Évaluation de l’atténuation acoustique de la double protection auditive

Méthodes de mesure

Méthode REAT

La mesure d’atténuation subjective la plus utilisée en laboratoire est la méthode REAT. Avec cette méthode, le seuil de l’audition d’un sujet est déterminé à plusieurs bandes d’octaves (entre 63 et 8000 Hz), avec et sans protecteurs auditifs et la différence des seuils, en dB, entre les deux séries de mesures donne l’atténuation sonore du protecteur auditif. Cette atténuation est apparentée à une perte par insertion mais elle est dénommée différemment du fait de son caractère subjectif.
Cette méthode de mesure fait l’objet d’une norme internationale : la NF EN ISO 4869-1 [15] dont la dernière édition date de novembre 2018.
Les essais sont réalisés sur un site dont le champ acoustique a une incidence sonore émanant d’un grand nombre de directions (champ diffus). Les caractéristiques de variation maximale du niveau de pression, de directivité du champ acoustique, de niveau de bruit ambiant et de temps de réverbération du local sont définies dans la norme.
Le bruit ambiant, qui doit être extrêmement faible, est critique car cette méthode repose sur la détection du seuil d’audition binaural, soit 0 dB HL environ. La variation spatiale des niveaux sonores autour de la tête du sujet doit être inférieure à 2,5dB.
Le temps de réverbération du local ne doit pas dépasser 1,6 s. Il est d’un peu plus de 1 s pour le laboratoire que nous avons utilisé (local BESA de l’INRS ci-dessous), ce qui permet d’obtenir un champ relativement diffus sans créer un écho qui perturberait la détection s’agissant de signaux pulsés.
Le seuil d’audition du sujet est mesuré oreille ouverte (sans protecteur) et oreille occluse (avec protecteur), pour chaque configuration de port de protecteurs individuels contre le bruit. La différence entre les résultats de ces deux essais fournit l’atténuation de la configuration de protecteurs individuels (en simple ou double protection).
Cette méthode présente un biais dû à l’effet de masquage des bruits physiologiques amplifiés par l’effet d’occlusion, induisant ainsi une surestimation de l’atténuation pour les basses fréquences (63-250 Hz). Berger dans sa publication [19] estime ce biais de 4 à 11 dB à l’octave 125Hz et de 1 à 10 dB à l’octave 250 Hz. Il s’appuie, pour ces estimations, sur une étude bibliographique, ce qui explique l’amplitude des fourchettes. En effet, les bruits physiologiques introduisent un masquage oreille ouverte comme oreille fermée, mais dans ce deuxième cas il est amplifié par l’effet d’occlusion (voir figure 3 cidessous). Le sujet va donc détecter le bruit à un seuil plus élevé. L’atténuation calculée étant la différence des seuils oreille ouverte et occluse, celle-ci sera surestimée.

Méthode MIRE (MEASUREMENT IN REAL EAR)

La méthode objective de mesure d’atténuation de référence s’appuie sur la technique du microphone dans l’oreille réelle (MIRE). Celle-ci repose sur l’utilisation d’instruments de mesure pour quantifier les niveaux sonores plutôt que sur une évaluation faite par l’individu.
Cette méthode de mesure fait l’objet d’une norme internationale : la NF EN ISO 11904-1 [16] dont la dernière édition date d’août 2003.
Des mesures de niveau sonore sont effectuées au moyen de microphones miniatures ou de sondes microphoniques insérées dans les conduits auditifs de sujets humains. Les valeurs mesurées sont ensuite converties en niveaux ramenés au champ diffus correspondant.
Les résultats sont donnés sous forme de niveaux de pression acoustique continus équivalents pondérés A relatifs au champ diffus.
La différence entre le niveau mesuré, dans les mêmes conditions, à l’intérieur de l’oreille, sans le protecteur individuel contre le bruit, puis avec le protecteur contre le bruit est la perte par insertion du protecteur auditif (IL). Pour cela, le microphone de mesure doit être positionné au même endroit dans le conduit auditif.
Dans le cas de la double protection, afin d’obtenir deux valeurs de perte par insertion en un seul mesurage, deux microphones sont utilisés : le premier est inséré dans le bouchon d’oreille par l’extérieur (par exemple, un microphone tubulaire) et le second sous le casque antibruit à l’extérieur du bouchon d’oreille.
Il convient de noter que certains auteurs utilisent la réduction du bruit (NR) plutôt que la perte par insertion (IL). Celle-ci ne correspond pas directement à l’affaiblissement acoustique d’un protecteur individuel contre le bruit. Le NR est la différence entre le niveau de pression acoustique prise au centre de la tête, lorsque le sujet est absent et le niveau de pression acoustique mesuré dans le conduit auditif, lorsque les protecteurs sont présents. Pour comparer le NR à l’IL, il faut le corriger de la fonction de transfert de l’oreille ouverte (TFOE).
La TFOE est la différence entre le niveau de pression prise au centre de la tête lorsque le sujet est absent et le niveau de pression mesuré dans le conduit auditif ouvert.
Pour cette méthode de mesure, il est nécessaire de corriger l’atténuation pour prendre en compte les limites imposées par la conduction osseuse en utilisant la formule ci-dessous.

