Etudes d’evaluation des durées de prises en charge des nouveau-nés grands prématurés au chu de Caen

ÉTUDE D’EVALUATION DES DUREES DES PRISES EN CHARGE DES NOUVEAU-NES GRANDS PREMATURES AU CHU DE CAEN

Objectif de notre étude

Au CHU de Caen, les nouveau-nés grands prématurés sont pris en charge selon l’évidence scientifique et les recommandations de l’ILCOR. Cependant il n’existait pas de protocole de prise en charge des nouveau-nés très grands prématurés permettant une standardisation des prises en charge.
Nous nous sommes donc intéressés à la prise en charge néonatale immédiate du nouveau-né grand prématuré.

Patients et méthode 

Étude et population

Il s’agit d’une étude non interventionnelle, de type prospective, monocentrique, réalisée dans le service de réanimation néonatale du CHU de Caen.
Tous les patients nés avant 32 SA + 6 jours au CHU de Caen entre le 1 er mai et le 1 er novembre 2020, ont été inclus.
Ont été exclus de l’étude : les patients nés out-born, les patients présentant une pathologie malformative grave conduisant au décès en moins de vingt-quatre heure ou les patients dans une situation de soins palliatifs
Ce travail a été soumis au Comité Local de la Recherche en Santé (CLERS) et a obtenu un avis favorable.

Objectifs

L’objectif principal était de mesurer nos temps de prise en charge des nouveau -nés grands prématurés en détaillant les durées de mise en place de supports vitaux, les durées de prise en charge en salle de naissance et dans le service.
Nos objectifs secondaires étaient de mesurer l’incidence des complications (hypothermies, hypoglycémies) et d’analyser les facteurs influençant les durées de prise en charge comme l’expérience des équipes traitantes, le nombre de radiographies réalisées, le délai de prévenance de la naissance.

Organisation géographique des unités de salle de naissance et de réanimation néonatale au CHU de Caen

Le service de gynécologie comprenant les blocs opératoires pour les césariennes et les salles de naissance sont situés au même étage que le service de réanimation néonatale. Les deux services se suivent et sont séparés par des portes battantes
On retrouve deux salles de réanimation dans le service de gynécologie. Une première salle est attenante au bloc opératoire et communique avec celui-ci par une trappe, par laquelle le nouveau-né est transmis par la sage-femme à l’équipe qui va prendre en charge le patient. La deuxième salle de réanimation se trouve entre la chambre d’accouchement par voie basse.
Le transfert entre la salle de naissance vers le service de réanimation des nouveaunés se fait de manière générale en couveuse équipée d’un scope et d’un neopuff. Le service se trouve à environ 60 mètres du service de réanimation néonatale.

Prise en charge en salle de naissance

Les durées de prise en charge en salle de naissance sont reportées dans le tableau 4 et détaillées selon le groupe de prématurité. La durée médiane du temps de transfert entre la SDN et le service de réanimation est de 2 minutes pour les deux groupes confondus.
Aucun patient n’a eu de pose de KTVO, de réalisation de LISA ou d’instillation de surfactant en salle de naissance. En revanche certains patients ont été intubés (Cf tableau 6).

Facteurs influençant les durées de prises en charge

L’expérience des équipes

L’impact de l’expérience des médecins dans la durée totale de prise en charge n’est pas significatif. La durée de prise en charge varie de 4 minutes en faveur du médecin avec une expérience supérieur à deux ans (p : 0, 82) versus moins de deux ans.
L’expérience de l’interne dans la pose du KTVO n’a pas non plus de différence significative. Avec une différence de 5 minutes en faveur de l’interne ayant déjà effectué un semestre dans un service de niveau 3 (p : 0, 264) versus l’interne en ayant réalisé au minimum deux.
Il n’a pas été possible d’étudier l’impact du niveau d’expérience de l’infirmière sur la durée totale de prise en charge.

Le nombre de radiographie

Le nombre de radiographies réalisées au chevet du patient a un impact significatif sur la durée totale de prise en charge.
L’analyse en sous-groupe avec un groupe 0-1 radiographie et un groupe 2-3 radiographies met en évidence une différence significative de durée de prise en charge avec une médiane de 95 minutes dans le groupe 0-1 radiographie contre 140 minutes dans le groupe ayant eu 2 ou 3 radiographies (p= 0,013).

