Etude numérique tridimensionnelle de la stabilité du front de taille d’un tunnel

Etude bibliographique sur le boulonnage du front de taille

     D’après Kavvadas (2005), les boulons de front ont un rôle de confinement, en permettant de maintenir une contrainte de compression horizontale non nulle dans le sol devant le front. L’équilibre mécanique est assuré par ancrage des boulons sur une certaine longueur loin du front. On considère généralement que le fonctionnement des boulons se ramène à une interaction mécanique de frottement le long des boulons (les effets de flexion étant considérés comme négligeables). Les instrumentations de boulons sur le front de taille sont rares, et la plupart des analyses du fonctionnement des boulons reposent sur des analyses de stabilité ou des calculs en déformation, par voie analytique ou le plus souvent numérique. Anagnostou et Perazzelli (2015) ont proposé une méthode d’analyse du renforcement du front de taille par boulonnage, qui repose sur des considérations d’équilibre limite, et prend en compte la résistance du scellement des boulons au terrain. Les résultats sont exprimés en termes de densité de boulonnage nécessaire pour assurer la stabilité. Ils examinent aussi l’intérêt de placer des boulons plus longs en partie haute ou basse de la section. Dias et Kastner (2005) ont étudié par voie numérique le fonctionnement des boulons et montré que les boulons produisent un confinement du front sur une distance de l’ordre d’un demi-rayon, que la zone d’ancrage s’étend sur environ entre 0,5 et 1,2 fois le rayon ; au-delà, les boulons ne sont pratiquement pas chargés. Dias (1999) a étudié l’influence du boulonnage au front sur les déplacements du massif observés lors du creusement du tunnel. Il a observé que le renforcement du front de taille par des boulons ne permet pas de conserver le terrain dans un état purement élastique, même s’il peut réduire d’environ 60% l’extrusion du front de taille, en cas de boulonnage dense. D’autre part, il a montré que le fonctionnement des boulons peut être décrit en trois zones : la zone de confinement du front concentrée sur une distance de l’ordre d’un demirayon, la zone d’ancrage s’étendant environ entre 0,5 et 1,2 rayon, au-delà de 1,2 rayons, les boulons ne travaillent plus. Pour le renforcement du front de taille avec des boulons adhérents de longueur variable, il a montré que le chargement en tête des boulons les plus représentatifs est progressif et il subsiste une zone morte sans transfert notable entre le boulon et le sol, situé entre la tête et la zone d’ancrage. Concernant l’interaction mécanique entre les boulons et le terrain, certains auteurs ont proposé de rendre compte des résultats d’essais d’arrachement par une loi d’interaction avec radoucissement (Ma et al, 2016, Blanco Martin, 2012). Pour le calcul des tassements, en condition normale de fonctionnement des boulons, on peut estimer que ce niveau de précision dans la description du comportement de l’interaction n’est pas nécessaire. Il l’est en revanche pour étudier la stabilité et la rupture du front de taille renforcé. On peut aussi citer les travaux de Li et al (2015), qui proposent une étude paramétrique, par voie numérique, de l’influence des paramètres de boulonnage du front, et discutent en particulier la position optimale des boulons : ils suggèrent de les placer en périphérie du front, plutôt qu’au centre. Ils observent aussi, comme d’autres auteurs, qu’il existe une densité de boulonnage au-delà de laquelle la réduction de l’extrusion du front n’évolue plus.

Calcul des forces nodales d’excavation

   Pour simuler les forces de déconfinement associées à l’excavation d’un ou plusieurs groupes d’éléments, on utilise généralement dans CESAR une option appelée « LAM », qui calcule des forces nodales à partir des contraintes stockées dans le fichier de résultats du calcul précédent. A la fin d’une phase de calcul, les contraintes sont étendues des points d’intégration aux nœuds des éléments avant d’être stockées dans le fichier de résultats. On a, pour un nœud donné, plusieurs valeurs des contraintes, une pour chaque élément auquel il appartient. L’option LAM fait une moyenne arithmétique et calcule ensuite le produit du tenseur de contrainte moyen obtenu avec la normale à la facette chargée. Le passage des points d’intégration aux nœuds et l’opération de moyenne font que le chargement LAM ne ramène pas rigoureusement la contrainte normale à zéro sur une surface excavée. D’autre part, ce chargement s’applique aux faces d’éléments volumiques : il ne permet pas de modéliser l’effet d’une excavation sur des éléments de structure (barre, poutre ou coque). On a donc utilisé un procédé alternatif permettant de modéliser une excavation, qui repose sur une évaluation des forces nodales à appliquer qui ne fait intervenir aucun procédé d’extrapolation ni de moyenne. Le calcul repose sur la combinaison de deux options : l’option REA du module MCNL dans un premier calcul et l’option EXC du module CHAR dans un calcul ultérieur. En plus d’une meilleure précision, il présente l’intérêt d’être plus polyvalent que le procédé classique, la prise en compte d’éléments de barre, de poutre ou de coque étant relativement simple. Il est cependant relativement plus lourd à utiliser. La structure des données à fournir pour stocker les forces nodales nécessaires et calculer les forces nodales est décrite en annexe.