Méthode du mannequin (ATF)

Une autre méthode de mesure objective largement utilisée est celle qui repose sur l’utilisation d’un mannequin muni d’une oreille artificielle instrumentée.
Elle fait l’objet d’une norme internationale : la NF EN ISO 11904-2 [17] dont la dernière édition date de janvier 2021.
Ce mannequin aussi appelé simulateur de tête et de torse ou ATF (Acoustic Test Fixture), est équipé d’une oreille artificielle au fond de laquelle est placé un microphone, qui permet de mesurer le niveau sonore au fond de la cavité représentant le conduit auditif. L’oreille artificielle simule la réponse acoustique d’une oreille occluse. En particulier, elle reproduit la première résonance du conduit auditif humain ouvert à approximativement 2600 Hz.
De même que pour la technique MIRE, la différence entre le niveau mesuré, dans les mêmes conditions, à l’intérieur de l’oreille artificielle, sans le protecteur individuel contre le bruit, puis avec le protecteur contre le bruit est la perte par insertion du protecteur.
Un élément à prendre en compte est que le mannequin doit présenter une perte par insertion supérieure sur chaque bande d’octave à celle des protecteurs, seuls ou en combinaison, que l’on cherche à évaluer.

Lien entre les approches subjective (REAT) et objectives (IL et NR)

Afin d’être à même d’effectuer des comparaisons, il est possible de faire le lien entre les atténuations obtenues par les méthodes décrites précédemment. La figure 5 ci-dessous montre l’oreille externe dans des conditions non occluse (oreille ouverte (a)) et occluse (par un casque antibruit (b), par un bouchon (c) ou par les deux (d)). Les indices de la pression acoustique p réfèrent, respectivement, à des positions de microphone juste à l’extérieur de l’entrée du canal auditif (p1) et dans le canal auditif (p2). La pression acoustique prise dans la condition d’oreille occluse est notée avec le symbole « prime ».

Protocole d’essais

Des essais mettant en œuvre les trois méthodes de mesure décrites au paragraphe précédent seront réalisés sur 12 sujets humains recrutés pour l’occasion, ainsi que sur un mannequin.
Les protecteurs individuels contre le bruit (PICB) retenus dans le cadre de cette étude sont les suivants.
Le choix s’est porté sur ces protecteurs tout d’abord parce que ce sont des protecteurs que l’on trouve facilement sur le marché, qu’ils sont largement utilisés par les entreprises, mais aussi parce qu’ils présentent entre eux des caractéristiques matérielles et acoustiques qui sont différentes.
Ils seront évalués seuls et en combinaison, pour chaque sujet et pour chaque méthode de mesure. Chaque série de mesure devra être réalisée pour neuf configurations : sans protecteur auditif, pour chaque casque antibruit seul, pour chaque bouchon seul et enfin pour chaque combinaison de bouchon et de casque.
Pour les essais objectifs (MIRE) les sujets doivent être équipés pour chaque oreille d’un microphone miniature dans le conduit auditif positionné seul ou au travers du bouchon et d’un microphone miniature supplémentaire dans le pavillon de l’oreille qui servira à mesurer la pression acoustique entre le casque et le bouchon lors de l’utilisation d’une double protection.
La façon dont le protecteur est mis en place et porté est un facteur qui influe largement sur l’atténuation apportée par le protecteur, en particulier pour les bouchons d’oreille.
Afin d’obtenir des résultats comparables pour les techniques de mesure subjectives et objectives (REAT et MIRE) chaque sujet positionnera et conservera sans les retirer les protecteurs pour la durée des mesures.
La séquence de réalisation des mesures avec chaque sujet pour chaque couple bouchon/casque (quatre couples en tout) est donc la suivante :
1. Mesure REAT sans protecteur
2. Mesure MIRE d’étalonnage sujet sans protecteurs
3. Mesures MIRE avec le casque antibruit
4. Mesures MIRE avec les bouchons
5. Mesures MIRE avec les bouchons + le casque antibruit
6. Mesures REAT avec les bouchons + le casque antibruit
7. Mesures REAT avec les bouchons
8. Répétition des mesures MIRE avec les bouchons pour vérification
Cette séquence correspond à une demi-journée d’essais. En comptant la séance d’entrainement du sujet d’essai et la réalisation d’une séquence pour chaque couple de protecteurs, le passage de chaque sujet nécessite deux journées et demie de mesures.
Les casques antibruit seuls ne font pas l’objet d’une mesure REAT car il a été jugé que rajouter une mesure REAT au milieu des mesures MIRE était à la fois compliqué et risquait de trop fatiguer les sujets d’essai. Par ailleurs les données fabricants pour les casques antibruit sont généralement très proches d’un laboratoire à un autre [21] à l’inverse des bouchons d’oreille.

Description des essais REAT

Les essais REAT sont réalisés strictement selon la norme ISO 4869-1 [15] dans une salle d’écoute spécialement aménagée par l’INRS, comme décrite au chapitre « Méthodes de mesure » précédent.
La sonorisation est réalisée à l’aide de 6 enceintes faible bruit monitorées. La communication avec le sujet d’essai et l’envoi des signaux aux enceintes se fait par des cartes analogiques/numériques Data Translation et un front end développé sous Matlab. Les résultats sont exportés sous Microsoft Excel.
Afin d’entrainer les sujets et de disposer d’une référence fiable, trois essais à blanc sont réalisés au début du cycle de mesures pour chaque sujet.
Les essais REAT exigent de la concentration et sont très sollicitants pour les sujets d’essai. Il est donc difficile d’en réaliser un trop grand nombre. Trois essais par demi-journée d’essai est un nombre raisonnable. Cela nous a donc obligé à découper le cycle de mesure pour chaque sujet en 5 demi-journées d’essai par sujet : une demi-journée d’entrainement et une demijournée par couple de protecteurs.
Les résultats de cette mesure sont théoriquement comparables aux données affichées par le fabricant. La norme de mesure ISO 4869-1 [15] fixe strictement les conditions et le protocole d’essai. La seule variable laissée à la discrétion des laboratoires est la méthodologie suivie par le sujet d’essai pour ajuster le niveau sonore à son seuil d’audition. Dans notre cas, nous utilisons la méthode d’encadrement Bekesy où pour chaque bande de fréquence le sujet d’essai fait osciller le bruit autour de son seuil d’audition 10 fois et seuls les 6 derniers résultats servent au calcul du seuil.
Par ailleurs, les sujets étaient jeunes et peu entrainés alors que certains laboratoires de certification utilisent majoritairement des sujets internes et très entrainés.
Ces deux points sont très importants et peuvent entrainer des écarts entre les données fabricants et nos propres résultats, allant jusqu’à 10 dB pour une bande d’octave comme le montrent des essais d’inter-comparaison entre laboratoires.

Description des essais MIRE

Les essais MIRE sont réalisés en chambre réverbérante de façon à obtenir un champ le plus diffus possible. La chambre réverbérante de l’INRS (figure 7 ci-dessous) où ont été réalisés les essais, dénommée banc d’essais à niveau élevé ou BENE, possède un champ homogène et les niveaux sonores peuvent atteindre 125 dB par bande d’octave grâce à un système composé de 4 enceintes de forte puissance positionnées dans les 4 angles de la pièce.

