Sur les 385 000 nouveaux cas de cancer en France en 2010, 11 % sont représentés par le cancer colorectal, qui le place en 3ème position après le cancer du sein et de la prostate. L’amélioration de la prise en charge des cancers et notamment du cancer colorectal, l’impact des actions de dépistage pour certains cancers et le vieillissement progressif de la population, conduisent à une augmentation croissante du nombre de personnes en longue rémission ou considérés guéris de leur cancer.
Les traitements qui ont amélioré la survie des patients peuvent avoir des répercussions physiques et psychologiques. Ils peuvent affecter leur qualité de vie et rendre difficile leur retour à une vie dite normale, en particulier durant la phase post thérapeutique. Certaines de ses répercussions peuvent persister au-delà de cette période et d’autres apparaître même des années plus tard [2, 3]. Il paraît ainsi important de recueillir les informations à long terme concernant le niveau de qualité de vie et de réinsertion pour mesurer toute l’étendue de l’impact de la maladie et de ses traitements sur les patients, leur famille et la société. Plusieurs études ont été mises en place pour évaluer les effets à long terme du cancer, et en particulier du cancer colorectal, sur la qualité de vie [4-6] et la sexualité des patients [7-9] ainsi que sur leur réinsertion surtout professionnelle [10-13]. En France, une étude s’est intéressée au niveau de qualité de vie des patients atteints d’un cancer colorectal mais cette évaluation a été effectuée trois ans après le diagnostic [7]. Trois autres études se sont intéressées à la réinsertion des patients, l’une deux ans après le diagnostic et pour toutes localisations tumorales [1] et les deux autres concernaient le cancer des testicules et les lymphomes hodgkiniens [14, 15]. Ainsi, aucune étude en France n’a été menée jusqu’à présent pour mesurer l’impact à long terme, voire très long terme, du cancer colorectal sur la qualité et les conditions de vie des patients.
Cancer Colorectal
Définition
Le cancer colorectal est essentiellement un adénocarcinome (95 %), tumeur primitive développée à partir de l’épithélium glandulaire et plus précisément à partir des glandes de Lieberkühn du côlon et du rectum. La tumeur peut être localisée au niveau :
– du côlon (C18) : cæcum, appendice, ascendant ou droit, angle colique droit, transverse, angle colique gauche, descendant ou gauche et sigmoïde (localisation la plus fréquente),
– de la jonction recto-sigmoïdienne (C19),
– du rectum (C20) : de la jonction recto-sigmoïdienne au bord supérieur du sphincter interne ; divisé en 3 parties : le bas rectum situé entre 3 et 5 cm de la marge anale, le moyen rectum entre 5 et 10 cm de la marge anale et le haut rectum situé entre 10 et 15 cm de la marge anale,
– du canal anal et de l’anus (C21) : zone de transition histologique allant d’un épithélium glandulaire à un épithélium épidermoïde (marge anale) pouvant être le siège d’adénocarcinome mais aussi de carcinome épidermoïde. Selon les études sur le cancer colorectal, cette localisation est exclue de la dénomination « cancer colorectal » du fait de cette particularité histologique.
Données épidémiologiques
Facteurs de risque du cancer colorectal
Quatre-vingt-quinze pourcent des cas de cancer colorectal sont sporadiques, 80 % sans antécédent familial et 15 % avec antécédent familial sporadique. Près de 60 à 80 % de ces cas sporadiques se développent à partir d’un adénome, tumeur bénigne ou polype. Le risque de transformation maligne d’un adénome est de 25/1000 [16]. Ainsi l’hérédité ne joue un rôle que dans 5 % des cas. Il a été démontré que le risque de développement d’un cancer colorectal est plus élevé si un des proches a ou eu un cancer colorectal et ce risque augmentant avec le nombre de personnes proches atteintes [17]. On a identifié des familles à très haut risque, possédant des mutations génétiques spécifiques et qui développent un des deux syndromes : la polypose adénomateuse familiale ou Familial Adenomatous Polyposis (FAP) syndrome (0,5 % à 1 % des cas) [18] et le cancer héréditaire sans polypose ou Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer (HNPCC) syndrome (ou anciennement nommé Syndrome de Lynch) représentant 2 à 4 % des cas [19]. Les maladies chroniques inflammatoires, telles que la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, sont à risque de transformation cancéreuse, ce risque devenant significatif pour les colites étendues évoluant depuis plus de 10 ans [20-23]. Concernant le mode de vie, il a été démontré que la consommation excessive de tabac, d’alcool, de viandes rouge et de charcuterie, ainsi que le surpoids et l’augmentation de la corpulence augmentaient le risque significatif de développer un cancer colorectal (niveau de preuve jugé convaincant), alors que l’activité physique ainsi que la consommation de fibres alimentaires avaient un rôle protecteur (respectivement niveau de preuve jugé convaincant et probable) [24-31]. Le mode de vie explique en grande partie les différences de taux de cancer colorectal entre les pays occidentaux, dits à haut risque de développer un cancer colorectal, et les pays en voie de développement. Mais un des facteurs de risque le plus important est l’âge, le risque devenant appréciable à partir de 50 ans et doublant ensuite à chaque décennie. Une proportion non négligeable de cancer, allant de 15 à 20 % survient avant 65 ans mais l’âge moyen au diagnostic est estimé à 70 ans chez les hommes et à 73 ans chez les femmes. Trente à 40 % des cancers colorectaux surviennent après 75 ans [32].
Données d’incidence
Avec 40 500 nouveaux cas (estimés) en 2011 dont 21 500 chez l’homme et 19 000 chez la femme, le cancer colorectal se place au 3ème rang des cancers les plus fréquents chez l’homme en France après le cancer de la prostate et des poumons et au 2ème rang chez la femme après le cancer du sein. Il représente 11 % des cancers . On constate que l’incidence des cancers distaux (colon droit et rectum) augmente par rapport aux cancers proximaux (caecum, gauche et transverse) [16, 33, 34]. En 2011, le taux d’incidence (standardisé monde) chez l’homme est estimé à 36,3 cas pour 100 000 personnes-années. Entre 1980 et 2005, ce taux est passé de 33,6 à 38,1 cas. Le taux d’incidence chez la femme est estimé à 24,7 cas pour 100000 personnes-années. Entre 1980 et 2005, ce taux est passé de 22,8 à 24,5 cas. Cependant, les tendances récentes montrent un ralentissement de l’augmentation des taux d’incidence entre 2000 et 2005 chez l’homme comme chez la femme [32, 35]. Ces taux sont comparables à ceux observés aux Etats-Unis [36, 37] que ce soit chez l’homme ou chez la femme, mais ils restent encore plus bas que ceux observés au Canada où ils sont estimés aujourd’hui à 45,4 chez l’homme et 31,8 chez la femme. Les taux d’incidence en France se situent un peu en dessous de la moyenne des 27 pays de l’Union européenne où ils varient chez l’homme de 15,4 en Grèce à 60,7 en l’Europe de l’Est (République Tchèque, Hongrie et Slovénie) et de 11,5 en Grèce à 35,2 au Danemark et en Norvège .
Données de mortalité
Avec 17 500 décès (estimés en 2011) dont 9 200 chez l’homme et 8 300 chez la femme, le cancer colorectal se place au 2ème rang des décès par cancer après le cancer des poumons chez l’homme et le cancer du sein chez la femme. L’âge médian au décès est de 75 ans chez les hommes et de 80 ans chez les femmes. Il contribue pour 12 % de l’ensemble des décès par cancer. En 2011, les taux de mortalité (standardisé monde) chez l’homme et chez la femme ont diminué depuis 1984 passant respectivement de 18,6 à 14,4/100 000 (baisse de 23 %) et de 11,0 à 8,3 (baisse de – 25 %). La baisse s’est particulièrement accélérée lors de la deuxième décennie entre 1994-98 et 2004-08 [32, 35]. Les taux de mortalité en France sont proches de ceux observés au Canada mais s’éloignent un peu de ceux observés aux Etats-Unis [36, 37]. Ils se situent légèrement en dessous de la moyenne des 27 pays de l’UE où les taux varient de 6,2 en Albanie à 34,4 en Hongrie chez l’homme et de 5,8 en Albanie à 16,2 en Hongrie chez la femme.
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Table des matières
Introduction
Partie 1. Contexte et aspects conceptuels
Chapitre 1.1 Cancer colorectal
1.1.1 Définition
1.1.2 Données épidémiologiques
1.1.3 Prises en charge du cancer colorectal
1.1.4 Complications tardives du cancer et des traitements
Chapitre 1.2. ‘‘Après cancer’’ et guérison
1.2.1 Concept d’ ‘‘Après cancer’’
1.2.2 Notion de guérison en cancérologie
Chapitre 1.3. Concept de qualité de vie
1.3.1 Historique
1.3.2 Définition
1.3.3 Qualité de vie en cancérologie
1.3.4 Evaluation de la qualité de vie
1.3.4 Indications de l’évaluation de la qualité de vie
Chapitre 1.4. Concept de réinsertion
1.4.1 Définition
1.4.2 Réinsertion et cancer
1.4.3 Evaluation de la réinsertion en cancérologie
Partie 2. Projet de recherche
Chapitre 2.1 Objectifs généraux
2.1.1 Objectifs du PHRC 2003
2.1.2 Objectifs de la thèse
Chapitre 2.2 Schéma général et population de l’étude
2.2.1 Schéma général de l’étude
2.2.2 Population de l’étude et sélection des participants
Chapitre 2.3 Procédure de recueil et d’analyses des données
2.3.1 Outils de recueil utilisés
2.3.2 Paramètres recueillis
2.3.3 Critères principaux d’évaluation
2.3.4 Nombre de sujets à inclure
2.3.5 Analyse statistique des données
Chapitre 2.4 Organisation et déroulement de l’étude
2.4.1 Organisation générale
2.4.2 Organisation par centre investigateur
2.4.3 Aspects réglementaires
Partie 3. Résultats et discussion
Chapitre 3.1 Participation de la population
Chapitre 3.2 Evaluation de la qualité de vie des patients en longue rémission
d’un cancer colorectal
3.2.1 Résumé de l’étude
3.2.2 Article 1 : « Health-related quality of life among long-term survivors of colorectal
cancer: a population-based study »
Chapitre 3.3 Evaluation de la réinsertion des patients en longue rémission
d’un cancer colorectal
3.3.1 Résumé de l’étude
3.3.2 Article 2 : « Long-term impacts of colorectal cancer on family, social, and
professional life: a population-based study »
Chapitre 3.4 Discussion globale
3.4.1 Points forts de l’étude
3.4.2 Limitations
Conclusion
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