Les populations africaines sont confrontées depuis des décennies à un manque de protéines d’origine animale. Le Sénégal qui est un pays d’élevage, avec le quart de sa population active impliquée dans cette activité (FAO/Sénégal, 1999), ne fait pas exception à cette tradition. En effet, la consommation de viande par tête est passée de 21,5 kg en 1960 à 13 kg en 1974 et à 11 kg en 2000 (Sénégal, 2003). Dans sa politique stratégique de lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire, le Sénégal s’est alors fixé comme objectif de porter ce niveau de consommation à 20 kg en 2020 (Sénégal, 2003).
GENERALITES SUR L’ELEVAGE AVICOLE AU SENEGAL
EFFECTIF DU CHEPTEL DE L’AVICULTURE SENEGALAISE
Au Sénégal, l’élevage occupe une place importante dans l’économie. Sur le plan macro-économique, il contribue à hauteur de 7,5% au PIB national. Dans le secteur primaire sa contribution est de 35,5% (Sénégal, 2004). Sur le plan socioéconomique, l’élevage est une source d’emplois. En effet près de 3000 000 familles s’adonnent à cette activité ce qui représente une population totale de près de 3 millions d’individus soit le ¼ de la population nationale (FAO/Sénégal, 1999). L’élevage connaît une croissance d’environ 6% par an (Sénégal, 2006).
Au Sénégal, le cheptel avicole est en plein essor depuis plus de deux décennies avec une prédominance de la volaille familiale sur la volaille industrielle. L’effectif actuel s’estime à 34, 840 millions de têtes (tableau I) dont près de 64 % pour la volaille traditionnelle (Sénégal, 2010). La production de viande de volaille servant à la satisfaction des besoins des populations provient de différents types d’élevages avicoles.
LES DIFFERENTS TYPES D’ELEVAGE AVICOLE ET LEURS CARACTERISTIQUES
Une caractéristique importante de l’aviculture mondiale aujourd’hui est la plus grande variabilité des niveaux d’intensification (ITAVI, 2003). Au Sénégal, on distingue deux types d’élevage avicole différenciés par leurs caractéristiques : l’aviculture moderne ou industrielle et l’aviculture villageoise ou traditionnelle.
L’aviculture industrielle ou semi-industrielle : effectif et caractéristiques
La dénomination d’élevage industriel est réservée à des élevages ou établissements qui « à la fois possèdent des effectifs importants, utilisent des poussins d’un jour provenant de multiplicateurs de souches sélectionnées, nourrissent leurs volailles avec des aliments complets ou complémentaires produits par une industrie spécialisée » (Lissot, 1941 cité par Savane, 1996). Cet élevage exploite des souches exotiques et est caractérisé par une grande technicité avec l’utilisation d’importants moyens et équipements pour les volailles. Au Sénégal, le cheptel avicole industriel a véritablement pris son envol en 2005 à la suite de la prise de mesure d’embargo sur les importations de produits et matériels avicoles par l’Etat pour se protéger contre l’épizootie de la grippe aviaire. Les activités de cet élevage sont essentiellement concentrées dans la zone agro-écologique des Niayes où se localisent les régions de Dakar, Thiès et Saint-Louis (Traoré, 2006).
L’aviculture traditionnelle ou villageoise
Définition et Importance
Définition
L’aviculture villageoise dite traditionnelle ou familiale se définit comme la production de volailles à petite échelle pratiquée par des ménages utilisant la maind’œuvre familiale et les aliments localement disponibles (Fao, 2004). La race locale Gallus gallus domesticus demeure la principale souche exploitée dans ce système. Cependant, il est difficile aujourd’hui de trouver une race locale pure du fait des métissages non contrôlés et des programmes nationaux d’infusion de sang nouveau (ex : coq raceur).
Importance
L’aviculture villageoise de par son effectif joue un rôle économique, socioculturel et nutritionnel indéniable en milieu rural.
Importance économique
Dans la plupart des pays africains, l’aviculture familiale est surtout l’apanage des femmes et peut représenter jusqu’à 90% de la production avicole totale (Guèye, 2000 ; Branckaert (1999) cité par Fao, 2004). Au Sénégal, elle représente 64% de la production avicole nationale, et près de 85% des ménages ruraux élèvent des volailles (Guèye, 1998). L’aviculture familiale crée des revenus par le biais de la vente ou du troc d’œufs et d’oiseaux. L’argent acquis permet aux familles d’assurer la couverture de certains besoins matériels et de faire face à des dépenses ponctuelles (Guèye, 2000). Dans les pays en voie de développement, elle représente une des rares opportunités d’épargne, d’investissement et de protection contre le risque (Fao, 2004). Dans la zone de Kolda, Dieye et al. (2005) ont rapporté que la vente d’une poule ou d’un coq peut procurer aux ménages un revenu de 1850 F CFA à 3452 F CFA par jour. Du fait de son potentiel de développement rapide (Baldé et al., 1996), l’aviculture familiale contribue substantiellement à la réduction de la pauvreté (Fao, 2000).
Importance socioculturelle
La production avicole utilise le travail familial souvent exercé par les femmes qui combinent propriété et gestion du troupeau familial (Fao, 2004). Dans beaucoup de pays africains, notamment au Sénégal, la poule est élevée depuis plusieurs générations et reste fortement ancrée dans la culture des populations. La réception des invités ne peut se faire sans un repas à base de viande qui dans la majorité des cas est le poulet. Le poulet vivant est offert à l’hôte comme marque de respect. Ainsi dans la société peulh « Fouladou », bien que le coq de couleur blanche symbolise l’amitié, la sincérité et réciproque considération, on évite d’immoler des coqs à plumes hirsutes pour ne pas empêcher le retour prochain de l’invité (Konaré, 2005). La poule intervient dans diverses cérémonies et fêtes religieuses (naissances, baptêmes, circoncisions, mariages, rituelles, korité, noël, etc.). Chez les Mandingue tout comme chez les Fouladou, la femme mangera un repas à base de poulet qualifié de « piti-piti cissai » juste après la mise au monde d’un nouveau-né (Savane, 1996). Par ailleurs, certains aviculteurs croient qu’un mauvais esprit guettant leur famille peut être dévié vers les poulets et justifie la pratique de cet élevage dans beaucoup de ménages (Bachir, 2002).
Importance nutritionnelle
L’aviculture villageoise fournit d’une manière générale les protéines animales sous la forme de viande et d’œufs. En milieu rural, la volaille représente la principale source de protéines d’origine animale par manque d’habitude d’auto-consommer un ruminant en dehors des fêtes, des cérémonies familiales ou religieuses (Buldgen et al., 1992). Au Sénégal, les produits avicoles représentent le principal apport de protéines animales, de minéraux et de vitamines pour les populations rurales des régions non côtières (Guèye et Bessei, 1995). Ces protéines représentent un élément capital pour l’équilibre alimentaire surtout pour les enfants et les femmes enceintes qui devraient consommer une dizaine de gramme/jour (Fedida, 1996). L’aviculture traditionnelle peut donc jouer un rôle déterminant dans le renforcement de la sécurité alimentaire. De plus, la viande et les œufs issus de l’aviculture traditionnelle sont, du fait de leur qualité organoleptique, très appréciés des consommateurs qui les payent plus chers (Gueye, 1998). Ba (1989) a constaté au Sénégal que 87% des enquêtés préféraient le poulet traditionnel à cause de sa saveur, son caractère salubre et sa conformité au coran contre 4% des enquêtés qui préfèrent plutôt le poulet importé.
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR L’AVICULTURE ET L’ALIMENTATION AVICOLE AU SENEGAL
I- GENERALITES SUR L’ELEVAGE AVICOLE AU SENEGAL
1.1. EFFECTIF DU CHEPTEL DE L’AVICULTURE SENEGALAISE
1.2. LES DIFFERENTS TYPES D’ELEVAGE AVICOLE ET LEURS CARACTERISTIQUES
1.2.1. L’aviculture industrielle ou semi-industrielle : effectif et caracteristiques
1.2.2. L’aviculture traditionnelle ou villageoise
1.2.2.1. Définition et Importance
1.2.2.1.1. Définition
1.2.2.1.2. Importance
1.2.2.1.2.1. Importance économique
1.2.2.1.2.2. Importance socio-culturelle
1.2.2.1.2.3. Importance nutritionnelle
1.2.2.2. Caractéristiques de l’aviculture traditionnelle
II – DIGESTION ET DIGESTIBILITE DES ALIMENTS CHEZ LA VOLAILLE
2.1. RAPPELS ANATOMO-PHYSIOLOGIQUES DE L’APPAREIL DIGESTIF
2.2. DIGESTIBILITE DES ALIMENTS CHEZ LA VOLAILLE
2.2.1. Définition
2.2.2. Méthodes de mesure de la digestibilité
2.2.2.1. Méthode directe
2.2.2.2. Méthode indirecte
2.2.2.2.1. Méthode des indicateurs
2.2.2.2.2. Méthode de laboratoire
2.2.2.2.3. Autres méthodes
2.2.3. Facteurs de variation de la digestibilité
2.2.3.1. Facteurs intrinsèques (liés à l’animal)
2.2.3.2. Facteurs extrinsèques (liés à l’aliment)
III – ALIMENTATION ET PERFORMANCES ZOOTECHNIQUES DES POULETS EN AVICULTURE VILLAGEOISE
3.1. BESOINS DE LA POULE
3.1.1. Besoins en énergie
3.1.2. Besoins en protéines
3.1.4. Besoins en minéraux et en vitamines
3.1.6. Besoins en eau
3.2. PRATIQUE DE L’ALIMENTATION EN AVICULTURE VILLAGEOISE
3.3. PERFORMANCES ZOOTECHNIQUES DES POULETS TRADITIONNELS
CHAPITRE II : UTILISATION DES RESSOURCES ALIMENTAIRES NONCONVENTIONNELLES (RANC) EN ALIMENTATION AVICOLE : CAS DES FEUILLES DE MORINGA OLEIFERA, DE LEUCAENA LEUCOCEPHALA ET DE CASSIA TORA
2.1. CONTEXTE ET UTILISATION DES RESSOURCES ALIMENTAIRES NON CONVENTIONNELLES (RANC)
2.2. UTILISATION DES FEUILLES DE LEGUMINEUSES EN ALIMENTATION AVICOLE
2.2.1. Cas des feuilles de Moringa oleifera
2.2.1.1. Propriétés ethno-agronomiques
2.2.1.2. Propriétés médicinales, pharmacologiques et industrielles
2.2.1.3. Valeur nutritive des feuilles de Moringa oleifera
2.2.1.4. Facteurs anitinutritionnels des feuilles de Moringa oleifera
2.2.1.5. Utilisation des feuilles de Moringa oleifera en alimentation animale
2.2.2. Cas des feuilles de Leucaena leucocephala
2.2.2.1. Propriétés ethno-agronomiques
2.2.2.2. Propriétés médicinales et pharmacologiques
2.2.2.3. Valeur nutritive des feuilles de Leucaena leucocephala
2.2.2.4. Facteurs antinutritionnels des feuilles de Leucaena leucocephala
2.2.2.5. Utilisation des feuilles de Leucaena leucocephala en alimentation animale
2.2.3. Cas des feuilles de Cassia tora
2.2.3.1. Propriétés ethno-agronomiques
2.2.3.2. Propriétés médicinales et pharmacologiques
2.2.3.3. Valeur nutritive des feuilles de Cassia tora
2.2.3.4. Facteurs antinutritionnels des feuilles de Cassia tora
2.2.3.5. Utilisation des feuilles de Cassia tora en alimentation animale
PARTIE EXPERIMENTALE
CHAPITRE I : MATERIEL ET METHODES
1.1. SITE ET PERIODE D’ESSAI
1.2. MATERIEL ET METHODES
1.2.1. Bâtiments
1.2.2. Equipements de transformation et d’expérimentation
1.2.3. Ingrédients utilisés et formulations des rations
1.2.3.1. Collecte et transformation des feuilles de légumineuses
1.2.3.2. Formulation des rations expérimentales
1.2.4. Conduite de l’élevage
1.2.4.1. Préparation du bâtiment et des cages de digestibilité
1.2.4.2. Préparation des animaux
1.2.4.3. Dispositif expérimental
1.2.5. Analyse bromatologique des échantillons
1.2.5.1. Détermination des paramètres zootechniques et des coefficients d’utilisation digestive et métabolisable (CUDM)
1.2.6. Analyse statistique
CHAPITRE II : RESULTATS ET DISCUSSION
2.1. RESULTATS
2.1.1. Valeurs nutritives des farines de légumineuses
2.1.2. Valeurs nutritives des rations expérimentales et composition chimique des fientes collectées par essai
2.1.3. Effets des rations expérimentales sur les parametres zootechniques et les coefficients d’utilisation des nutriments chez les poulets locaux
2.1.3.1. Cas de l’incorporation des feuilles de Moringa oleifera (Essai 1)
2.1.3.2. Cas de l’incorporation des feuilles de Leucaena leucocephala (Essai 2)
2.1.3.3. Cas de l’incorporation des feuilles de Cassia tora (Essai 3)
2.2. DISCUSSION
2.2.1. Valeurs nutritives des feuilles et des rations expérimentales
2.2.2. Effets des rations expérimentales sur les performances zootechniques et l’utilisation digestive et métabolique des nutriments chez les poulets locaux
2.2.2.1. Cas de l’incorporation des feuilles de Moringa oleifera
2.2.2.2. Cas de l’incorporation des feuilles de Leucaena leucocephala
2.2.2.3. Cas de l’incorporation des feuilles de Cassia tora
RECOMMANDATIONS
CONCLUSION