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Initiation de l’athérogénèse
L’apparition des lésions athéromatheuses est liée principalement à deux évènements majeurs : d’une part le dysfonctionnement des cellules endothéliales entraînant l’activation de l’endothélium, et d’autre part la présence de LDL oxydées dans l’espace sous-intimal.
Endothélium et stress oxydant
L’endothélium vasculaire, constitué d’une monocouche de cellules endothéliales recouvrant la surface interne des vaisseaux sanguins, a longtemps été considéré comme une simple barrière physique séparant le flux sanguin des tissus sous-jacents. En réalité, il est responsable de la sécrétion de molécules impliquées dans la régulation du tonus vasculaire, dans la réponse inflammatoire et dans la coagulation sanguine.7 L’endothélium participe au maintien de l’homéostasie vasculaire et à la synthèse de médiateurs endocrines. Il sécrète également de nombreuses substances vasoactives comme l’oxyde nitrique (NO) synthétisé de façon constitutive par la NO syntase endothéliale (eNOS) dont l’activité est stimulée par les forces de cisaillement. Le NO participe à la relaxation et au maintien de la tonicité des vaisseaux (effet vasodilatateur, anti-thrombotique, inhibiteur de molécules d’adhésion ou de chémokines, mitogène et anti-oxydant). Ainsi, dans une artère saine, l’endothélium sert de barrière entre les constituants de la paroi artérielle et ceux du sang circulant. Il produit également des molécules vasoactives et anti-thrombotiques, régule le tonus vasculaire et limite la réponse inflammatoire.
A l’état basal, les espèces réactives de l’oxygène (ERO) et les espèces réactives de l’azote (ERN) sont également présentes en faible quantité dans l’endothélium. Elles sont, entre autres, des régulateurs des voies de signalisation et de l’expression des gènes au niveau des cellules vasculaires.8
Dysfonction endothéliale
Il existe un fragile équilibre d’oxydo-réduction entre la production et l’élimination des ERO et des ERN. Cet équilibre peut être rompu en présence de différents facteurs tels que des facteurs Ce stress oxydant-nitrosant peut être de courte durée. L’équilibre d’oxydo-réduction physiologique peut être restauré grâce aux antioxydants endogènes et/ou exogènes. Lorsque cet équilibre est perturbé de façon prolongée en faveur de l’oxydation, le stress oxydant devient permanent et chronique. Le dysfonctionnement est également lié à une diminution de la biodisponibilité du NO. Il entraîne une vasoconstriction, une augmentation de la perméabilité endothéliale et facilite la pénétration des lipoprotéines présentes dans la circulation. De plus, une inflammation de l’endothélium se manifeste par l’augmentation de l’expression d’intégrines et de molécules d’adhésion telles que les VCAM-1 (Vascular Cell Adhesion Molecule) ou les ICAM-1 (Inter Cellular Adhesion Molecule) à la surface de l’endothélium. Ceci induit l’adhésion puis la pénétration des monocytes dans l’espace sous-intimal.6,18-21
Enfin, les lésions athérosclérotiques ont davantage tendance à se former au niveau des bifurcations ou des courbures des artères. En effet, dans ces zones, le flux sanguin est perturbé. Des zones de turbulences, de stagnation et des forces de cisaillement apparaissent, diminuant alors la résistance des cellules endothéliales et augmentant leur perméabilité.
Oxydation des LDL
La première étape de l’athérogénèse est l’oxydation des LDL dans l’intima de l’artère.
Les LDL sont des macromolécules complexes composées de lipides et de protéines. Elles permettent le transport, vers les tissus périphériques, de différentes molécules dont le cholestérol. Les HDL (lipoprotéines de haute densité), quant à elles, réalisent l’action inverse : elles récupèrent le cholestérol dans les tissus et organes périphériques pour le transporter vers le foie où il sera excrété. Pour qu’un organisme soit considéré comme sain, le taux de cholestérol LDL dans le sang doit se trouver en-dessous de 5 mM. Une hausse de 2 mM augmente de 50% la probabilité de maladies cardiovasculaires.22
En temps normal, les LDL interagissent avec les cellules endothéliales afin de faciliter les échanges et le transport du cholestérol. Il existe un équilibre dynamique entre les flux d’entrée et de sortie des LDL qui évite l’accumulation massive de LDL dans l’intima. Cependant, une cholestérolémie élevée et l’activation de l’endothélium favorisent l’accumulation des LDL au niveau des zones lésées de celui-ci. En effet, les cellules endothéliales activées produisent des protéoglycanes qui interagissent avec les LDL et ainsi les retiennent dans l’intima. Le flux d’entrée des LDL va alors être supérieur au flux de sortie et provoquer leur accumulation dans l’intima.
