Dans les pays industrialisés, le mode de vie est devenu de plus en plus sédentaire et ne comporte qu’un très faible niveau d’activité physique. Dans les années 1960 aux État Unis, près de la moitié des emplois dans le secteur industriel demande des efforts modérés contre moins de 20% aujourd’hui (Church et al., 2011). L’accroissement de la sédentarité en plus de la dégradation de l’hygiène de vie liée à de mauvaises habitudes alimentaires et la consommation de tabac et d’alcool, tend à priver la majorité de la population d’un mode de vie sain et équilibré. Ces facteurs entrainent une augmentation de la fréquence des maladies chroniques, comme les maladies cardiovasculaires, l’obésité, le diabète ou encore chez les personnes âgées les risques de chutes qui conduisent à la fragilité et à la dépendance. De ce fait, la mise en place de politiques de prévention est un enjeu socio-économique fort car les pathologies induites sont des causes importantes de mortalité dans la plupart des régions du monde (Organisation Mondiale de la Santé, 2002).
Cette réalité qui interpelle les professionnels de santé et ceux du milieu sportif est à l’origine d’une prise de conscience. Elle les pousse à agir pour modifier les habitudes de vie et à proposer de nouvelles solutions technologiques afin d’améliorer le bien être et la santé des individus par la promotion de l’exercice physique. Ces dernières concernent, non seulement la sensibilisation à la nécessité d’adopter une pratique physique régulière, mais aussi au développement de la motivation pour l’accomplissement personnel et l’amélioration de l’estime de soi ( DiLorenzo et al., 1999; De Moor et al., 2006). De plus, une bonne évaluation de la motricité qu’elle soit effectuée dans le cadre clinique ou par un utilisateur désireux de connaitre ses capacités physiques doit passer par un dispositif rapide et simple, et une autoévaluation sur le lieu de la pratique sportive ou à domicile. Ces nouveaux moyens sont encore à développer aussi bien du point de vue des appareillages que des applications informatiques qui les exploiteront. Dans cette optique, le projet BodyScoring, propose une solution innovante avec de nouveaux services associés. Elle regroupe d’une part, une technologie embarquée communicante de mesure de l’activité physique et, d’autre part, des applications web et mobile permettant d’offrir les services nécessaires à l’évaluation de la motricité et au suivi de l’activité physique. Le projet BodyScoring comporte deux parties. La première est technologique et correspond au développement d’un appareillage dénommé « BodyTrack » porté par l’individu qui regroupe un ensemble de capteurs physiologiques /biomécaniques et un calculateur dont le rôle est de traiter les signaux des capteurs et de délivrer en sortie des informations interprétées relatives à l’analyse de l’exercice physique. La seconde partie aborde les fonctionnalités d’un ensemble d’outils exploitant les réseaux et les appareils mobiles (terminal, smartphone et/ou tablette tactile). Leur objectif est de fournir à l’utilisateur un bilan de ses aptitudes physiques, un programme d’activités individualisé, un accompagnement virtuel lors de la pratique de l’exercice physique et enfin, le support d’un réseau social afin de comparer sa progression avec d’autres utilisateurs.
EVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL
Notions et concepts de contrôle postural
L’exécution de toute activité motrice lors de tâches de la vie quotidienne ou lors d’une activité physique nécessite d’acquérir et de maintenir une posture stable (Massion, 1998). Le terme de posture se définit comme la position relative des segments corporels les uns par rapport aux autres et par rapport à un repère inertiel extérieur au corps (J. Paillard, 1976). L’homme est capable d’adopter une infinité de postures, cependant, les termes «posture» ou «postural», font classiquement référence à la position bipédique, dénommée «posture érigée fondamentale» (J. Paillard, 1971). Le contrôle de la posture constitue l’un des aspects fondamentaux de l’activité motrice, car il assure (1) les fonctions de stabilisation et (2) d’orientation des segments corporels indispensable afin d’effectuer une action (Massion, 1997). La fonction de stabilisation vise à s’opposer à la force gravitationnelle et aux forces de réaction au sol pour maintenir la superposition des segments corporels du fait de la raideur articulaire et du tonus musculaire. Elle vise également à réguler la position du corps par rapport à la surface d’appui en assurant son équilibre et en faisant face aux contraintes extérieures. La fonction d’orientation quant à elle consiste à ajuster la position géométrique des segments corporels par rapport au monde extérieur pour la perception et l’organisation de l’action (Paillard, 1976). Dans le cadre de ce travail, nous nous focaliserons plus spécifiquement sur le premier aspect relatif à la fonction de stabilisation. Le maintien de la posture debout est un phénomène complexe. Il l’est au point que le système postural humain n’est pas totalement fonctionnel à la naissance et qu’il nécessite une maturation et un apprentissage (Assaiante, 1998; Grasso et al., 1998). A l’âge adulte, une part prépondérante de la masse du corps est située à plus d’un mètre du sol et de ce fait, la station debout bipédique et à fortiori unipodale est naturellement instable. Les mécanismes mis en jeu afin de maintenir la posture debout sont complexes et dépendent de nombreux facteurs, résumés dans la (Figure 1.a), tels que les caractéristiques de l’individu, la tâche à accomplir et l’environnement (Shumway-Cook and Woollacott, 2007). Ils dépendent, aussi, de l’interaction de différents facteurs (Figure 1:b) cognitifs, sensoriels, moteurs et biomécaniques (Horak, 2006).
