Au cours de la dernière décennie, les techniques expérimentales et théoriques ont fortement évolué permettant la caractérisation et la compréhension à l’échelle atomique des processus physico chimiques intervenant aux interfaces (e.g. solide – gaz), dans des phases diluées comme les jets atomiques et moléculaires et la dynamique ultrarapide sous l’effet des impulsions laser femto – seconde. Les travaux de thèse présentés dans ce manuscrit sont au cœur de cette évolution. Les applications sont par exemple dans le domaine de la catalyse, la solvatation, le stockage, la séparation sélective et la séquestration des gaz. Le point crucial dans ce type de problématique est la description correcte de l’interaction entre les deux entités : molécule/atome – molécule ; molécule – surface ; molécule – cavité, … Ces systèmes sont faiblement liés, leurs interactions mutuelles sont de nature Van der Waals. De façon générale, la détermination précise de ces potentiels à longue portée représente encore un challenge en chimie quantique en particulier pour des systèmes moléculaires électroniquement excités. Néanmoins, les développements méthodologiques récents en chimie quantique et la forte montée en puissance des performances des ressources informatiques permettent d’y apporter des réponses satisfaisantes. Les études présentées dans cette thèse se concentrent donc sur l’application et la validation de ces nouvelles méthodologies pour le calcul des potentiels d’interaction entre une entité avec un agrégat ou une surface.
Equation de Schrödinger
En chimie quantique, un système moléculaire est décrit par la fonction d’onde totale Ψ(R,r) donnée par l’équation de Schrödinger [1] stationnaire :
HΨ(R,r) = E Ψ(R,r) (1.1)
Où R et r représentent respectivement l’ensemble des coordonnées des noyaux et des électrons, E est l’énergie totale du système et H l’hamiltonien total non-relativiste indépendant du temps du système.
Cet hamiltonien total non-relativiste se décompose de la façon suivante (en unités atomiques : e = ћ = me = 4πε0 = 1) :
H(R,r) = TN(R) + Te(r) + VNN(R) + VNe(R,r) + Vee(r) (1.2)
L’approximation de Born-Oppenheimer [2] a été avancée en 1927 par Max Born et Robert Oppenheimer. Elle consiste à séparer les mouvements des noyaux et ceux des électrons. Elle se base sur le fait que la masse du noyau est beaucoup plus grande que celle d’un électron (mp/me ≈ 1836), alors que les forces agissant sur ces particules sont du même ordre. Les électrons vont donc s’adapter instantanément à tout changement de positions des noyaux. Les mouvements de chaque particule pourront ainsi être étudiés séparément. L’hamiltonien total du système peut alors être décomposé comme la somme d’un hamiltonien électronique He et un opérateur énergie cinétique pour le noyau TN :
H = He + TN (1.3)
avec :
He = Te + Vee + VNe + VNN (1.4)
Le terme VNN ne dépend que de la position des noyaux et joue donc le rôle de constante dans cette équation.
Programmes de calcul utilisés
Molpro
MOLPRO est un ensemble de programmes ab initio effectuant des calculs de structures électroniques moléculaires, conçus et mis en ligne par H.-J. Werner et P. J. Knowles [4]. L’accent est mis sur des calculs de grande précision : que ce soit pour des systèmes multi configurationels, ou pour le traitement de la corrélation électronique à l’aide de méthodes telles que les clusters couplés (ou CCSD). Récemment développées, les méthodes explicitement corrélées (CCSD – F12) rapportent des résultats de meilleure précision avec des ensembles de base de petite taille, réduisant ainsi l’effort informatique pour les calculs de cette qualité par deux ordres de grandeur.
Grâce à l’utilisation de méthodes de corrélation électroniques locales, qui réduisent significativement l’augmentation du coût informatique avec la taille moléculaire, des calculs ab initio peuvent être exécutés pour des molécules beaucoup plus grandes qu’avec la plupart des autres programmes. Ces méthodes ont récemment été augmentées par des termes explicitement corrélés, qui réduisent fortement d’une part les erreurs de troncature d’ensemble de base, et d’autre part, les erreurs des approximations locales.
Gaussian
GAUSSIAN [5] est un logiciel de chimie quantique, créé à l’origine par John Pople et sorti en 1970 (Gaussian 70). Il a été depuis plusieurs fois mis à jour. Le nom provient de l’utilisation par Pople d’orbitales gaussiennes pour accélérer le calcul par rapport aux logiciels utilisant des orbitales de Slater. Ceci a facilité le développement de la chimie quantique. Gaussian 09 est la dernière version de la série. Il fournit des capacités de pointe pour la modélisation de structure électronique.
Ce programme peut effectuer des calculs selon plusieurs méthodes, comme Hartree-Fock, les méthodes post-Hartree-Fock (Møller-Plesset, coupled-clusters…), ou les fonctionnelles de la DFT (les fonctionnelles d’échange comme PBE, celles de corrélation comme LYP ou les fonctionnelles hybrides comme B3LYP). Gaussian est devenu rapidement un programme de structure électronique très populaire et largement utilisé.
CP2K
CP2K [6] est un programme permettant d’exécuter des simulations atomistiques et moléculaires de systèmes solides, liquides, gazeux, biologiques et les interfaces. Il fournit un cadre général pour des méthodes différentes comme par exemple, la théorie de la fonctionnelle de densité (DFT) utilisant des gaussiennes mixtes et une approche en ondes planes (GPW) ou une partie classique avec des potentiels des pseudo-potentiels. CP2K est librement disponible conformément à la licence GPL. Il est écrit en Fortran 95 et peut être exécuté efficacement en parallèle. Ce programme fournit des méthodes de pointe pour des simulations ab initio. Les sources sont librement disponibles et régulièrement mises à jour (http://sourceforge.net/p/cp2k/code/13023/tree/trunk/cp2k/src/). Il est donc facile de faire des modifications jugées nécessaire.
Aucune sortie officielle n’a encore été faite. Des changements substantiels, des améliorations et des corrections d’erreur sont donc faits à intervalle de temps irrégulier. Ce programme est basé sur un autre projet de développement pour le calcul ab initio nommé Quickstep.
Quickstep :
Quickstep est un code informatique librement disponible pour exécuter des calculs DFT précis et efficaces sur des systèmes grands, complexes comme par exemple des liquides, des cristaux, des protéines ou des interfaces.
Les calculs de propriétés statiques (comme des spectres calculés avec la méthode de la fonctionnelle de la densité dépendante du temps ou les propriétés dérivées de l’énergie totale) et des propriétés dynamiques (par exemple la diffusion, basée sur la dynamique moléculaire) sont possibles. Quickstep est basé sur une approche mélangeant gaussiennes et ondes planes (GPW) ainsi que son extension augmentée (GAPW). Le premier est utilisé pour représenter les fonctions d’onde (par exemple la matrice Kohn-Sham), tandis que la version étendue est utilisée pour représenter la densité électronique. Les avantages sont :
– Pour une représentation compacte de la fonction d’onde, peu de fonctions de base par atome sont nécessaires en comparaison des représentations en ondes planes.
– Les représentations de la matrice Kohn-Sham et de la matrice de la densité deviennent clairsemées lorsque la taille du système croit, ce qui permet de réduire l’optimisation de la matrice de la densité par des calculs plus linéaires.
– Les calculs linéaires de l’énergie Kohn-Sham et de la matrice sont aisément réalisés en utilisant la Transformée de Fourier.
La méthode « orbital transformation » (OT) est un arrangement de minimisation directe qui tient compte de l’optimisation de fonction d’onde efficace. Elle est significativement plus rapide que la diagonalisation par les méthodes classiques, particulièrement pour de grands systèmes avec de grands ensembles de base. Bien que le temps de calcul augmente significativement avec la taille de système, on peut étudier un système moléculaire comportant approximativement 1000 atomes assez facilement. Des simulations de dynamique moléculaires ab initio basées sur l’approche BornOppenheimer peuvent être exécutées et sont plus efficaces en utilisant un schéma d’extrapolation de la matrice de la densité.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 Approche théorique
I) Equation de Schrödinger
II) Programmes de calcul utilisés
a) Molpro
b) Gaussian
c) CP2K
III) Les bases atomiques
IV) La méthode Hartree-Fock
V) Les méthodes post-Hartree-Fock
a) Les méthodes d’interaction de configuration
1)La méthode Multi-Configurational Self-Consistent Field (MCSCF)
2) Internally Contracted Multi-Reference Configuration Interaction (MRCI)
b) Méthode perturbative : Møller-Plesset d’ordre 2 (MP2)
c) La méthode des clusters couplés (coupled clusters)
d) La méthode des clusters couplés explicitement corrélée (R)CCSD(T)–F12
VI) Théorie de la fonctionnelle de la densité
VII) Conclusion
Bibliographie Chapitre 1
Chapitre 2 Etude systématique du DABCO en interaction avec un atome de gaz rare
I) Introduction
II) Détails des calculs
III) Etude systématique sur les potentiels d’interaction des complexes DABCO-Rg (Rg = He, Ne, Ar et Kr)
IV) Structures optimisées de DABCO – Rg et de DABCO+ – Rg (où Rg = He, Ne, Ar et Kr)
V) Discussion
VI) Conclusion
Bibliographie Chapitre 2
Chapitre 3 Etude des états électroniques et des structures des complexes DABCO – Arn
I) Introduction
II) Détails des calculs
III) Structures du DABCO0,+1 – Arn (pour n = 1 – 4)
IV) Etats électroniques excités du DABCO – Arn (pour n = 1, 2 et 3)
V) Conclusion
Bibliographie Chapitre 3
Chapitre 4 Etude microscopique de l’interaction du CO2 avec une molécule d’imidazole et les complexes imidazole – or
I) Introduction
II) Détails des calculs
III) Etude préliminaire sur la ZIF
IV) Adsorption de l’imidazole sur une surface d’or
V) Etude périodique de l’imidazole adsorbée sur une surface d’or
VI) Conclusion
Bibliographie Chapitre 4
Conclusion et perspectives
Annexe