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Les lanthanides
Cette première partie a pour but de présenter quelques applications choisies de la chimie des Ln au degré d’oxydation +III (Ln(III)). Pour cela, nous verrons dans un premier temps, les propriétés très générales de ces Ln(III) expliquant un comportement chimique similaire au sein de la série, mais en revanche des propriétés physiques (spectroscopiques) variées qui en font toute leur richesse. Ainsi, le contrôle de la sphère de coordination des complexes de Ln(III) est essentiel pour orienter les applications.
Propriétés
La quasi identité des propriétés physiques et chimiques de l’yttrium et du scandium avec celles des Ln conduit naturellement à regrouper ces 17 éléments sous le nom de « terres rares ». Ce nom est historiquement associé à la difficulté que les chimistes avaient à les isoler sous une autre forme que l’oxyde, très réfractaire (terre en ancienne chimie). L’épithète rare rappelle leur faible concentration dans les minerais, bien que l’abondance naturelle soit globalement plus importante que celle de l’argent, du plomb ou de l’or.
La configuration électronique des Ln correspond au remplissage progressif de la couche 4f qui est blindée par les couches externes 5s2 5p6. Les Ln existent tous majoritairement à l’état trivalent et présentent alors la configuration électronique [Xe] 5d0 6s0 4fn. Ainsi, ces ions lanthanides trivalents (notés ions Ln3+ ou Ln(III)) présentent une remarquable homogénéité de leurs propriétés chimiques.
Les électrons de « valence » des orbitales 4f sont « enfouis » dans le nuage électronique et sont donc très peu sensibles à l’environnement chimique. Ceci a plusieurs conséquences. Tout d’abord les ions lanthanides sont des acides durs dans la « classification de Pearson des acides et bases durs et mous » (Pearson, 1963). Ils vont donc interagir préférentiellement avec des ligands durs, contenant entre autres des atomes donneurs d’oxygène (eau, carboxylates, alcoolates, etc.). Leur forte acidité au sens de Lewis conduit également à une activation d’atomes d’hydrogène présents sur les molécules d’eau coordonnées au cation métallique, favorisant ainsi la formation d’hydroxocomplexes (ou espèces hydrolysées). Ces hydroxydes de lanthanides sont insolubles à partir de pH de l’ordre de 6.
Une autre conséquence de la profondeur des orbitales 4f est que le champ cristallin est très faible, de l’ordre de quelques centaines de cm-1, contre 5 000 à 30 000 cm-1 pour les métaux de transition. D’un point de vue structural, les liaisons métal-ligand présentent une absence de directionnalité. La position des différents ligands dans la sphère de coordination est conditionnée essentiellement par les interactions électrostatiques et stériques entre le cation métallique et les ligands. Ceux-ci s’organisent au mieux autour du cation métallique de façon à minimiser l’énergie électrostatique et les interactions stériques répulsives. Enfin, la taille de l’ion varie de façon monotone tout au long de la série. En effet, du début à la fin de la série, le rayon ionique décroît régulièrement. Ce phénomène est appelé « contraction lanthanidique ». Ce rayon ionique est un paramètre effectif, fonction du nombre de coordination des Ln(III) en solution, qui représente le nombre de liaisons métal-ligand. Les nombres de coordination les plus fréquents des Ln(III) sont 8 ou 9, mais ils peuvent varier de 6 à 12.
Utilisationss
Les domaines d’applications des Ln se sont multipliés lorsque qu’il a été possible de bien séparer les terres rares entre elles et de nos jours ces applications sont de très haute valeur ajoutée, depuis les applications en médecine ou en biochimie aux développements plus récents pour les couleurs des écrans de télévision.
Les tests immunologiques
Les tests immunologiques reposent sur une réaction biochimique entre un antigène (à analyser) et un anticorps spécifique. Dans les tests immunologiques luminescents, l’anticorps est marqué avec un complexe de Ln(III) : par exemple, un complexe Eu(III) avec un cryptand tris(bipyridine) est lié à un anticorps spécifique alors qu’un accepteur A est greffé sur un second anticorps spécifique, la réaction biochimique avec l’antigène va amener ces deux entités à proximité l’une de l’autre et un transfert d’énergie va avoir lieu (Figure 2).
Cette technique permet de détecter la prolactine avec une sensibilité similaire à celle obtenue avec des marqueurs radioactifs (moins de 0,3µg/L) (Mathis, 1995).
Les techniques d’imagerie par luminescence
En ajoutant deux dimensions spatiales à ces procédures analytiques, il est possible de réaliser de l’imagerie par luminescence. Les complexes de Ln(III) sont très intéressants du fait que ce sont des sondes très sensibles pour tous les tests biologiques et qu’ils ont des temps de vie de luminescence plus longs que les sondes fluorescentes classiques. Ainsi, les signaux provenant des Ln(III) peuvent être séparés de ceux provenant des tissus biologiques ou des composants optiques en utilisant la luminescence résolue en temps. L’utilisation de la microscopie luminescente permet d’obtenir une résolution spatiale inférieure à la dimension de la cellule, rendant possible la localisation précise de la substance à analyser ainsi que la détermination de sa concentration (Faulkner et al., 2005).
Agents de déplacement chimique en RMN
Bien que les ions Ln3+ ne soient pas directement observables par Résonance Magnétique Nucléaire (RMN), ils induisent des propriétés particulières sur les noyaux environnants, observables par RMN. La RMN est une technique spectroscopique qui s’intéresse aux transitions énergétiques entre les niveaux Zeeman des spins nucléaires placés dans un champ magnétique. Ces transitions se font dans le domaine des ondes radio et sont caractéristiques de la nature et de l’environnement chimique du noyau considéré. L’étude des fréquences de résonance et des réseaux de couplage qui existent entre les spins de la molécule permet d’obtenir des informations sur sa structure et sa dynamique.
La proximité d’un métal paramagnétique avec les noyaux observés a une forte influence sur l’allure des spectres RMN. Il existe un couplage hyperfin entre le spin du noyau étudié et le spin de l’électron célibataire appartenant au cation métallique. Son influence se ressent sur le déplacement chimique du spin nucléaire étudié et sur la relaxation de ces spins, qui influe sur la largeur de raie. Les premières observations de complexes de Ln(III) en tant qu’agents de déplacement chimique remontent à 1969 (Mar et al., 1973).
Agents de contraste pour l’IRM
Pour un examen d’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM), technique d’imagerie médicale permettant d’avoir une vue 2D ou 3D d’une partie du corps, notamment du cerveau, l’agent de contraste est injecté par voie intraveineuse, mais il se distribue ensuite dans les espaces extracellulaires et intravasculaires. Les doses requises sont en général de 0,1 à 0,3 mmol.kg-1 et la concentration de la solution injectée est importante (environ 0,5 mol.L-1). Le complexe doit absolument être soluble à ces concentrations. Le deuxième point crucial est la stabilité cinétique et thermodynamique du complexe injecté.
L’ion aquo Gd3+ est très toxique. Sa toxicité provient essentiellement de la similitude de son rayon ionique avec celui du calcium (Ca2+). Il se substitue donc au calcium dans le corps humain et empêche, entre autre, la transmission neuromusculaire en bloquant les canaux du calcium. Il est également connu pour interagir avec les protéines du sérum, et pour se déposer de façon irréversible, sous forme de sels insolubles, sur les os, le foie et la rate. Le complexe injecté doit donc être thermodynamiquement stable et cinétiquement inerte pour que la concentration de Gd(III) libre soit limitée. Ces contraintes très fortes impliquent de nombreux tests cliniques, d’un coût actuel d’au moins cent millions de dollars, avant la mise sur le marché.
Autres applications liées aux propriétés optiques
Nous avons vu que les transitions électroniques des Ln se situaient entre niveaux discrets : cela se traduit par des absorptions et des émissions de lumière à caractère fortement monochromatique. Ainsi, de nombreux niveaux d’énergies, se succèdent à intervalles rapprochés entre le proche infrarouge et l’ultraviolet.
Dans le domaine de l’absorption, certains Ln(III) permettent l’obtention de colorations très particulières mises à profit dans l’industrie du verre et de la céramique où ils entrent dans la composition des pigments (vert de praséodyme, violet du néodyme ou rose de l’erbium).
Au niveau de l’émission, les applications se sont développées, en liaison avec la disponibilité industrielle des Ln à des puretés suffisantes : télévision couleur, éclairage fluorescent et radiographie médicale. Une grande variété d’émission peut être obtenue en fonction de la nature du Ln mis en jeu et des positions respectives des niveaux d’énergie excités ou fondamentaux. Ainsi, en télévision couleur, l’image est reproduite grâce à l’excitation cathodique sélective de trois luminophores (bleu, vert et rouge) à base de Ln déposés sur la face interne de l’écran. Suivant l’élément de Ln choisi, l’émission lumineuse est localisée dans le proche ultraviolet (avec le gadolinium, le cérium), le visible (rouge avec l’europium, orange avec le samarium, vert avec le terbium, jaune avec le dysprosium, bleu avec le thulium), ou le proche infrarouge (avec le néodyme). Cela a permis la réalisation de lampes compactes pour les applications domestiques.
Les actinides
Les An sont générés par des captures de neutrons qui n’ont pas été suivies de fissions. Ils tirent leur nom de l’actinium (Z=89), un métal lourd qui précède de peu l’uranium dans le tableau de Mendeleïev, car ils possèdent des propriétés chimiques voisines.
Production
L’An produit le plus abondamment est le plutonium avec en tête son principal isotope le 239Pu, lui-même fissile. Mais les réacteurs génèrent en quantité moindre, d’autres An qui sont dits « mineurs » pour cette raison. Les principaux sont le 237Np, les 241Am et 243Am et les 244Cm et 245Cm. Les An mineurs constituent avec le plutonium une grande partie des déchets radioactifs à Haute Activité et durée de Vie Longue (HAVL), c’est-à-dire les déchets de l’industrie électronucléaire les plus dangereux.
Les transuraniens, An plus lourds que l’uranium, n’existent en général pas à l’état naturel, car leurs isotopes ont souvent une demi-vie très courte, aux exceptions notables, de quelques isotopes de Np, Pu, Am et Cm produits en quantités pondérables dans les réacteurs nucléaires (Tableau 1).
Le devenir des radionucléides
En cas de rejet de radionucléides (RN) dans l’environnement, il est nécessaire de connaître le terme source, les phénomènes de transport et de transformation, l’interaction avec les sols, l’incorporation au milieu biologique, etc., afin de pouvoir estimer les conséquences à long terme de cette contamination.
Une connaissance précise du comportement des RN selon leur spéciation avec les différentes molécules impliquées dans les phénomènes présentés Figure 3 est non seulement utile pour préciser les risques encourus pour l’homme et l’environnement mais aussi pour définir les protocoles à mettre en place afin de retirer efficacement les RN du milieu (phytorémédiation et décorporation notamment).
Dans le corps : la décorporation
Les premières recherches concernant le traitement de la contamination interne par des An ont été menées par le Département Santé du groupe Manhattan. Différentes solutions furent envisagées (suppléments d’hormones, utilisation de citrate de zirconium ou d’acides carboxyliques communs (Schubert, 1947)) avant de considérer l’administration d’un agent chélatant capable de former avec un métal, un complexe stable, soluble et pouvant être excrété par l’organisme comme la seule thérapie envisageable. Cet agent doit idéalement posséder les caractéristiques suivantes : une plus grande affinité envers les An qu’envers d’autres espèces complexantes présentes dans le corps, une faible affinité envers d’autres cations métalliques essentiels, une faible toxicité chronique et une administration par voie orale.
La première molécule envisagée en 1947 fut l’H4-EDTA hexadentate. En 1954, une autre molécule brevetée, l’H5-DTPA, présentant une plus grande affinité envers les cations multivalents et une moindre affinité envers les métaux divalents fut testée. Les CaNa3-DTPA ou ZnNa3-DTPA sont aujourd’hui encore les seuls traitements en cas de contamination interne. Malgré son fort pouvoir complexant envers les An(III) et le Pu(IV) dans les fluides corporels, ce traitement DTPA possède aussi quelques points faibles. Ainsi, une fois le Pu lié aux tissus ou aux os, le pouvoir de mobilisation du Pu par le DTPA est faible. De plus, la thérapie DTPA peut conduire à des formes sévères d’hypocalcémie et de carences en ions métalliques divalents essentiels tels que Zn, Co, Cu et Mn. Pour finir, le DTPA n’est pas très efficace pour la décorporation d’autres An comme Th(IV), Np(IV) ou U(VI). Ceci peut poser des problèmes en cas de contamination par plusieurs métaux ou bien en cas de doute sur le contaminant.
Dans le cadre de travaux sur la décorporation, il est important de rechercher de nouvelles unités chélatantes afin d’améliorer la sélectivité des traitements vis-à-vis des RN. En matière de décorporation, une revue récente de Ansoborlo présente l’état de l’art sur la décorporation des actinides en milieu biologique (Ansoborlo et al., 2007).
Une voie envisagée se base sur les sidérophores qui possèdent des unités complexantes – catécholates, catécholamines, acides amino-carboxyliques, hydroxamates ou hydroxypyridinates (HOPO) – très spécifiques de Fe(III) ainsi que de Pu(IV). Trois ligands comportant des groupes HOPO, le 5-LIO-(Me-3,2-HOPO) tetradentate, le TREN(Me-3,2-HOPO) hexadentate et le 3,4,3-LI(1,2-HOPO) octadentate sont aujourd’hui considérés comme les meilleurs agents décorporants des An (Gorden et al., 2003). Ces trois molécules s’avèrent être significativement plus efficaces que le DTPA pour réduire la quantité de Pu(IV) et d’Am(III) dans le corps, ainsi que pour éliminer Np(V), Np(VI) et U(VI), pour lesquels le traitement DTPA est inactif. De plus, l’administration de ces ligands se fait par voie orale et la toxicité associée aux quantités efficaces est assez faible. Des recherches sont menées pour mettre au point un cocktail de ligands afin de tirer le meilleur parti des spécificités de chaque molécule en cas de contamination interne par un mélange d’An.
Cependant, il est aussi possible de développer des formulations pharmaceutiques originales permettant de diriger davantage le décorporant vers les sites de transfert et de dépôt du RN, in vivo. Par exemple, les liposomes10 sont des formulations qui offrent toute une série de possibilités de vectorisation (par encapsulation), notamment concentrer un médicament au niveau du foie ou augmenter sa période biologique dans la circulation sanguine et ainsi améliorer son efficacité. Dans le cadre du programme national de recherche sur la Toxicologie Nucléaire Environnementale, cette démarche a été récemment appliquée avec succès pour le DTPA dont la pharmacocinétique a été étudiée chez le rat et modifiée grâce à une formulation galénique11 à base de différents liposomes (Phan et al., 2006a). Il a été possible d’étudier la distribution du DTPA dans les organes cibles du Pu que sont le foie et l’os, et de modifier cette distribution de façon à augmenter le temps de contact entre le complexant et le RN pour favoriser l’élimination de ce dernier (Phan et al., 2006b).
Dans les sols
Quelque soit la source et leur forme chimique initiale, la majorité des RN est insoluble dans les sols et très peu mobile ; l’activité reste donc majoritairement dans les 10 premiers centimètres du sol (Mboulou et al., 1998). La migration des RN est dite latérale car en général causée par le vent et l’érosion hydrique, mais des processus mécaniques comme l’exploitation agricole peuvent favoriser sa migration verticale. La fraction de RN hydrosoluble et échangeable dans le sol est inférieure à 0,4 % et leur dissolution peut s’étaler sur plusieurs années, conduisant à un gradient de concentration très faible (Michel et al., 2002).
Pourtant, suivant les conditions locales, la fraction de RN soluble et/ou mobile peut augmenter considérablement. Différents paramètres du sol peuvent influencer la mobilité du RN dans les sols : adsorption, présence de colloïdes, de matière organique et de micro-organismes, etc.
Influence de l’adsorption
Etant donné que les carbonates forment des complexes stables avec les RN en solution, la surface des minéraux carbonatés serait susceptible d’être un site privilégié d’adsorption des An (Choppin, 2003). Le rôle important de l’adsorption des RN dans leur immobilisation ou leur transport a été discuté par de nombreux auteurs (Meece et Benninger, 1993). L’adsorption suit la même tendance que la complexation, puisqu’elle est influencée par les mêmes paramètres (charge des cations, effet stériques, etc.). Dans les milieux neutres et basiques, les RN interagissent avec les groupements hydroxydes de la silice, avec les oxydes de fer ou encore les groupements hydroxydes présents à la surface des colloïdes.
Influence des colloïdes
Les colloïdes naturellement présents dans les aquifères sous forme de particules submicrométriques en suspension sont soupçonnés d’augmenter la mobilité de contaminants non solubles au dépend de l’adsorption. Ce serait également le cas pour les An (Kim, 1994). Afin de ne pas sous-estimer le transport des RN dans l’environnement, il est donc indispensable de prendre en compte d’autres facteurs que la solubilité et l’adsorption sur les roches dans les modèles de migration. Toutefois, l’influence des colloïdes sur la mobilité des An est encore sujet à polémiques.
Influence de la matière organique
Les matières organiques naturelles, issues principalement de la dégradation de la matière organique contenue dans les sols, sont essentiellement constituées de substances humiques (SH) (acides humiques AH et acides fulviques AF). La différence entre AH et AF se fait selon une définition opérationnelle, par leur différence de solubilité dans le milieu aqueux : les AH précipitent en milieu acide (pH < 3) tandis que les AF sont solubles quelque soit le pH et retenus sur résine hydrophobe. Les RN sont susceptibles de se complexer avec les substances organiques, notamment les AH et les AF ou les acides organiques simples. L’utilisation de l’ES-SM a permis de mettre en évidence que les SH sont un mélange de molécules organiques de masses molaires inférieures à celles observées expérimentalement, pouvant être considérées comme des supramolécules dont la cohésion pourrait être assurée par des liaisons hydrogène (Plancque et al., 2001).
Dans le cas de milieux très réducteurs, même faiblement concentrés en AH (dès 0,1 mg.L-1), la spéciation des An(III) et des Ln(III) est dominée par des complexes humiques. Au-delà de pH 7, la formation de complexes mixtes de type hydroxo-humates est évoquée (Artinger et al., 2002; Montavon et Grambow, 2003; Reiller et al., 2002).
Dans le cas des RN au degré d’oxydation +IV, bien que l’hydrolyse soit très forte, la complexation par les SH ne doit pas être sous-estimée. Les données obtenues sur Th(IV) montrent que dès de faibles concentrations en SH (de l’ordre du mg.L-1) et pour des pH neutres ou basiques, les RN(IV) seraient majoritairement associés aux SH, au lieu d’être présents sous forme d’espèces hydrolysées (Reiller et al., 2003).
Dans le cas où les RN seraient présents aux degrés d’oxydation plus élevés +V ou +VI, les AH sont susceptibles de réduire ces valences en +IV, adoptant le comportement décrit précédemment. Les groupements présumés responsables de ces processus rédox sont les hydroquinones (Reiller et al., 2003).
Influence de la masse microbienne
Les systèmes biologiques constituent un autre mode de transport dans le sol. Les RN peuvent interagir avec les structures cellulaires et extracellulaires des bactéries et perturber l’assimilation et l’utilisation d’éléments essentiels, altérant le métabolisme cellulaire. Ces interactions peuvent transformer les RN de leurs formes les plus communes (solide, adsorbée ou colloïdale) en différentes espèces biogéochimiques. Les acides organiques produits par les cellules peuvent solubiliser les RN et augmenter leur mobilité dans l’environnement ou leur transfert dans les cellules. Les polymères associés aux parois cellulaires qui comportent des groupements phosphates et carboxylates peuvent complexer les RN et former des biocolloïdes mobiles.
Les analyses des retombées de Nagasaki dans des sols de Nishiyama ont montré que 10 % du Pu est complexé par les AH, que 3 % a migré rapidement (8 cm.an-1) et que 1 % est complexé par les AF (Fujikawa et al., 1999). La transformation du Pu initialement déposé sous forme d’oxydes thermovitrifiés hautement insolubles, puis incorporé dans des complexes organiques mobilisables, est attribuée à l’action des micro-organismes.
L’ensemble de ces études vise à mieux comprendre le comportement des RN dans l’environnement, point capital pour prendre les décisions adéquates concernant le traitement des RN, en matière de stockage, de dépollution ou d’utilisation médicale. Un point commun à toutes ces études est la connaissance de la spéciation des RN. Nous allons donc détailler le principe de ces études.
Les études de spéciation
Utilisation d’analogues chimiques
La difficulté des mesures de spéciation des RN radioactifs à l’état de traces implique la simplification des systèmes par l’utilisation d’analogues chimiques non radioactifs. Ils permettent par ailleurs la mesure de quantités macroscopiques par différentes techniques pour prédire le comportement du RN radioactif à ces concentrations en supprimant le risque radiologique. Ils sont choisis pour leurs propriétés chimiques aussi proches que possibles (rédox, taille, etc.). Le tableau ci-dessous présente les analogues les plus fréquemment utilisés pour les études de spéciation de RN courants.
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Table des matières
INTRODUCTION
INTERACTIONS DES RADIONUCLEIDES AVEC LES MOLECULES D’INTERET BIOLOGIQUE
1. Les radionucléides
1.1. Présentation des lanthanides et des actinides
1.1.1. Définition
1.1.2. Les lanthanides
1.1.3. Les actinides
1.2. Le devenir des radionucléides
1.2.1. Dans le corps : la décorporation
1.2.2. Dans les sols
1.2.3. Influence de la masse microbienne
2. Les études de spéciation
2.1. Utilisation d’analogues chimiques
2.2. Modèles prédictifs
2.3. Choix des radionucléides
2.4. Complexité des systèmes – Enjeux des études de spéciation
2.4.1. Hydrolyse de Eu(III)
2.4.2. Hydrolyse de U(VI)
2.4.3. Cas particulier de la précipitation des espèces neutres
3. Les mécanismes d’entrée des métaux dans les cellules ; Application aux RN
3.1. Les cellules
3.2. Voies d’entrée des RN dans la cellule
3.2.1. Les protéines porteuses
3.2.2. Le transport actif
3.2.3. Les canaux ioniques
3.3. Les mécanismes connus d’entrée des RN
3.3.1. Un exemple concret : les similitudes Ln3+/Ca2+
3.3.2. Le calcium en milieu biologique
4. Molécules biologiques impliquées dans la prise en charge des métaux lourds
4.1. Les phospholipides
4.2. Les protéines séquestrices de métaux lourds
4.2.1. Les protéines
4.2.2. Les métallothionéines
4.2.3. Les phytochélatines
4.3. Choix des molécules à étudier
4.4. Etude des systèmes biologiques
4.4.1. Conditions « biologiques » et biochimie des RN
4.4.2. Biochimie des RN étudiés
4.4.3. Données disponibles
5. Conclusion
-IIMETHODES ANALYTIQUES : PRINCIPES ET OUTILS SPECTROMETRIQUES
1. La spectrofluorimétrie laser résolue en temps (SLRT)
1.1. Présentation de la technique
1.1.1. Principe de la fluorescence
1.1.2. La fluorescence
1.1.3. La résolution temporelle
1.1.4. Montage expérimental
1.2. Propriétés spectroscopiques de l’europium
1.2.1. Niveaux d’énergie
1.2.2. Transitions fluorescentes
1.2.3. Complexation en sphère interne/ sphère externe
1.2.4. Nombre d’hydratation
1.3. Fluorescence de l’uranium
1.4. Longueurs d’onde d’excitation
2. L’ElectroSpray Spectrométrie de Masse (ES-SM)
2.1. Les différents composants d’un spectromètre de masse
2.1.1. La source d’ionisation électrospray (ES) ou électronébulisation
2.1.2. L’analyseur (trappe ionique)
2.2. Identification des espèces : la spectrométrie de masse en tandem (SM/SM) ou fragmentation
2.3. Un outil pour la spéciation
2.4. Comparaison avec la SLRT
2.5. Mode opératoire
3. Autres techniques utilisées
3.1. La Spectroscopie d’Absorption des rayons X (SAX)
3.2. La spectrométrie de Résonance Magnétique Nucléaire (RMN)
3.2.1. RMN du 1H
3.2.2. RMN du 13C
3.3. Spectroscopie infrarouge à Transformée de Fourier en réflexion totale atténuée (ATR-IRTF)
3.4. La spectrophotométrie UV-Visible
4. Conclusion
ETUDES DES INTERACTIONS DES RN AVEC LES ACIDES AMINES
1. Chélation par les petites molécules
2. Conditions opératoires
3. Interactions avec la cystéine
3.1. Interaction de l’europium avec la cystéine par SLRT
3.2. Interaction de l’uranium avec la cystéine par SLRT
3.2.1. Résultats à pH 2
3.2.2. Résultats à pH 4
4. Interactions avec l’acide glutamique
5. Interactions avec l’histidine
5.1. Dosage Eu-His à pH 3 par SLRT
5.2. Effet du pH sur la complexation par l’histidine
5.3. Caractérisation des espèces par résolution temporelle à pH 7,7
6. Conclusion
ETUDES DES RN AVEC LES POLYPEPTIDES
1. Les polypeptides précurseurs des PC
1.1. Le glutathion réduit
1.2. Le glutathion oxydé
2. Interactions avec le GSH et le GSSG
2.1. Interactions avec le GSH
2.1.1. Etudes de Eu-GSH à pH 3 par SLRT
2.1.2. Etude de Eu-GSH à pH 3 par ES-SM
2.1.3. Eu-GSH pH 6 par SLRT
2.1.4. U-GSH pH 2 par SLRT
2.2. Interactions avec le glutathion oxydé (GSSG)
2.3. Conclusion
3. Caractérisation d’échantillons concentrés en RN et en ligand
3.1. Données structurales RN-Ligands biologiques dans la littérature
3.1.1. Données structurales « Ln-AA »
3.1.2. Données structurales « Uranyle-AA »
3.2. Echantillons analysés
3.3. RMN du 1H et du 13C
3.3.1. Cas du GSH pH 3
3.3.2. Cas du GSSG pH 3
3.4. Apport des mesures de spectrophotométrie UV-Visible
3.5. ATR-IRTF
3.5.1. Etude du GSH
3.5.2. Etude du GSSG
3.6. Spectroscopie d’Absorption des rayons X (EXAFS)
3.7. Conclusion
4. Interactions avec les phytochélatines
4.1. Présentation des molécules étudiées
4.2. Echantillons
4.3. Etude des PCn par SLRT
4.4. Etude des PCn par ES-SM
4.4.1. Caractérisation des solutions de PC (sans Eu)
4.4.2. Caractérisation des solutions de PC (avec Eu)
4.5. Conclusion
5. Interactions avec les métallothionéines
ETUDE DE L’IMPACT DE L’EUROPIUM SUR LES KERATINOCYTES HaCaT
1. Objectifs des études de contamination
1.1. Bibliographie
1.2. Choix des cellules
1.3. Choix des concentrations de contamination
2. Méthodologie
2.1. Solution mère de contamination
2.2. Milieux de culture contaminés
2.3. Culture des cellules
3. Analyses effectuées
3.1. Les culots cellulaires
3.1.1. Minéralisation par attaque acide
3.1.2. Minéralisation par calcination
3.1.3. Autre voie de minéralisation envisagée : la lyophilisation
3.2. Les échantillons « liquides »
3.2.1. Solutions de contamination
3.2.2. Surnageants de contamination
3.2.3. Solutions de rinçage
3.2.4. Solutions de trypsination
3.2.5. Témoins
4. Résultats
4.1. Bilan de matière
4.2. Mesure des quantités de Eu intégrées par les cellules
4.2.1. Quelques remarques
4.2.2. Analyses des concentrations dans les culots cellulaires
5. Conclusion
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
ANNEXES
Liste des abréviations
Annexe 1 : Notions de chimie des solutions et formalisme
Annexe 2 : Rappels sur les phénomènes d’inhibition de fluorescence
Annexe 3 : Exploitation du signal de fluorescence en SLRT
Annexe 5 : Composition du milieu de culture DMEM des cellules HaCaT
Annexe 6 : Estimation des incertitudes
Annexe 7 : Produits chimiques
Annexe 8 : Communications scientifiques
BIBLIOGRAPHIE
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