Suite à la présence de ERO et de la dysfonction endothéliale, ces LDL subissent une oxydation de la partie lipidique qui les constituent. Cette oxydation est une réaction radicalaire qui se déroule en trois étapes : l’initiation, la propagation et la terminaison.23-25 A l’origine de ce processus se trouve la transformation de l’anion superoxyde (O2.-) en radical hydroxyle OH..6 Elle peut être réalisée par tous les types cellulaires.
La première étape, l’initiation (Schéma 1), débute par l’action des ERO sur les acides gras polyinsaturés des LDL. Les principaux radicaux libres mis en jeu dans cette étape sont les radicaux hydroxyles (OH.) et hydroperoxyles (HOO.). L’autoxydation des acides gras polyinsaturés par l’oxygène conduit à la formation de LOOH (lipides hydroperoxylés) et de LOH (lipides hydroxylés), l’oxygène se fixant directement sur les doubles liaisons.
La seconde étape de la peroxydation des lipides est la propagation. Le radical alkyle (L.) va réagir très rapidement avec O2 pour former un radical peroxyle (LOO.). De nombreux isomères sont formés (isomères de position et stéréoisomérie). Des peroxydes cycliques sont également synthétisés, conduisant par la suite à la formation d’isoprostanes. (Schéma 2)
L’étape finale de cette peroxydation lipidique est la terminaison. Au cours de cette phase, la neutralisation des radicaux libres permet l’arrêt de la réaction de peroxydation. Celle-ci s’effectue par dimérisation des radicaux des acides gras poly-insaturés pour donner des espèces non-radicalaires. La présence d’antioxydants peut également terminer la propagation radicalaire en piégeant les radicaux peroxyles. On les appelle alors « chain breaking ».
L’accumulation et la formation des LDL oxydées constituent les principales causes de l’initiation du mécanisme inflammatoire dans l’athérosclérose en participant à l’entretien du stress oxydant et au dysfonctionnement des cellules endothéliales. Ainsi débute véritablement la formation de la plaque d’athérome.
Recrutement et internalisation des monocytes circulants
Les monocytes font partie de la famille des leucocytes (globules blancs). Ce sont des cellules essentiellement phagocytaires du système immunitaire inné. Ils ont la capacité de se différencier en macrophages lorsque cela est nécessaire. Ces derniers jouent un rôle d’éboueurs dans l’organisme. Une hypercholestérolémie provoque une augmentation du taux de monocytes circulants.26
Les monocytes participent à la formation des lésions : leur recrutement se fait par leur interaction avec des molécules d’adhésion, exprimées par les cellules endothéliales activées. Les monocytes sont ralentis au niveau des zones lésées par le flux sanguin modifié. Des interactions avec les sélectines (molécules d’adhésion) de la surface de l’endothélium ralentissent également la circulation des monocytes et favorisent leur roulement à la surface de l’endothélium. Dans leur parcours, les monocytes rencontrent ensuite une autre catégorie de molécules d’adhésion : les intégrines. Celles-ci vont les stopper dans leur parcours (Figure 3). Les récepteurs à intégrines LFA-1, CD11B et VLA-4 des monocytes sont reconnus par les ICAM-1 (inter-cellular adhesion molecule 1) et les VCAM-1 (vascular cell adhesion molecule 1) endothéliales dont l’expression est augmentée par la présence de cytokines pro-inflammatoires (TNF-α (tumor necrosis factor α), l’INF-γ (interferon γ) et les interleukines 1, 2, 6, 8 et 18)6 et des LDL oxydées.8,26-31
Recrutement des cellules musculaires lisses
La plaque évolue ensuite par le développement d’une chape fibreuse dont la formation résulte de la migration des cellules musculaires lisses (CML) de la média vers l’intima sous l’influence de différents facteurs (cytokines, facteurs de croissance et LDL oxydées).38 Cette chape fibreuse est indispensable à la stabilisation du cœur lipidique. Les CML de phénotype contractile, présentes dans la média, produisent une matrice extracellulaire riche en collagène de type I et II. Cette matrice est dégradée par les métalloprotéases, produites par les macrophages, et favorise la migration des CML. La présence de macrophages et de CML dans l’espace sous-intimal est caractéristique des lésions de type III.
A ce stade, la plaque d’athérome est formée par un cœur nécrotique-lipidique entouré d’une chape fibreuse. Les étapes suivantes correspondent à l’accroissement de la plaque d’athérome puis à la diminution de sa stabilité. L’instabilité de la plaque d’athérome provoquée par différents facteurs (fragilisation de la chape fibreuse, expansion du cœur lipidique) conduit à l’obstruction totale ou partielle de l’artère ou à la libération d’un embolus dans la circulation sanguine.5,20,39 La conséquence directe de ces évènements est l’apparition de complications cliniques telles que l’accident vasculaire cérébral, l’infarctus du myocarde, l’angine de poitrine, l’artérite des membres inférieurs ou l’anévrysme abdominal.