Comportement élastique linéaire isotrope

Régimes permanents : La Figure 4.15 présente la variation des tassements instantanés maximaux en fonction du nombre de phases de calcul. Pour les cas 1 (aucun présoutènement) et 2 (boulonnage à longueur constante), les tassements instantanés maximaux deviennent constants au-delà d’une certaine phase. Pour le cas du renouvellement des boulons (cas 3) et du retard de pose du radier (cas 4), on obtient un régime périodique de période 4 et 6 respectivement, qui correspondent au renouvellement d’une famille de boulons tous les 6 m et à la construction du radier tous les 9 m. Dans le cas 3 (prise en compte du renouvellement des boulons au front), le tassement instantané maximal est le plus grand une phase avant le renouvellement d’une famille complète de boulons ; la valeur maximale du tassement instantané varie d’une phase à l’autre au cours d’un cycle de destruction des boulons, mais cette variation reste modérée entre 0,14 et 0,135 mm (soit 1,4% par rapport à la valeur médiane de 0,138 mm). Dans le cas 4, les tassements instantanés maximaux augmentent de 0,14 mm à 0,23 mm au fur et à mesure que le front s’éloigne du dernier tronçon de radier construit. Après la fermeture du radier à 9 m en arrière du front, cette valeur passe de 0,23 mm à 0,14 mm. Les variations de tassement instantané maximal d’une phase à l’autre sont donc nettement plus significatives, avec un écart de 17% par rapport à la valeur médiane.
Cas 1 : Aucun présoutènement Cas 2 : Boulonnage à longueur constante
Cas 3 : Boulonnage avec renouvellement Cas 4 : Retard du radier à 9 m du front
On choisira pour les cas 1 et 2, la phase 30 pour relever les tassements et on utilisera la méthode de Möller (2006) pour reconstituer les tassements finaux. Pour le cas 3, on fait la somme de toutes les cuvettes de tassements instantanés longitudinales obtenues à la surface sur le cycle de creusement correspondant aux phases 28 à 31. On adoptera la même démarche pour le cas 4 sauf que le cycle de creusement correspond aux phases 26 à 31.
Cuvettes de tassements transversales finales : La Figure 4.16 compare les cuvettes de tassements transversales finales pour les différentes simulations étudiées. Pour un comportement élastique, la cuvette de tassement transversale finale est identique pour les trois premiers cas : sans présoutènement, boulonnage à longueur constante et renouvellement des boulons. D’autre part, la prise en compte du retard du radier à 9 m du front augmente les tassements calculés : le tassement maximal passe de 5,3 mm à 6,8 mm soit une augmentation de 29%. Les cuvettes transversales obtenues sont plus larges que celle de Peck, considérée comme une référence représentative d’un grand nombre d’observations sur des chantiers réels. Le paramètre i, défini comme la distance à laquelle le tassement est égal à 60% de la valeur maximale, vaut respectivement 13,3 m dans les cas 1 à 3 et 14,5 m dans le cas 4 (retard du radier) : la prise en compte du retard du radier augmente un peu la largeur de la cuvette calculée. Elle ne dépend donc pas uniquement du type de terrain traversé.
Cuvettes de tassements longitudinales finales : La Figure 4.17 compare les cuvettes de tassements longitudinales finales obtenues à la surface pour les différents cas. Le tassement est nul loin en avant du front, et prend une valeur constante à partir d’une certaine distance en arrière du front. Pour un massif élastique linéaire isotrope, les cuvettes de tassements transversales et longitudinales finales sont quasiment identiques pour les cas 1 (aucun présoutènement), 2 (boulonnage à longueur constante) et 3 (renouvellement réel des boulons). Pour le cas 4 (retard du radier à 9 m du front), il est intéressant de souligner qu’à partir d’une distance supérieure à 5 m en avant du front de taille, les tassements obtenus sont identiques à ceux des cas 1, 2 et 3. En arrière du front, dans la zone soutenue, les déformations du sol se stabilisent à une distance de 35 m environ pour les cas 1, 2, 3 et 4. Le retard du front pris en compte dans le cas 4 conduit à une augmentation du tassement au front de 14% par rapport aux cas 1, 2 et 3 (et de 29% pour le tassement final comme on l’a déjà signalé).

Influence de la discrétisation des tubes dans le maillage tridimensionnel

     La prise en compte dans le maillage d’un grand nombre de tubes au-dessus du front peut poser des problèmes pour la constitution du maillage si l’on ne dispose pas d’un outil robuste pour générer simplement un maillage paramétré (comme le script que nous avons développé pour cette étude). Elle conduit aussi à augmenter le nombre de degrés de liberté et donc la durée des calculs. De nombreux auteurs procèdent donc à une simplification, qui consiste à prendre en compte dans leurs simulations un nombre réduit de tubes, en leur donnant des caractéristiques mécaniques plus élevées que celle des tubes réels. On se propose ici de discuter la validité de cette simplification. On conserve les hypothèses de la section précédente : le soutènement est fermé à 1,5 m du front et le sol a un comportement élastoplastique sans écrouissage de type Mohr-Coulomb. On cherche à discuter si l’on peut retrouver les tassements calculés avec un nombre de tubes N en faisant un calcul avec un nombre de tubes réduit N’ dans le maillage, auxquels on attribue un module égal à N/N’ fois le module des tubes du calcul de référence.

Influence du choix de modélisation de la géométrie du tunnel

     Dans ce chapitre, nous avons cherché à reproduire au mieux la géométrie réelle du soutènement, en prenant en compte la géométrie tronconique des tronçons successifs. Dans cette section, on cherche à discuter dans quelle mesure la prise en compte d’une géométrie cylindrique (c’est-à-dire d’une section invariante par translation dans la direction du creusement) modifie les résultats et les conclusions qu’on peut tirer sur l’influence des présoutènements sur les tassements. On a entré les données liées aux dimensions du tunnel et au domaine maillé, les caractéristiques des tubes de la voute parapluie, et du sol (dont le comportement est représenté par le modèle HSM avec les paramètres du Tableau 5.4), dans le logiciel développé par Itech dans le cadre du projet Newtun. Ce logiciel permet d’obtenir de façon automatique le maillage tridimensionnel et les fichiers de données, en prenant en compte une voute cylindrique, donc en négligeant l’influence du caractère conique de la voute. Les tubes de la voute parapluie sont horizontaux et s’appuient sur le soutènement déjà posé ; la longueur des tubes de la voute parapluie et des boulons du front reste constante en avant du front de taille. Le tunnel avance par pas d’excavation et le soutènement est fermé à une distance du front paramétrable.

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Table des matières

Introduction
1 Chapitre 1 : Comparaison de quelques techniques numériques de simulation du creusement des tunnels peu profonds
1.1 Introduction
1.2 Etude de quelques procédures de simulation numérique du creusement
1.3 Influence de la profondeur du maillage sur les tassements de surface calculés
1.4 Présentation des différentes techniques de simulation du creusement du tunnel
1.4.1 Approche 1 : application des forces de déconfinement
1.4.2 Approche 2 : déplacement radial (uniforme) imposé
1.4.3 Approche 3 : pilotage en perte de volume imposée
1.4.4 Approche 4 : déformation volumique « initiale »
1.4.5 Approche 5 : Méthode de ramollissement
1.5 Résultats
1.5.1 Déplacements et tassements
1.5.2 Conditions d’équilibre en force
1.6 Conclusion
2 Chapitre 2 : Etude numérique tridimensionnelle de la stabilité du front de taille d’un tunnel
2.1 Introduction
2.2 Stabilité d’un talus
2.2.1 Cas d’un talus vertical
2.2.2 Calcul numérique avec CESAR-LCPC
2.2.3 Cas d’un talus incliné
2.3 Etude tridimensionnelle de la stabilité du front de taille d’un tunnel
2.3.1 Présentation du problème
2.3.2 Différentes géométries du front de taille
2.3.3 Calcul du facteur de sécurité sur un chargement (FSC)
2.3.4 Calcul du facteur de sécurité avec la méthode c-phi réduction
2.4 Conclusion
3 Chapitre 3 : Influence des boulons sur le comportement du front de taille
3.1 Introduction
3.2 Présentation des essais en centrifugeuse
3.2.1 Principe des essais en centrifugeuse
3.2.2 Description du modèle
3.2.3 Massif encaissant – caractéristiques et préparation
3.2.4 Déroulement des essais
3.2.5 Dispositifs de mesure
3.2.6 Description des essais – influence des paramètres du renforcement
3.2.7 Résultats des essais en centrifugeuse
3.3 Etude numérique du comportement du front de taille non renforcé
3.3.1 Présentation du modèle numérique
3.3.2 Loi de comportement des différents groupes
3.3.3 Initialisation des contraintes (phase initiale)
3.3.4 Chargements appliqués pour les deux phases de l’essai
3.3.5 Résultats obtenus pour l’essai II (front non renforcé)
3.4 Etude numérique du comportement du front de taille renforcé par des tiges
3.4.1 Configurations étudiées (Al Hallak, 1999)
3.4.2 Comparaison entre calculs et mesures
3.5 Conclusion
4 Chapitre 4 : Influence des boulons au front sur les tassements
4.1 Introduction
4.2 Etude bibliographique sur le boulonnage du front de taille
4.3 Modèle caractéristique
4.3.1 Géométrie et maillage
4.3.2 Conditions aux limites
4.3.3 Contraintes initiales
4.3.4 Phases de calcul
4.3.5 Calcul des forces nodales d’excavation
4.3.6 Lois de comportement considérées pour le massif et le soutènement
4.3.7 Hypothèses de modélisation
4.4 Situations de calcul étudiées
4.4.1 Cas 1 : Aucun présoutènement
4.4.2 Cas 2 : Boulonnage au front à longueur constante
4.4.3 Cas 3 : Renouvellement des boulons au front
4.4.4 Cas 4 : Retard de pose du radier
4.5 Exploitation des résultats
4.5.1 Tassements instantanés dans le modèle tridimensionnel
4.5.2 Correction des cuvettes numériques instantanées longitudinales
4.5.3 Tassements finaux dans le modèle tridimensionnel (Möller 2006)
4.6 Analyse des résultats
4.6.1 Comportement élastique linéaire isotrope
4.6.2 Comportement élastoplastique sans écrouissage
4.6.3 Comportement élastoplastique de type Hardening Soil Model (HSM)
4.6.4 Modèle de Mohr-Coulomb avec E = 60 MPa
4.6.5 Influence du nombre de boulons au front
4.7 Discussion
4.8 Conclusion
5 Chapitre 5 : Effet de la voute parapluie sur les tassements
5.1 Introduction et motivations du travail présenté
5.2 Méthodologie de simulation du creusement d’un tunnel à section variable
5.2.1 Objectifs de l’approche proposée
5.2.2 Développements de scripts
5.3 Hypothèses de simulation
5.3.1 Modèle géométrique
5.3.2 Choix de modélisation pour la simulation du creusement du tunnel
5.3.3 Illustration du phasage de calcul simulant le creusement du tunnel
5.4 Cas de calculs étudiés et principes de l’exploitation des résultats
5.4.1 Cas de calcul
5.4.2 Exploitation des résultats
5.5 Etude de l’influence de la modélisation des tubes
5.5.1 Etude paramétrique sur le nombre de tubes
5.5.2 Influence de la discrétisation des tubes dans le maillage tridimensionnel
5.6 Résultats obtenus avec le Hardening Soil Model (HSM)
5.6.1 Tassements instantanés et régimes permanents
5.6.2 Cuvettes de tassements longitudinales finales
5.6.3 Récapitulatif des tassements finaux maximaux
5.6.4 Largeurs et volumes des cuvettes de tassements transversales finales
5.6.5 Influence des présoutènements sur les déplacements horizontaux instantanés
5.6.6 Sollicitations dans les tubes de la voute parapluie
5.6.7 Influence de la voute parapluie sur la contrainte déviatorique
5.6.8 Pertes de volume en souterrain et en surface
5.6.9 Influence de l’inclinaison des tubes sur les tassements
5.6.10 Influence de l’augmentation de l’inertie des tubes sur les tassements
5.6.11 Influence du choix de modélisation de la géométrie du tunnel
5.7 Comportement élastoplastique sans écrouissage de type Mohr-Coulomb
5.7.1 Cuvettes de tassements longitudinales finales
5.7.2 Largeurs et volumes des cuvettes de tassements transversales finales
5.8 Comportement élastique non linéaire anisotrope sans écrouissage
5.9 Modélisation d’une prévoute « active »
5.9.1 Notion de voute active
5.9.2 Simulation du procédé « voute active »
5.9.3 Illustration des phases de calcul
5.9.4 Calcul avec le Hardening Soil Model
5.9.5 Calculs avec le modèle de Mohr-Coulomb
5.10 Discussion
5.11 Conclusion
Conclusions et perspectives
Références
Annexe

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