D’aprèsl’OMS, le CaP est le deuxième cancer le plus fréquent dans le monde mais le cinquième le plus mortel. En effet, l’évolution de la maladie est longue, et l’âge moyen du diagnostic est 70 ans, les patients atteints de CaP meurent plus souvent d’une autre cause que de l’évolution du cancer. Le ratio mortalité sur incidence est plus faible que pour d’autres cancers, ce qui s’explique d’une part par l’efficacité des traitements curatifs, l’évolution longue de la maladie, mais également par une proportion non négligeable de « tumeurs latentes » (insignifiantes ou indolentes). Ce constat soulève le problème du dépistage organisé dans la population générale. En effet, depuis l’avènement du dosage du PSA dans les années 1980, l’incidence du CaP a fortement augmentée. Le concept de tumeur « latente », autrement dit « tumeur dont l’évolution naturelle n’est pas mortelle », est apparu dans les années 1990. Les sociétés savantes et les organismes de santé publique se sont donc interrogés sur la pertinence de diagnostiquer un cancer qui dans certains cas ne mettrait pas en danger la vie du patient à court ou moyen terme, et de le traiter, en raison de la morbidité qui s’y associe (effets secondaires des traitements), et du coût pour la société. Deux grandes études randomisées ont évalué le dépistage systématique du CaP dans la population générale, l’une européenne (ERSPC) (1) et l’autre américaine (PLCO) (2), dont les résultats sont parus en 2009 dans le New England Journal of Medecine. Seul l’essai ERSPC montrait un gain significatif de 20% de survie dans le bras dépisté, mais au prix d’un nombre important de CaP latents identifiés. L’essai PLCO n’a pas montré quant à lui de bénéfice en matière de mortalité mais il présentait différents biais méthodologiques. À la lumière de ces résultats, les autorités de santé publique européennes et américaines se sont opposées au principe du dépistage de masse du CaP, au profit d’un dépistage «individuel » par le médecin, afin de pouvoir donner différentes informations au patient sur les résultats du dépistage et les traitements en cas de CaP. Les sociétés savantes ont donc publié, à partir d’une littérature assez étendue, des recommandations sur le dépistage, qui varient selon la nature des examens (PSA +/ TR), du rythme de dépistage et de la population ciblée. Ce dernier point paraît primordial puisque l’on sait que le CaP est plus fréquent chez les noirs, chez les patients plus âgés, et chez les sujets qui présentent un antécédent familial ou génétique de CaP. L’antécédent familial de CaP peut être défini soit par le nombre de patients atteints dans la famille et leur lien de parenté (1er, 2ème, 3ème degré…), soit par l’âge de survenue du CaP chez ces apparentés, qui, s’il est précoce, représente un facteur de risque plus important car évoquant une forme héréditaire. Peu d’études s’intéressent spécifiquement au dépistage dans ces familles à risque en fonction de ces deux critères. L’étude PROGENE, initiée en 1994 et promue par le CeRePP (Centre de Recherche pour les Pathologies Prostatiques), a recruté une cohorte de patients présentant un facteur de risque familial confirmé de CaP, et mis en place l’ « étude Française sur le dépistage du CaP dans les familles à risque » . Le dépistage annuel par dosage du PSA était évalué dans cette population. Les premiers résultats, à l’issue du premier tour de dépistage, ont été publiés en 2002 par Valeri et al.(3). L’âge de diagnostic précoce de CaP dans la famille (<65 ans) était alors significativement corrélé au risque de développer un CaP chez les apparentés.
L’OMS estime que le CaP est le deuxième cancer le plus fréquent chez l’homme, avec 1,1 millions de cas en 2012. Environ 70% des CaP sont distribués dans les régions développées en raison de l’utilisation répandue du dosage du taux PSA et de la réalisation de biopsies de prostate. Les taux standardisés à la population mondiale (TSM ) les plus élevés sont constatés en Australie et en Amérique du nord (TSM = 11,6 et 97,2 respectivement). L’incidence est par ailleurs élevée dans les Caraïbes, l’Afrique du sud et l’Amérique du sud (TSM = 79,8 ; 61,8 et 60,1 respectivement), mais reste faible en Asie. (TSM=4,5-10,5) (4) (Annexe 1, page 79). Avec 307000 décès dans le monde en 2012, le CaP est la 5ème cause de décès par cancer chez l’homme et concerne 6,6% des décès toutes causes confondues. Les taux de décès sont plus importants dans les populations noires et plus faible dans les populations asiatiques (TSM = 19-29 et 2,9 respectivement).
En France le CaP est le cancer le plus fréquent, tous sexe confondus, avec 5 6841 nouveaux cas en 2012, dépassant le cancer du sein (48 763), du côlon (40 825) et du poumon (40 043). Le TSM est évalué à 98 en 2012 (4). L’évolution de l’incidence est difficile à prévoir. Une forte augmentation est apparue entre 1980 et 2005 (+ 6,6%) (Figure 1), notamment due à l’amélioration des techniques de biopsie échoguidées et l’avènement du dosage du PSA. On a observé une chute de TSM de près de 4% jusqu’en 2011 suite aux recommandations des sociétés savantes qui responsabilisent davantage le médecin et le patient quant au dépistage du CaP (5). Le taux de CaP progresse à partir de 50 ans pour atteindre un pic d’incidence autour de 70 ans.
Avec 8 893 décès en 2011, les décès par CaP se placent en 4ème position des décès par cancer en France, après les cancers du sein, du poumon et du colon-rectum. On observe une baisse constante de la mortalité depuis la fin des années 1990 (Figure 1) où les TSM sont passés de 18 à 10,5 en 2011 (6). Cette baisse est attribuée à l’amélioration des traitements, notamment les différentes hormonothérapies qui améliorent la survie à une phase avancée de la maladie, ainsi qu’au dépistage par dosage du PSA qui a permis de diagnostiquer des formes plus précoces et plus souvent curables, posant parfois le problème de sur-diagnostic (formes latentes) de CaP .
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Table des matières
I. OBJECTIFS
II. INTRODUCTION
III. ÉTAT DE L’ART
A. ÉPIDÉMIOLOGIE
1. TENDANCE MONDIALE
2. INCIDENCE EN FRANCE
3. LA MORTALITÉ EN FRANCE
B. FACTEURS DE RISQUES
1. ÂGE
2. ORIGINE ETHNIQUE
3. ANTÉCÉDENT FAMILIAL DE CAP
4. FACTEURS GÉNÉTIQUES (11)
5. FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX
C. ASPECT CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
1. GÉNÉRALITÉS
2. CLASSIFICATION CLINIQUE
a. Stade TNM (Annexe 2,)
b. Classification de d’Amico
c. Formes latentes
d. Formes agressives
e. Extension locale du CaP
3. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE
a. Différents traitements curatifs
1) Prostatectomie radicale
2) Radiothérapie externe
3) Curiethérapie
4) Autres thérapies
b. Tumeurs cliniquement localisées
1) Tumeurs à bas risque
2) Tumeurs à risque intermédiaire
3) Tumeurs à haut risque
c. Tumeurs à haut risque, localement avancées
4. FORMES FAMILIALES DE CAP
a. Définitions des familles à risque génétique
b. Aspects cliniques
D. DÉPISTAGE DU CAP
1. DIFFÉRENTS TYPES DE DÉPISTAGES
a. Dépistage organisé
1) Le cancer colorectal
2) Le cancer du col de l’utérus
3) Le cancer du sein
b. Dépistage individuel
2. DÉPISTAGE DU CAP DANS LA POPULATION GÉNÉRALE
a. Résultats des principales études dans le dépistage de masse
1) PLCO (Prostate, Lung, Colorectal And Ovarian Cancer Screening)
2) ERSPC (European Randomized Study of Screening for Prostate Cancer)
3) Recommandations des sociétés savantes
4) Recommandations des organismes de santé publique
3. DÉPISTAGE DU CAP DANS LES FAMILLES À RISQUE
a. Dépistage génétique
b. Résultats des principales études dans le dépistage des populations à risque familial de CaP
c. Modalités pratiques
IV. CONCLUSION
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