Étude multi-traceurs de la productivité primaire et du paléoclimat dans le nord de la baie de Baffin

L’Arctique et le réchauffement climatique

   L’Océan Arctique, au sens strict, correspond à un bassin interne excluant la baie de Baffin et la mer du Groenland (Menard et Smith, 1966; Jakobsson, 2002; Jakobsson et al.,2003). Toutefois, les mers arctiques incluent, de façon plus générale, l’ensemble de la surface océanique délimitée par le cercle polaire arctique (66°33’44″N) (IHO, IBCAO),soit la contrée du soleil de minuit. À ces latitudes extrêmes, le faible angle d’incidence des rayons solaires résulte en un climat très froid . Ainsi, la majeure partie du territoire est recouverte par la glace et la neige lui donnant un albédo très élevé. En conséquence, la plus grande partie de l’énergie solaire est réfléchie vers l’atmosphère (ACIA, 2004).De ce climat extrême, il résulte un écosystème caractérisé par des espèces spécialisées et donc très vulnérables aux variations climatiques (Parmesan, 2006), mais jouissant toutefois d’une valeur intrinsèque (Ghilarov, 2000; Costello et al., 2010). Malgré son isolement et sa vulnérabilité, l’Arctique joue un rôle central dans le système terrestre en raison de son implication dans plusieurs phénomènes d’envergure planétaire (par exemple, albédo et bilan d’énergie terrestre, bilan d’eau douce et circulation thermohaline, réservoir d’ hydrates de gaz, grandes mi grations aviaires, biodiversité) (ACIA, 2004; IPCC, 2007).Toutes ces raisons font de la compréhension de l’Arctique une région d’étude prioritaire.Il est difficile de bien comprendre l’écosystème arctique et la biosphère en général,car nos connaissances limitées des variations climatiques à long terme nous font voir notre monde comme étant stable ou à l’équilibre, alors qu’il est en changement continuel. Il est donc primordial d’établir des repères fixes afin d’évaluer son évolution. La paléocéanographie nous permet justement d’estimer de tels changements à des échelles de temps géologiques.

La polynie des Eaux du Nord et la baie de Baffin

   Les efforts pour comprendre les réponses de l’écosystème arctique aux variabilités interactuelles et aux changements climatiques ont mené à l’étude des polynies. Dans le nord de la baie de Baffin, la polynie des Eaux du Nord a été l’objet de travaux dans le cadre du projet de recherche North Water Polynya (NOW) entre 1990 et 2002, projet qui s’insérait dans le cadre d’ un prograrmne international sur les polynies arctiques (International Arctic Polynya Programme, IAPP). La majeure pmiie des dOllliées recueillies durant le projet NOW sont disponibles en ligne à l’adresse suivante: http://www.quebecocean. ulaval.ca/nowl. La zone de 5-8.104 km2 constituant les Eaux du Nord est illustrée à la Figure 2. Cette région montre régulièrement des étend ues li bres de glace au début du mois d’ avril contrairement au reste de l’ archipel arctique canadien qui n’en montre habituellement qu’ à la mi-juillet (Fortier et al., 2002). Les vents et les courants dominants venant du nord, et,dans une moindre mesure, les eaux plus chaudes provenant du courant ouest groenl andais ainsi qu ‘ une résurgence au sud-est de la région seraient responsables de cette ouverture rapide de la banquise au printemps (Barber et al. , 2001 ; Melling et al. , 2001). Plusieurs études montrent que Je secteur des Eaux du Nord est l’une des régions les plus productives du cercle polaire arctique (e.g. Tremblay et al. , 2006). La région est d’ ai lleurs l’obj et de flo raisons massives (bloom) de diatomées au printemps (Lewis et al., 1996). De plus, la présence des lnuits près de cette région est associée à la présence d’ une mégafaune aquatique. Le possible lien de causalité entre la forte productivité de la région et la présence d’une mégafaune (Dunbar, 1981 ), de même que le devenir du carbone organique produit dans les eaux de surface représentaient les thèmes principaux du programme NOW et plus récemment du programme ArcticNet. Les résultats suggèrent que la folie productivité planctonique de la polynie soutient la faune pélagique herbivore mais ne contribue pas de façon majeure à la pompe biologique à CO2 . Par ailleurs, le devenir du carbone organique dissous issu de la production biologique dans les eaux de surface et sa transformation ultérieure demeurent incertains (Tremblay et al. , 2006). C’est dans ce contexte qu’ une campagne d’échantillonnage paléocéanographique a été entreprise dans la baie de Baffin à l’ été 2008 afin d’évaluer les changements environnementaux de la région au cours des derniers milliers d’ années. Dans ce projet de maîtrise, une carotte par boîte prélevée à proximité de la polynie des Eaux du Nord a été analysée afin de caractériser l’évolution du climat et de la productivité primaire dans la région au cours du passé récent.