Traitements actuels
La prévention reste le meilleur moyen de limiter l’apparition des lésions d’athérosclérose (consommation modérée d’alcool, arrêt du tabagisme, alimentation saine, pratique d’une activité
sportive régulière).
Deux traitements médicamenteux utilisés dans le cas de l’athérosclérose sont les antiagrégants plaquettaires et les statines.
Les antiagrégants plaquettaires ont pour but de diminuer les risques de formation d’un caillot une fois que la plaque d’athérome est formée. Ils agissent en inhibant l’activation plaquettaire par différentes voies. Le premier d’entre eux, l’aspirine est un inhibiteur irréversible de la cyclo- oxygénase-1, enzyme liée à la production de thromboxane A2 (activateur de l’agrégation plaquettaire) (Figure 5).40
Le ticlopidine, le clopidogrel et le pasugrel sont des inhibiteurs de l’adénosine diphosphate en se fixant de façon irréversible sur le récepteur P2Y12 de la plaquette (Figure 6). Ces trois composés sont des prodrogues, inactives in vitro, et qui sont activés dans l’organisme par le cytochrome P450. Il existe également des antagonistes réversibles tel que le ticagrelor (Figure 6).40
Le cilostazol inhibe l’activation plaquettaire en se fixant de façon réversible sur la phosphodiestérase III (Figure 7).40
Enfin, un dernier type d’antiagrégants plaquettaires, les inhibiteurs de la glycoprotéine IIb/IIIa. Nous pouvons citer l’abciximab, inhibiteur non-compétitif, qui est une protéine, plus précisément le fragment Fab de l’anticorps monoclonal chimérique humain-murin 7E3.40
Les statines sont des inhibiteurs de l’hydroxyméthylglutaryl Co-enzyme A réductase (HMGC-CoA réductase), enzyme impliquée dans la biosynthèse du cholestérol. Elles visent à diminuer le taux de cholestérol-LDL dans le sang et aident ainsi à stabiliser l’évolution de la plaque. Elles sont utilisées chez les personnes présentant un haut risque cardiovasculaire (présence ou risque important d’une maladie cardiovasculaire, taux supérieur à 1,9 g/L de cholestérol-LDL dans le sang, diabète). Nous pouvons citer l’atorvastatine (Tahor®, Lipitor®) et la simvastatine (Lodales®, Zocor®)
Lorsque la survie d’un organe ou d’un membre est compromise, un traitement chirurgical est mis en place. Le plus courant est l’angioplastie avec la pose d’un stent au niveau de la plaque d’athérome. L’artère peut être également désobstruée par endartériectomie dont le principe est d’enlever le bouchon en ne laissant que l’adventice de l’artère. Un pontage peut être réalisé pour contourner l’obstruction créée par la plaque d’athérome.
A ce jour, et aux meilleurs de nos connaissances, il n’existe pas de traitements commerciaux efficaces ciblant le facteur clé à l’origine de la formation de la plaque d’athérome : l’oxydation des
LDL.
Stress oxydant et antioxydants
Les espèces réactives de l’oxygène (ERO) et de l’azote (ERN), radicalaires ou non- radicalaires, sont produites en permanence par les différents types cellulaires constituant la paroi vasculaire. Elles participent à tous les stades du développement de la lésion. Leur génération est due à l’action de différents systèmes enzymatiques comme les NADPH oxydases, les NO syntases et la chaîne respiratoire mitochondriale. Les principaux ERO présents dans l’organisme sont les suivants : anion superoxyde, peroxyde d’hydrogène, radical hydroxyle, … (Schéma 3). (SOD = superoxyde dismutase ; MPO = myeloperoxidase)
A l’état physiologique, les ERO modulent des voies de signalisation participant ainsi à l’homéostasie vasculaire. Les macrophages, par la génération d’ERO, exercent leur action bactéricide.
La production d’ERO est contrebalancée par l’existence de systèmes de détoxification (enzymatiques ou non-enzymatiques) qui régulent l’équilibre entre leur production et leur neutralisation par les antioxydants (enzymatiques et non-enzymatiques).
Lorsque des circonstances physiopathologiques rompent cet équilibre dans la paroi vasculaire, on parle alors de stress oxydant délétère. Plusieurs facteurs de risques comme l’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie ou le diabète favorisent ce déséquilibre. En effet, ceux-ci sont à l’origine de stimuli entraînant une production anormale d’ERO (notamment par l’activation des NADPH oxydases et de la chaîne respiratoire mitochondriale) et une diminution de la biodisponibilité du monoxyde d’azote. Le déséquilibre pro-oxydant participe aux différentes étapes de l’athérosclérose, entraînant la formation de LDL oxydées et de multiples dysfonctionnements cellulaires : dysfonction endothéliale, production de facteurs pro-inflammatoires, mitogènes et angiogéniques, ou encore de facteurs favorisant la mort par apoptose et/ou nécrose.8,41
Le stress oxydant représente donc une cible de choix dans la prévention de l’athérosclérose.
Qu’est-ce qu’un antioxydant ?
Un antioxydant est une molécule naturelle ou synthétique qui est capable d’inhiber l’oxydation d’autres molécules en intervenant à différents stades du processus d’oxydation. Il peut agir de différentes façons : piéger les composés qui initient la réaction radicalaire, piéger les ions métalliques tel que Fe2+, neutraliser l’anion superoxyde pour éviter la formation de peroxydes, terminer la réaction de propagation dans la réaction radicalaire mise en place ou réduire la concentration en O2.42 Les antioxydants les plus efficaces agissent en terminant la réaction radicalaire en chaîne. Les polyphénols, naturels ou non, peuvent libérer un radical H., en formant un radical phénoxyle stabilisé par résonnance, pour terminer la propagation de l’oxydation lipidique.
Antioxydants naturels
Les antioxydants naturels sont divisés en deux grands groupes : les antioxydants enzymatiques et les antioxydants non-enzymatiques (Schéma 4).
Les antioxydants enzymatiques endogènes
Cette catégorie présente les enzymes produites par l’organisme humain et ayant une action antioxydante. Nous pouvons citer la glutathione peroxydase, la catalase et la superoxyde dismutase.
Les antioxydants non-enzymatiques sont nombreux et de divers types. Commençons par les vitamines qui sont des antioxydants exogènes, c’est-à-dire extérieurs à l’organisme. La vitamine C est un piégeur de radicaux libres. La vitamine A s’associe aux radicaux peroxyles pour éviter la propagation de la peroxydation lipidique. Elle existe sous trois formes rétinoïde. La vitamine E peut stopper la réaction radicalaire en chaîne. la vitamine E est l’α-tocophérol (Figure 9).
La glutathion réductase réduit le glutathion sous forme oxydée en glutathion sous sa forme réduite ainsi que la glucose-6-phosphate déshydrogénase qui régénère le NADPH (nicotinamide adénine dinucléotide phosphate hydrogène) en créant un environnement réducteur (Schéma 5). Ces deux derniers types d’enzymes n’agissent pas directement sur l’oxydation mais viennent en support aux autres antioxydants.43
III.2.b. Les antioxydants non-enzymatiques
La glutathione peroxydase réduit les peroxydes en sélénols, la catalase transforme le peroxyde d’hydrogène H2O2 en eau et en oxygène moléculaire tandis que la superoxyde dismutase transforme l’anion superoxyde en peroxyde d’hydrogène, substrat pour la catalase (Schéma 5).
Les composés azotés non-protéiques et les caroténoïdes sont également des antioxydants. Parmi les composés azotés non-protéiques se trouve l’acide urique, antioxydant endogène (produit par l’organisme), qui est un piégeur de l’oxygène singulet, des radicaux peroxyles et hydroxyles. Il protège également les érythocytes de la peroxydation lipidique (Figure 10).43,44
Dans la famille des caroténoïdes, le β-carotène, le lycopène, les xantophylles (hydroxy-caroténoïdes) telles que la lutéine et la zéaxanthine, sont des antioxydants exogènes piégeurs de radicaux libres (Figure 11).43,46
Les minéraux tels que le zinc et le sélénium sont essentiels dans la lutte contre l’oxydation. Bien qu’ils n’agissent pas directement sur les radicaux libres, ils permettent le fonctionnement d’enzymes antioxydantes comme la glutathione réductase ou la superoxyde dismutase.43,44
Parmi les antioxydants endogènes, le coenzyme Q10 (co-facteur) prévient la peroxydation lipidique et neutralise les radicaux libres une fois qu’ils sont formés. Le glutathion, tripeptide soufré endogène, piège le peroxyde d’hydrogène et les anions hydroxyles (Figure 12).42-44