DISCUSSION

Principaux résultats

Notre étude a montré que la durée totale de prise en charge était respectivement de 110 minutes pour les TGP et 89 minutes pour les GP. Elle a également révélé que les temps de prévenance étaient conséquents avec 60,5 minutes de médiane, permettant ainsi une anticipation importante. Le principal facteur montrant une augmentation de la durée totale de prise en charge était le nombre de radiographie s réalisées. Enfin parmi les comorbidités immédiates, 48% des patients ont présenté une hypothermie durant la prise en charge et 8% de l’effectif a présenté une hypoglycémie.

Données de la littérature et éclaircissement des résultats

Des projets d’amélioration de la qualité d’admission des prématurés déjà publiés ont démontré la réussite de la mise en œuvre d’un protocole Golden Hour. Les protocoles utilisés dans ces projets variaient en fonction des besoins spécifiques de l’unité concernée. Certaines études ont évalué les pratiques de leur service et mesuré les durées de prise en charge des patients nés prématurés et établi un protocole de service.
Dans ces études plusieurs paramètres étaient mesurés pour évaluer l’efficacité des protocoles de Golden hour dont la température, les glycémies, la médiane de vie lors de la pose de la perfusion et des antibiotiques, la durée totale de prise en charge. Dans notre étude, nous retrouvons des résultats similaires aux études pré-protocoles réalisées aux États-Unis et en Israël depuis l’introduction de cette notion par Reynolds et al en 2009 (12,14,31,34,35), avec une durée médiane de prise en charge de 89 minutes chez les grands prématurés. Dans toutes ces études la mise en place du protocole a permis de diminuer de manière significative le nombre d’hypoglycémie, d’hypothermie, le délai de perfusion des fluides et des antibiotiques. (Cf Tableau 13).
Dans la plupart des études la durée totale de prise en charge pouvait être réalisée durant la première heure de vie ou tout du moins la perfusion était administrée avant H1, après établissement d’un protocole.
Ces études ont permis de réaliser des groupes de discussion et ont soulevé certains problèmes spécifiques au centre. L’étude de Harriman et al, a notamment mis en évidence comme facteurs allongeant la prise en charge, le délai pour recevoir les antibiotiques de la pharmacie, le délai pour l’admission informatique et le délai pour la réalisation des radiographies. La mise en place d’un protocole a permis de diminuer les durées de prise en charge. Ces données sont cohérentes avec notre étude dans laquelle le nombre de radiographies allongeait également la durée de prise en charge de manière significative.

Rédaction d’un protocole de service

La mise en place d’un protocole permet de standardiser et faciliter les admissions malgré le turn-over des équipes.
Le protocole Golden Hour a été conceptualisé à partir des données de la littérature et en accords avec les retours des membres de l’équipe afin de l’adapter à l’institution.
Pendant la phase de planification du projet, les entretiens avec les membres du personnel ont permis de mieux comprendre les pratiques actuelles et ont contribué à l’élaboration du protocole. Parmi ces membres du personnel figurait des infirmières et médecin du service. Les membres de l’équipe multidisciplinaire : pharmacie, laboratoire, et radiologie ont également fourni des retours.

Le protocole

Le protocole d’admission du nouveau-né très grand prématuré se base sur 3 grands axes.

L’anticipation 

L’anticipation est la clé de cette pris en charge. Il a été décidé qu’une chambre montée pour la prise en charge d’un enfant de < 28SA devait toujours être prête et vérifiée pour anticiper une naissance rapide et en urgence. Une couveuse girafe permettant une humification importante et une pesée de l’enfant, doit être installée en priorité si elle est disponible. Enfin un respirateur permettant une ventilation invasive et non invasive doit être présent et monté avec un humidificateur prêt à l’emploi.
L’utilisation d’une liste de contrôle avant la naissance rend ce processus de vérification de l’équipement facile et rapide (Cf Annexe 6,7 et 8).
L’histoire de la grossesse doit être lue en détails à partir des dossiers de gynécologie et les détails importants notés.
L’idéal est d’avoir préparé la chambre de l’enfant, avec le matériel et les traitements requis, afin d’éviter tout retard dans leur administration. Et si possible les prescriptions sont anticipées, les médicaments nécessaires à la prise en charge sont alors disponibles immédiatement et il ne reste plus qu’à ajouter le poids définitif , à la prescription pour l’ajuster.Un tiroir avec tout le matériel nécessaire à la prise en charge est toujours prêt et rangé dans la salle de soins (Cf Annexe 7 et 8).
Lorsqu’elle est appelée à assister à la naissance d’un nouveau-né à haut risque. Une équipe de prise en charge doit être constituée avec un binôme puéricultrice/infirmière et 1 binôme de médecin (Junior/ sénior ou 2 séniors). Un chef d’équipedoit être désigné et chaque membre de l’équipe doit se voir attribuer un rôle. La désignation d’un leader a en effet été démontré comme un facteur protecteur pour le patient, lors d’une réanimation (37). De sorte que pendant la réanimation il n’y ait pas de confusion sur les interventions.
Le personnel de l’unité doit être informé de l’admission néonatale prévue. L’état de fonctionnement des instruments nécessaires à la réanimation doit être vérifié et doit être en nombre suffisants en cas de grossesse multiple.

La prise en charge dans le service

A l’arrivée dans le service, l’équipe désignée initialement suit le déroulement du protocole réalisé dans l’annexe 2.
Un débrief sur la prise en charge en salle de naissance et un briefing sur les étapes à venir est réalisé à l’arrivée dans le service, et le leader rappel les tâches de chacun dans la prise en charge.
Un algorithme de prise en charge à l’admission selon l’état clinique de l’enfant a été réalisé (Cf annexe 2 et 3).
Pour rappel les nouveau-nés prématurés sont à risque de décès ou d’instabilité par syndrome de détresse respiratoire en raison d’un déficit en surfactant. L’administration de la corticothérapie anténatale et l’utilisation de la ventilation non invasive et notamment la CPAP ont permis de diminuer la prévalence des détresses respiratoires et l’intubation référence.
Dans l’étude de Bahadue et al (41), le seuil retenu comme critique, c’est-à-dire le marqueur prédictif d’un échec de la CPAP, malgré la réalisation de surfactant, est une FiO2 initiale > 30%.
Lors de la rédaction du protocole il a alors été décidé, que si à l’admission l’enfant présentait une Fi02 > 30% le premier objectif été l’administration du surfactant. Pour la réalisation du LISA il faut une voie d’abord afin de pouvoir réaliser une analgésie efficace de l’enfant. La pose d’un KTVO se faisant en stérile, il faut une voie d’abord rapide, les infirmières essayent donc dans ce contexte de poser une voie veineuse périphérique ou une épicrânienne.
Pour la pose du KTVO, nous avons étudié l’impact de l’expérience de l’interne. Nous avons mis en évidence que la durée du geste était allongée de 5 minutes quand il était réalisé par un interne de premier semestre versus un interne ayant déjà réalisé un semestre en niveau 3. Même si cette valeur n’est pas significative elle est conséquente pour une durée de réalisation du geste médiane de 31,5 minutes. Il a été décidé que pour la pose d’un KTVO chez un patient né <28SA + 6 j, seulement des internes ayant déjà une expérience d’un semestre en néonatalogie ou un des séniors du service pouvait le poser. La simulation prend alors toute sa place dans la formation des internes.
Effectivement pour pallier au fait que les internes vont poser moins de KTVO, il leur est proposé de s’entrainer plus souvent sur un mannequin de simulation.
Le seul facteur ayant démontré un impact sur la durée de prise en charge est le nombre de radiographies réalisées. Plusieurs raisons ont été identifié pour expliquer ces durées.
En premier lieu, (en heure ouvrable) l’appel du manipulateur radio se faisait une fois la pose du cathéter réalisé avec des délais d’attentes parfois importants. Les discussions avec l’équipe de radiologie ont permis de décider que le manipulateur radio serait appelé avant le début de la pose du KTVO, afin de ne pas retarder la réalisation de l’examen.
Ensuite, lors de la réalisation de l’étude, en dehors des heures ouvrables, le manipulateur radio ne se déplaçait pas et l’équipe s’occupait de faire développer les images dans un service extérieur à la réanimation. Lors des mises en situation l’impression pouvait prendre jusqu’à dix minutes.
Désormais le manipulateur est appelé et présent même la nuit.
Autre point positif, un nouvel appareil de radiographie est disponible et permet d’afficher l’image en temps réel, dans la chambre de l’enfant sans avoir à charger l’image dans le système informatique et l’ouvrir depuis un ordinateur.
Enfin, une fois la prise en charge terminée, un dernier débrief a lieu afin de discuter de la prise en charge du patient, des points positifs et des points qui ont posé soucis pour l’efficacité de la prise en charge et qui peuvent être source d’amélioration pour l’admission.
Ainsi la clé de cette prise en charge est une anticipation importante, permise grâce à la mise en place d’une chambre dédiée à l’accueil d’un grand prématuré constamment prête et vérifiée grâce à un ensemble de check-list.
Enfin l’efficacité de la prise en charge est surtout permise grâce à la communication des équipes, à la réalisation de briefings fréquents afin de toujours avoir en tête les tâches à réaliser pour chacun. Le leadership réalisé par le membre de l’équipe avec le plus d’expérience est également important, il permet de constamment réadapter la prise en charge au protocole réalisé.
Enfin il est important de faire un bilan en fin de prise en charge, afin de noter les axes d’améliorations, mais également les points positifs qui ont permis de faire avancer de façon efficace l’admission du patient.

CONCLUSION

Notre étude visait à évaluer nos durées de prise en charge et par ce biais, à identifier les facteurs retardant cette durée de prise en charge des nouveau-nés grands prématurés.
Nous n’avons pas mis en évidence de facteur retardant la prise en charge, à l’exception du nombre de radiographies réalisées.
Nous avons pu constater que la durée de préparation des équipes avant une naissance n’était pas négligeable et permettait ainsi une anticipation importante permettant d’améliorer la prise en charge des patients.
A l’inverse, les temps de transfert et d’installation entre les différents gestes et étapes de la prise en charge étaient conséquents, la rédaction d’un protocole de service vise à rendre plus efficiente l’admission de ces patients vulnérables en faisant en sorte que chaque acteur de la prise en charge connaisse les procédures à réaliser.
D’autres études dans le service vont être instaurées afin d’évaluer l’efficacité de la mise en place de ce protocole dans l’unité Le protocole a été mis à disposition des équipes pendant 6 mois. Et une phase d’évaluation de la prise en charge est actuellement en cours pour une durée de six mois. Permettant ainsi une étude pré-post protocole dans le service de réanimation néonatale du CHU de Caen.
Enfin des sessions de simulation sur la prise en charge du nouveau-né prématuré vont être prochainement mises en place afin de rendre encore plus efficiente les prises en charge.

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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. CONCEPT DE LA GOLDEN HOUR 
1. Optimisation des facteurs de comorbidité
A) L’hypothermie
B) Hypoglycémie
C) Sepsis
D) Prise en charge ventilatoire
2. Standardisation de la prise en charge néonatale immédiate
3. Formation des équipes
III.ETUDES D’EVALUATION DES DUREES DE PRISES EN CHARGE DES NOUVEAU-NES GRANDS PREMATURES AU CHU DE CAEN
1. Objectifs
2. Patients et méthodes
A) Étude et population
B) Objectifs
C) Paramètre recueillis et définitions
D) Organisation géographique des services de salle de naissance
et de réanimation au CHU de Caen
E) Analyse statistique
IV.RESULTATS 
1. Caractéristiques de la population étudiée
2. Mesure des temps de prise en charge
A) Prise en charge totale
B) Préparation à la naissance
C) Prise en charge en salle de naissance
D) Prise en charge dans le service
E) Temps de réalisation des procédures
F) Administration des médicaments
G) Évaluation des temps de transition entre les différentes étapes
3. Facteurs influençant les durées de prise en charge
A) Expérience des équipes
B) Nombre de radiographie
4. Les comorbidités immédiates
A) Hypoglycémie
B) Hypothermie
V. DISCUSSION 
1. Résultats principaux
2. Données de la littérature et éclaircissement des résultats
3. Force et Biais
4. Rédaction d’un protocole de service
A) La consultation prénatale et l’intégration des parents dans la prise en charge durant la première heure de vie
B) Le protocole
VI. CONCLUSION 
VII.BIBLIOGRAPHIE

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