Étude prospective multicentrique d’une cohorte de patients atteints de polyradiculonévrite chronique

Le nœud de Ranvier dans le système nerveux périphérique et sa structure

   La myéline est formée par l’enroulement autour de l’axone d’une cellule de Schwann. La gaine de myéline forme une gaine isolante tout au long de l’axone à l’exception du nœud de Ranvier (ou étranglement annulaire décrit par Louis-Antoine Ranvier). Les fibres myélinisées sont organisées en quatre domaines : le nœud de Ranvier, le paranœud, le juxtaparanœud et l’inter-nœud. La myélinisation des fibres nerveuses périphériques permet la propagation rapide et sûre du potentiel d’action. Ces derniers sont régénérés au niveau du nœud de Ranvier par des canaux sodiques voltagedépendants. L’agrégation des canaux sodiques est dépendante du contact axo-glial médié à la fois par des protéines transmembranaires et cytoplasmiques (Faivre-Sarrailh and Devaux, 2013). La connaissance de la formation et de la composition du nœud de Ranvier a fortement progressé au cours des dernières années. Différentes organisations sont donc rapportées : une organisation anatomique (faite de 4 domaines) (Stathopoulos et al., 2015; Willison and Scherer, 2014), une organisation biophysique (correspondant à la distribution non uniforme des canaux ioniques) et une organisation moléculaire (protéines constituantes du nœud et glycolipides responsables de la stabilité axogliale). Au nœud de Ranvier, l’axone est à nu, seulement recouvert des microvilli des cellules de Schwann. Les canaux sodiques et canaux potassiques sont ancrés au cytosquelette d’actine au moyen de protéines cytosoliques : l’ankyrine G et la spectrine βIV. L’ankyrine G a un rôle primordial dans la formation du nœud de Ranvier tandis que la spectrine βIV semble nécessaire à la maintenance de complexes nodaux. Ce complexe cytosolique se lie à une molécule d’adhérence transmembranaire au niveau de l’axone qui est la neurofascine 186 (NF186). Cette protéine appartient à la famille L1 et présente une région cytoplasmique, un domaine transmembranaire, et une région extracellulaire glycosylée avec quatre domaines de type Fibronectin III, un domaine mucine, et six domaines de type immunoglobuline (Ig). Le contact axo-glial au niveau du nœud est assuré par la liaison de la NF186 avec deux molécules d’adhérence gliales: la gliomédine et la neuron-glia-related cell adhesion molecule (NrCAM) qui sont sécrétées au niveau des microvillosités, terminaisons de la cellule de Schwann qui recouvrent le nœud de Ranvier. La région paranodale est également fondamentale pour la formation du nœud de Ranvier et la propagation rapide de l’influx nerveux. L’espace intercellulaire y est particulièrement diminué et présente une jonction adhérente particulière appelée bandes transverses ou jonctions de type septée. Il s’agit d’un point de vue anatomique de boucle de myéline non compacte et fortement attachée. Les jonctions septées limitent le passage des solutés et des protéines transmembranaires du nœud de Ranvier vers l’inter-nœud. Elles sont constituées par un complexe protéique formé de trois molécules d’adhérence. On retrouve deux protéines axonales que sont la contactine 1 (CNTN1) et la contactin associated protein 1 (CASPR1, également appelée paranodine) ainsi qu’une protéine gliale, la neurofascine 155 (NF155). CASPR1 ne comporte qu’un seul segment transmembranaire, une courte queue C-terminale cytoplasmique et une grande région extracellulaire glycosylée comprenant plusieurs domaines protéiques. CNTN1 appartient à la famille L1, mais ne traverse pas la membrane et est attachée à la membrane par glypiation. Ces deux dernières forment un complexe hétérodimérique. L’association de ces deux protéines est indispensable pour l’adressage de CASPR1 à la membrane. Si l’une des protéines n’est pas présente, les jonctions paranodales ne peuvent se former, les boucles gliales sont mal attachées à l’axone avec une rupture du contact axo-glial et les bandes transverses sont absentes. Cela résulte en un ralentissement des vitesses de conduction. Ce complexe protéique est relié au niveau du cytosquelette par la protéine 4.1B en particulier au niveau de la queue cytosolique de CASPR1. La dernière région précédant l’inter-noeud (qui correspond à de la myéline compacte) est la région juxtaparanodale. Elle est caractérisée par un enrichissement en canaux potassiques voltage dépendants Kv1.1/1.2/1.4/1.6. Ces canaux sont associés à un complexe similaire à celui retrouvé au niveau du paranœud. On retrouve une protéine d’adhérence transmembranaire du côté axonal nommée CASPR2 qui se lie à la contactine 2 (ou transient axonal glycoprotéin1 ; TAG1) une protéine d’adhérence axonale. CASPR2 est ancrée au cytosquelette via la protéine 4.1B également présente au niveau juxtaparanodal. En extracellulaire, ce complexe se lie la protéine contactine 2 également exprimée au niveau de la cellule de Schwann. Ce complexe est indispensable pour l’accumulation des canaux potassiques au niveau des juxtaparanœuds.

La polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante chronique

   La désorganisation des nœuds de Ranvier ainsi que les processus de démyélinisation sont responsables de pathologies démyélinisantes que ce soit au niveau central ou périphérique. Nous nous sommes intéressés en particulier à une pathologie dénommée polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante chronique (PIDC), qui présente des caractéristiques hétérogènes. En effet, il s’agit d’une maladie chronique, progressive et handicapante entraînant des déficits moteurs et sensitifs des quatre membres souvent symétriques et bilatéraux ainsi que des troubles de l’équilibre et de la coordination. Les critères diagnostiques cliniques retenus pour une PIDC typique sont : une atteinte progressive chronique (évolution supérieure à 2 mois ou par poussées) avec un déficit sensitif de toutes les extrémités et un déficit moteur proximodistal symétrique en association à une aréflexie ou une hyporéflexie tendineuse des 4 membres. Les PIDC atypiques sont définies par une atteinte à prédominance distale ou une atteinte asymétrique ou une atteinte focale ou purement motrice ou purement sensitive (Joint Task Force of the EFNS and the PNS, 2010). Les examens complémentaires permettant de conforter le diagnostic sont :
– une dissociation albuminocytologique à l’analyse du liquide cérébro rachidien (avec moins de 10 éléments retrouvés et une hyperprotéinorachie)
– des signes de démyélinisation à l’ENMG (allongement des latences distales, réduction des vitesses de conduction, allongement des ondes F, présence de blocs de conduction ou de dispersion temporelle)
– la réalisation d’une biopsie de nerf (objectivant des signes de démyélinisation et ou de remyélinisation : bulbe d’oignion, infiltration de cellules mononuclées, œdème endoneural).
– la réalisation d’une imagerie par résonnance magnétique (IRM) retrouvant des hypersignaux après injection de gadolinium et / ou une hypertrophie des racines nerveuses (cervicales, lombosacrées ou de la queue de cheval) ou du plexus brachial ou du plexus lombosacré
– Des anomalies de conduction périphérique sur les potentiels évoqués moteurs et sensitifs
Ces pathologies sont considérées comme dysimmunes et les traitements de référence comprennent les corticoïdes, les immunoglobulines intraveineuses (IgIV), ainsi que les échanges plasmatiques. La réponse au traitement immunomodulateur est par ailleurs un des critères diagnostiques en faveur de PIDC. Toutefois, les mécanismes immuns et physiopathologiques responsables de cette pathologie sont encore méconnus. Il a récemment été observé que certaines formes évoluaient par poussées avec des rémissions cliniques ou électrophysiologiques rapides ce qui laissait suggérer l’implication d’autoanticorps ciblant le nœud de Ranvier. Depuis peu, il a été mis en évidence que des molécules d’adhérence du nœud de Ranvier et du paranœud sont la cible des auto-anticorps dans la PIDC : CNTN1 (Doppler et al., 2015; Miura et al., 2015; Querol et al., 2013), NF155 (Devaux et al., 2016;Kadoya et al., 2016; Ng et al., 2012; Ogata et al., 2015; Querol et al., 2014), et récemment NF186(Delmont et al., 2017). Ces anticorps sont d’isotype IgG4, isotype qui ne permet pas l’activation de la voie classique du complément. Ces auto-anticorps sont associés à des sous-groupes de patients atteints de PIDC présentant des signes cliniques distinctifs (comme la présence d’une ataxie ou d’un tremblement) et une absence de réponse aux IgIV. Au plan anatomopathologique, on ne retrouve pas les signes de démyélinisation habituels, mais une modification de l’ultrastructure avec unedésorganisation de la région paranodale (Doppler et al., 2015; Koike et al., 2017; Vallat et al., 2017). Le profil électrophysiologique de ces PIDC a peu été décrit, certains rapportent une perte axonale et d’autres des signes de démyélinisation.