Les composés phénoliques d’origine naturelle constituent une famille importante d’antioxydants exogènes. Les polyphénols sont généralement des molécules efficaces et plus puissantes que celles évoquées précédemment dans la lutte contre le stress oxydant. Dans cette famille sont regroupés les alcools et les acides phénoliques, les flavonoïdes, certains stilbènes comme le résveratrol, les tannins et les lignanes. Parmi les alcools phénoliques, nous pouvons donner comme exemple l’hydroxtyrosol qui est un très bon antioxydant naturel présent dans les feuilles d’olivier et l’huile d’olive (Figure 13).42-46
Limitation et controverse des antioxydants
L’oxydation des LDL est à l’origine du processus athérosclérotique. Il a été postulé que l’utilisation d’antioxydants pour empêcher l’oxydation des LDL permettrait de lutter plus efficacement contre la formation de la plaque d’athérome. Cependant, les études actuelles utilisant les antioxydants s’avèrent décevantes, notamment en ce qui concerne leur capacité à limiter le développement de l’athérosclérose chez l’Homme. En effet, certains antioxydants donnant de très bons résultats in vitro se révèlent décevant in vivo. 45,47
De plus, certaines études pointent un effet inverse de l’effet attendu. Par exemple, la vitamine C est pro-oxydante quand elle est en faible concentration ou si les radicaux libres sont présents en très grande quantité. Elle se combine avec des ions Fe3+ ou Cu3+ pour donner des ions Fe2+ ou Cu2+ lesquels réduisent par la suite le peroxyde d’hydrogène en radical hydroxyle.43,44,52 La vitamine E est également pro-oxydante à dose élevée.43
Les composés phénoliques sont également pro-oxydants quand ils sont présents à de fortes concentrations ou en présence de métaux.53 Par exemple, la quercétine (Figure 13) présente un caractère antioxydant quand elle est utilisée à des concentrations entre 0,1 µM et 20 µM. Toutefois, des études faites à 50 µM ont montré, qu’à cette concentration, la quercétine promeut la génération
de ERO et cause des dommages à l’ADN.54
La présence de métaux, en particulier Fe3+ et Cu2+, affecte l’activité des antioxydants (Schéma 6). En présence de Fe3+, à pH 7,40 et à une concentration de 100 mM, la quercétine (Figure 12) participe à la formation de radicaux hydroxyles à partir de H2O2. Des études sur le kaempférol (Figure 16) montrent qu’il provoque des dommages à l’ADN et la peroxydation lipidique dans le foie de rat.44 Le resvératrol (Figure 13) est aussi pro-oxydant ; in vitro, il est par exemple capable de dégrader l’ADN par un processus oxydatif à partir d’une concentration de 100 µM dans les milieux de culture cellulaire.55
Les caroténoïdes ne dérogent pas la règle puisqu’ils se révèlent également pro-oxydants. Le β-carotène et le lycopène sont antioxydants in vitro à des concentrations inférieures à 3 µM en milieu cellulaire et se montrent pro-oxydants à des concentrations supérieures à 4 µM en milieu cellulaire.56,57
Une molécule antioxydante n’est donc pas suffisante pour bloquer le processus athérosclérotique. Cependant, une molécule qui agirait à la fois sur le stress oxydant et sur les voies de signalisation pro-athérogènes représenterait une voie prometteuse pour lutter contre l’athérosclérose.
L’inflammation dans l’athérosclérose
Le foyer inflammatoire est localisé dans l’espace sous-intimal. Le premier agent entraînant cette réaction est le cholestérol-LDL sous une forme oxydée (LDL oxydées). Par la suite, l’inflammation intervient à tous les stades de l’athérosclérose : formation de stries lipidiques riches
en macrophages spumeux, développement de lésions fibro-musculaires conduisant à l’apparaition de la chape fibreuse, déstabilisation de la plaque par activation des métalloprotéinases matricielles et complications de la lésion (rupture de plaque, formation de thrombus occlusif) entraînant des accidents coronariens aigus. Il est important de noter qu’au-delà des LDL oxydées, plusieurs acteurs de l’inflammation seraient impliqués dans l’athérosclérose. On y retrouve le LPS (lipopolysaccharide), des cytokines, des interleukines ou encore des facteurs lipidiques.
Dans un premier temps, l’infiltration, la rétention des LDL et leur oxydation dans l’espace sous-endothélial, activent les cellules endothéliales. Tout cela se traduit par une réaction inflammatoire conduisant à l’activation de l’endothélium et à l’initiation de la formation de la plaque. Les cellules endothéliales activées expriment alors des molécules d’adhésion et plusieurs types de chimiokines comme la chimiokine MCP-1 (Monocyte chemoattractant protein-1) ou la cytokine IL-8 (Interleukine-8) qui stimulent la migration des cellules inflammatoires vers le sous-endothélium. Le blocage pharmacologique ou génétique de ce processus induit une diminution significative de la taille des lésions d’athérosclérose.
