Depuis une vingtaine d’années, les problématiques de transport public en région parisienne sont devenues une préoccupation majeure, tant pour les pouvoirs publics que pour les usagers. Ces préoccupations s’inscrivent dans un contexte tendu : en regroupant à elle seule presque 20% de la population française, la région Ile-de France doit satisfaire une très forte demande de transport. Cette dernière est renforcée par une organisation spatiale caractérisée par une forte dissociation entre les lieux de domicile et de travail. Le développement d’importants bassins d’emploi dans des zones périphériques contribue aujourd’hui à une accélération de cette tendance. Pour les salariés franciliens, qui consacrent en moyenne environ deux heures quotidiennement à leurs déplacements domicile-travail, ainsi la qualité de l’offre de transport est un enjeu majeur.
Le développement des transports publics représente aussi un double enjeu écologique et de santé publique dans une région où la voiture d’une part comptabilise plus de la moitié des déplacements et d’autre part contribue de manière significative aux émissions de CO2 et à la dégradation de la qualité de l’air. Les transports publics, et tout particulièrement le ferroviaire, ont une empreinte écologique bien plus faible que la voiture individuelle, ce qui en fait des outils privilégiés pour relever les défis écologiques et sanitaires.
Le chemin de fer, matériel roulant et infrastructure
Définition – Chemin de fer
Le chemin de fer est un système de transport guidé destiné à l’acheminement de personnes ou de marchandises qui comporte :
• Une infrastructure qui comprend à minima :
· Un ensemble de rails en acier qui forme la voie ferrée et assurent la fonction de guidage des véhicules.
· Un ensemble de points d’arrêt, appelés gares ou stations, qui assurent la fonction d’interface d’échange entre deux véhicules ou entre un véhicule et l’extérieur du système.
• Un ensemble de véhicules de transport qui se déplace au moyen de roues en contact avec le rail .
Le matériel roulant
Les véhicules ferroviaires s’organisent en convois que l’on appelle des trains. Un train peut être composé d’une rame unique et parlera d’unité simple ou composé d’un attelage de plusieurs rames et on parlera d’unité multiple. Une rame peut être :
• Un attelage de voitures non motrices pour le transport de passagers avec une locomotive placée à une ou deux extrémités de la rame et qui assure la motorisation de la rame .
• Un attelage de wagons pour le transport des marchandises avec une locomotive placée à une ou deux extrémités de la rame et qui assure la motorisation de la rame.
• Un attelage d’éléments automoteurs qui sert pour le transport de passagers. Chaque élément étant moteur, il n’y a pas de locomotive mais une cabine de conduite aux deux extrémités de la rame.
Dans cette thèse, on se place dans le cadre du transport de passagers uniquement. On décrira souvent les trains sans rentrer dans le détail de leur composition mais en les résumant par un ensemble de caractéristiques physiques nécessaires et suffisantes pour décrire la dynamique de ce train avec une précision adaptée aux problématiques de cette thèse.
Modèle de la dynamique d’un train
Considérons un train comme un solide indéformable se déplaçant sur une voie qui fait un angle α avec l’horizontale . On fait le bilan des forces qui s’appliquent à celui ci dans un cas général . On distingue quatre forces :
• Le poids P qui est vertical et dirigé vers le bas et qui s’applique dans l’hypothèse d’un solide indéformable au centre de gravité du train.
• La réaction normale Rn du rail à l’écrasement du train. Cette force s’applique aux
points de contacts entre les roues et le rail perpendiculairement à celui-ci.
• Les frottements inefficaces F ine f f dus à la résistance de l’air, aux zones de glissements entre les roues et le rail et à la résistance à l’arrachement. Ces frottements sont indésirables.
• Les frottements efficaces F e f f qui transmettent les efforts de traction et de freinage au train par les surfaces où les roues (motrices pour les efforts de traction) adhèrent aux rails. Ces frottements sont utiles.
La force de frottement inefficace se décompose en plusieurs composantes :
• La force d’arrachement Far c’est la force minimale à fournir pour mettre le train en mouvement, une fois le train mobile cette force disparait.
• Les frottements induits par la courbure de la voie Fcour be qui dépendent de l’écartement des voies et du rayon de courbure.
• Les frottements permanents Fper m dans lesquels on inclut également la résistance au roulement bien que ce ne soit pas à proprement parler un phénomène de frottement.
• Les frottements dus aux défauts Fdéf aut. Cette force dépend des défauts présents sur la voie et les roues et de la vitesse du train.
• Les frottements aérodynamiques Fai r qui dépendent de la vitesse du train (on fait l’hypothèse de l’absence de vent).
Toutes ces composantes font intervenir des mécanismes complexes et sont en pratique déterminées de manière empirique ou semi-empirique. Les formules présentées dans le formulaire 1.1 sont issues de ALLENBACH et collab. [2008]; LAMALLE [1947], les changements d’unité demandent quelques calculs d’adaptations. Il faut retenir davantage l’ordre de grandeur de ces coefficients qu’une valeur exacte. D’une part parce que ces coefficients varient beaucoup en fonction de la diversité des situations rencontrées, d’autre part parce que les formules présentées sont elles aussi imprécises. Il est important de noter que ces ordres de grandeurs correspondent à des roues en acier et qu’un train sur pneumatiques n’aurait pas le même comportement. Les valeurs numériques des paramètres fournis correspondent aux ordres de grandeurs observés pour un train en unité simple sur le réseau régional d’Ile-de-France.
Conséquences de la faible adhérence
Les phénomènes de frottement et de résistance au roulement dus aux déformations qui ont lieu entre la roue et le rail sont responsables de l’adhérence du train mais occasionnent également des pertes d’énergie. Il n’existe pas de matériau qui assure à la fois une adhérence forte et des pertes d’énergie faibles. On ne considérera que le cas où les roues sont en acier (comme le rail). Dans ce cas-là l’adhérence est alors assez faible ce qui limite l’accélération et le freinage. En revanche, un faible coefficient de friction et une grande raideur de l’acier assurent une dissipation d’énergie faible. À titre de comparaison, dans le cas des roues dotées de pneumatiques, le coefficient de friction est quatre fois plus grand et la résistance au roulement vingt fois plus grande que dans le cas de roues en acier.
Feff peut évoluer entre ses deux limites, maximum de traction et minimum de freinage. En pratique, on ne s’approche pas trop des limites d’adhérence (partie constante de ces courbes) et on garde une bonne marge de sécurité pour éviter les phénomènes de patinage et d’enrayage. En effet, le coefficient de frottement acier acier peut varier par exemple selon les conditions météorologiques ou l’état des surfaces en contact.
Pour tracer Fine ff on n’a pas tenu compte de Far qui est nul si la vitesse n’est pas nulle et qui influence donc peu la dynamique des trains. Concernant Fcour be on a tenu compte du fait que les courbes à petit rayon de courbure peuvent seulement être parcourues à faible vitesse. À titre d’illustration on a réglé la dépendance entre la vitesse et le rayon de courbure en prenant : rc = 150m pour v = 0m.s−1 et rc = 300m pour v = 30m.s−1 . Ces valeurs sont les limites minimum que peut prendre le rayon de courbure à ces vitesses pour des raisons de sécurité . Par conséquent, la force Fine f f que l’on a représentée est seulement une possibilité parmi d’autres. Ce choix correspond à ce que Fine f f pourrait valoir au maximum en valeur absolue. Ici la diminution de Fcour be au cours du temps l’emporte sur l’augmentation d’autres forces et Fine f f tend donc à diminuer avec la vitesse .
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Table des matières
Introduction
1 Éléments de trafic – problématique
1.1 Le chemin de fer, matériel roulant et infrastructure
1.1.1 Le matériel roulant
1.1.2 L’infrastructure
1.2 Le chemin de fer : gestion des circulations
1.2.1 Planification : gestion à l’horaire ou à la fréquence
1.2.2 Les sillons
1.2.3 Débit et capacité
1.2.4 Construction du plan de transport et robustesse
1.2.5 Effondrement du plan de transport
1.3 Le trafic routier et la congestion
1.3.1 Variables individuelles-variables de flux
1.3.2 Relation entre vitesse, concentration et débit du flux
1.3.3 Diagramme fondamental
1.3.4 Le modèle LWR
1.3.5 Congestion-définitions
1.3.6 Comparaison entre le trafic ferroviaire et le trafic routier
1.4 Problématique
2 Modélisation microscopique stochastique sans gare
2.1 État de l’art de la modélisation stochastique du déplacement des trains
2.1.1 Historique de la modélisation stochastique du déplacement des trains
2.2 Construction du modèle
2.2.1 L’infrastructure
2.2.2 Le matériel roulant
2.2.3 Les forces décrivant le comportement d’un train
2.2.4 Implémentation numérique du modèle
2.3 Apparition de la congestion
2.3.1 Organisation des simulations
2.3.2 Compétiton entre la force aléatoire et la force horaire
2.3.3 Résultats
2.4 Analyse du modèle et des résultats par des processus de Markov
2.4.1 Processus de Markov
2.4.2 Les distributions de type phase
2.4.3 Lien avec le modèle
2.5 Quantification de la congestion
2.5.1 Organisation des simulations
2.5.2 Dynamique de la vitesse instantanée moyenné sur les trains
2.5.3 Diagramme Fondamental de Ligne Ferroviaire
3 Prise en compte des gares
3.1 Évolution du modèle pour prendre en compte les gares
3.1.1 L’infrastructure et le plan de transport
3.1.2 Implémentation numérique du modèle
3.2 Apparition de la congestion
3.2.1 Organisation des simulations
3.2.2 Résultats
3.3 Quantification de la congestion
3.3.1 Organisation des simulations
3.3.2 Dynamique de la vitesse moyenne instantanée
3.3.3 Diagramme Fondamental de Ligne Ferroviaire
3.4 Conclusions sur le modèle développé
3.4.1 Aspects statiques
3.4.2 Aspects dynamiques
4 Confrontation avec les données
4.1 Données
4.2 Impossibilité d’un diagramme fondamental local
4.3 Vers un diagramme fondamental de ligne ferroviaire
4.3.1 Principes du diagramme fondamental de réseau en routier
4.3.2 Méthode de construction du DFLF
4.3.3 Résultats et analyses
4.4 Confrontation des données avec le modèle
4.4.1 Diagramme fondamental de ligne ferroviaire moyenné : cas réel
4.4.2 Mise en perspective avec la modélisation
4.5 Discussion et conclusion
Conclusion