Concept de la nodo-paranodopathie

   Les neuropathies inflammatoires sont reconnues d’origine dysimmune et la connaissance de cette organisation protéique du nœud a permis la découverte de nombreuses cibles antigéniques. On retrouve ainsi au niveau du nœud des anticorps dirigés contre les gangliosides responsables de pathologies comme les AMAN (Acute motor axonal neuropathy), les AMSAN (Acute motor and sensory axonal neuropathy), les NMM (neuropathies motrices multifocales avec blocs de conduction), les CANOMAD (Chronic ataxic neuropathy, ophtalmoplegia, monoclonal IgM paraprotein, cold agglutinins disialosyl antibodies) ; mais aussi dirigés contre la gliomédine (responsables de NMM et de PIDA (polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante aiguë)) ou la NF186 (responsables d’AMAN, de PIDA et de PIDC). Au niveau du paranoeud, les anticorps identifiés sont dirigés contre d’autres gangliosides (responsables de variantes de syndrome de Guillain Barré comme le syndrome de Miller- Fisher ou la forme pharyngo-cervico-brachiale), contre la NF155, la CNTN1 et CASPR1 qui sont impliquées dans des polyradiculonévrites démyélinisantes. Au niveau du juxtaparanœud, aucune neuropathie spécifique n’a été retrouvée mais des associations avec des cas de neuromyotonie (associée aux anti-CASPR2) ont été rapportées (Fehmi et al., 2018). C’est à partir des différentes variantes de syndrome de Guillain-Barré que les classifications électrophysiologiques actuelles ont été remises en question et qu’une nouvelle catégorie en prenant en compte ces biomarqueurs sérologiques est née : les nodo-paranodopathies.En effet, Uncini et Kuwabara ont décrit en 2013 un continuum physiopathologique entre les blocs de conduction nerveuse (jusqu’alors caractéristiques de démyélinisation) et la dégénérescence axonale (Uncini et al., 2013; Uncini and Kuwabara, 2015). Les blocs de conduction « axonaux » étaient dus au détachement de la myéline paranodale, à l’allongement secondaire du nœud ce qui conduisait à une dysfonction ou une interruption des canaux sodiques dépendants du voltage, d’où une altération de l’homéostasie eau-ions et pour finir à une polarisation anormale de l’axone menant à un axone inexcitable. La dégénérescence axonale pouvait donc être secondaire aux blocs de conduction.
A) L’accumulation de charges positives provoque l’ouverture des canaux sodiques, ce qui permet à un afflux de sodium de dépolariser la membrane et de propager le potentiel d’action vers le noeud adjacent.
B) La démyélinisation conduit à la disparition des canaux sodiques voltage-dépendant (VGSC) et donc à une altération de la dépolarisation (d’où des blocs de conduction et un ralentissement de la conduction)
C) La dégénérescence axonale entraîne un échec de la conduction nerveuse (réversible ou non)
D) Les anticorps se fixent au niveau du nœud, activant la cascade immunologique (et l’activation du complément) ou au niveau du paranœud sans faire intervenir la cascade du complément et sont responsables d’une désorganisation structurelle en association à l’absence de propagation du potentiel d’action.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
1. Le nœud de Ranvier dans le système nerveux périphérique etsa structure
2. Concept de la nodo-paranodopathie
3. Données électrophysiologiques
4. La polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante chronique
5. Objectifs
ARTICLE EN ANGLAIS, version soumise au JNNP
Abstract
Backgrounds
Methods
Results
Conclusion
Authors
Introduction
Materials and Methods
Patients
Cell culture and transfection
Flow cytometry
Cell binding assay
Immunostaining on tissue
ELISA (Enzyme-linked immunosorbent assay)
Statistics
Results
Characterization of CIDP patients with antibodies against the node of Ranvier
Comparison between CIDP with and without antibodies againstparanodal proteins
Discussion
ARTICLE EN FRANCAIS
Introduction
Matériels et méthodes
Patients
Culture cellulaire et transfection
Cytométrie en flux
Culture cellulaire et immunomarquage
Immunomarquage sur tissu et incubationin vitro
ELISA (Enzyme-linked immunosorbent assay)
Analyse statistique
Résultats
Caractérisation des patients atteints de PIDC associées à des anticorps dirigés contre le nœud de Ranvier
Comparaison entre les patients PIDC avec et sans anticorps dirigés contre le nœud de Ranvier
Discussion
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES
Abreviations (anglais)
Abréviations(français)
Figure 1
Tableau 1
Figure 2
Tabeau 2
Tableau 3
Questionnaire envoyé aux neurologues
Fiche de renseignement clinique pour la recherche des anticorps anti nœudde Ranvier
Critères EFNS/PNS (Joint Task Force of the EFNS and thePNS, 2010).

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *