La fibrillation atriale (FA) est l’arythmie la plus fréquente et une cause majeure d’accidents vasculaires cérébraux, elle affecte la qualité de vie et est associée à une augmentation de la mortalité[1,2]. Les indications pour l’ablation de la FA sont étendues, allant de patients hautement symptomatiques présentant une FA réfractaire aux médicaments, à un traitement de première intention pour certains patients sans traitements médicamenteux antiarythmiques antérieurs[3]. Les techniques de rythmologie interventionnelle sont en constante amélioration et la balance bénéfice risque doit être régulièrement réévaluée. L’évaluation des pratiques permet de mieux conseiller le patient dans la prise de décision en fonction d’une information précise qui lui est fournie. Le taux de succès et complications variant significativement d’un centre à un autre, nous avons entrepris d’évaluer les complications à moyen terme de la technique d’ablation selon les modalités utilisées au CHU de Brest qui comportent des voies d’abord veineuses fémorales gauches et droites, une seule voie transseptale et l’utilisation systématique de l’échographie endocavitaire pour guider la ponction transseptale. La plupart des complications sont bénignes mais certaines plus rares sont sévères, on retrouve notamment les épanchements péricardiques voire tamponnades, les accidents vasculaires cérébraux (AVC), les paralysies diaphragmatiques, les fistules atrioœsophagiennes et les complications au niveau des voies d’abord. Les dernières études sur l’ablation de la FA retrouvent des taux de complications entre 11.7 et 13.8% dont 3.8 à 7.2% de complications graves[4]. Nous avions déjà effectué une évaluation de nos pratiques pour observer l’efficacité de la cryoablation de FA paroxystique et avions retrouvé un taux similaire à celui des études.
EPIDEMIOLOGIE
La fibrillation auriculaire est l’arythmie cardiaque la plus fréquente, les hommes étant plus touchés que les femmes, on estime 20.9 millions d’hommes et 12.6 millions de femmes atteints dans le monde[5]. La prévalence et l’incidence augmentent dans les pays développés[6]. Le risque de développer une FA après 40 ans a été estimé à 26%[7]. La prévalence est estimée entre 2 et 3 % chez les patients de plus de 20 ans[8,9] avec une augmentation chez les patients âgés et présentant une hypertension artérielle, insuffisance cardiaque, coronaropathie, valvuloplastie, obésité, diabète, insuffisance rénale .
COMPLICATIONS
– La FA est indépendamment associée à un risque multiplié de 2 de mortalité toute cause confondue chez les femmes et de 1.5 chez l’homme[10].
– Accident vasculaire cérébraux la FA est responsable de 20-30% des AVC avec une mortalité multipliée par 2 par rapport aux autres causes d’AVC[11]. Ce risque peut être largement atténué par l’anticoagulation. Le risque annuel d’embolisation est calculé par le CHADS-VASC. Dans les essais cliniques randomisés contemporains le taux annuel moyen d’accident vasculaire cérébral est d’environ 1,5% et le taux de mortalité est d’environ 3% par an chez les patients atteints de FA anticoagulé[4,7].
– Hospitalisation : entre 10 et 40% des patients porteurs de FA sont hospitalisés chaque année[12].
– La dysfonction ventriculaire gauche (VG) est présente dans 20 à 30% des cas de FA. La FA cause ou aggrave le dysfonctionnement du VG chez de nombreux patients atteints de FA, tandis que d’autres ont une fonction VG conservée malgré une FA de longue date.
– Diminution de la qualité de vie[13].
– Démence vasculaire : des embolies asymptomatiques participeraient au déclin cognitif[14].
CLASSIFCATION DE LA FA
Il existe 4 types de FA qui sont classés en fonction de leur durée et réponse aux thérapeutiques, elles peuvent évoluer d’une catégorie à une autre :
– Paroxystique : Réduction spontanée en moins de 48h.
– Persistante : Durée > 7jours avec réduction par cardioversion électrique et/ou médicamenteuse.
– Persistante de longue durée : Durée > 1 an quand est décidée une stratégie de contrôle du rythme.
– Permanente : Cardioversion non efficace et/ou non envisagée.
IMPACT THERAPEUTIQUE SUR LA MORTALITE
L’anticoagulation par un traitement par Anti-vitamine K (AVK) ou Anticoagulants oraux directs (AOD) diminue largement et significativement les AVC et la mortalité[15,16]. Les autres interventions comme le contrôle du rythme ou de la fréquence cardiaque diminuent les symptômes de la FA et préserve la fonction VG mais n’ont pas démontré de diminution à long terme de la mortalité ou de la morbidité[17,18].
PHYSIOPATHOLOGIE
La FA possède une forte composante héréditaire qui est indépendante des conditions cardiovasculaires concomitantes[19], Jusqu’à un tiers des patients atteints de FA ont des variantes génétiques communes prédisposant à la FA, même si le risque ajouté est relativement faible. Au moins 14 de ces variant communs sont connus pour augmenter le risque de FA prévalent dans les populations [20]. Des modifications des caractéristiques du potentiel d’action auriculaire, du remodelage auriculaire a été suggéré en tant que mécanismes potentiels contribuant à un risque accru de FA chez les porteurs de variantes génétiques communes [21]. Bien que l’analyse génomique puisse être l’occasion d’améliorer le diagnostic et la gestion de la FA à l’avenir, les tests génétiques de routine pour les variantes génétiques communes associées à la FA ne sont pas recommandés pour le moment[22].
Les maladies cardiaques structurelles, l’hypertension, éventuellement le diabète, mais aussi la FA elle-même induit un lent mais progressif processus de remodelage structurel dans les oreillettes. Activation des fibroblastes, augmentation du dépôt dans le tissu conjonctif et fibrose sont les caractéristiques de ce processus [23]. En outre, l’infiltration graisseuse auriculaire, les infiltrats inflammatoires, l’hypertrophie des myocytes, la nécrose et l’amylose sont présents chez les patients atteints de FA qui présentent des affections concomitantes prédisposant à la FA[24]. Le remodelage structurel entraîne une dissociation électrique entre les faisceaux musculaires et des hétérogénéités de conductions locales, favorisant la réentrée et la perpétuation de l’arythmie. Chez de nombreux patients, le processus de remodelage structurel a lieu avant l’apparition de la FA. Les modifications fonctionnelles et structurelles du myocarde auriculaire et de la stase du sang, en particulier de l’auricule gauche, génèrent un milieu prothrombotique. En outre, même de courts épisodes de FA entraînent des lésions du myocarde auriculaire et l’expression de facteurs prothrombotiques à la surface de l’endothélium auriculaire, parallèlement à l’activation des plaquettes et des cellules inflammatoires, et contribuent à un état prothrombotique généralisé[25].
Il a été observé qu’une source focale dans les veines pulmonaires peut déclencher la FA, et l’ablation de cette source peut supprimer la récidive. Le mécanisme de l’activité focale peut impliquer à la fois une activité déclenchée et une réentrée localisée[26].
FACTEURS DE RISQUE
Il a été mis en évidence de nombreux facteurs de risque indépendants augmentant le risque d’apparition de la FA :
– L’Insuffisance cardiaque et la FA sont un facteur de risque l’un pour l’autre[27].
– Hypertension artérielle (HTA) est un facteur de risque emboligène de la FA[28].
– Valvulopathies (Principalement le rétrécissement mitral): augmentent le risque de FA mais aussi le risque thromboembolique[29].
– Diabète : augmente le risque thromboembolique[30].
– Obésité : Facteur de risque de FA avec augmentation de dysfonction diastolique, inflammation et infiltrats atriales[31].
– Syndrome d’apnée du sommeil (SAS) : Facteur de risque de FA[32].
– Insuffisance rénale chronique (IRC) : Facteur de risque de FA[33].
THERAPEUTIQUE ANTI-THROMBOTIQUE
Il est recommandé par l’European Society of Cardiology (ESC) d’estimer le risque thrombotique par le calcul du CHA2DS2-VASc score . En cas de score supérieur ou égal à 1 pour l’homme ou 2 pour la femme il y a un bénéfice à introduire un traitement anticoagulant. Il a été démontré que le sur-risque pour les patients de sexe féminin n’apparaissait qu’après 75ans modifiant le score pour les femmes [35].
Les AVK ont été les premiers anticoagulants utilisés dans la prévention des embolies dues à la FA, ils réduisent le risque d’AVC de 64% et la mortalité de 24%[16]. Utilisation limité par un intervalle thérapeutique étroit nécessitant des contrôles de dosages fréquents. Il sont les seuls traitements anticoagulants validés pour la FA chez les patients porteurs de valves mécaniques et atteints de rétrécissement mitral modéré à sévère[36]. Les AOD comprenant un inhibiteur direct de la thrombine représentés par le dabigatran et des inhibiteurs du facteur Xa de la coagulation apixaban, rivaroxaban sont des alternatives aux AVK avec une efficacité comparable[15]. Les antiagrégant plaquettaire (AAP) ne sont plus recommandés dans la prévention des AVC chez les patients porteurs de FA, ils augmentent le risque hémorragique de façon similaire aux AVK en étant moins efficaces pour la prévention des AVC[37]. L’occlusion de l’auricule gauche percutanée a été démontrée non inférieure aux AVK mais n’est pour l’instant recommandée que pour les patients porteurs d’une contre indication non réversible aux anticoagulants[38].
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Table des matières
I. LISTE DES ABREVIATIONS
II. RESUME
III. INTRODUCTION
IV. ETAT DES CONNAISSANCES
1. Epidémiologie
2. Complications
3. Classification de la FA
4. Impact thérapeutique sur la mortalité
5. Physiopathologie
6. Facteurs de risque
7. Thérapeutique anti-thrombotique
8. Thérapeutique pour le contrôle de la fréquence cardiaque
9. Thérapeutique pour le contrôle du rythme cardiaque
10. Ablation
11. Radiofréquence
12. Echographie intra-cardiaque
V. MATERIEL ET METHODES
VI. RESULTATS
VII. DISCUSSION
VIII. CONCLUSION
IX. BIBLIOGRAPHIE
X. ANNEXE
1. Score de CHA2DS2-VASC
2. Recueil de données registre PRINT
XI. SERMENT D’HIPPOCRATE
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