Résultats des mesures

Mesures sur sujets

Résultats des mesures

Suivant les protections considérées, les mesures ont été réalisées soit à la fois suivant les méthodes REAT et MIRE (bouchons et double protections), soit seulement suivant la méthode MIRE (casques).
La méthode REAT donne l’atténuation. La méthode MIRE donne la perte par insertion. Comme expliqué au paragraphe 2.4., ces deux grandeurs sont comparables mais la méthode REAT souffre d’un biais aux basses fréquences lié à l’effet d’occlusion qui entraîne une surévaluation de l’atténuation et la méthode MIRE ne tient pas compte de la transmission osseuse directe à l’oreille moyenne ou à la cochlée. Or, cette transmission osseuse, normalement négligeable devant la transmission aérienne, devient prépondérante lorsque l’atténuation de la transmission aérienne est élevée. La perte par insertion doit donc être corrigée de la limite imposée à l’atténuation de la transmission aérienne par la conduction osseuse. Dans la présentation et l’analyse des résultats, les mesures de perte par insertion sont systématiquement corrigées, c’est pourquoi par la suite on ne parlera plus que d’atténuation, quelle que soit la méthode utilisée.

Simples protections

Sur les sujets, et pour les bouchons d’oreille 3M E.A.R ULTRAFIT et SOFT NEONS, les mesures ont été effectuées à la fois suivant les méthodes REAT et MIRE. Les figures 13 et 14 comparent par bande d’octave les atténuations mesurées avec ces deux méthodes entre-elles et avec le niveau de protection estimé, donné par le fabricant (APV).
Comme attendu, du fait du biais imputable au masquage par les bruits physiologiques amplifiés par l’effet d’occlusion, l’atténuation est surestimée aux basses fréquences (< 500 Hz) par la méthode REAT. Aux moyennes fréquences, les atténuations issues de chacune des deux mesures sont très bien corrélées. Aux hautes fréquences (> 2 kHz), il peut y avoir un écart du fait de la conduction osseuse, la correction apportée aux mesures MIRE étant une correction moyenne. Comme les atténuations restent largement inférieures à cette limitation quelle que soit la bande de tiers d’octave considérée, la conduction aérienne reste prédominante et la corrélation est également très bonne.

Analyse des résultats

Simples protections

Les résultats de l’évaluation de l’atténuation des bouchons d’oreille ULTRAFIT et SOFT NEONS n’appelle pas de commentaires particuliers. Cette atténuation augmente avec la fréquence et ce résultat était attendu. Sa pente présente une inflexion à l’octave 500 Hz pour l’ULTRAFIT et à l’octave 1 kHz pour le SOFT NEONS. Cela est toujours le cas et correspond d’après les modèles proposés dans la littérature [14] et [25] à l’apparition des premières fréquences de résonance du bouchon d’oreille. Ces premières fréquences de résonance se situent en général et toujours d’après ces publications autour de 1 kHz, ce qui est cohérent avec nos résultats.
Le casque CLARITY C1 a été volontairement choisi pour son atténuation modérée. De fait, sa perte par insertion varie, suivant les sujets d’essai, de faiblement négative (-2 dB) à une dizaine de décibels aux bandes d’octave 63 Hz et 125 Hz et présente des valeurs comparables à ces deux fréquences (voir figure 19). La littérature [26] et [27] explique que l’atténuation aux basses fréquences d’un casque anti-bruit est gouvernée par la résonance de la coque sur le coussinet, la coque se comportant à ces fréquences comme une masse rigide et le coussinet comme un ressort. Les fabricants essayent de positionner cette résonance le plus bas possible, car l’atténuation est alors nulle voire négative. Cependant, comme la raideur du coussinet dépend de l’appui sur le crâne du porteur et de l’effort de compression de l’arceau, la fréquence de la résonance est, malgré leurs efforts, susceptible de varier. Pour le casque CLARITY C1, la coque étant assez légère, il est manifeste au vu des résultats que cette résonance intervient assez haut en fréquence, souvent dans l’octave 63 Hz voire même dans l’octave 125 Hz, alors qu’il serait beaucoup plus efficace qu’elle soit dans une octave inférieure. Cela explique à la fois les disparités entre les sujets, les atténuations parfois négatives, l’homogénéité des résultats entre les deux bandes d’octaves et enfin la faible atténuation moyenne. Ensuite, aux fréquences moyennes (500 Hz-1 kHz), l’atténuation augmente rapidement, la loi de masse imposant une augmentation de l’atténuation de +6 dB par octave. Puis, elle stagne en moyenne fréquence (2 kHz), ce qui s’explique par le comportement modal de la coque [27]. En effet, les premiers modes des coques des casques anti bruit se situent d’après la littérature dans la fourchette 1 kHz-2 kHz et cela semble bien être le cas pour le CLARITY C1. Enfin, aux hautes fréquences (4 kHz et 8 kHz), l’atténuation doit, toujours d’après la littérature, diminuer du fait du couplage entre la coque et les premiers modes de la cavité créée par cette coque [27]. C’est bien ce qui est observé. Dans le cas particulier de ce casque, le fabricant a ménagé un passage pour le son obturé par un filtre censé garantir une atténuation plate en fréquence. Il est possible que cela accentue cette diminution de l’atténuation. La courbe d’atténuation obtenue pour le casque CLARITY C1 est donc conforme à la littérature et ce casque anti-bruit présente bien une atténuation assez faible, quoi que plus élevée que prévue, aux moyennes et hautes fréquences.
Le casque OPTIME III avait été choisi, au contraire du précédent, pour sa forte atténuation. Il est réputé être l’un des plus efficaces du marché. Il est de fait plus efficace que le CLARITY C1 mais il est loin d’être conforme aux données du fabricant. Ce résultat était attendu aux basses fréquences ; comme cela a été expliqué précédemment, quel que soit le casque anti-bruit considéré, l’atténuation aux basses fréquences est gouvernée par la résonance masse-ressort de la coque sur le coussinet et sauf à réussir à positionner cette résonance très bas – mais cela alourdirait le casque et compromettrait le confort – il n’est pas possible d’obtenir une atténuation élevée aux octaves 63 Hz et 125 Hz. En plus cette fréquence de résonance varie en fonction des conditions d’appui et de charge statique du coussinet, donc du sujet. Comptetenu de ces considérations, l’atténuation du casque OPTIME III est finalement assez élevée aux basses fréquences. De plus, la pente d’atténuation entre 63 Hz et 125 Hz montre que la résonance masse-ressort se produit quel que soit le sujet d’essai à une fréquence assez basse, probablement dans l’octave 63 Hz. L’atténuation progresse assez vite aux moyennes fréquences et atteint 38 dB à 1 kHz, ce qui est une très bonne performance. En revanche, conformément à ce qu’annonce la littérature mais contrairement aux données du fabricant,elle diminue ensuite régulièrement et n’est plus que de 30 dB à 8 kHz.
Bien que les deux profils fréquentiels de l’atténuation des casques anti-bruit soient cohérents avec les phénomènes physiques identifiés par les modèles et décrits dans la littérature, ils ont été vérifiés à l’aide d’une mesure avec la technique du mannequin. Cette mesure les a confirmés. L’atténuation obtenue avec le mannequin est moins élevée dans le cas du casque CLARITY C1, avec une fréquence de résonance masse-ressort de la coque sur le coussinet souple manifestement plus basse mais plus importante qu’avec les sujets. La forme de la courbe est cependant la même sur tout le spectre et cela valide nos mesures sur les sujets.
Pour le casque OPTIME III, la correspondance est très bonne à la fois en forme et en niveau.
L’intention était de disposer de deux casques anti-bruit différents, l’un présentant une faible atténuation, l’autre une forte atténuation. Ils sont en fait plus proches que prévus. Le casque anti-bruit CLARITY C1 a de plus un comportement assez variable d’un sujet à l’autre, ce qui est probablement dû à un mauvais plaquage du coussinet sur la tête des sujets comme évoqué précédemment. A contrario, le casque OPTIME III a une atténuation plus proche d’un sujet à l’autre avec des écarts types plus faibles (voir figures 19 et 20).

Doubles protections

L’analyse des résultats s’appuie sur quelques publications trouvées sur le sujet.
D’après Behar [28], l’atténuation de la combinaison est celle du bouchon à 125 Hz et celle du bouchon faiblement augmentée à 1 et 2 kHz. Au-dessus de 2 kHz, l’atténuation est limitée par la conduction osseuse. A 250 et 500 Hz, les atténuations du bouchon et du casque se combinent bien. Berger [29] confirme ce constat. Il note aussi une très forte augmentation de l’atténuation lorsque le bouchon est enfoncé très profondément dans le canal auditif avec une limitation par la conduction osseuse qui s’étend alors aux octaves 500 Hz et 1 kHz. Berger toujours [30] précise que d’une part le gain par bande d’octave sera de 0 à 15 dB par rapport à la plus performante des deux protections combinées et que le fait que la conduction osseuse soit la plus élevée, et donc plus limitante, à 2 kHz entraînera un pincement de l’atténuation à cette octave. La publication la plus approfondie trouvée sur le sujet est celle de Rawlinson et al. [31]. Ils ont examiné, à partir de mesures REAT, l’atténuation de 11 combinaisons de bouchons d’oreille et de casques anti-bruit. Ils constatent qu’aux octaves basses fréquences, 63 Hz et 125 Hz, l’atténuation de la combinaison est plus élevée mais n’atteint pas la somme des deux atténuations. A 250 Hz, à une exception près, c’est également le cas mais le gain est souvent peu élevé. Aux octaves moyennes fréquences, 500 Hz et 1 kHz, l’atténuation de la combinaison est très variable : elle peut être inférieure à celle de la plus performante des deux protections, du même ordre ou largement supérieure. D’après eux, plus le volume intérieur du casque anti-bruit est faible, meilleure est l’effet de la combinaison. Enfin ils constatent un plafonnement systématique de l’atténuation à 2 kHz et aux octaves supérieures qu’ils attribuent comme E. Berger à la limite imposée par la conduction osseuse. De ce fait, ils constatent que les atténuations des combinaisons sont similaires à ces fréquences. Abel et Amstrong [32] comparent quatre combinaisons de deux bouchons et deux casques anti-bruit au moyen de la méthode REAT. Ils commencent leurs mesures à l’octave 500 Hz. Aux octaves 500 Hz et 1 kHz, ils constatent que l’atténuation est gouvernée par celle du bouchon d’oreille et qu’elle est environ 15 dB plus élevée que celle de la meilleure des deux protections combinées. Ils ne font donc pas le même constat que Rawlinson et al. En revanche, ils confirment qu’à partir de 2 kHz les atténuations des combinaisons correspondent aux limites imposées par la conduction osseuse.
Pour observer le comportement des quatre combinaisons testées nous avons, à l’instar de ce qui est fait dans la littérature, superposé pour chaque couple de protecteurs les courbes d’atténuation individuelles et combinées obtenues par la méthode MIRE. Elles sont présentées figures 25 à 28 et tableau 5 ci-après.

Mesures sur tête artificielle ISL

Mesures des atténuations individuelles

L’objectif de cette partie est de retrouver avec le mannequin les atténuations obtenues avec les sujets. Le tableau 7 suivant détaille les résultats obtenus.
La représentativité de la tête ISL vis-à-vis du panel des 12 sujets est très faible pour les bouchons d’oreille.
Pour le bouchon 3M E.A.R. ULTRAFIT, il faut l’enfoncer sur seulement une de ses 3 ailettes pour se rapprocher des valeurs obtenues avec les sujets. Même avec ce faible enfoncement, les atténuations obtenues avec la tête ISL restent très supérieures à celles obtenues avec les sujets d’essais. Le conduit de la tête ISL est cylindrique. Il est revêtu de silicone pour simuler la flexibilité de la peau humaine. Ceci est objectivement insuffisant pour reproduire la réalité.
Il est manifeste que l’étanchéité est bien supérieure avec ce conduit artificiel à ce qu’il est possible d’atteindre avec des personnes réelles.
Pour le bouchon 3M E.A.R. NEONS, avec un enfoncement standard, l’atténuation obtenue n’est pas non plus représentative. Par contre, en ne l’enfonçant que sur 4 mm, il est possible de se rapprocher des valeurs obtenues avec les sujets d’essais. Le résultat n’est pas pour autant satisfaisant car il présente une trop forte variabilité. Elle est due au fait que 4 mm représente aussi l’enfoncement minimum et que le bouchon tient à peine dans le conduit.
Ces résultats étaient attendus. Lors de leur communication au congrès ASA à Boston en 2017 [12], Nélisse et Sgard évoquent déjà ce problème. Eux aussi testent des enfoncements différents sans réussir à obtenir une atténuation « raisonnable », c’est-à-dire proche de ce qui est observé pour des conduits humains. Ils montrent cependant que leur tête artificielle, en l’occurrence une tête de marque G.R.A.S. différente de celle utilisée ici, permet de reproduire les mêmes phénomènes aux moyennes fréquences que ceux observés sur les sujets.
Pour ce qui concerne les casques anti-bruit, le mannequin reproduit très bien le comportement sur les sujets d’essais du casque 3M Peltor OPTIME III. En revanche, le casque Howard Leight CLARITY C1 montre un décalage de la fréquence résonance de la coque sur le coussinet souple vers le haut avec pour conséquence une atténuation négative aux octaves 63 et 125 Hz. C’est une surprise. Habituellement, la tête artificielle permet de bien approcher, au contraire de celui des bouchons d’oreille, le comportement des casques anti-bruit sur les sujets d’essais. Par ailleurs quatre essais ont été faits pour chaque casque. Ils sont très reproductibles.
En conclusion, pour trois des quatre protections, les résultats en termes d’atténuation obtenus avec la tête artificielle ISL sont éloignés de ceux obtenus avec les 12 sujets d’essais.
La tête artificielle n’est représentative des résultats sur des humains que pour le casque 3M Peltor OPTIME III. C’est un résultat intéressant puisqu’il invite à questionner les méthodes d’essai des normes qui utilisent un mannequin (EN 13819-3 et ISO 11904-2), lorsqu’elles sont utilisées pour la certification de bouchons d’oreilles. Pour la présente étude, c’est un résultat décevant mais non rédhibitoire puisque les essais de Nélisse et Sgard [12] semblent montrer que la tête artificielle permet les mêmes observations sur les doubles protections qu’avec des sujets d’essais. C’est ce qui va être vérifié dans le paragraphe suivant.

Mesures des atténuations des doubles protections

La figure 30 compare les pressions sonores du champ diffus extérieur, sous le casque antibruit et sous le bouchon d’oreille pour la combinaison casque anti-bruit Howard Leight CLARITY C1 et bouchon 3M E.A.R. ULTRAFIT enfoncé sur une seule ailette.

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Table des matières
Résumé-Abstract 
Remerciements
Table des tableaux
Table des illustrations
Introduction 
1. Revue de littérature 
2. Méthodes de mesure
2.1. Méthode REAT
2.2. Méthode MIRE (MEASUREMENT IN REAL EAR)
2.3. Méthode du mannequin (ATF)
2.4. Lien entre les approches subjective (REAT) et objectives (IL et NR)
3. Protocole d’essais 
3.1. Description des essais REAT
3.2. Description des essais MIRE
3.3. Description des essais sur mannequin
4. Résultats des mesures 
4.1. Mesures sur sujets
4.1.1. Résultats des mesures
4.1.1.1. Simples protections
4.1.1.2. Doubles protections
4.1.2. Analyse des résultats
4.1.2.1. Simples protections
4.1.2.2. Doubles protections
4.2. Mesures sur tête artificielle ISL
4.2.1. Mesures des atténuations individuelles
4.2.2. Mesures des atténuations des doubles protections
4.2.3. Prévision des atténuations des doubles protections
Conclusion
Références bibliographiques 
Glossaire

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