Le maintien postural est un aspect fondamental de la motricité et donc sa quantification est naturellement pertinente afin de construire une vue d’ensemble des capacités d’un individu dans le cadre du projet Bodyscoring. Ainsi, l’objectif des paragraphes suivants est de présenter le fonctionnement du système du contrôle postural ainsi que les concepts biomécaniques liés à la notion d’équilibre postural et de stabilité afin de pouvoir considérer de manière adéquate leur évaluation. Dans l’optique de sélectionner les paramètres appropriés permettant une caractérisation valide de l’aspect de la motricité qui est évalué, les travaux traitant de la sensibilité des paramètres biomécaniques en fonction de l’âge, du sexe, de la pratique sportive et de la pathologie seront détaillés. De plus, dans ce travail, nous évaluerons la capacité de maintien de l’équilibre postural lors de l’exécution d’exercices de Yoga. Ainsi, le choix des exercices retenus sera justifié en présentant leur apport dans le cadre de l’amélioration de la motricité et leur capacité à fournir des situations d’évaluation suffisamment contraignantes en incluant des postures bipodales et unipodales.
Le système postural
Le corps humain est un système complexe. La motricité humaine est issue de la coordination du système musculo-squelettique sous le contrôle du système nerveux central et périphérique avec son réseau dense de capteurs physiologiques. La complexité réside dans la bonne coordination de l’ensemble du système neuro sensori-moteur pour se mouvoir tout en gardant l’équilibre. Ceci fait de ces deux activités, la posture et la locomotion, les deux activités motrices fondamentales. La réalisation d’un mouvement engendre une perturbation de la posture, ce qui nécessite un ajustement pour compenser cette perturbation et maintenir l’équilibre (Bouisset and Zattara, 1981). De manière schématique, le contrôle postural se traduit par l’immobilisation des pièces du squelette dans des positions déterminées, pour composer une attitude d’ensemble (Paillard, 1976). Une attitude relative à la caractéristique de l’individu, la tâche à accomplir et l’environnement, et dépendante de l’interaction de différents facteurs cognitifs, sensoriels, moteurs et biomécaniques.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 EVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL
1.1 Notions et concepts de contrôle postural
1.1.1 Le système postural
1.1.2 L’orientation spatiale
1.1.3 Le contrôle de l’équilibre dynamique
1.1.4 Processus cognitifs
1.1.5 Équilibre et stabilité posturale
1.1.6 Facteurs influençant les oscillations posturales
1.2 Moyens et techniques d’évaluation du contrôle postural
1.2.1 Évaluations cliniques
1.2.2 Évaluation instrumentale du maintien de l’équilibre postural
1.2.3 Synthèse et Conclusion
CHAPITRE 2 EVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL : MATÉRIEL ET MÉTHODE
2.1 Introduction
2.2 Le dispositif BodyTrack
2.3.1 Données accélérométriques
2.3.2 Mesures de gyromètre
2.3.3 Mesures magnétométriques
2.3.4 Repère et matrice de passage
2.4 Méthodes
2.4.1 Protocole
2.4.2 Traitement du signal
2.4.3 Calcul des paramètres
2.5 Conclusion
CHAPITRE 3 : VALIDITE DU BODYTRACK DANS LE CADRE DE L’EVALUATION DE L’ÉQUILIBRE POSTURAL LORS D’EXERCICES DE YOGA
3.1 Introduction
3.2 Méthodes
3.2.1 Sujets
3.2.2 Matériels
3.2.3 Instructions
3.2.4 Traitement du signal
3.2.5 Analyse statistique
3.3 Analyse des données pour l’exercice « montagne »
3.3.1 Résultats de répétabilité Intra-session
3.3.2 Résultats de capacité discriminative
3.3.3 Résultats pour la corrélation entre données accélérométriques et centre de pression
3.3.4 Discussion pour l’exercice montagne
3.3.5 Conclusion pour l’exercice montagne
3.4 Analyse des données pour l’exercice « Arbre »
3.4.1 Résultats de répétabilité intra-session
3.4.2 Résultats pour la corrélation entre données accélérométriques et centre de pression
3.4.3 Discussion pour l’exercice « Arbre »
3.4.4 Conclusion pour l’exercice « Arbre »
3.5 Conclusion
4.1 Introduction
4.2 Méthodologie
4.2.1 Paramètres stabilométriques
4.2.2 Normalisation des paramètres
4.2.3 Analyse en composante principale
4.2.4 Élaboration du score
4.3 Résultats de l’analyse en composantes principales
4.3.1 Analyse multi-régression et normalisation des paramètres
4.3.2 Analyse en composantes principales appliquée sur les paramètres 1D
4.3.3 Analyse en composantes principales appliquée sur les paramètres 2D
4.3.4 Analyse en composantes principales appliquée aux paramètres 3D
4.4 Discussion
4.5 Résultats relatifs au calcul du score
4.6 Conclusion
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
ANNEXES
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