Les kystes de dinoflagellés

   Les kystes produits par les dinoflagellés (dinokystes) sont parmi les microfossil es les plus intéressants à étudier dans un contexte de marge continentale des milieux de hautes latitudes. En effet, les dinoflagellés (Dinophyceae) sont des organismes unicellulaires auto, hétéro- ou mixotrophes responsables d’une part importante de la production primaire en milieu marin (Menden-Deuer et Lessard, 2000). Ils sont avec les diatomées des contributeurs majeurs à la chaîne alimentaire marine (Tappan, 1980), et sont présents en grande quantité de l’ équateur aux pôles et des zones néritiques à océaniques ouvertes. Environ 15 % des dinoflagellés produisent un kyste (hypnozygote) organique durant leur cycle de vie (Evitt, 1985) (Figure 3). Ce kyste, produit suite à la fusion des gamètes, est composé de dinosporine, un polymère s’apparentant à la cellulose (Versteegh et Blokker, 2004; Versteegh et al. , 2012) et résistant aux processus diagénétiques, peut être utilisé comme traceur paléocéanographique. Les kystes de dinoflagellés ainsi produits sont donc généralement bien préservés dans les sédiments marins. Des études visant à déterminer la relation entre les assemblages des dinokystes à la surface des sédiments marins et les conditions climatiques actuelles ont été nombreuses dans l’Arctique et dans les hautes latitudes au cours des dernières années (de Vernal et al., 1997; de Vernal et al. , 200 1;Mudie et Rochon, 2001; de Vernal et al. , 2005; Radi et de Vernal, 2008; Richerol et al. , 2008). L’information permettant de définir les relations liant les assemblages de dinokystes et les conditions océaniques de surface est illustrée dans un ouvrage synthèse présenté par Marret et Zonneveld (2003). Ainsi, en appliquant des fonctions de transfert, notamment la méthode des analogues modernes, les assemblages de dinokystes permettent la glace de mer, et productivité primaire) dans les milieux arctiques (de Vernal et al., 2001 ; de Vernal et al. ,2005; de Vernal et Hillaire-Marcel, 2008; de Vernal et al. , 2008 ; Ledu et al. , 2008 ; Radi et de Vernal, 2008; Rochon et al., 2008; Ledu et al. , 201 Oa; Ledu et al. , 20 1 Ob).

Biomarqueurs organiques

  Parmi les traceurs biogéniques, certains biomarqueurs ont aussi montré un fort potentiel paléocéanographique pour l’Arctique. Comme ils peuvent transiter longtemps avant d’ être ensevelies dans les sédiments marins, il est très important de bien comprendre les mécanismes sédimentaires impliqués dans leur dépôt (par exemple, adsorption, absorption, transport vertical et latéral par le vent, les vagues et les glaces, le remaniement sédimentaire), car ceux-ci peuvent avoir des conséquences importantes sur leur interprétation subséquente (Belicka et al., 2004; Rosel l-Melé et McClymont, 2007; Belicka el al. , 2009). La porté paléoécologique des biomarqueurs peut être vérifiée par l’utilisation croisée de différents traceurs (Henderson, 2002). Par exemple, l’ utilisation de biomarqueurs d’origine connue permet de diminuer l’incertitude inhérente associée à l’utilisation de substrats organiques sédimentaires dérivés de sources diverses terrestres et aquatiques. En outre, l’ utilisation de rapports isotopiques du carbone sur composés organiques spécifiques peut être envisagée afin ùe préciser l’origine des biomarqueurs (Sauer el ct!., 2001; RosellMelé et McClymont, 2007). Parmi les biomarqueurs orgal1lques, plusieurs molécules ubiquistes dérivées des acides gras, des alcanes ou de stérols fournissent des indications sur la productivité primaire, alors que des indices particuliers basés sur des rapports entre différents groupes d’acides gras ou d’hydrocarbures ont été utilisés pour estimer les contributions terrestre, marine et bactérienne dans les sédiments. Une revue exhaustive et complète de l’utilisation de biomarqueurs organiques dans le but de reconstituer l’origine et les transformations de la matière organique sédimentaire a été publiée par Peters et al. (2005). Plus spécifiquement, le dinostérol, produit majoritairement par les dinoflagellés, permet d’ évaluer l’ apport des dinoflagellés dans les sédiments marins. Comme la plupart des stérols, cette molécule est relativement bien conservée dans les sédiments marins. La somme de ses produits de dégradation connus, incluant le dinostanol, le dinostérone et le dinostanone, semble être étroitement corrélée avec l’abondance de dinokystes dans les sédiments marins (Mouradian et al. , 2007).

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Table des matières

REMERCIEMENTS
RÉSUMÉ
ABSTRACT
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION GÉNÉRALE
MULTY PROXY STUDY OF PRIMARY PRODUCTIVITY AND PALEOCLIMATE IN NORTHERN BAFFIN BAY, CANADA
1. INTRODUCTION 
1.1. The Arctic and Global Warming
1.2. Paleoceanography of the Arctic
1.3. Specifie objectives
2. MATERIEL AND METHOO
2.1. Sampling
2.2. Chronostratigraphy of the sedimentary sequence
2.3. Palynological analyses
2.4. Isotopie geochemistry
2.5. Analysis of organic biomarkers
3. RESULTS
3.1. Isotope geochemistry
3.2. Palynology
3.3. Reconstruction of past sea-surface conditions
3.4. Organic biomarkers
4. DISCUSSION
4.1. Recent c1imate changes of Arctic Ocean
4.2. North Water Polynya input.
4.3. Primary productivity
5. CONCLUSION
ANNEXE 1: ESTIMATE AGE VS DEPTH IN BOX CORE H U 2008-029-040 BC-C BASED ON THE CRS MODEL
ANNEXE II: DINOCYSTS IN BOX CORE HU 2008-029-040 BC-C
ANNEXE III: DENDOGRAM DISSIMILARITY
ANNEXE IV: ORGANIC BIOMARKERS IN BOX CORE HU 2008- 029-040 BC-C
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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