Évaluation de la faisabilité technique des mesures de lutte contre l’érosion côtière

Utilisation et gestion de la zone côtière

Les zones côtières du Québec maritime sont d’abord un milieu de vie pour de nombreuses familles, alors qu’on y dénombre 4848 bâtiments résidentiels (Bernatchez et al., 2015). Les zones côtières présentent également de nombreux attraits pour le développement d’activités industrielles, commerciales et récréotouristiques, traditionnelles et culturelles, qui sont maintenant majeures pour l’économie (Dalcourt et al., 2002). Pour soutenir ces activités, de nombreuses infrastructures, telles que des bâtiments (578 unités), des routes et des voies ferrées (320 km) (Bernatchez et al., 2015) ont été construites dans la zone côtière au fil des années. Sur le plan socio-économique, les routes nationales et les voies ferrées occupent une place prépondérante pour le développement régional. Aussi, en raison de la qualité du paysage qu’elle traverse, la vocation touristique de ces liens de transports est l’assise d’un secteur économique majeur pour ces régions (Morneau et al., 2001). Ainsi, le tourisme, couplé généralement au désenclavement des régions, amène une diversification et un accroissement des activités en zone côtière (Dalcourt et al., 2002). En 1987, au Québec, l’abrogation d’une loi restreignant l’accès public au bord de mer dans une bande riveraine de 60 mètres (Lagueux et Côté, 1995) a mené à une densification de l’occupation du littoral. Or, l’accroissement du nombre d’usagers est en corrélation avec l’augmentation des perturbations des écosystèmes côtiers. En effet, le développement de diverses activités côtières a engendré des modifications aux composantes physiques des écosystèmes côtiers (Dalcourt et al., 2002). L’aménagement d’infrastructures côtières et de mesures de lutte contre l’érosion côtière (MLCEC) a eu pour effet de perturber la dynamique hydrosédimentaire, entraînant la modification et la perte d’habitats naturels (Zanuttigh et al., 2005) et affectant la diversité et l’abondance des espèces benthiques (Bertasi et al., 2007). De plus, les écosystèmes côtiers qui migrent vers les terres afin de s’ajuster à la hausse du niveau de la mer, font maintenant partie des écosystèmes les plus à risques face aux changements climatiques en raison de contrainte naturelle (falaises) ou artificielle (routes, structures de protection) bloquent cette migration naturelle (Bernatchez et Quintin, 2016).

Entre les années 1980 et le début des années 2000, à la suite de tempêtes majeures, une concentration des efforts gouvernementaux québécois en réaction aux aléas climatiques laisse peu de ressources pour la prévention des risques. Durant cette période, l’aménagement de MLCEC s’est effectué en situation d’urgence afin de protéger les infrastructures côtières (Bernatchez et Fraser, 2012; Boyer-Villemaire et al., 2015). Les enjeux individuels (conservation de l’intégrité des infrastructures côtières par les propriétaires, municipalités et7 ministères) ont été à la base du financement des mesures de lutte contre l’érosion côtière mettant de côté la dynamique naturelle des systèmes côtiers et la prise de décision collective (Boyer-Villemaire et al., 2015). Également, l’aménagement d’un grand nombre de MLCEC entraîne un faux sentiment de sécurité dans les populations côtière. Alors que la prolifération des MLCEC devrait démontrer l’intensification de l’érosion côtière, elle est plutôt perçue comme étant une maîtrise de l’environnement côtier (Drejza, Bernatchez et Dugas, 2011). Or, ce mode de gestion de la zone côtière provoque une rétroaction positive (amplification des effets) du processus d’érosion côtière. L’omission d’analyser l’impact d’une MLCEC sur la dynamique hydrosédimentaire a pour effet d’accentuer l’érosion côtière par une artificialisation du littoral, sans traiter les causes réelles qui y sont liées (Jolicoeur et O’Carroll, 2007).

En 2001, environ 38,3 % de la population canadienne résidait à moins de 20 km d’un littoral océanique ou d’une berge des Grands Lacs (Manson, 2005). Dans le Québec maritime, entre 2015 et 2065, 1,5 milliard de dollars en bâtiments, terrains et infrastructures routières seront affectés par l’érosion côtière si le statu quo est conservé (Bernatchez et al., 2015). Dans l’état actuel, c’est 5426 bâtiments résidentiels, industriels, de services et commerciaux, en plus de 295 km de route et de 26 km de voies ferrées qui seront touchés par l’érosion côtière dans le Québec maritime (Bernatchez et al., 2015). Avec de tels chiffres, les plans d’action gouvernementaux québécois et canadiens ont été ajustés afin de mener des actions avec une perspective systémique et moins encline à la variabilité politique (Boyer-Villemaire et al., 2015). Une saine gestion de la zone côtière se veut primordiale afin de coordonner les activités économiques qui y ont lieu. Ces activités impliquent la présence d’acteurs aux intérêts divers complexifiant la gestion de ces zones côtières dont les écosystèmes sensibles sont spécialement vulnérables aux choix de gestion. Ainsi, dans le cadre du Plan d’action Saint-Laurent (PASL) 2011-2026, la gestion intégrée du Saint-Laurent (GISL) est mise en œuvre.

Cette démarche de gestion est définie dans le PASL 2011-2026 comme étant « un processus permanent basé sur la concertation de l’ensemble des décideurs et des usagers de la société civile pour une planification et une meilleure harmonisation des mesures de protection et d’utilisation des ressources de cet important écosystème, et ce, dans une optique de développement durable ». Les éléments de la GISL sont concrétisés par la mise sur pied de 12 tables de concertation régionales (TCR) dont la mission est de favoriser la concertation des acteurs régionaux concernés par les enjeux liés à la zone côtière afin de représenter les préoccupations et la volonté d’action du milieu. Les diverses activités économiques de la zone côtière sont aujourd’hui vulnérables aux conséquences des changements climatiques, soit la submersion, l’érosion côtière et les aléas climatiques (Jacob, Lamar et Sawadogo, 2015). Une gestion appropriée de la zone côtière doit tenir compte d’une adaptation des régions littorales aux changements climatiques afin de définir les limites de l’utilisation anthropique des littoraux (Jacob, Lamar et Sawadogo, 2015).

Changements climatiques

Les changements climatiques sont la résultante de la détérioration de la composition de l’atmosphère mondiale et viennent s’additionner à la variation naturelle du climat (GIEC, 2014). La hausse des températures à l’échelle planétaire perturbe particulièrement les systèmes côtiers en raison de son influence sur le niveau moyen de la mer, sur la fréquence et l’intensité des tempêtes ainsi que sur la présence d’amas de glace (Wong et al., 2014). L’augmentation du niveau moyen de la mer (NMM) est observée depuis le début du XXe siècle, période durant laquelle la tendance du niveau moyen des mers à l’échelle mondiale s’est élevé de 1,7 ± 0,2 mm/an entre 1900 et 2009 (Church et White, 2011). Aujourd’hui, les projections de hausse du niveau marin présentent de grandes incertitudes qui sont fonction des scénarios de réchauffement climatique. Les scénarios les plus optimistes limitant le réchauffement moyen à 2oC prévoient une hausse du niveau marin se situant entre 0,4 et 0,6 m d’ici 2100. Les scénarios les plus pessimistes prédisant un réchauffement moyen de 4,5 oC prévoient une hausse du niveau marin se situant entre 0,7 et 1,2 m d’ici 2100. Ce phénomène est expliqué par la fonte des glaciers et par l’expansion thermique des océans (Daniel, 2001). Les tempêtes engendrent de forts vents ainsi qu’une baisse de la pression atmosphérique qui influent sur la dynamique hydrosédimentaire.

Alors que les vents produisent de grandes vagues, la baisse de la pression atmosphérique provoque une surcote du niveau d’eau (Savard et al., 2008). Dans le golfe du Saint-Laurent, une augmentation a été remarquée quant à la fréquence d’observations des surcotes entre la première et la deuxième moitié du XXe siècle (Savard et al., 2008). Lorsqu’une tempête coïncide avec d’autres conditions telles que de fortes marées et l’absence de glaces, son impact sur les zones côtières est amplifié (Bernatchez et M. Dubois, 2004). Dès lors, l’augmentation du NMM et de la fréquence des tempêtes accroit la vulnérabilité des zones côtières en augmentant les risques de dommage aux infrastructures côtières par l’érosion et la submersion (Daigle et al., 2006). De 30 à 40 % des tempêtes annuelles surviennent en période hivernale (Savard et al., 2008). La présence d’un couvert de glace offre donc une protection naturelle au littoral en atténuant l’impact des vagues durant cette période (Senneville et al., 2014). Or, le couvert de glace de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent est menacé par le réchauffement climatique. La décroissance de la glace côtière a pour effet d’accentuer le temps d’exposition du littoral aux agents hydrodynamiques et, ainsi, d’augmenter les risques d’érosion et de submersion (Senneville et al., 2014).

Un hiver doux retarde la formation du couvert de glace, provoque son départ prématuré, augmente sa mobilité et provoque de grandes ouvertures dépourvues de glace pouvant atteindre plusieurs dizaines de kilomètres de largeur. La présence d’une couverture de glace de mer dans le golfe du Saint-Laurent à un taux supérieur à 30 % permet d’amoindrir l’émergence des vagues (Savard et al., 2008). Or, la durée de cet effet est passée d’une durée moyenne de 80 jours entre 1960 et 1995 à une durée moyenne de 55 jours entre 1996 et 2007 (Savard et al., 2008). Il est donc prévu que la réduction du couvert de classe devrait engendrer une augmentation de 5 à 10 % des hauteurs de vagues significatives extrêmes dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent (Ruest, 2014). De plus, une diminution de 67 % de la concentration maximale annuelle du régime de glace depuis 1981 est à prévoir d’ici 2055 (Senneville et al., 2014). En l’absence de glace sur le bas estran, le pied de glace du haut estran forme un mur vertical sur la rive permettant une amplification de l’effet de réflexion des vagues sur la paroi verticale favorisant l’érosion du bas de plage (Bernatchez et M. Dubois, 2004).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 ÉTAT DES CONNAISSANCES
1.1 Zone côtière
1.1.1 Utilisation et gestion de la zone côtière
1.1.2 Changements climatiques
1.1.3 Variations géomorphologiques
1.2 Mesures de lutte contre l’érosion côtière
1.2.1 Structure de renforcement
1.2.2 Structure de stabilisation
1.2.3 Ouvrage non structural
1.3 Sélection de mesures de lutte contre l’érosion côtière
1.3.1 Caractérisation du système côtier
1.3.2 Présélection des mesures de lutte contre l’érosion côtière
1.3.3 Aide à la décision
CHAPITRE 2 MÉTHODOLOGIE
2.1 Démarche proposée
2.2 Processus technique
2.2.1 Caractérisation du système côtier
2.2.2 Présélection de mesures de lutte contre l’érosion côtière
2.2.3 Évaluation de la faisabilité technique des mesures de lutte contre l’érosion côtière
2.3 Processus décisionnel
2.3.1 Critères d’aide à la décision
2.3.2 Hiérarchisation
2.3.3 Intégration de l’aspect financier
2.4 Caractéristiques de l’étude de cas
2.4.1 Processus technique
2.4.2 Processus décisionnel
CHAPITRE 3 RÉSULTATS
3.1 Caractérisation du site à l’étude
3.1.1 Caractéristiques géomorphologiques
3.1.2 Caractéristiques techniques du système côtier
3.2 Conception des mesures de lutte contre l’érosion côtière présélectionnées
3.2.1 Présélection des mesures de lutte contre l’érosion côtière
3.2.2 Évaluation de la faisabilité technique
3.3 Processus d’aide à la sélection des mesures de lutte contre l’érosion côtière
3.3.1 Critères hiérarchisés d’aide à la décision
3.3.2 Mesures de lutte contre l’érosion côtière hiérarchisées
3.3.3 Itérations subséquentes
3.3.4 Intégration de l’aspect financier
CHAPITRE 4 DISCUSSION
4.1 Retombées de la démarche proposée
4.2 Analyse de la démarche proposée
4.3 Perspectives et recommandations
CONCLUSION
ANNEXE I FICHES DE CARACTÉRISATION DES MESURES DE LUTTE CONTRE L’ÉROSION CÔTIÈRE
ANNEXE II EXPLICATION DE LA MÉTHODE AHP
ANNEXE III QUESTIONNAIRE
ANNEXE IV MESURES DE LUTTE CONTRE L’ÉROSION CÔTIÈRE HIÉRARCHISÉES PAR LES ORGANISMES
LISTE DE RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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