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L’approche expérimentale
Afin d’essayer de reproduire les textures des produits émis par les éruptions explosives, une autre approche est de simuler les conditions P-T-X subies par le magma au cours de sa remontée et d’étudier le processus de vésiculation. Les études directement représentatives du processus de vésiculation des conditions de remontée d’un magma vers la surface sont simulées par des expériences de décompression à haute pression (HP) et haute température (HT), sur des liquides silicatés hydratés de composition chimique variable, avec des taux de décompression variables et contrôlés, avec ou sans système d’observation.
La nucléation
La première étude sur la vésiculation est celle deMurase & McBirney (1973), réalisée en température (800-1100°C) et à pression ambiante, sur des rhyolites naturelles hydratées à des teneurs en eau de 0,2 %pds. Les résultats montrent que le taux de nucléation, ainsi que la dnb, dépendent de la température. Ces premières expériences apportent des informations sur les textures des échantillons naturels, cependant elles ne sont pas représentatives des conditions naturelles de remontée d’un magma.
Les études expérimentales sur la nucléation au cours d’une décompression se focalisent soit sur la nucléation homogène e(.g. Mourtada-Bonnefoi & Laporte, 1999) soit sur la nucléation hétérogène e(.g. Gardner & Denis, 2004). Ces études concernent des séries d’expériences trempées à des pressions finales variables.
Les premiers résultats concernant la nucléation homogène montrent que l’on observe un retard à la nucléation lors de la décompression. Eneffet, lorsque le seuil de saturation des volatils dans le liquide silicaté décomprimé est teint,at il n’y a pas exsolution, et il est nécessaire d’avoir des sursaturations allant de quelques centaines de bar à plusieurs kbar pour qu’il y ait nucléation (e.g. Bagdassarov & Dingwell, 1993 ; Mourtada-Bonnefoi & Laporte, 1999).
Les premiers travaux expérimentaux sur la nucléatio homogène en décompression ont été réalisés par Mourtada-Bonnefoi & Laporte (1999). Dans cette première étude, ils étudient la nucléation homogène dans des verres naturels rhyolitiques, hydratés à des teneurs en eau allant de 4 à 7 %pds et des teneurs en CO 2 jusqu’à 800 ppm. Les décompressions réalisées sont isothermes (800°C), instantanées, depuis la pression initiale de 2-2,8 kbar et jusqu’à une pression finale inférieure à 1-2 kbar, pression finale à laquelle sont maintenus les échantillons pendant un temps déterminé. Le principal résultatedleur étude est qu’il faut une très grande pression de sursaturation (> 1,5-2 kbar) pour générer une nucléation homogène dans les échantillons, produisant des bulles de taille petite et uniforme, et très nombreuses (dnb allant de 1013 à 10 15 m-3).
Mangan & Sisson (2000) ont réalisé des expériencesde décompression isotherme sur des rhyolites naturelles hydratées à des teneurs en eau de 5,2 %pds ou avec un mélange 4,2 %pds H2O + 640 ppm CO2, pour des taux de décompression allant de 0,03 à 35 bar.s-1. Ils déterminent unP minimal de 1,5 kbar nécessaire pour initier la nucléation homogène, confirmant ainsi les résultats précédents.
Mourtada-Bonnefoi & Laporte (2002), sur le même type d’expériences, ont précisé le rôle de la composition chimique et de la teneur des éléments volatils présents dans le verre silicaté, en étudiant le rôle de l’ajout de CO2 en quantités variables dans le système. La pression de sursaturation nécessaire pour initier la nucléationhomogène augmente avec la baisse de la teneur en eau et augmente avec l’augmentation de la teneur en CO2 dans le liquide.
Enfin Mourtada-Bonnefoi & Laporte (2004) ont étudiéplus spécifiquement le rôle du taux de décompression (ou taux d’ascension du magma) sur la pression de nucléation et sur la dnb en faisant varier le taux de décompression de 0,3 à 10 bar.s-1. Ils démontrent ainsi que la pression de nucléation des bulles est indépendante du taux ed décompression. A l’inverse, la dnb est dépendante du taux de décompression : plus celui-ciest élevé, plus la dnb est élevée, plus la taille moyenne des bulles est petite.
Ces résultats sont confirmés par l’étude menée parCluzel (2007). Cependant, une extrapolation aux taux d’ascension naturels des magmas produit des valeurs de dnb beaucoup plus faibles que celles retrouvées dans les échantillons de ponces naturelles.
Hurwitz & Navon (1994) ont étudié la nucléation à HP (1,5 kbar) et HT (780-850°C) sur un liquide silicaté rhyolitique saturé en eau à 5 %pdset décomprimé à des taux allant de 100 bar.s-1 à 1 kbar.s -1, et trempé à différentes pressions finales. Ils discutent le fait que la nucléation dans leurs expériences est uniquement dela nucléation hétérogène, même lorsque lesP très élevés(P ~ 800 bar) suggéreraient une nucléation homogèneIls. démontrent l’importance des oxydes de Fe-Ti comme sites de nucléation, et la plus faible efficacité des cristaux comme la biotite, l’apatite et le zircon.
Gardner & Denis (2004) ont étudié expérimentalementla nucléation hétérogène et notamment l’efficacité de différents types de cristaux commesites de nucléation. Ils déterminent ainsi que les oxydes de Fe-Ti sont très efficaces, leur présence augmentant la dnb dans l’échantillon. La nucléation sur les cristaux d’hématite dépend duP. La nucléation sur les cristaux de plagioclase n’est pas efficace.
Gardner (2007a) a étudié plus spécifiquement l’influence de la viscosité sur la nucléation hétérogène et la croissance des bulles. Les expériences sont réalisées sur une rhyolite naturelle de viscosité variable (suivant la teneur en eau, de106,6 à 10 9,4 Pa.s). Suivant le type de cristal, la nucléation a lieu ou non, confirmant les résultats de la précédente étude de Gardner & Denis (2004). Le résultat principal de leur étude ste que les variations des taux de nucléation suivant les conditions expérimentales sont principalement dues aux changements de tension de surface entre le liquide silicaté et la phase gazeuse, directement liés aux changements de la viscosité du liquide silicaté et de la diffusion del’eau en réponse aux variations de température.
Cluzel (2007) a étudié la cinétique de la nucléatiohétérogène dans des rhyolites naturelles contenant des teneurs variables en cristaux d’hématite et de magnétite, hydratées à ~ 6 %pds. Il détermine que la magnétite est un cristal favorisant la nucléation, puisque leP nécessaire à la nucléation est de l’ordre de 150 à 200 bar alors qu’elle est de l’ordre de 1,5 kbar pour la nucléation homogène sans cristal. Dans le cas de l’hématite, la pression nécessaire à la nucléation est de l’ordre de 1,3 kbar, très proche de la valeur duP pour la nucléation homogène.
La croissance
Les premières études expérimentales sur la croissance des bulles d’eau dans des rhyolites naturelles ont été réalisées à pressiontmosphériquea et en température de bulles d’eau. Ces études permettent d’établir des lois decroissance en mesurant le rayon de la bulle en croissance en fonction du temps pour des teneurs en eau très faibles, inférieures à 0,2 %pds (Murase & McBirney, 1973 ; Bagdassarov et al., 1996).
La première étude de Bagdassarovet al. (1996) a été réaliséein situ en température et à pression ambiante sur des rhyolites naturelles hydratées à 0,14 %pds ; les bulles observées sont des bulles existant préalablement dans le liquide silicaté avec un diamètre initial allant de 20 à 50 µm. Cela sert à faciliter l’observation, qu i est difficile. Ils montrent qu’il existe un temps de retard entre le moment de la sursaturation et le moment de la vésiculation, dû à la forte viscosité du liquide silicaté.
Les lois de croissance dans les conditions de ces deux études ont un début de type exponentiel, puis le rayon des bulles atteint une valeur finale constante. D’autres expériences ont été réalisées pour des teneurs en eau intermédiaires, de 1,3 à 2 %pds (Liu & Zhang, 2000).
Les courbes de croissance s’écartent des lois en Öt, prouvant ainsi le rôle important de la viscosité, notamment au départ de la croissance.
Cette première étude in situ a l’avantage de l’observation de la croissance en continu, cependant les conditions P-T-H2O ne reflètent pas les conditions naturelles des magmas en ascension dans un conduit volcanique.
Un autre type d’expériences concerne la croissance de bulles en P et T, à une pression constante pour des magmas allant d’une composition rhyolitique (Lyakhovsky et al., 1996) à albitique (NaAlSi3O8, Baker et al., 2006) et des teneurs en eau entre 0,5 et 5,5 %pds. Ces expériences sont réalisées en trois étapes : une emièrepr étape d’hydratation à HP et HT pour saturer les échantillons en eau (suivant les lois de solubilité des gaz dans les magmas). La deuxième étape consiste à amener les échantillons àune pression initiale élevée (1,5 kbar à 4,5 kbar), puis de les décomprimer très rapidement (instantanément ou à un taux de décompression de 10 bar.s ) jusqu’à une pression finale maintenue sur un temp s déterminé allant de quelques secondes à quelques heures. Enfi n, les expériences se terminent par une trempe rapide. Ces expériences sont réalisées en aveugle, les lois de croissance sont déterminées à partir des échantillons trempés.
Lyakhovsky et al. (1996) montrent que les lois de croissance de bulle unique n’arrivent pas à reproduire de manière satisfaisante les données ; ependantc le modèle de Proussevitch et al. (1993), qui tient compte de l’effet des bulles voisines sur la croissance, permet de retrouver parfaitement les données expérimentales. La croissance est dans ce cas là contrôlée par la diffusion, la viscosité n’ayant une influence sur la croissance que dans les premiers stades.
Baker et al. (2006) se placent dans le cas de liquides silicaté peu visqueux (103,9-4,4 Pa.s). Ils montrent qu’il n’y a pas de temps de retard à la cr oissance lorsque la viscosité du liquide est faible, confirmant les résultats de travaux précédents (e.g. Hurwitz & Navon, 1994 ; Gardner et al., 1999 ; Mourtada-Bonnefoi & Laporte, 2002). Suivant la composition chimique du liquide silicaté, les taux de croissance sont différents : les lois de croissance des liquides silicatés peu visqueux sont de type lois puissance, tandis que les lois de croissance des liquides silicatés plus visqueux sont de type logarithmique.
Le troisième type d’études est la croissance selonun taux de décompression contrôlé (de 0,03 à 35 bar.s -1 suivant les études), réalisées le plus souvent dans des autoclaves à chauffage interne ou à chauffage externe avec un système de trempe rapide (Gardner et al., 1999 ; 2000 ; Mangan & Sisson, 2000). Ces conditions simulent plus précisément les remontées lentes du magma depuis la chambre magmatique jusqu’à la surfa ce dans le conduit volcanique. Ces expériences sont réalisées en ‘time-séries’ et enveugle,a les échantillons étant étudiés après la trempe à des pressions finales variables. Ces expériences sont proches des expériences précédentes. Seule l’étape de la décompression diffère puisqu’elle se fait avec un taux de décompression contrôlé. Gardner et al. (1999) ont ainsi étudié l’influence du taux de décompression sur la capacité du liquide silicaté à dégazer avant d’arriver en surface, et à la capacité de maintenir un équilibre chimique entre le liquide silicaté et les bulles. L’efficacité du dégazage est évaluée par la mesure de la teneur en eau dissoute dans le verre après expériences, et par la mesure de la taille des bulles et de la porosité de l’échantillo. Ils démontrent que le dégazage se fait à l’équilibre uniquement dans le cas du faible taux de décompression de 0,25 bar.s . Ces données expérimentales confirment bien les simulations numériques de Proussevitch & Sahagian (1996, 1998).
Dans une autre étude, Gardneret al. (2000) testent l’influence de la viscosité sur la croissance des bulles pendant la décompression sur des obsidiennes rhyolitiques saturées en eau. Ils déterminent que la viscosité n’a pas d’influence sur la nucléation. Par contre la résistance visqueuse d’un liquide silicaté peut gêner la croissance d’une bulle, notamment lorsque le temps nécessaire pour la croissance est inférieur ua temps de relaxation du liquide silicaté autour de la bulle. Ce temps de relaxation du liquide silicaté augmente avec la viscosité du liquide silicaté, confirmant ainsi les résultats des modèles de Lyakhovsky et al. (1996), Proussevitch & Sahagian (1998), Navon et al. (1998).
Seulement une étude expérimentale a été réaliséepressionen et en température in situ, avec une observation optique de la nucléation et de la croissance des bulles (Martel & Bureau, 2001). La vésiculation a lieu dans un liquide silicaté (verre synthétique haplogranitique HPG8), en pression (7-21 kbar), en température (700-900°C) et pour des fortes teneurs en eau (12-30 %pds). Ces expériences ont été réaliséesnsdaune cellule à enclumes de diamants (CED) hydrothermale de type Bassett. Les lois de croissance des bulles sont logarithmiques et se rapprochent ainsi des conditions de basse pression ou de grande sursaturation en eau évoquées par Proussevitch & Sahagian (1998) pour expliquer des lois de croissance de type logarithmique.
Cependant, les conditions P-T-H2O de ces expériences ne sont pas représentatives des conditions naturelles de remontée d’un magma rhyolitique dans un conduit volcanique. En effet, avec une cellule à enclumes de diamants hydr othermale, la baisse de pression est générée par la baisse de température : la décompression n’est donc pas isotherme (baisse de température de 100 à 200°C suivant les expériences). Cela rend difficile la comparaison des résultats avec les résultats obtenus en aveugle enautoclaves à chauffage externe ou même avec les modèles de croissance réalisés majoritairement à température constante. De plus, les expériences en CED sont réalisées à des pressions ed l’ordre de 7 à 21 kbar, pressions qui sont beaucoup plus élevées que dans le cas de remontéeedrhyolites dans le conduit volcanique où la pression initiale est généralement inférieure 5à kbar. Cependant cette étude est la première étude en pression et en température où il est possible d’observer directement le dégazage d’un liquide silicaté, de la nucléation des bulles jusqu’à leur coalescence.
La coalescence
Seules deux études expérimentales (Larsenet al., 2004 ; Gardner, 2007b) se sont focalisées sur l’étude du processus de coalescence,en décompression et en aveugle, pour des pressions initiales de 1 à 1,5 kbar et des températures de 750°C à 850°C.
Larsen et al. (2004) présentent une étude expérimentale sur laoalescence de bulles dans un magma de composition rhyolitique à phonolitique en décompression, pour une température de 775°C à 840°C, pour des teneurs en eau de l’ordre d e 10 %pds, des pressions de 1-1,5 kbar et un taux de décompression de l’ordre de 100 bar.s-1. Ils examinent deux cas de coalescence : le cas d’une « émulsion statique », lorsque la pression extérieure est constante et le cas d’une « mousse en expansion » lorsque la coalescence a lieu entre des bulles qui remontent dans le conduit (donc soumises à une décompression). Le résultat de leurs expériences montre que la dnb diminue au fur et à mesure que les processus de coalescence et de mûrissement d’Ostwald ont lieu, après la nucléation et la croisance. Lorsque la viscosité du liquide silicaté atteint des valeurs de 103 à 10 6 Pa.s, le processus de coalescence sera gêné par laviscosité ; de la même manière, plus le magma est décomprimé rapidement, plus la coalescence sera facilitée. De plus, ils montrent, grâce à leurs exp ériences de coalescence en expansion, que même pour des taux de remontée relativement rapided’un magma rhyolitique dans le conduit (de l’ordre de 20 m.s -1), la coalescence ainsi que l’inter-connectivité des bulles pendant la remontée peut avoir lieu.
