En dépit des efforts pour prévenir et éliminer le paludisme, cette maladie constitue encore un problème de santé publique majeur dans les pays en voie de développement, notamment les pays intertropicaux. En effet selon l’Organisation Mondiale de la Santé, environ 37% de la population mondiale, soit plus du tiers, c’està-dire 3,2 milliards de personnes sont exposées au risque de contracter le paludisme [1], habitant essentiellement dans les pays les plus pauvres et les plus marginalisés du monde. Cette maladie parasitaire tue un enfant toutes les 2 minutes en Afrique [2]. Au niveau mondial 214 millions de cas de paludisme sont encore enregistrés en 2015, avec 438000 décès dont 70% concernaient les enfants âgés moins de 5 ans. L’Afrique Subsaharienne supporte une charge disproportionnée de la charge mondiale du paludisme car 90% de ces décès sont survenus dans la région [1].
Le nombre de cas de paludisme a suivi une courbe croissante ces dernières années selon les données statistiques fournies par la direction de lutte contre le paludisme à Madagascar. En 2012, un peu plus de 349.000 cas ont été recensés, tandis qu’en 2013, 369 688 cas ont été enregistréset représentant la 5ème cause de morbidité au niveau des CSB [3]. A part les pertes en vies humaines causées par le paludisme, si on estime ces cas par année, beaucoup de personnes sont affectées à l’inactivité durant plusieurs jours à cause de la maladie. De ce fait l’impact sur l’économie du pays est inéluctable. De l’autre côté, la pauvreté qui n’a cessé de s’intensifier due notamment à la crise politique que subit le pays ne peut que détériorer les systèmes nationaux d’infrastructure sanitaire présents et les conditions de vie des ménages. De ce fait la lutte contre le paludisme devient plus complexe.
Conscient des répercussions socio-économiques du paludisme, des études ont été menées afin de contribuer à la réduction de l’impact de cette maladie dans le pays.
Dans le cadre du projet de l’USAID | MalariaCare, en collaboration avec leMinistère de la Santé Publique, une enquête d’évaluation auprès des formations sanitaires a été menée vers la fin de l’année 2014. Cette étude a évalué la capacité des formationssanitaires vis-à-vis de la prise en charge du paludisme, c’est-à-dire les soins prodigués aux patients afin d’avoir une idée claire des pratiques de la prise en charge de cette maladie à travers le pays et de déterminer les moyens d’améliorer la qualité des soinsfournis aux patients.
RAPPELS
LE PALUDISME
DEFINITION
Le paludisme ou malaria en anglais est une parasitose due à des hématozoaires du genre Plasmodium, transmise par des moustiques hématophages du genre Anopheles.
HISTORIQUE
Dans le monde
Avant 1630, on distinguait déjà, parmi les fièvres intermittentes, la « fièvre des marécage».En 1820, Pelletier et Caventou isolent la quinine que Maillot utilise au cours de la campagne d’Algérie en 1830 [4] En 1880, Laveran fit la découverte de l’agent pathogène du paludisme : le Plasmodium. Marchiafava, Celli et Golgi firent la découverte d’un grand nombre d’espèces parasitaires des vertébrés dont quatre d’entre elles sont à l’origine de l’infection chez l’homme :
– Plasmodium malariae (Laveran, 1881) [5]
– Plasmodium vivax(Grassi et Felleti, 1890) [5]
– Plasmodium falciparum(Welch, 1897) [5]
– Plasmodium ovale (Stephene, 1922) [5]
De 1895 à 1897, la transmission du paludisme par un moustique du genre anophèles est soupçonnée par Ross et confirmée par Grassi en 1898. [6] En 1948, Shortt et Granham ont mis en évidence l’existence des formes érythrocytaires, tissulaires dans le foie expliquant ainsi la phase pré-patente et peut être la survenue des rechutes. [7] Plasmodium knowlesidécrit par Knowles en 1932, est un parasite des singes d’Asie, genres Presbytiset Macaca (M mulata, M fascicularis, Mnemestrina) vivant en forêt dans la canopée. L’Anophelesleucosphyrusest son vecteur [8].Plasmodiumknowlesin’a émergé qu’en 2004 (Borneo). C’est « le 5ème agent » du paludisme humain [9].
À Madagascar
Le paludisme appelé « tazo » ou « tazomoka » à Madagascar est synonyme de « fièvre, frisson, myalgie et de bouche amère ». Le mot « moka » signifie moustique. Ainsi, l’appellation « tazomoka » permet d’avancer que les Malgaches connaissaient depuis longtemps la relation entre le paludisme et le moustique. Selon la littérature, le paludisme est connu des Malgaches depuis les années 1800 [10]. Cette maladie sévissait surtout dans les régions côtières. Si le paludisme sévit de façon endémique dans les régions côtières, les hautes terres centrales ont connu trois épidémies meurtrières :
· La première à partir de 1878 suite à la généralisation de la riziculture et à l’introduction massive de travailleurs immigrés venus d’Afrique,
· La deuxième en 1885 au moment de la construction de la ligne ferroviaire liant les Hautes terres centrales et la côte Est ;
· La troisième en 1986 suite à un relâchement de la pulvérisation intradomiciliairede DDT. Cette troisième épidémie a fait près de quarante millemorts. La population se crut en présence d’une nouvelle maladie appelée « Bemangovitra ». En fait, il s’agissait d’une forme compliquée et très grave du neuropaludisme, ce qui souligne le caractère redoutable de la maladie. L’utilisation de la quinine fut instituée avec l’arrivée des troupes françaises en 1895 [10]. La chloroquine fut introduite à partir de 1945. L’administration hebdomadaire de chloroquine aux écoliers et aux enfants de bas âge dans les écoles et les postes sanitaires a marqué la période entre 1949 et 1975. L’apparition desrésistances à la chloroquine [10] a amené le Gouvernement Malagasy à adopter une nouvelle Politique Nationale de Lutte contre le Paludisme en 2005 [11].
EPIDEMIOLOGIE
Dans le monde
La transmission du paludisme est présente dans toute la zone intertropicale entre le 30° de latitude Nord et le 30° de latitude Sud [12] : en Afrique intertropicale, dans l’océan Indien (Madagascar, Union des Comores), en Amérique latine, en Asie centrale et du Sud Est, au Proche et au Moyen Orient, dans les Caraïbes et en Océanie (Iles Salomon, Vanuatu, Papouasie Nouvelle Guinée). La Réunion, la Nouvelle Calédonie, la Polynésie en sont indemnes.
A Madagascar
Agents pathogènes
Quatre espèces plasmodiales sont présentes dans la Grande Ile : Plasmodium falciparum, Plasmodium vivax, Plasmodium ovale et Plasmodium malariae, avec une prédominance de Plasmodium falciparumà plus de 90% [3].
-Plasmodium falciparum :le plus répandu, à l’ensemble de la zone intertropicale. Son incubation est de 7 à 12 jours. Il est responsable de la fièvre tierce maligne, de l’accès pernicieux.Il évolue d’une seule tenue, sans rechutes.
-Plasmodium vivax : il est responsable de la fièvre tierce bénigne mais en zone d’endémie. Sa durée d’incubation est variable de 15 jours à plusieurs mois.Il évolue avec des rechutes.
-Plasmodium ovale :est essentiellement retrouvé en Afrique noire, sa durée d’incubation est variable de 15 jours à plusieurs années. Il est très proche de Plasmodium vivax. Son évolution est bénigne mais on peut observer une reviviscence.
-Plasmodium malariae : présente une répartition plus clairsemée grossièrementsuperposable à celle de Plasmodium falciparum. Son incubation est d’environ trois semaines. Il est responsable de la fièvre quarte.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1. LE PALUDISME
1.1. DEFINITION
1.2. HISTORIQUE
1.2.1. Dans le monde
1.2.2. À Madagascar
1.3. EPIDEMIOLOGIE
1.3.1. Dans le monde
1.3.2. A Madagascar
1.3.2.1. Agents pathogènes
1.3.2.2. Vecteurs
1.3.2.3. Sujets réceptifs
1.3.2.4. Faciès épidémiologiques
1.3.2.5. Stratification et les zones d’intervention du paludisme
1.4. CYCLES BIOLOGIQUES DES PLASMODIUMS
1.4.1. Chez l’homme : cycles schizogoniques
1.4.1.1. Cycle exo-érythrocytaire
1.4.1.2. Cycle intra-érythrocytaire
1.4.1. Chez l’anophèle : cycles sporogoniques
2. LE PALUDISME ET SA PRISE EN CHARGE DANS LE PAYS
2.1. Rappels sur l’Organisation du système de santé
2.2. Plan Stratégique National
2.2.1. Objectif général
2.2.2. Objectifs Spécifiques
2.2.3. Approches stratégiques
2.2.3.1. Prise en charge correcte des cas
2.2.3.2. Prévention du paludisme
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
1. METHODES
1.1. Caractéristiques du cadre de l’étude
1.2. Type d’étude
1.3. Durée de l’étude
1.4. Période de l’étude
1.5. Population d’étude
1.5.1. Critères d’inclusion
1.5.2. Critères d’exclusion
1.6. Mode d’échantillonnage et taille de l’échantillon
1.7. Déroulement de l’étude
1.8. Variables étudiées
1.9. Mode de collecte des données
1.10. Mode d’analyse des données
1.11. Les limites de l’étude
1.12. Questions éthiques
2. RESULTATS
2.1. Caractéristiques des CSB enquêtés
2.1.1. Répartition des CSB
2.1.2. Disponibilité des équipements, directives et antipaludiques
2.1.3. Affiliation des CSB avec les AC
2.2. Evaluation des AS
2.2.1. Répartition des AS enquêtés
2.2.2. Formations et supervisions
2.2.3. La pratique du TDR
2.2.4. Connaissance des AS selon les scénarii
2.2.5. Evaluation des pratiques des AS lors des consultations
2.2.5.1. Répartition des patients vus en consultation
2.2.5.2. L’examen clinique
2.2.5.3. Adhérence à la PNLP
2.2.5.4. Pratique du counseling
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
1.Les Centres de Santé de Base
1.1. Disponibilitéde TDR pour le paludisme
1.2. Disponibilité des directives de référence,des équipements
1.3. Disponibilité des médicaments antipaludiques
1.4. Formations et supervisions des AC
2. Pratiques des AS
2.1. Consultation des Patients
2.2. Pratique lors des examens physiques
2.3. Formations et supervision des AS
2.4. Pratique du TDR
2.5. Connaissance des AS selon les scénarii
2.6. Suspicion
2.7. Suspectés-Testés
2.8. La qualité de la prescription des AS
2.9. Counseling
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE