L’Imagerie par Résonnance Magnétique (IRM) est un outil diagnostique, non invasif, non douloureux et non irradiant, devenu indispensable dans le monde médical. Sa réalisation requiert cependant l’immobilité du patient pendant toute sa durée. Cette immobilité peut être difficile à obtenir, notamment en pédiatrie (1,2). L’IRM reste un endroit impressionnant pour un enfant, bruyant (jusqu’à 110 décibels pour certaines séquences), sombre, pouvant être une source d’agitation (2). Le recours à une sédation ou à une anesthésie générale (AG) est donc nécessaire pour obtenir l’immobilité de l’enfant et garantir une image de bonne qualité (2). Le choix de l’agent anesthésique est important pour que l’ensemble de la procédure puisse être réalisé de façon sécuritaire et dans les meilleures conditions, en dehors du bloc opératoire (1–4). Le médicament idéal doit avoir un délai d’action court, un minimum d’effets indésirables et une voie d’administration peu invasive. Actuellement en France, il n’existe aucune recommandation sur les modalités de prise en charge anesthésique lors d’IRMs pédiatriques. Le recours à l’anesthésie générale avec utilisation du propofol ou des gaz halogénés est majoritaire en France (5) et est associé à un contrôle des voies aériennes supérieures par intubation trachéale ou masque laryngé (5). Il se pose ainsi la question de l’invasivité et de l’innocuité de l’anesthésie dans ce contexte. Les différentes classes d’agents anesthésiques ont été étudiées dans cette indication depuis plusieurs années (3,6,7). Tous ces agents anesthésiques agissent, soit sur le récepteur de l’acide gama-aminobutyrique (GABA-R) ou sur le récepteur N méthyl-D-aspartate (NMDA-R) (un sous type de récepteur au glutamate) (8). En raison de leurs mécanismes d’action et de leurs interactions sur la neurotransmission, de nombreuses études suggèrent un effet délétère de ces agents sur les phénomènes d’apoptose neuronale et de synaptogenèse dans un cerveau immature en voie de développement (8–10). Des études expérimentales ont montré que ces agents anesthésiques peuvent être la cause de changements morphologiques sur le développement du cerveau immature de souriceaux, à l’origine de troubles neurocognitifs à long terme (8–10).
Plusieurs études cliniques ont été menées afin d’évaluer l’impact potentiel de l’anesthésie générale sur le développement neurocognitif de l’enfant (11–13). Ainsi, l’une d’entre elles (The Mayo Anesthesia Safety in Kids Study) a montré que des expositions multiples à une anesthésie générale avant l’âge de 3 ans étaient associées à des difficultés d’apprentissage et de comportement (12,14). En 2016, la Food and Drug Administration (FDA) a publié un avertissement aux Etats Unis, sur l’utilisation de l’anesthésie et de la sédation chez les jeunes enfants et les femmes enceintes, soulignant le risque potentiel des procédures anesthésiques si celles-ci sont d’une durée supérieure à 3h ou si elles sont répétées chez les enfants de moins de 3 ans (15). L’agence Santé Canada a publié un avertissement similaire à celui de la FDA en 2017 (16). La société européenne d’anesthésie (ESA) ne partage pas quant à elle l’avertissement de la FDA (17). Les preuves qui sous-tendent cet avertissement sont, pour elle, insuffisantes et incomplètes, et ne permettent pas de changer les pratiques anesthésiques actuelles. Néanmoins, elle soutient le fait de n’entreprendre aucune procédure anesthésique chez l’enfant ou la femme enceinte qui n’est pas nécessaire (17). Ce consensus rappelle également les facteurs essentiels afin de délivrer une anesthésie sûre chez l’enfant., c’est-à-dire des techniques d’anesthésies sûres et approuvées, délivrées par un personnel formé et compétent, dans un environnement pédiatrique adapté (17). Il semble donc nécessaire de minimiser les expositions des enfants aux agents anesthésiques et de rechercher des agents sédatifs possédant un meilleur profil de sécurité (9).
La dexmédétomidine est un agoniste α2 pré-synaptique, elle induit une sédation en diminuant l’activité des neurones adrénergiques au niveau du locus coeruleus du tronc cérébral, sans interaction avec la fonction respiratoire (18). L’absence d’effet neurotoxique de la dexmédétomidine a été démontrée dans diverses études (8,18). Un effet neuroprotecteur a été attribué à la dexmédétomidine lors de son association avec d’autres agents anesthésiques tels que les gaz halogénés (8).La dexmédétomidine suscite donc un grand intérêt en pédiatrie, de part sa non neurotoxicité et sa bonne tolérance clinique, spécifiquement pour les procédures et actes non douloureux comme la réalisation d’imagerie et a d’ailleurs fait l’objet de multiples études à l’international (19–23). La dexmédétomidine a montré son efficacité et sa sécurité d’utilisation dans plusieurs études comme agent sédatif en IRM pédiatrique lorsqu’administrée par voie intraveineuse (20,21,23,24) ou intranasale (22,25). Elle est d’ailleurs utilisée en off-label en Amérique du Nord dans ce domaine, mais reste néanmoins peu utilisée en Europe. La préservation de la fonction respiratoire lors de la sédation par dexmédétomidine permet de réaliser l’examen en ventilation spontanée, sans nécessité de contrôler les voies aériennes par une intubation trachéale ou un masque laryngé et, ainsi, diminue l’invasivité du geste.
Matériel et méthode
Type d’étude et population étudiée
Nous avons réalisé une étude descriptive rétrospective dans le service de réanimation pédiatrique du CHU de CAEN de Janvier à Août 2018. Cette étude concernait les patients hospitalisés dans le service de réanimation pédiatrique du CHU de CAEN ayant reçu une sédation par dexmédétomidine pour la réalisation d’une IRM (au cours de l’hospitalisation).
Critères d’inclusion
Tout patient hospitalisé dans le service de réanimation pédiatrique ayant reçu une sédation par dexmédétomidine pour une IRM réalisée dans un contexte d’urgence lors de leur hospitalisation. Le consentement oral parental pour la procédure et la sédation était recueillie avant la réalisation de l’IRM.
Prise en charge
La sédation par dexmédétomidine était réalisée chez les patients pour lesquels une IRM était indiquée en urgence, et pour lesquels l’immobilité pendant l’examen requérait le recours à une sédation. La sédation par dexmédétomidine suivait un protocole d’aide à l’utilisation de la dexmédétomidine rédigé par les réanimateurs pédiatriques et la pharmacienne responsable du pôle Pédiatrique du CHU de CAEN. Les modalités d’administration de la dexmédétomidine étaient les suivantes:
– Deux voies d’administration étaient possibles :
o Par voie intraveineuse (IV) : La dexmédétomidine était diluée dans du sérum physiologique pour obtenir une concentration finale à 4 mcg/ml. Une perfusion d’une dose de charge de 2 mcg/kg en intraveineux lent (IVL) sur 10 minutes était débutée 15 minutes avant l’installation dans l’IRM, et était suivie d’une perfusion continue en entretien de 1 mcg/kg/h pendant la durée de l’IRM. La perfusion était arrêtée à la fin de l’examen. Il existait une possibilité de réaliser une 2ème dose de charge (1 mcg/kg IVL sur 10 minutes) si la sédation était insuffisante après la 1ère dose de charge.
o Par voie intranasale (IN) : La dexmédétomidine était utilisée pure sans dilution. La posologie initiale était de 4 mcg/kg, et administrée par l’intermédiaire du dispositif d’atomiseur intranasal MAD-300®. Une 2ème dose de 2 mcg/kg à 15-20 minutes de la 1ère était possible en cas de sédation insuffisante.
– Une voie veineuse périphérique était posée dans le service avant la réalisation de la sédation, si nécessaire, c’est-à-dire si le patient n’avait pas déjà un accès veineux
– Un réanimateur pédiatrique (sénior ou interne) était présent pendant l’administration de la sédation de même que toute la durée de l’IRM .
La surveillance reposait sur un monitorage continu de la fréquence cardiaque, la fréquence respiratoire, la saturation en oxygène et de la tension artérielle. Le monitorage était débuté avant le transfert en radiologie, dès que la sédation était initiée, et maintenu après le retour dans l’unité de réanimation, jusqu’au réveil.
Recueil de données cliniques
Les données cliniques ont été recueillies de façon rétrospective à partir du dossier médical de chaque patient. La qualité de l’image des séquences de chaque IRM a été évaluée par un radiologue dans un second temps de façon rétrospective, en utilisant l’échelle 3 points (1 = aucun mouvement ; 2 = mouvements légers ; 3 = mouvements majeurs nécessitant de répéter l’examen) .
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Table des matières
INTRODUCTION
ARTICLE: “Dexmedetomidine sedation for pediatric MRI: a case series from a French pediatric intensive care unit”
1. Objectif
2. Matériel et méthode
2.1 Type, période d’étude et population étudiée
2.2 Critères d’inclusion
2.3 Prise en charge
2.4 Recueil des données
2.5 Ethique
3. Résultats
4. Discussion
5. Article original
ENQUETE: “Evaluation des prises en charge anesthésiques pour les IRMs pédiatriques en France : Anesthésie générale ou sédation ? Une enquête nationale menée dans les CHU français” (DEXIRMSurvey)
1. Objectif
2. Matériel et méthode
2.1 Type, période d’étude et population étudiée
2.2 Critères d’inclusion
2.3 Recueil des données et analyse statistique
2.4 Ethique
3. Résultats
4. Discussion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES