Au cours de ces dernières années, les progrès dans le domaine de l‟observation astrophysique ont permis la détection d’un grand nombre de molécules dans le milieu interstellaire (ISM) et dans les enveloppes circumstellaires. A ce jour, plus de 160 molécules ont été détectées et 1/3 d’entre elles contiennent plus de 6 atomes [1]. La plupart des identifications moléculaires ont été accomplies en enregistrant leur spectres et en les comparant aux observations dans les domaines micro-ondes, millimétriques ou submillimétriques. Aujourd’hui, les télescopes comme l‟Atacama Large Millimeter Array (ALMA) et l’observatoire stratosphérique pour l‟astronomie infrarouge (SOFIA) sont opérationnels. Ils fournissent beaucoup de données à analyser et à interpréter. On peut s’attendre, dans un proche avenir, à la détection de molécules encore plus complexes grâce à ALMA et SOFIA.
Les molécules observées peuvent être utilisées comme indicateurs sensibles pour sonder les processus astrophysiques tels que l’accumulation de la matière dans les jeunes étoiles ou des jets de plasma. Les espèces chimiques complexes nous donnent un aperçu de la relation entre les nuages moléculaires et la formation des systèmes planétaires contenus dans ces nuages. L’utilité des molécules est liée :
● à leurs spectres qui sont très instructifs (leur spectroscopie).
● à la constitution de leur réseaux chimiques (leurs réactivités).
Ces deux domaines scientifiques sont intimement liés et la compréhension des phénomènes astrophysiques provient de leur interactions étroites et mutuelles. La détection des espèces moléculaires dans l’espace par les télescopes micro-ondes (W) et infrarouge (IR) aurait été impossible sans les études qui leur sont consacrées en laboratoire. Ces études traitent la spectroscopie rotationnelle et rovibrationnelle à haute résolution, aussi bien du point de vue théorique qu‟expérimental. La production de ces données spectroscopiques de haute résolution dans le domaine spectral est indispensable pour une interprétation des observations astrophysiques. En règle générale, les données de laboratoire sont transférées à des bases de données afin de les rendre accessibles à la communauté scientifique on peut citer par exemple les bases de données dans les domaines suivantes: W, IR et UV (SPATALOG, colone database for molecular spectroscopy…) .
Néanmoins, de nombreuses questions se posent quant à la formation de molécules organiques complexes et quant à leur évolution chimique. En effet des modèles chimiques sont développés afin de simuler et de comprendre leur chimie interstellaire en phase gazeuse et en phase condensée [8]. Dans le cadre de ces modèles, les abondances moléculaires sont calculées en fonction de leur taux de formation et de destruction par des réactions chimiques variées telle que la photodissociation. Les abondances sont calculées en fonction du temps et des conditions physiques. Par conséquent, elles peuvent être utilisées pour décrire l’état actuel d’un objet astrophysique, son histoire et son devenir. Avec l’arrivée des nouveaux télescopes mentionnés ci-dessus, la résolution spatiale des mesures à distance se raffine de mieux en mieux et conduit à l‟amélioration des modèles astrochimiques. Il est à noter que ces modèles sont encore incomplets en raison des connaissances insuffisantes des processus physicochimiques qui en découlent. En outre, la plupart des objets astrophysiques ne sont pas à l‟équilibre thermodynamique et leur état physique peut changer en fonction du temps [9]. La fiabilité et l’utilité de ces modèles dépendent directement de la qualité des résultats des bases de données utilisées. Ces données comprennent par exemple, les coefficients des taux de réactions bimoléculaires et les propriétés photophysiques fondamentales qui doivent être déterminées en laboratoire. Ces dernières comprennent les sections efficaces de photoabsorption et de photoionisation (σabs et σion) en fonction de la longueur d’onde. A partir de ces deux sections efficaces le rendement quantique d’ionisation (γion) peut être déterminé. En ce qui concerne l’évolution photochimique, les molécules ont besoin de rapports de branchement (BRS) de photoréactions élémentaires. Les rapports de branchement (BRs) se situent entre 0 et 1 et permettent d‟identifier l’importance relative des différentes voies de réaction photochimique. Les voies de réaction des molécules (grandes et moyennes > 5 atomes) jouent un rôle très important dans la chimie interstellaire.
Résolution de l’équation de Schrödinger électronique
Au cours de ce travail nous avons utilisé différentes méthodes de calculs basées sur l‟approximation de Born-Oppenheimer pour résoudre l‟équation de Schrödinger électronique pour chaque position de noyaux. Le problème électronique est un problème à N corps. En effet, il est impossible de traiter séparément les différents électrons à cause des termes 1/rij .
Méthode Hartree-Fock ou SCF (Self-Consistent-Field)
La méthode Hartree-Fock (HF) (ou encore approximation du champ auto-cohérent (SCF)) [4,5] est une méthode variationnelle. Elle permet de déterminer les orbitales et les énergies associées d’un atome ou d’une molécule, en tenant compte de manière moyenne des interactions électrostatiques entre les électrons. Elle est le point de départ pour la plupart des calculs ab initio actuels [6,7]. L‟approche Hartree-Fock se base sur l‟approximation du modèle à électrons indépendants. On peut séparer les variables en supposant que chaque électron se meut dans le champ moyen des autres électrons.
Limites de la méthode HF et corrélation électronique
La méthode Hartree-Fock peut décrire 99% de l’énergie totale exacte du système. Cependant, elle sous-estime l’énergie d’interaction entre les électrons puisqu’elle remplace l’interaction réelle inter-électronique par une interaction moyenne des électrons où le mouvement d’un électron particulier ne dépend pas explicitement de celui des autres. Le 1% de l’énergie totale restante correspond à l‟énergie de corrélation électronique.
Certes, le modèle HF est très utile pour prédire certaines propriétés atomiques ou moléculaires, mais les méthodes post Hartree-Fock sont nécessaires pour retrouver l‟énergie de corrélation. En effet un traitement plus poussé de la corrélation électronique peut se révéler nécessaire pour l‟obtention de certaines propriétés physicochimiques des atomes et des molécules et de leur réactivités. La détermination recherche des fonctions d‟onde est donc rendue plus compliquée.
La corrélation électronique comporte deux contributions :
• La corrélation statique : Elle correspond à la considération du critère multiconfigurationnel de la fonction d‟onde pour obtenir une description qualitativement correcte de la structure électronique du système. Elle est importante par exemple lorsque la fonction d‟onde du système contient au moins deux déterminants. Elle se présente ainsi lorsque les orbitales sont dégénérées. Cette forme de corrélation est récupérable à longue portée et elle se corrige facilement car les états quasi-dégénérés sont très peu nombreux. Ceci est possible dans le cas des états électroniques à couches ouvertes de bas spin ou lorsque plusieurs orbitales sont dégénérées.
• La corrélation dynamique : Il s‟agit d‟un terme qui tient compte de l‟interaction instantané des électrons. La probabilité de trouver deux électrons au même endroit est déterminée par les déterminants.
Plusieurs méthodes ont été proposées afin de tenir compte de la corrélation électronique :
– Les méthodes de perturbation : Møller-Plesset d’ordre 2 (MP2)…
– Les méthodes variationnelles comme l‟interaction de configuration (CI), la méthode du champ auto-cohérent multiconfigurationnelle (MCSCF), la méthode d‟interaction de configuration multi référence (MRCI). Ces méthodes offrent l‟avantage de pouvoir traiter les états excités.
– Les méthodes des clusters couplés (CC).
– Les méthodes des clusters couplés explicitement corrélées CCSD(T)-F12.
Toutes les méthodes appelées post Hartree-Fock sont basées sur une fonction d‟onde HF de référence, c‟est-à-dire un seul déterminant de Slater. Celui-ci constitue alors une fonction d‟onde qualitative qui peut être améliorée par la suite.
Méthode Multi-Configuration Self-Consistent- Field (MCSCF)
La méthode Multi-Configurational Self-Consistent Field (MCSCF) [21] est une méthode d‟interaction de configuration dans laquelle les coefficients de la combinaison linéaire des déterminants et les orbitales moléculaires sont optimisés variationnellement. Cette méthode autorise la relaxation des orbitales moléculaires. Ceci améliore la description obtenue par la méthode Hartree-Fock. Néanmoins, il faut choisir judicieusement les configurations à inclure, ce qui revient à définir un espace actif. L‟espace actif regroupe généralement les orbitales moléculaires dans lesquelles des excitations électroniques peuvent avoir lieu. Cet ensemble inclut les orbitales occupées les plus hautes en énergie ainsi que les orbitales les plus basses inoccupées.
|
Table des matières
Introduction générale
Références
PARTIE A: Méthodologie
Chapitre 1: Théorie
1.1 Equation de Schrödinger
1.2 Approximation de Born-Oppenheimer
1.3 Approximation adiabatique
1.4 Résolution de l‟équation de Schrödinger électronique
1.4.1 Méthode Hartree-Fock ou SCF (Self-Consistent-Field)
1.4.2 Limites de la méthode HF et corrélation électronique
1.4.3 Méthode de perturbation Møller-Plesset d’ordre 2 (MP2)
1.4.4 La méthode des clusters couplés (en anglais Coupled Clusters)
1.4.5 Méthode des clusters couplés explicitement corrélée (R)CCSD(T)–F12
1.4.6 Méthodes d‟interaction de configuration (CI)
1.4.7 Méthode Multi-Configuration Self-Consistent- Field (MCSCF)
1.4.8 Méthode Multi-Reference Configuration Interaction (MRCI)
1.5 Les bases d‟orbitales atomiques
1.5.1 Fonctions de bases atomiques
1.5.2 Extrapolation à la limite des bases complètes
1.6 Résolution de l‟équation de Schrödinger nucléaire
1.6.1 Hamiltonien de rotation-vibration
1.6.2 La théorie de perturbation vibrationnelle d‟ordre 2 (VPT2)
1.6.2.1 Hamiltonien Vibrationnel
1.6.2.2 Hamiltonien Rotationnel
1.7 Programmes de calculs utilisés
1.7.1 Molpro
1.7.2 Gaussian
1.7.3 CFOUR
Conclusion
Références chapitre 1
Chapitre 2: Partie expérimentale
2.1 La ligne de lumière DESIRS
2.2 Le spectromètre de coïncidence double imageur électrons/ions : DELICIOUS 3
2.3 Introduction de l‟échantillon dans le spectromètre DELECIOUS3
2.4 Spectromètre de masse à temps de vol (Time-of-flight, TOF)
2.5 Principe de Franck-Condon
2.6 Principe de la technique SPES
Références chapitre 2
PARTIE B: Résultats
Chapitre 3: Etude de l‟acétyle cyanide neutre (AC)
3.1 Travaux antérieurs
3.2 Calculs des structures d‟AC neutre et de ses tautomères
3.3 Diagramme d‟énergie potentielle d‟AC
3.4 Spectroscopie IR
Références chapitre 3
Chapitre 4: Etude de l‟ion d‟acétylee cyanide (AC+)
4.1 Calculs des structures de l‟ion AC+ et de ses tautomères
4.2 Spectroscopie IR
4.3 Spectre SPES (Slow PhotoElectron Spectroscopy) d‟AC
4.4 Energie d‟ionisation (EI)
4.5 Réactivité
4.5.1 Spectres de masse à temps de vol (Time of flight TOF)
4.5.2 Spectres de photoionisation PEPICO
4.5.3 Seuils de fragmentation d‟AC+
Références chapitre 4
Conclusion générale