Les benzodiazépines sont des médicaments très sollicitées partout dans le monde pour leurs effets sédatifs, anticonvulsivants et myorelaxants. La consommation de ces médicaments anxiolytiques expose à un certain risque bien connu en particulier neuropsychiatrique, ainsi que des risques d’abus et de pharmacodépendance notamment un phénomène de tolérance et de sevrage à l’arrêt [1]. L’OMS rapporte que dans le Monde 50% de médicaments contenant des benzodiazépines consommés ne sont pas prescrites, ou délivrés selon les normes édictées par la réglementation pharmaceutique. Les médecins qui prescrivent ces médicaments et les pharmaciens qui les délivrent doivent assurer le bon usage de ces médicaments, apporter les conseils nécessaires pour une prescription et une délivrance adaptées[2].
En France une étude publiée par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) a montré que 131 millions de boîtes de médicaments contenant des benzodiazépines ont été vendus en 2012 dont (53,2% d’anxiolytiques). Chaque année, un Français sur cinq consomme au moins une benzodiazépine ou une molécule apparentée. Ainsi, plus de 25millions de sujets ont été exposés à une benzodiazépine entre 2006 et 2011 [3]. En Afrique du Sud, dans une étude menée en 2007, KAIRUZ et TRUTER [4] ont noté que sur 27 080 sujets enquêtés, 8 084 soit 30% consommaient des benzodiazépines [12].
Au Sénégal nous n’avons retrouvé qu’une étude effectuée dans la commune de Saint louis sur une dizaine de pharmacies pour apprécier le niveau de consommation des benzodiazépines et le respect des règles de prescription et de délivrance de ces dernières [8]. L’application stricte de la déontologie et de la législation pharmaceutique a toujours posé problème dans nos contrées.
Les benzodiazépines (BZD) sont des molécules qui agissent sur le système nerveux central et qui possèdent toutes des propriétés anxiolytiques, hypnotiques, myorelaxantes et anticonvulsivants mais à des niveaux différents en fonction de leur structure chimique [1]. Elles sont ainsi indiquées et prescrites, selon leurs propriétés pharmacologiques, dans :
– le traitement symptomatique des manifestations anxieuses ;
– les manifestations du sevrage alcoolique ;
– les troubles sévères du sommeil ;
– le traitement des épilepsies généralisées ou partielles ;
– le traitement des contractures musculaires douloureuses [8, 16].
RAPPELS SUR L’ANXIETE PATHOLOGIQUE
L’anxiété a été définie comme un sentiment pénible d’insécurité causé par l’attente d’un danger imminent ou indéterminé [21]. L’anxiété est un phénomène psychologique normal qui chez certains individus, peut revêtir un caractère pathologique du fait de son intensité, du caractère anodin des circonstances qui la déclenchent ou du fait des comportements qu’elle peut induire. La symptomatologie anxieuse revêt deux composantes dont l’importance relative varie en fonction des patients :
– l’une somatique, d’expression clinique très variée,
– l’autre psychique subjective, seule spécifique, dans la mesure où des symptômes somatiques, similaires peuvent être retrouvés dans diverses actions médicales [16].
La nature de l’anxiété demeure mal connue de même que les mécanismes cérébraux qui jouent un rôle dans l’expression de ces symptômes. Le système noradrénergique central dont l’activité est étroitement liée à la régulation de la vigilance et à la réponse de l’organisme à des stress divers, et certainement stimulé chez les patients anxieux comme l’augmentation de certains marqueurs périphériques de l’activité [4]. Des éléments expérimentaux existent également en faveur de l’intervention d’autres systèmes de neuromédiateurs, notamment la sérotonine, mais les preuves cliniques manquent encore pour affirmer leur implication dans l’anxiété humaine.Du point de vue psycho-pathologique, l’anxiété ne saurait cependant être considérée comme un phénomène équivoque. En dehors des cas où l’anxiété est manifestement secondaire à une autre affection psychiatrique ou médicale, plusieurs formes d’anxiété peuvent être décrites en fonction des circonstances d’apparition, de l’évolution et des caractéristiques cliniques des symptômes.
HISTORIQUE DES BENZODIAZEPINES
L’histoire des BZD est liée aux besoins des hommes de lutter contre les effets du stress, de l’anxiété, de la dysphorie et de toutes les sensations d’inconfort qu’ils ressentent. Pour cela de nombreuses substances ont pu être utilisées allant de l’éthanol aux sels de bromures en passant par le paraldéhyde et les hydrates de chloral qui ont été introduits en médecine. Au début des années 1900, l’apparition des barbituriques a révolutionné la prise en charge des états d’anxiété [15]. Au cours des années 1950, lorsque les inquiétudes liées à l’interaction des premiers benzodiazépines furent multipliées (intolérance, dépendance physique, mort au cours du sevrage), commença la recherche de nouvelles molécules chimiques comportant moins de risques. Le méprobamate fit son apparition, avec lui d’autres molécules très proches ont été largement utilisées pour leurs effets de sédation et leurs effets hypnotiques. Partageant avec les barbituriques de nombreux effets indésirables, entre autres, leurs faibles écarts entre les posologies entraînant des effets anxiolytiques et celles produisant des effets de sédation ; leur capacité à induire une dépendance physique et une intoxication aigue sévère en cas de surdosage, ces molécules se verront supplanter assez rapidement. Vers la fin des années 1950, la découverte du Chlordiazepoxide et la synthèse de quelques 3000 BZD révolutionna la pratique médicale dans la prise en charge de l’anxiété avec une nette domination des BZD dont une cinquantaine de molécules sont commercialisées. Ces dernières années, l’Alprazolam, le diazépam, le Lorazepam et d’autres molécules de la même génération ont été parmi les plus prescrits [6].
DEFINITION ET CLASSIFICATION
Définition
Les benzodiazépines sont des médicaments psychotropes destinés à traiter les manifestations psychiques et somatiques de l’anxiété pathologique. La plupart des benzodiazépines partagent des propriétés pharmacologiques communes : sédation, anxiolyse, effet anticonvulsivant et myorelaxant [1]. Cependant, les effets apparaissent à des doses différentes et peuvent évoluer dans le temps de façon non simultanée, par exemple, la sédation souvent associée aux effets précoces du traitement sur l’anxiété, disparaît rapidement alors que l’effet anxiolytique se maintient [17].
Classification
La classification utilisée est la classification ATC Anatomique, Thérapeutique, Chimique, établie par l’organisation mondiale de la santé afin de favoriser des études internationales sur l’utilisation des médicaments. Les médicaments sont classés selon leurs caractéristiques thérapeutiques et chimiques [1].
MECANISME D’ACTION DES ANXIOLYTIQUES
Les benzodiazépines n’agissent pas directement sur les cellules nerveuses, mais elles renforcent les effets du GABA sur ses récepteurs cérébraux qui sont du type GABA A. Ces récepteurs GABA A font partie de la membrane cellulaire et contrôlent l’ouverture des canaux chlore des cellules nerveuses. La fixation d’une molécule de benzodiazépine sur ou à proximité immédiate du récepteur GABA A potentialise l’action du GABA qui exerce une action inhibitrice à travers de nombreux circuits GABA-ergique du SNC [7,23].
PHARMACOCINETIQUE DES ANXIOLYTIQUES
L’utilisation des benzodiazépines en clinique impose une bonne connaissance de leur propriété pharmacocinétiques qui conditionnent le plus souvent le choix d’une molécule. L’évolution du médicament dans l’organisme est la résultante Globale des phénomènes de résorption, de diffusion de métabolisme, d’élimination qui se produit successivement ou simultanément [17].
Absorption
L’absorption des BZD après administration orale se fait au niveau de la partie haute du tube digestif. Elle est pratiquement complète et le plus souvent rapide, à l’exception de celle du Prazépam. L’administration intramusculaire de Diazépam et de Chlordiazépoxide, entraîne par contre une absorption plus irrégulière, moins complète et plus lente que celle obtenue par voie orale. La vitesse d’absorption, reflétée par le délai nécessaire pour atteindre la concentration plasmatique maximale, est le facteur principal du délai d’action du médicament. Le diazépam qui est le plus rapidement absorbé, commence à agir 10 à 20 minutes après son administration orale [13].
Distribution
La distribution du médicament dépend en particulier de sa liposolubilité. Les produits ayant le volume de distribution le plus large comme le Diazépam et le N Desméthyldiazépam sont aussi ceux dont la pénétration cérébrale est la plus rapide. Malgré une absorption assez rapide, le délai d’action du Lorazépam est de 2 à 4 heures du fait d’une pénétration assez lente au niveau du SNC liée à la barrière hémato-encéphalique [13].
Métabolisme
Le métabolisme des anxiolytiques est essentiellement hépatique. La biotransformation hépatique des BZD est le facteur essentiel de leur clairance. Seul un infime pourcentage de la dose administrée est retrouvé inchangé dans les urines. Les principales transformations hépatiques, résumées dans la figure ci-dessous, sont des réactions d’oxydation microsomales (déméthylation et hydroxylation) qui donnent naissance à des composés actifs. Dans un second temps, la plupart de ces métabolites subissent une glucurono-conjugaison qui les rend inactifs et sont dans leur grande majorité éliminés sous cette forme dans les urines. Certaines molécules comme le Lorazépam et l’Oxazépam subissent essentiellement une glucurono-conjugaison et ne possèdent donc aucun métabolite actif [4].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE :REVUE DE LA LITTERATURE
1. RAPPELS SUR L’ANXIETE PATHOLOGIQUE
2. HISTORIQUE DES BENZODIAZEPINES
3. DEFINITION ET CLASSIFICATION
3.1. Définition
3.2. Classification
4. MECANISME D’ACTION DES ANXIOLYTIQUES
5. PHARMACOCINETIQUE DES ANXIOLYTIQUES
5.1. Absorption
5.2. Distribution
5.3. Métabolisme
6. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES
6.1. Effet anxiolytique
6.2. Effet sédatif
6.3. Effet myorelaxant
6.4. Effet anticonvulsivant
7. INDICATIONS THERAPEUTIQUES
8. PHARMACOVIGILANCE DES ANXIOLYTIQUES
8.1. Contre-indications
8.2. Précautions d’emploi
8.3. Interactions médicamenteuses
8.4. Effets indésirables
8.5. Dépendance et syndrome de sevrage
8.5.1. Dépendance aux Benzodiazépines
8.5.2. Sevrage aux Benzodiazépines
9. MODALITES PRATIQUES D’EMPLOI DES BENZODIAZEPINES
9.1. Choix des Benzodiazépines
9.2. Principes d’utilisation des benzodiazépines
9.3. Rôle de la pharmacie d’officine
9.3.1. Définition
9.3.2. Ordonnance médicale
9.3.3. Ordonnancier
9.3.4. Règles de prescriptions et de délivrance des médicaments
9 .3.5 La délivrance des médicaments au public
10. RESPONSABILITE DU PHARMACIEN D’OFFICINE DANS LA DELIVRANCE DES MEDICAMENTS AU PUBLIC
10.1. Responsabilités pénales du pharmacien dans la délivrance des médicaments
10.2. Responsabilités civiles du pharmacien dans la délivrance des médicaments au public
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
1. OBJECTIFS DE L’ETUDE
2. CADRE DE L’ETUDE
3. CHRONOGRAMME DE L’ETUDE
4. PROCEDURE DE COLLECTE
5. METHODOLOGIE
5.1. Echantillonnage
5.1.1. critères d’inclusion
5.1.2. Critères de non inclusion
5.2. Matériels d’analyse et de rédaction
6. RESULTATS
6.1. Evaluation de la qualification des prescripteurs des benzodiazépines
6.2. Evaluation de la qualité de la prescription des benzodiazépines
6.3. Evaluation de la délivranceau niveau des pharmacies
6.4. Evaluation de la consommation des benzodiazépines
7. DISCUSSION
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE