Etude structurale de métalloprotéines à centres [2Fe-2S]

Les ferrédoxines 

Les ferrédoxines sont des métalloprotéines contenant des atomes de fer et de soufre inorganique organisés sous la forme d’un ou plusieurs groupes prosthétiques. Dans ce cas, le groupe prosthétique est appelé centre à fer-soufre (Fe-S) et est lié à la chaine polypeptidique par des liaisons covalentes. Les ferrédoxines sont de petites protéines solubles ubiquitaires qui, grâce à leur propriété de transfert d’électrons, participent à une grande variété de réactions redox biologiques ; elles interviennent dans des processus essentiels à la vie cellulaire, tels que la fixation de l’azote et la photosynthèse (Matsubara et al., 1980).  Les ferrédoxines peuvent être classées en fonction de la nature du centre Fe-S qu’elles contiennent ; on trouve principalement trois types de centre Fe-S, les centres [2Fe-2S], [3Fe4F] et [4Fe-4S]. Dans la majorité des cas, chaque atome de fer est coordonné à deux des atomes de soufre inorganique et à deux atomes de soufre provenant de la chaine latérale de cysteines . Dans le cas particulier des ferrédoxines à centre [2Fe-2S], un des atomes de fer peut être lié par l’atome d’azote de deux histidines, le centre Fe-S étant alors appelé centre [2Fe-2S] de type Rieske ([2Fe-2S]R ). Le centre Rieske est couramment retrouvé dans les dioxygénases microbiennes impliquées dans la dégradation des composés aromatiques, ainsi que dans les chaînes de transport d’électrons associées à la photosynthèse dans les chloroplastes et à la respiration dans les mitochondries.

Les ferrédoxines de type [2Fe-2S]

Les ferrédoxines (Fd) contenant un centre [2Fe-2S] lié à la chaîne polypeptidique par l’intermédiaire de quatre cystéines appartiennent majoritairement à deux familles, les ferrédoxines de type plante et les ferrédoxines de type vertébré (comme par exemple l’adrénodoxine). Cette classification est basée sur des critères structuraux et des propriétés spectroscopiques distinctives. Le centre Fe-S des Fds de type plante donne un signal rhombique en RPE, alors que celui des Fds de type vertébré est plutôt de symétrie axiale. Les deux familles de Fds se distinguent également par l’écartement des cystéines ligands du centre Fe-S dans la séquence. On retrouve un consensus de type (CX4CX2CXnC) chez les Fd de plantes et (CX5CX2CXnC) chez les Fds de vertébrés (Müller et al., 1999).

Propriétés structurales 

Les ferrédoxines sont des protéines de petit poids moléculaire, environ 12 kDa (une centaine d’acides aminés) constituées de deux domaines : un domaine central où se situe le centre Fe-S et un domaine d’interaction. Bien que les ferrédoxines de type plante et de type vertébré aient relativement peu de similitude de séquence (20 % d’identités tout au plus), le repliement de la chaîne polypeptidique des deux classes de Fds est très semblable.

Chez toutes les ferrédoxines à centre [2Fe-2S], un motif structural absolument conservé a été observé, composé d’un feuillet β à 4 brins flanqué d’une hélice α (Müller et al., 1999). Ce motif constitue l’essentiel du domaine central dans lequel se trouve le centre Fe-S, protégé du solvant par une boucle qui le recouvre. L’accessibilité du centre [2Fe-2S] au solvant diffère selon le type de Fd, car chez les ferrédoxines de type plante, il existe un canal contenant des molécules d’eau qui connecte le centre Fe-S au solvant (Morales et al., 1999). Un tel canal n’existe pas dans l’adrénodoxine (Müller et al., 1999). Les ferrédoxines ont une charge globalement négative, du fait de la présence d’acides aminés acides en excès dans la séquence. Ces charges négatives ne sont pas uniformément réparties, de sorte que les fds ont souvent un caractère dipolaire marqué. Cette propriété, ainsi que la présence de charges négatives à la surface de la molécule, notamment au niveau du domaine d’interaction, contribuent probablement à la reconnaissance et à l’interaction des Fds avec leurs partenaires physiologiques. Il a été proposé que ces charges permettent d’orienter les Fds avant qu’elles ne s’associent à leur partenaire en un complexe où le transfert des électrons est optimisé (Müller et al., 1999).

Fonction

Le centre [2Fe-2S] des ferrédoxines oscille entre deux états d’oxydation dans lesquels les atomes de fer sont soit tous les deux ferriques (état oxydé), soit l’un ferrique, l’autre ferreux (état réduit). Le potentiel de demi-réduction des Fds de type plante est relativement bas (compris entre – 0.3 et – 0.5 V vs NHE). Pour la plupart, ces ferrédoxines servent d’échangeurs d’électrons entre le photosystème I et des oxydoréductases impliquées dans le métabolisme de la plante, comme la Fd-NADP réductase. Dans les cyanobactéries du genre Anabaena, des ferrédoxines à centre [2Fe-2S] participent à l’assimilation de l’azote atmosphérique dans des cellules différenciées appelées hétérocystes. La ferrédoxine des hétérocystes sert de donneur d’électrons à la nitrogénase, l’enzyme qui réduit l’azote en ammoniac (Jacobson et al., 1993).

Les Fds de type vertébré ont un potentiel redox voisin de – 0.3 V et fonctionnent souvent comme transporteurs d’électrons entre une NAD(P)H-oxydoréductase et une monooxygénase de type cytochrome P450 (Müller et al., 1998). Toutefois, certaines ferrédoxines de cette catégorie seraient impliquées dans la biosynthèse des centres Fe-S, comme par exemple la ferrédoxine Fdx de Escherichia coli (Kakuta et al., 2001). La biosynthèse des centres Fe-S, dont on ne connaissait presque rien il y a 15 ans, a connu un fort regain d’intérêt ces dernières années.

Rôle de l’adrénodoxine chez les mammifères 

Chez les mammifères, l’adrénodoxine est localisée dans les mitochondries du cortex des glandes surrénales et participe à la synthèse d’hormones stéroïdes (Grinberg et al., 2000). Elle transfère les électrons d’une NADPH-réductase à une enzyme de la famille des cytochromes P450 (CYP450). Les CYP450 sont des enzymes contenant un groupe héminique, qui catalysent des réactions de monohydroxylation très variées. Les CYP450 associés à l’adrénodoxine oxydent des substrats polycycliques, comme le cholestérol en prégnénolone, et servent donc à la biosynthèse des hormones stéroïdes. Le fonctionnement du CYP450 requiert une source d’électrons alimentée par deux protéines spécifiques, une NADPH oxydoréductase et l’adrénodoxine . Les électrons provenant de l’oxydation du NADPH, et transférés au CYP450 par l’intermédiaire de l’adrénodoxine, permettent l’activation de l’oxygène moléculaire nécessaire à la catalyse. Ce système enzymatique a fait l’objet de nombreuses études et une revue détaillée a fait le point des connaissances sur les aspects moléculaires et structuraux de son fonctionnement (Grinberg et al., 2000).

Chez les bactéries, il existe des Fds associées à des CYP450, mais dans ce cas, les oxygénases font partie de voies cataboliques permettant la décomposition oxydative de certains substrats carbonés. Chez Pseudomonas putida, par exemple, le CYP450cam est une enzyme soluble qui oxyde le camphre et permet aux bactéries d’utiliser ce composé comme substrat de croissance. Le CYP450cam est associé à une réductase et à une ferrédoxine à centre [2Fe-2S], appelée putidarédoxine dont la structure est voisine de celle de l’adrénodoxine (Sevrioukova et al., 2003). Le principe de fonctionnement de ce système enzymatique est comparable à celui décrit ci-dessus pour l’adrénodoxine.

Rôle des ferrédoxines dans la photosynthèse 

La photosynthèse permet aux plantes et aux cyanobactéries de convertir l’énergie lumineuse en énergie chimique utilisable pour synthétiser le glucose à partir de l’eau et du gaz carbonique. Au cours de ce processus, les ferrédoxines à centre [2Fe-2S] jouent un rôle essentiel en transférant les électrons à bas potentiel produits par le photosystème I (PSI) à un certain nombre d’oxydoréductases, comme la ferrédoxine réductase (FNR) qui régénère le NADPH . La réaction a lieu dans les thylacoïdes des chloroplastes.

Chez les plantes, les Fds participent aussi à la réduction des nitrates, ainsi qu’à la synthèse d’acides aminés (Neuhaus and Emes, 2000).

Biosynthèse des centres Fe-S chez les bactéries

Nous l’avons vu, les ferrédoxines à centre [2Fe-2S] sont des protéines essentielles au fonctionnement normal des cellules vivantes. Il en est de même pour de nombreuses enzymes contenant des centres Fe-S, comme par exemple celles qui font partie de la chaîne respiratoire des mitochondries. In vitro, le centre [2Fe-2S] se forme spontanément par incubation de fer ferrique et de soufre inorganique en conditions réductrices avec une apoferrédoxine (Malkin and Rabinowitz, 1966). In vivo, la biosynthèse des centres Fe-S dans les protéines fait appel à une machinerie complexe, faisant intervenir plusieurs protéines spécifiques. Compte tenu de la toxicité des ions Fe2+ et S2-, la synthèse des centres Fe-S in vivo requiert des transporteurs et des protéines spécialisées dans l’assemblage et le transfert du centre dans la chaîne polypeptidique des apoprotéines. C’est lors de l’étude de la Nitrogénase de la bactérie fixatrice d’azote Azotobacter vinelandii, que les protéines impliquées dans la biosynthèse des centres Fe-S ont été mises en évidence pour la première fois (Jacobson et al., 1989). Depuis, des protéines homologues ont été découvertes dans d’autres bactéries et dans les cellules eucaryotes. Dans ce qui suit, la biosynthèse des centres Fe-S sera abordée seulement dans le contexte bactérien. Des revues récentes ont fait le point sur ce sujet pour ce qui concerne les plantes (Balk and Lobréaux, 2005) et les autres encaryotes (Lill and Mühlenhoff, 2005).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 La structure de FdVI, la ferrédoxine à centre [2Fe-2S] de la bactérie photosynthétique Rhodobacter capsulatus probablement impliquée dans la synthèse des centres Fe-S
Partie 1 : Introduction
1. Les ferrédoxines
2. Les ferrédoxines de type [2Fe-2S]
2.1. Propriétés structurales
2.2. Fonction
2.2.1. Rôle de l’adrénodoxine chez les mammifères
2.2.2. Rôle des ferrédoxines dans la photosynthèse
3. Biosynthèse des centres Fe-S chez les bactéries
3.1. Le système de biosynthèse des centres Fe-S NIF-spécifique de A. vinelandii
3.2. Le système ISC de biosynthèse des centres Fe-S de E. coli
3.3. Le système SUF de E. coli
3.4. Quelques conclusions sur la biosynthèse des centres Fe-S chez les bactéries
Etude structurale de la ferrédoxine VI (FdVI) de Rhodobacter capsulatus
Références bibliographiques
Partie 2 : Article 1 Structure of a [2Fe–2S] ferredoxin from Rhodobacter capsulatus likely involved in Fe–S cluster biogenesis and conformational changes observed upon reduction
Abstract
1. Introduction
2. Materials and Methods
2.1. Purification and crystallization of FdVI
2.2. Reduction of FdVI crystals
2.3. Analytical and spectroscopic methods
2.4. Determination of midpoint redox potentials
2.5. X-ray data collection and processing
2.6. Structure comparisons of [2Fe-2S] containing proteins
3. Results and discussion
3.1. Comparative genomics indicate that FdVI and its orthologs in α- and βproteobacteria are involved in Fe-S cluster biosynthesis
3.2. Circular dichroïsm and redox properties of FdVI
3.3. Overall fold of FdVI
3.4. Comparison with related [2Fe-2S] ferredoxins
3.5. The [2Fe-2S] cluster environment
3.6. Charge distribution and Interaction domain
3.7. Structural changes induced upon reduction
3.8. Comparison of redox-linked structural changes in FdVI, Pdx, Adx and AnFd
References
Supplementary material
Partie 3 : Conclusions et perspectives
CHAPITRE 2 Caractérisation biochimique et structure cristallographique de la dioxygénase de Sphingomonas CHY-1 (PhnI), catalyseur de l’attaque initiale des hydrocarbures aromatiques polycycliques
Partie 1 : Introduction
1. Structure des hydrocarbures aromatiques polycycliques
2. Origine et exposition aux HAP
3. La toxicité des HAP
4. La biodégradation des HAP par les bactéries
5. Dégradation bactérienne des HAP à quatre cycles et plus
6. Les dioxygénases bactériennes
6.1. Propriétés générales des dioxygénases
6.2. Classification des dioxygénases
6.3. Données structurales sur les transporteurs d’électrons associés
7. La structure de la naphtalène dioxygénase (NDO-P)
8. Mécanisme réactionnel des dioxygénases
9. Les structures d’autres composantes terminales de dioxygénases
10. Spécificité des dioxygénases
11. Sphingomonas sp. CHY-1
Présentation des travaux expérimentaux sur la dioxygénase de Sphingomonas CHY-1
Références bibliographiques
Partie 2 : Article 1
Characterization of a naphthalene dioxygenase endowed with an exceptionally broad substrate specificity towards polycyclic aromatic hydrocarbons
Abstract
1. Introduction
2. Materials and Methods
2.1. Bacterial strains and growth conditions
2.2. Protein purification
2.2.1. Purification of the oxygenase component PhnI
2.2.2. Purification of the ferredoxin component PhnA3
2.2.3. Purification of the reductase component PhnA4
2.2.4. Purification of ht-RedB356
2.3. Enzyme assays
2.4. Single turnover reactions
2.5. Identification and quantification of reaction products
2.6. Determination of the iron content of proteins
2.7. Protein analyses
2.8. EPR spectroscopy
2.9. Chemicals
3. Results
3.1. Purification and properties of the oxygenase component PhnI
3.2. Purification of the ferredoxin and reductase components
3.3. Catalytic properties of the dioxygenase complex : dependence of activity on electron carrier concentrations
3.4. Specific activity and coupling efficiency
3.5. Steady-state kinetics
3.6. Dihydroxylations and monohydroxylations catalyzed by PhnI
3.7. Dihydroxylation of benz[a]anthracene
3.8. Reactivity of ht-PhnI toward benz[a]anthracene as investigated by single turnover experiments
3.9. Interaction of ht-PhnI with benz[a]anthracene and dihydrodiols as probed by EPR spectroscopy
4. Discussion
References
Partie 3 : Article 2
The crystal structure of the ring-hydroxylating dioxygenase from Sphingomonas CHY-1
Abstract
1. Introduction
2. Material and Methods
2.1. Purification and crystallization of PhnI
2.2. Data collection and processing
2.3. Structure solution and refinement
2.4. Protein Data Bank accession number
3. Results and Discussion
3.1. Overall Structure
3.2. β-subunit
3.3. α-subunit
3.3.1. The Rieske domain
3.3.2. The catalytic domain
3.3.3. The substrate binding pocket
3.3.4. The Mononuclear Fe
3.3.5. Intramolecular Electron Transfer
3.3.6. alpha subunit interactions
3.3.7. Interdomain interactions
3.3.8. Occurrence of a water channel
3.3.9. Possible role of Asn 200
4. Conclusions
References
Partie 4 : Article 3
The catalytic pocket of the ring-hydroxylating dioxygenase from Sphingomonas CHY-1
Abstract
1. Introduction
2. Material and methods
3. Results and Discussion
3.1. The Phn1 catalytic domain
3.2. Topology of the catalytic pocket
3.3. Substrate specificity
4. Conclusion
References
Partie 5 : Conclusions et perspectives
Conclusions
Purification et activité catabolique
Cristallisation et détermination de la structure de la composante oxygénase
Le site actif
Perspectives
Bases moléculaires de la sélectivité des dioxygénases
Amélioration des performances catalytiques par ingénierie moléculaire
CHAPITRE 3 Utilisation des rayons X de très haute énergie pour la cristallographie des protéines
Partie 1 : Introduction
1. La radiocristallographie des protéines
1.1. Description d’une expérience de cristallographie
1.2. Etat des lieux et avancées
2. Les méthodes de phasage
3. Les dommages dus aux rayonnements
3.1. L’interaction des R-X avec le cristal
3.2. Dommages, dose et effets
3.3. Les alternatives
4. L’utilisation des hautes énergies
Présentation des travaux expérimentaux
Références bibliographiques
Partie 2 : Article 1
Anomalous Diffraction at Ultra High Energy for Protein Crystallography
Abstract
1. Introduction
2. Material and Methods
2.1. Sample Preparation
2.2. High Energy X-ray Beam lines
2.3. Detectors
2.4. Energy Scan
2.5. Data Processing, Phasing and Refinement
3. Results and Discussion
3.1. Crystals and Diffraction Quality
3.2. Phases and Electron Density Maps
3.3. The Holmium Sites
3.4. SAD Phasing and Redundancy
3.5. Phasing at Ultra High X-rays Energies
3.6. Potential Future for Ultra High Energy Crystallography
4. Conclusion
Appendix: Dose estimation
References
Partie 3 : Article 2
Protein Crystallography at Ultra High Energy ?
Abstract
1. Introduction
2. Material and Methods
2.1. Data analysis
2.2. Radiation damage evaluation
3. Results
3.1. Ultra High Energy Phasing
3.2. Data statistics
3.3. Radiation damage: Overall parameters variation
3.4. Radiation damage: Structural specific damages
3.4.1. Holmium sites
3.4.2. Decarboxylation
3.4.3. Disulfide bridges
3.5. Reference residues
3.6. Dose estimate
4. Conclusion
References
Partie 4 : Conclusions et perspectives
CONCLUSION

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *