La mise en forme des poudres ou métallurgie des poudres est un procédé en plein développement, de plus en plus adaptée à la fabrication de pièces mécaniques de petites et moyennes dimensions mais aussi comme moyen de synthèse de matériaux nouveaux, exigés par les techniques de pointes, telles que les industries nucléaire, aérospatiale, automobile… Pour les pièces de structures, cette filière concurrence les méthodes d’élaboration plus traditionnelles comme le moulage ou le forgeage, notamment. Son grand intérêt tient au fait qu’elle permet des cadences de production très élevées sur de grandes séries avec un nombre réduit d’étapes de fabrication moyennant une utilisation optimale de la matière première et un coût des opérations de base relativement faible. Cependant, son développement est limité par les difficultés à obtenir simultanément de hautes caractéristiques mécaniques et une grande précision dimensionnelle.
En particulier, les dimensions des pièces produites dépendent des opérations de compression et de frittage. Au cours de cette première opération, le frottement sur les parois de la matrice induit par l’action de la pression axiale exercée sur la poudre est généralement la cause d’une répartition non homogène de la densité au sein du comprimé dit « à vert » ou « à cru ». Ce premier facteur conduit généralement à des retraits plus ou moins anisotropes au cours du frittage, qui affectent considérablement la précision des cotes des pièces si bien que des opérations de recompression, calibrage et/ou usinage sont souvent nécessaires. Pour certains matériaux comme les aciers, les changements de forme entre la pièce à vert et le fritté sont limités (retraits de l’ordre du pourcent) en raison de densités élevées atteintes à l’issue de la compression. La maîtrise des cotes des pièces au cours des opérations de compression et d’éjection est alors primordiale mais délicate car elle dépend essentiellement des propriétés des poudres, compressibilité, densité apparente et pression appliquée. Dans le cas des poudres dures comme les céramiques, les densités atteintes après compression sont faibles (entre 50 et 60% en densité relative) et par conséquent les retraits au cours de la densification par frittage sont importants. La maîtrise des changements de forme au cours du frittage est alors beaucoup plus importante. Enfin, en raison du caractère relativement friable du comprimé après compression, l’opération d’éjection de la pièce peut induire des fissures conduisant irrémédiablement la pièce au rebut. Tous ces artefacts alourdissent considérablement les frais de mise au point d’une nouvelle fabrication qui ne sont amortis que sur des séries importantes. Le calcul des dimensions des outillages par les ingénieurs des bureaux des méthodes est par conséquent une tâche ardue et fastidieuse pour laquelle l’outil de simulation numérique semble s’imposer .
Métallurgie des poudres
La métallurgie des poudres peut être caractérisée par les trois mots clés suivants : poudre, pression et température. Les différents modes de fabrication sur laquelle elle repose, permettent l’obtention de pièces poreuses ou non, de formes, dimensions et masses variés. Les techniques intervenants successivement au cours de l’élaboration d’un composant peuvent se résumer de la façon suivante :
– élaboration de la poudre,
– densification et mise en forme,
– frittage,
– calibrage, traitements thermiques et finitions.
Elaboration de la poudre
Les poudres utilisées ne sont pas des produits naturels au sens où elles ne sont pas issues directement du milieu naturel. Elles sont produites suivant différentes méthodes dont chacune se distingue par les propriétés conférées non seulement à la poudre en terme de granulométrie, microstructure, coulabilité, compressibilité … mais également à la pièce finale. Ces méthodes peuvent être dissociées en deux classes différentes : les méthodes mécaniques et chimiques.
Les méthodes dites mécaniques rassemblent principalement deux techniques :
– Le broyage repose sur la fragmentation d’un matériau solide sous l’effet de chocs répétés. Des éléments étrangers tels que des billes sont généralement utilisés afin d’accroître l’intensité du broyage sous l’effet des impacts, de la pression et des frottements mutuels. Le broyage peut être réalisé à sec ou par voie humide.
– L’atomisation consiste à désintégrer (et solidifier) un métal liquide sous l’effet d’un gaz, d’un liquide sous pression, ou d’ultrasons. Le degré de dispersion, de forme et de structure des particules de poudre peuvent varier en changeant l’énergie mise en jeu, la température, la viscosité, la tension de surface et les conditions de refroidissement de l’alliage liquide.
Les méthodes chimiques sont beaucoup plus nombreuses et variées. On peut citer comme exemple :
– La réduction d’un composé métallique par un agent réducteur solide ou gazeux représente la méthode de production la plus utilisée à ce jour. Les procédés utilisent principalement le carbone et l’hydrogène comme milieu réducteur. Une partie des poudres de fer de Höganäs est produite de cette manière, le minerai de fer est réduit par l’intermédiaire d’un agent réducteur solide et subit par la suite diverses opérations de séchage, séparation magnétique, recuit … Néanmoins, le procédé d’atomisation tend aujourd’hui à supplanter ce procédé : nous verrons que la poudre de fer Distaloy AE, étudié dans ce manuscrit, est une poudre atomisée.
– L’électrolyse d’une solution aqueuse d’un sel de métal est réservée à la production de poudres très pures (fer, cuivre, nickel par exemple). Son utilisation est également limitée par son coût relativement élevé.
– La méthode par plasma permet de produire des poudres ultrafines. Les particules de poudres sont produites sous l’action d’un jet d’argon ionisé à très haute température, 4500◦C à 5000◦C.
Dans la majorité des cas, les poudres ne sont pas utilisées directement après production. Des procédés de classification de la taille des grains, de réduction, de recuit, de mélangeage avec un lubrifiant ou un liant et de granulation sont fréquemment mis en œuvre.
Densification et mise en forme
La mise en forme des poudres métalliques est un procédé utilisé pour produire des pièces ayant une forme particulière à partir d’une poudre métallique. L’opération de densification et de mise en forme conduit à une pièce cohésive manipulable dite « à vert » ou « à cru ». La pièce subit ensuite une opération de frittage qui se distingue de la précédente par le fait qu’elle a lieu à haute température et conduit généralement la pièce à sa densité théorique maximale. L’objectif principal de la densification est donc de produire une pièce capable d’être manipulée au cours des procédés de production avals. Les techniques mises en œuvre reposent pour la plupart sur la notion de pression.
– La compression à froid en matrice est en pratique une des principales méthodes utilisées. Elle occupe au sein de ce travail une place essentielle puisque la première partie de ce rapport lui est consacrée. Dans ce contexte, nous avons souhaité la détailler. Dans une description successive de la mise en forme d’une pièce par ce biais, l’étape initiale consiste à remplir la matrice.
Un sabot, relié à une trémie assure généralement l’alimentation de manière automatique. La vibration du sabot ou parfois de l’ensemble sabot et matrice augmente la coulabilité de la poudre et modifie également la densité initiale, dite densité de remplissage, dans la matrice. L’arasement que provoque le retrait du sabot permet d’assurer que la même quantité de poudre soit déversée à chaque passe. L’étape suivante consiste à comprimer la poudre. Les forces généralement mises en jeu au travers de poinçons doivent vaincre :
1. les forces de frottement de la poudre contre les parois de la matrice,
2. les forces de frottement interparticulaire ou frottement interne,
3. les forces pour déformer plastiquement les particules de poudre.
|
Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 Métallurgie des poudres et Pré-requis
1.1 Introduction
1.2 Métallurgie des poudres
1.2.1 Elaboration de la poudre
1.2.2 Densification et mise en forme
1.2.3 Frittage
1.2.4 Calibrage, traitements thermiques et finitions
1.3 Notions sur la formulation des lois de comportement élastoplastique
1.3.1 Aspects phénoménologiques
1.3.2 Critère de plasticité
1.3.3 Loi d’écoulement
1.4 Les matériaux de l’étude
1.4.1 Poudre de fer Distaloy AE
1.4.2 Poudre WC-Co
1.4.3 Poudre WC-TiCN
1.5 Conclusion
Chapitre 2 Caractérisation expérimentale des matériaux pendant la phase de compression
2.1 Introduction
2.2 Essais de compression en matrice instrumentée
2.2.1 Dispositif expérimental
2.2.2 Méthode d’étalonnage de la matrice
2.2.3 Principe et interprétation de l’essai
2.2.4 Influence de la hauteur de poudre comprimée sur les résultats
2.2.5 Résultats expérimentaux
2.3 Essais de compression simple
2.3.1 Généralités sur l’essai de compression simple
2.3.2 Influence de l’élancement des échantillons
2.3.3 Influence de la lubrification
2.3.4 Résultats expérimentaux
2.4 Essais de compression diamétrale
2.4.1 Principe de l’essai
2.4.2 Influence de la géométrie des échantillons sur les résultats
2.4.3 Résultats expérimentaux
2.5 Essais de frottement
2.5.1 Dispositif expérimental et principe de l’essai
2.5.2 Analyse des résultats
2.6 Mesure des paramètres élastiques des matériaux
2.6.1 Dispositif expérimental et principe de l’essai
2.6.2 Résultats expérimentaux
2.7 Conclusion
Chapitre 3 Simulation numérique
3.1 Introduction
3.2 Présentation et identification des paramètres du modèle
3.2.1 Modèle de Drucker-Prager/Cap dans ABAQUS
3.2.2 Identification des paramètres du modèle
3.3 Simulation de la compression d’une pièce de référence
3.3.1 Géométrie et cinématique de compression
3.3.2 Maillage et paramètres de calcul
3.3.3 Analyse des résultats des simulations
3.3.4 Discussion des résultats
3.4 Conclusion
Chapitre 4 Approche phénoménologique du comportement frittant d’une poudre WC-Co
4.1 Introduction
4.2 Loi de comportement
4.3 Technique expérimentale
4.3.1 Equipement de dilatométrie
4.3.2 Conditions d’essai et hypothèses de dépouillement
4.4 Résultats expérimentaux et identification des paramètres
4.4.1 Etude d’un cycle de référence
4.4.2 Etude d’un cycle thermique de type « escalier »
4.4.3 Etude d’un cycle thermique avec chargement intermittent
Conclusion générale
Télécharger le rapport complet