La réaction inflammatoire est également entretenue par les lymphocytes et les macrophages au niveau de la lésion. L’inhibition de la prolifération des macrophages induit une résistance au développement de l’athérosclérose, même en présence d’un taux de cholestérol circulant très élevé, suggérant le rôle majeur de ces derniers dans le développement des lésions. De plus, en captant les LDL oxydées via leurs récepteurs « scavengers » (SR-AI, SR-AII, CD36, …), ces macrophages se transforment en cellules spumeuses. Leur lyse, entraînant le déversement de leur contenu cellulaire dans la lésion, entretient la présence d’un contexte inflammatoire. Elles produisent également des cytokines telles que l’IL-12 (activateur des lymphocytes T CD4+ pathogènes), des ERO et des métalloprotéinases matricielles qui participent à la déstabilisation de la plaque. Ceci est corroboré par des études anatomo-pathologiques montrant une infiltration importante des macrophages, et une diminution d’éléments stabilisants comme les cellules musculaires lisses et le collagène dans les zones de rupture de plaque. Enfin, en fonction de leur polarisation M1 (phénotype pro-inflammatoire) ou M2 (phénotype anti-inflammatoire), les macrophages induisent des réponses différentes qui orientent l’évolution de la lésion.58,59
Nous venons de voir, dans ce chapitre, que l’initiation et le développement de l’athérosclérose sont intimement liés à deux phénomènes que sont le stress oxydant et l’inflammation. La recherche d’agents possédant des propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires prend maintenant tout son sens.
Nous pouvons donc supposer qu’en bloquant le stress oxydant et l’inflammation, deux facteurs étroitement liés, il est possible de limiter l’apparition ou l’évolution d’une plaque athéromateuse. Il serait donc intéressant d’avoir une molécule possédant des propriétés antioxydantes ainsi qu’un caractère anti-inflammatoire.
Le but de mon projet de thèse a consisté à synthétiser de nouvelles molécules prévenant l’athérosclérose en limitant à la fois la génération d’ERO et l’inflammation afin de limiter la progression de l’athérosclérose.
Structure macrocyclique versus structure linéaire
Une autre caractéristique de ces macrocycles concerne leur pré-organisation structurelle. Malgré la contrainte conformationnelle les macrocycles ne sont pas totalement rigides. Ils représentent un bon compromis entre une pré-organisation et une flexibilité suffisante qui peut faciliter les interactions avec la protéine cible. Par leur topologie, les macrocycles sont capables de couvrir de grandes surfaces tout en présentant peu de liberté conformationnelle par rapport aux molécules acycliques de même poids moléculaires. Cette caractéristique les rend particulièrement adaptés aux cibles protéiques ayant des sites de liaisons peu profonds.
Différents exemples montrent que la cyclisation intramoléculaire d’une molécule linéaire améliore l’affinité pour la cible. En effet, pour se lier au site de liaison de la protéine, la molécule acyclique doit adopter une certaine conformation. La limitation du nombre de conformations possibles de la molécule d’intérêt lors de la liaison avec sa cible, provoque une importante perte d’entropie qui est défavorable à une bonne affinité. Les macrocyles ont, de par leur pré-organisation structurelle, un nombre de conformations restreint. Leur perte d’entropie au moment de la liaison avec la cible est alors minimisée, ce qui entraîne un gain d’affinité. Toutefois ce gain d’affinité n’est présent que si les groupements fonctionnels du macrocycle se liant au site conservent leur orientation spatiale.63,64
L’inhibiteur de type pipérazinone de la farnésyltransférase 1 est un composé linéaire présentant une conformation repliée, celle-ci suggérant qu’il peut être cyclisé. Une fois synthétisé, le macrocycle 2 s’est révélé vingt fois plus puissant que le composé acyclique 1 et cinquante-cinq fois plus puissant que son analogue acyclique direct 3 (Figure 19).
Du fait du nombre restreint de conformations, la macrocyclisation permet également d’augmenter la sélectivité vis-à-vis d’une cible. Par exemple, l’inhibiteur de l’adénylation des amino-acides (4), qui inhibe également les synthétases d’aminoacyl-tRNA, a été cyclisé pour donner le macrocycle 5. Ce dernier présente une activité inhibitrice contre l’adénylation des acides aminés mais contrairement à son analogue linéaire, il n’inhibe pas l’activité des synthétases d’aminoacyl- tRNA (Figure 20).63,64
De nombreux exemples montrent que la macrocyclisation permet également de moduler les propriétés physico-chimiques et pharmacocinétiques de la molécule. C’est particulièrement vrai dans le cas des peptides cycliques. En effet, les peptides acycliques présentant, entre autres, une instabilité métabolique et une pauvre perméabilité membranaire, leur cyclisation permet d’améliorer ces Prenons l’exemple d’un composé peptidomimétique inhibiteur de la déformylase
peptidique. L’analogue macrocyclique 7 est plus puissant que la molécule linéaire 6 et présente une stabilité accrue contre la dégradation protéolytique (pas de détection de dégradation après 5 heures dans du plasma de rat contrairement au dérivé linéaire 6) (Figure 21).63
En résumé, les macrocycles représentent une classe de molécules d’intérêt pour la découverte de nouvelles molécules bioactives bien qu’elle soit encore peu exploitée. Les macrocycles présentent généralement de bonnes activité, affinité et sélectivité vis-à-vis de leur cible. De plus, ils affichent souvent de meilleures propriétés pharmacochimiques et pharmacocinétiques (stabilité métabolique et protéolytique, solubilité, pénétration cellulaire, biodisponibilité orale) que leurs analogues acycliques.
Dans le cadre de notre projet, nous nous sommes donc orientés vers cette catégorie de molécules. Parmi les nombreux types de macrocycles existants, les diarylheptanoïdes macrocycliques et phénoliques, présents à l’état naturel, montrent des propriétés biologiques intéressantes et sont peu explorés à ce jour. Le paragraphe suivant décrit les diarylheptanoïdes macrocycliques naturels sachant que nous nous concentrerons plus particulièrement sur les diaryléthers heptanoïdes macrocycliques pour la suite de nos travaux.
Les macrocycles diarylheptanoïdes
Généralités
Les macrocycles diarylheptanoïdes sont des métabolites secondaires issus principalement des plantes. Ils sont divisés en deux familles :
Les macrocycles diarylheptanoïdes de type biphényle présentent un lien diaryle et une chaîne à sept atomes reliant ces deux mêmes cycles comme le montrent les exemples ci-dessous (Figure 22) :
Les macrocycles diarylheptanoïdes de type diphényléther sont constitués de deux noyaux aromatiques reliés d’une part par un pont éther et d’autre part par une chaîne à sept atomes (Figure 23). Ils possèdent une architecture 2-oxa-1(1,3),3(1,4)-dibenzèneoxacyclodécaphane. A notre connaissance, il n’existe aucun diaryléther heptanoïde macrocyclique méta-méta naturel. La numération IUPAC est représentée en bleue et rouge sur la Figure 23. La numérotation en bleue correspond à la numérotation principale de la molécule. Les cycles aromatiques sont considérés comme des « superatomes » et sont numérotés comme des atomes classiques. La numérotation en rouge est celle interne à chaque noyau aromatique.
Différentes variations fonctionnelles peuvent être observées sur la chaîne heptanoïde. On retrouve principalement des insaturations, des fonctions alcools ou cétones. Ces molécules sont donc constituées de carbone, d’hydrogène et d’oxygène (Figure 24).
Des modulations peuvent être également présentes sur les noyaux aromatiques. Ce sont principalement un ou plusieurs groupements hydroxy et/ou méthoxy (Figure 25).
Biosynthèse des diarylheptanoïdes
Comme mentionné dans le paragraphe précédent, les macrocycles diaryléthers heptanoïdes font partis de la famille des diarylheptanoïdes dans laquelle on les retrouve soit sous forme cyclique soit acyclique. La biosynthèse de la curcumine, 1,7-diarylheptanoïde linéaire, est la première à avoir été explorée. La curcumine est très connue pour ses nombreuses propriétés biologiques telles que : antioxydante, anti-inflammatoire, antibactérienne, antifongique, antivirale et anticancéreuse.65-71 La première hypothèse à avoir été proposée concernant sa voie de biosynthèse est la suivante (Schéma 7) :
En 1971, P. J. Roughley et D. A. Whiting ont proposé une voie de biosynthèse alternative (Schéma 8). Celle-ci a été mise en évidence grâce au marquage isotopique de la phénylalanine, d’acétate et de malonate de Coenzyme A qui ont ensuite été administrés sur une période de six jours à du Curmuna longa.
La biosynthèse de l’acérogénine A, diaryléther heptanoïde cyclique, a également été explorée. L’acérogénine A serait biosynthétisée à partir de l’ester de CoEnzyme A de l’acide coumarique, en passant par la formation du (-)-centrolobol qui subit ensuite une cyclisation (Schéma 9). Cette dernière étape n’est pas explicitée par les auteurs.73
La cyclisation finale du (-)-centrolobol pourrait faire intervenir un couplage phénolique oxydant qui conduirait à la formation du pont méta-para (Schéma 10).
Un couplage radicalaire C-C expliquerait la formation des diarylheptanoïdes de type biphényles macrocycliques tels que l’acérogénine K (Schéma 11).
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Table des matières
I Matériaux à transition de spin : principe et état de l’art
I.1 Le phénomène de la transition de spin
I.1.1 Historique .
I.1.2 La transition de spin à l’échelle moléculaire
I.1.2.1 Théorie du champ cristallin
a) Diagramme de Tanabe-Sugano .
b) Diagramme congurationnel
I.1.2.2 Aspect thermodynamique de la transition de spin
I.1.3 La transition de spin à l’état solide
I.1.3.1 La notion de « coopérativité »
I.1.3.2 Les diérents types de transition de spin
I.2 Mise en forme des complexes à transition de spin
I.2.1 Nanoparticules à transition de spin
I.2.1.1 Nano-composites à transition de spin
I.2.1.2 Les eets de matrice .
I.2.2 Élaborations de lms à transition de spin
I.2.2.1 Technique d’élaboration de lm
I.2.2.2 Les complexes à transition de spin sublimables
I.2.2.3 Films composites à transition de spin
I.3 Dispositifs basés sur les complexes à transition de spin
I.3.1 Dispositifs photoniques .
I.3.2 Jonctions ou dispositifs électriques
I.3.3 Dispositifs mécaniques .
I.4 Objectifs de ces travaux de thèse
II Les complexes à TS sublimables : synthèses, caractérisations et lms minces
II.1 Complexes de Fe(II) à base d’unité pyrazolylborate
II.1.1 Synthèses des complexes
II.1.2 Étude des propriétés de la transition de spin
II.1.3 Étude par spectroscopie Raman et NIS de la dynamique du réseau cristallin
II.1.3.1 Étude par spectroscopie Rama
II.1.3.2 Étude Mössbauer inélastique (NIS)
II.1.4 Élaboration de lms minces
a) Morphologie des lms .
b) Propriété de transition de spin des lms
II.1.5 Intégration et mise en applications des lms minces
II.1.5.1 Jonctions électriques commutables
a) Élaboration des jonctions .
b) Mesures électriques .
c) Voltamétrie cyclique .
II.1.5.2 Systèmes électromécaniques micrométriques (MEMS)
II.2 Complexe de Fe(II) à base de ligand scorpionate tris(triazolyl)Borate
II.2.1 Synthèse du complexe [Fe(HB(tz)3)2]
II.2.2 Caractérisations structurales et propriétés de transition de spin
II.2.2.1 Structure cristalline
II.2.2.2 Spectroscopie Raman .
II.2.2.3 Propriétés de transition de spin
II.2.3 Étude par microscopie optique des mono-cristaux
II.2.4 Relation structure/propriété
II.2.5 Élaboration de lms minces et propriétés de transition de spin
II.2.5.1 Films minces .
II.2.5.2 Propriétés de transition de spin des lms minces
II.2.6 Intégration et mise en applications
II.2.6.1 Jonctions électriques bistables
a) Élaboration des jonctions
b) Mesures électriques
II.2.6.2 Systèmes électromécaniques micrométriques
II.3 Conclusion partielle
III Composite à base de complexes à transition de spin et de polymères
III.1 Papier composite à base de complexes à transition de spin
III.1.1 Synthèses et caractérisations
III.1.2 Analyses mécaniques dynamiques
III.1.3 Papier thermochromique bistable
III.2 Composite à base de complexes à transition de spin et de polymères électroactifs
III.2.1 Choix du polymère électroactif et du complexe à transition de spin
III.2.2 Préparation des échantillons
III.2.2.1 Synthèse de nanoparticules du complexe à transition de spin
III.2.2.2 Préparation du composite P(VDF-TrFE)/transition de spin
III.2.3 Morphologie des échantillons
III.2.4 Propriétés de transition de spin
III.2.5 Mesures électriques et mécaniques
III.3 Conclusion partielle .
Conclusion Générale
A Techniques de caractérisation
A.1 Caractérisation des complexes à TS
A.1.1 Mesures magnétiques
A.1.2 Microscopies optiques
A.1.3 Spectroscopie 57Fe Mössbauer classique
A.1.4 Analyses thermiques
A.1.5 Spectroscopies vibrationnelles
A.1.6 Diraction des rayons-X
A.1.7 Microscopies électroniques
A.2 Caractérisations des composites
A.2.1 Propriétés mécaniques
A.2.2 Propriétés électriques
B Complexes à TS sublimable
B.1 Diraction des rayons X sur monocristal du complexe [Fe(H2B(pz)2)2(phen)]
B.2 Calculs NIS
B.3 Films minces du complexe [Fe(HB(tz)3)2]
Bibliographie
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