Gardner (2007b) a réalisé des expériences de coalescence, en aveugle, sur des rhyolites naturelles hydratées à 2-5,3 %pds, pour des températures de 725°C à 875°C, des pressions de l’ordre de 1 kbar, et des taux de décompression lents (de 0,06 à 0,25 bar.s -1) pour maintenir un équilibre pendant la décompression. Il étudie l’influence du taux de décompression et de la viscosité (variant de 10 à 10 Pa.s) sur la coalescence. Le processus de la coalescence est étudié en regardant l’évolution de la taille des bulles et de la dnb. Les résultats confirment ceux de Larsen et al. (2004) : la viscosité a une forte influence sur l’efficacité de la coalescence, celle-ci est gênée lorsque le liquidesilicaté est plus visqueux. Le taux de décompression joue également un rôle important : lacoalescence peut être absente si le taux de décompression est très élevé. Il démontre également que l’un des paramètres contrôlant l’étendue du processus de coalescence est la distance entre les bulles : dans le cas de ces expériences, si les bulles sont éloignées de plused10 µm, même si le temps nécessaire à la coalescence est suffisant, les bulles ne pourront pas coalescer. Le processus de coalescence dépendrait donc directement de la dnb initiale.
Il apparaît que pour pouvoir comprendre le processus de dégazage des magmas rhyolitiques au cours de leur remontée dans le conduit volcanique, il est nécessaire de pouvoir caractériser le processus de vésiculation de( la nucléation des bulles à leur coalescence) et son évolution dans le temps, en se rapprochant le plus possible des conditions P-T-H2O naturelles. Pour cela, deux outils expérimentaux permettant l’observation directe du processus de vésiculation,en pression et en température, ont été développés dans le présent travail.
Techniques expérimentales et développements méthodologiques
Ce chapitre est consacré aux deux outils expérimentaux utilisés au cours de ce travail : les autoclaves à chauffage interne (ACI) et les cel lules à enclumes de diamants (CED).
La première partie présente les deux types d’ACI que nous avons utilisés, l’un dit « classique » et l’autre « transparent ».
La deuxième partie présente les CED d’un point de vue général puis la CED de type Bassett utilisée pour cette étude. La fin de ce chapitre est dédiée à la technologie des diamants implantés adaptée aux CED, permettant un contrôle précis de la pression et de la température.
Les autoclaves à chauffage interne
Les autoclaves à chauffage interne (ACI) sont des e nceintes haute pression hermétiques qui permettent d’amener un échantillonsous une pression de gaz et sous une température contrôlées. Ils sont appelés chauffageinterne car le four lui-même est sous pression. Ce type d’outil est utilisé depuis les années 50 pour réaliser des expériences pour des pressions allant jusqu’à 10 kbar et des températures allant jusqu’à 1500°C (Holloway, 1971).
L’avantage majeur des ACI par rapport aux autres autoclaves est que le volume d’échantillon sous pression est grand, pouvant aller jusqu’à quel ques cm3. Mais du fait de ce grand volume de gaz sous pression, les taux de refroidissement sont faibles, de l’ordre de 3°C.s -1 pour les ACI classiques (Holloway & Wood, 1988). Des systèmes dits de « trempe rapide » ont été mis au point pour permettre un taux de trempe allant jusqu’à plusieurs centaines de degrés par secondes (Roux & Lefèvre, 1992 ; Holloway et al., 1992).
Dans le cadre de ce travail, deux types d’autoclaves à chauffage interne ont été utilisés : l’un ‘classique’ équipé d’une trempe rapide, l’autre transparent.
Techniques expérimentales et développements méthodologiques
Les autoclaves à chauffage interne à trempe ra pide
Les ACI à trempe rapide que nous avons utilisés sont situés à l’Institut des Sciences de la Terre d’Orléans ISTO (Figure II.1). Ils ont été utilisés afin de réaliser des expériences d’hydratation à une pression de 3 kbar et une température de 1200°C (voir chapitre V.A).
Ces ACI sont constitués de deux cylindres en acier emboîtés entre lesquels passe un système de refroidissement d’eau. Les cylindres sont fermés par deux obturateurs à chaque extrémité. Ces obturateurs portent les différents passages pour les thermocouples et les alimentations du four, et assurent l’étanchéité de l’autoclave. Ilsont utilisés en position verticale. Le milieu de pression est l’argon (Ar). Le système de mise sous pression est constitué d’une pompe à air comprimé 0,5 kbar, d’un multiplicateur hydraulique 2 kbar et d’un deuxième multiplicateur hydraulique 10 kbar.
Afin d’assurer l’étanchéité de l’autoclave en pression, le corps de l’autoclave est scellé grâce à des joints de type Bridgman consistant en une alt ernance de joints téflon/caoutchouc/téflon (Bridgman, 1971). Cette configuration est optimale jusqu’à des pressions de 4 kbar, pression que nous n’avons pas dépassée. L’obturateur arrièrepossède un passage pour l’alimentation en gaz. L’obturateur avant possède 6 passages étanches pour les thermocouples (2), les alimentations du four (2) ainsi que l’alimentation des cannes de trempe (2). Ces passages sont réalisés grâce à des cônes métalliques en appui sur des cônes en plastique (PSU) pour assurer l’étanchéité sous pression.
La cellule sous pression est présentée schématiquement dans la Figure II.2. Celle-ci est située dans le corps de l’autoclave, elle est constituée d’un four et d’un système de trempe rapide.
Les différents fours utilisés sont constitués de deux enroulements de fils de molybdène (Mo), en double spirale, autour d’un moufle Inconel 600 (voir Roux et al., 1994 ; Champallier, 2005). Ce double enroulement permet de contrôler pr écisément la zone chaude du four. Deux thermocouples sont placés respectivement en haut eten bas de la zone chaude. Cela permet d’ajuster les résistances indépendamment l’une de ’autrel pour diminuer au maximum les gradients thermiques dans la chambre à échantillons.
La zone chaude est longue de 5 cm, assurant sur cette longueur une température homogène à ± 1°C. Les capsules introduites dans les ACI ont une longueur de 5 cm au maximum. On peut ainsi supposer que la température est homogène surtout le volume d’échantillon.
Le système de trempe rapide a été décrit dans Roux& Lefèvre (1992). Ce système est constitué d’un porte échantillon, dans lequel sontplacées les capsules de l’expérience. Ce porte échantillon, placé dans la zone chaude du four, est relié par un fil de platine (Pt) à deux cannes de trempe conductrices électriquement.
Lorsque l’on veut tremper les échantillons, le four de l’autoclave est coupé. Simultanément, un courant électrique est envoyé dans les deux cannes de trempe, faisant chauffer le fil de Pt qui se rompe ; le porte échantillon ‘tombe’ alors dans la partie froide de l’autoclave, assurant ainsi une trempe de l’ordre de 900°C.min -1.
L’autoclave à chauffage interne transparent
Dispositif expérimental
L’autoclave à chauffage interne transparent (ACIT) est un autoclave prototype inspiré de la technologie des ACI classiques (Figure II.3). Il a été mis au point au Laboratoire Pierre Süe (Massare et al., 1987) et a été modifié pour cette étude (voir Gondé et al., 2006 en annexe). La remise en fonctionnement, les tests et calibrations ont été réalisés en collaboration avec Dominique Massare.
Son originalité réside dans le fait qu’il est équip de fenêtres transparentes, ce qui permet l’observation directe de l’échantillon en pression et en température pendant les expériences. Il n’est pas équipé d’un système permettant un refroidissement rapide.
L’autoclave est présenté schématiquement dans la Figure II.4, et consiste en un cylindre à parois fines en acier à hautes propriétés mécaniques (acier 819 AW). Il a un diamètre interne de 50 mm et un diamètre externe de 150 mm. Un système de refroidissement, constitué d’un tuyau en caoutchouc enroulé autour du cylindre externe, permet de maintenir le corps de l’autoclave à des températures inférieures à 100°C pendant les expériences, lorsque le four fonctionne. Le système de refroidissement est protégé par des plaques en acier fixées sur le corps de l’autoclave.
Température de 20 à 150°C – Iodure d’argent
La vérification de la mesure de la pression, ainsi que la mesure du gradient de température pour T < 150°C a été réalisée en observant la transition de phase de AgI pour une pression allant de la pression atmosphérique à 3 kbar.
Des morceaux de AgI sont placés dans la chambre à échantillons de l’autoclave et les transitions- et- sont observées. On se place à une pression donnéeet l’on fait varier la température. Deux cycles sont réalisés : le premiercycle consiste à augmenter la température pour observer la transition- ; le deuxième cycle consiste à diminuer la température pour observer la transition-. Le processus est instantané et dure typiquement 1 à 2 secondes (Figure II.10, Figure II.11, Tableau II.2).
La Figure II.11.a (triangles pleins et vides) présente les résultats obtenus pendant les cycles de température croissante. On observe un bon accord entre les valeurs théoriques (Mellander et al., 1981) obtenues par conductivité électrique et parmesure par coloration différentielle et nos données expérimentales. Les deux courbes de laFigure II.11.a représentent les points expérimentaux pour deux fours différents. Pour le ourf n°0 (triangles vides), le gradient de température est de ± 5°C au maximum. Pour le four n°5 (triangles pleins), le gradient de température est en moyenne de 4°C.
La Figure II.11.b présente les résultats obtenus pour les transitions de phase pendant les cycles de température décroissante. Les transitionsde phase durant ce cycle se font avec un certain retard, la courbe est décalée : c’est un phénomène d’hystérésis. Le gradient de température pour le four n°0 est alors de 9°C en moyenne.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I – Contexte scientifique de l’étude
A. Cadre scientifique : dynamique éruptive et dégazage des magmas acides
B. L’approche par l’étude des textures des échantillons naturels
C. L’approche théorique : principes de la nucléation, la croissance et la coalescence
C.1. La nucléation
C.2. La croissance
C.3. La coalescence
D. L’approche expérimentale
D.1. La nucléation
D.2. La croissance
D.3. La coalescence
Chapitre II – Techniques expérimentales et développements méthodologiques
A. Les autoclaves à chauffage interne
A.1. Les autoclaves à chauffage interne à trempe rapide
A.2. L’autoclave à chauffage interne transparent
A.2.1. Dispositif expérimental
A.2.2. Calibration de la pression et de la température dans l’autoclave
A.2.2.1 Température de 20 à 150°C – Iodure d’Argent
A.2.2.2. Température entre 500 et 600°C – Aluminate de Lanthane
A.2.2.3. Température entre 900 et 1000°C – Argent
A.2.2.4. Conclusions
B. Les cellules à enclumes de diamants
B.1. Les cellules à enclumes de diamants
B.1.1. Principe
B.1.2. Mesure de la température
B.1.3. Mesure de la pression
B.2. La cellule à enclumes de diamants de type Bassett
B.2.1. Principe général
B.2.2. Mesure de la température
B.2.3. Calcul de la pression
B.2.4. Discussion sur la mesure de la température et de la pression
B.2.4.1. Discussion sur la mesure de la température
B.2.4.2. Discussion sur le calcul de la pression
B.3. Implantation de capteurs dans les enclumes de diamants ou « enclumes intelligentes »
B.3.1. Définition et principe des diamants semi-conducteurs
B.3.2. Présentation de l’implantation ionique
B.3.3. Les différents types de capteurs existants
B.3.3.1. Les capteurs de pression et de température
B.3.3.2. Autres applications
B.3.4. Préparation des capteurs de température
B.3.4.1. Fabrication de la diode
B.3.4.2. Fabrication des contacts
B.4. La cellule à enclumes de diamants de type Burchard-Zaistev
B.4.1. Principe
B.4.2. Les premiers tests de la cellule Burchard-Zaistev
B.4.3. Modifications de la cellule Burchard-Zaistev
B.4.4. Protocole expérimental
B.4.4.1. Les premiers tests effectués en température
B.4.4.2. Description du montage expérimental
B.4.4.3. Description des diamants implantés étudiés
B.4.5. Calibration de la température à pression ambiante
B.4.5.1. Caractéristiques électriques des diamants et des contacts àT ambiante
B.4.5.2. Mesures de la résistance en fonction de la température
B.4.5.3. Calibration de la température dans la chambre à échantillons
B.4.5.4. Discussion sur le comportement des capteurs en fonction de la température
B.4.6. Conclusion et perspectives de l’utilisation de ces capteurs
Chapitre III – Techniques de caractérisation des échantillons expérimentaux
A. Analyse globale de l’eau dans les verres de départ par titration Karl Fischer (KFT)
A.1. Principe
A.2. Procédure
B. Analyse ponctuelle de l’eau par spectrométrie infrarouge à Transformée de Fourier (FTIR)
B.1. Principe
B.2. Procédure
C. Analyse ponctuelle de l’eau par la méthode ERDA (Elastic Recoil Detection Analysis)
C.1. Dispositif expérimental : la microsonde nucléaire
C.1.1. Principe général de l’ERDA
C.1.2. Principes de la RBS et du PIXE
C.2. Procédure
C.2.1. Préparation des échantillons
C.2.2. Procédure expérimentale
C.2.3. Mode opératoire
C.2.4. Analyse des spectres
D. Caractérisation des échantillons expérimentaux par analyse de films et d’images
D.1. Traitement des films
D.1.1. Films réalisés dans la cellule à enclumes de diamants
D.1.2. Films réalisés dans l’autoclave transparent
D.2. Paramètres texturaux des échantillons vésiculés
D.2.1. Taille des bulles
D.2.1.1. Echantillons trempés en cellule à enclumes de diamants
D.2.1.2. Echantillons trempés en autoclave transparent
D.2.2. Densité numérique de bulles
D.2.2.1. Echantillons trempés en cellule à enclumes de diamants
D.2.2.2. Echantillons trempés en autoclave transparent
Chapitre IV – Etude in situ du dégazage d’un magma rhyolitique en décompression et à température décroissante
A. Présentation des expériences de décompression
A.1. Les matériaux de départ
A.2. Protocole des décompressions
A.2.1. Montage expérimental
A.2.2. Protocole expérimental
B. Résultats des expériences de décompression
B.1. La nucléation
B.1.1. Conditions initiales des expériences de décompression
B.1.2. Pression de nucléation, pression de sursaturation
B.1.2.1. Influence du taux de décompression
B.1.2.2. Influence de la taille du globule de liquide silicaté
B.1.3. Densité numérique de bulles
B.2. Croissance des bulles
B.3. Etude de la coalescence des bulles
B.3.1. Les événements de coalescence
B.3.2. Rayons des bulles
B.3.3. Lois de croissance
B.3.4. Cinétique de la coalescence
B.4. Conclusions
Chapitre V – Etude in situ du dégazage d’un magma rhyolitique en décompression et à température constante
A. Stratégies expérimentales adoptées en autoclave à chauffage interne transparent
A.1. Synthèse des produits de départ
A.1.1. Choix des compositions des matériaux de départ
A.1.2. Synthèse du verre initial
A.1.3. Hydratation du verre
A.1.3.1. Conditions d’hydratation des verres
A.1.3.2. Préparation des capsules
A.1.3.3. Caractérisation des verres de départ
A.2. Les expériences de décompression en autoclave à chauffage interne transparent
A.2.1. Montage expérimental
A.2.2. Protocole expérimental
B. Résultats des expériences de décompression
B.1. Teneurs en eau des échantillons avant nucléation
B.1.1. Calculs de diffusion
B.1.1.1. Diffusion pendant la montée en température
B.1.1.2. Diffusion pendant la décompression
B.1.1.3. Diffusion pendant la trempe
B.1.1.4. Distance caractéristique de diffusion totale
B.1.2. Mesures de la teneur en eau des échantillons non vésiculés
B.1.3. Détermination des lois de perte en eau
B.2. Pression de nucléation
B.2.1. Détermination des pressions de nucléation
B.2.2. Détermination des teneurs en eau au moment de la nucléation
B.2.3. Influence de divers paramètres sur les pressions de nucléation
B.2.3.1. Influence de la teneur en eau
B.2.3.2. Influence du taux de décompression
B.2.3.3. Influence de la température
B.3. Texture des échantillons trempés
B.3.1. Description des échantillons
B.3.2. Population et tailles de bulles
B.3.3. Coalescence
B.3.4. Teneurs en eau des produits trempés
B.4. Vésicularité et densité numérique de bulles
B.4.1. La vésicularité
B.4.2. La densité numérique de bulles
B.4.3. Influence de divers paramètres sur la densité numérique de bulles
C. Discussion
C.1. Perte en eau des verres expérimentaux : importance et applicabilité
C.2. Nucléation des bulles : influence de la teneur en eau et du taux de décompression
C.2.1. Pression de nucléation, pression de sursaturation
C.2.2. Densité numérique de bulles
C.3. Croissance et coalescence de bulles
Conclusions et perspectives
Références
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