHE
II-1- Physiopathologie
II-2- L’électrocardiogramme
II-2-1- Les critères les plus utilisés
II-2-2- Autres critères
II-2-3- Les limites de l’ECG
II-2-4- Utilité de l’ECG chez le patient hypertendu
II-3- L’échocardiographie
II-3-1- Indices
II-3-2- Géométrie du ventricule gauche
II-3-3- Fonctions systolique et diastolique
II-3-4- Les limites de la mesure
II-3-5- Utilité de l’échocardiographie chez le patient hypertendu
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I- METHODOLOGIE
I-1- Type d’étude
I-2- Cadre d’étude
I-3- Période d’étude
I-4- Critères d’inclusion
I-5- Critères de non inclusion
II- COLLECTE DES DONNEES
II-1- Outil de collecte
II-2- Définition opérationnelle des variables
II-3- Méthodologie de collecte
II-4- Analyse statistique
III- RESULTATS
III-1- Les données épidémiologiques
III-1-1- L’effectif des patients
III-1-2- Le genre
III-1-3- L’âge
III-1-4- Le niveau de scolarisation
III-1-5- L’activité professionnelle
III-1-6- Niveau socio-économique et mode de vie
III-2- Antécédents
III-2-1- Antécédents personnels
III-2-1-1- Antécédent d’hypertension artérielle
III-2-1-2- Antécédent de diabète
III-2-1-3- Dyslipidémie
III-2-1-4- Antécédent cardio-vasculaire
III-2-2- Antécédents familiaux
III-3- Données cliniques et biologiques
III-3-1- Clinique
III-3-1-1- Symptômes
III-3-1-2- Les mesures physiques
III-3-2- Biologie
III-4- Les données électrocardiographiques
III-5- Les données échocardiographiques
III-5-1- Diamètre de l’oreillette gauche et surface des oreillettes
III-5-2- Diamètre et volume du ventricule gauche
III-5-3- Masse ventriculaire gauche
III-5-3-1- Selon l’American Society of echocardiography (ASE)
III-5-3-2- Selon la convention de PENN
III-5-4- Géométrie du VG
III-5-5- Autres données échocardiographiques
III-6- Corrélation de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique avec les différents paramètres
III-6-1- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique selon le sexe
III-6-2- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique selon l’âge
III-6-3- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique selon le grade de l’hypertension artérielle
III-6-4- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique selon le suivi du traitement
III-6-5- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique selon l’ancienneté de l’HTA
III-6-6- Facteurs de risque cardio-vasculaire corrélés à l’hypertrophie ventriculaire gauche électrique
III-7- Corrélation entre les données échographiques et les différents paramètres
III-7-1- Corrélation entre l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique et le sexe
III-7-2- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique en fonction de l’âge
III-7-3- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique en fonction du grade de l’HTA
III-7-4- Prévalence de l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique en fonction du suivi du traitement
III-7-5- Corrélation entre l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique et l’ancienneté de l’HTA
III-7-6- Facteurs de risque cardio-vasculaire corrélés à l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique
III-8- Corrélation entre modifications électrocardiographiques et modifications échocardiographiques
III-8-1- Corrélation entre l’indice de Sokolow-Lyon et l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique
III-8-2- Corrélation entre l’indice de Lewis et l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique
III-8-3- Corrélation entre l’indice de Cornell et l’hypertrophie ventriculaire gauche échographique
DISCUSSION
CONCLUSION