Depuis quelques décennies, l’étude expérimentale des réactions fondamentales entre l’atome le plus simple qui soit, l’hydrogène, et les surfaces s’est développée sous l’impulsion des astrophysiciens, des concepteurs de sources d’ions et de réacteur de fusion thermonucléaire par confinement magnétique. La molécule la plus abondante de l’univers a un rôle crucial dans la chimie du milieu interstellaire, dont les produits participent au refroidissement des nuages gazeux lors de leur effondrement qui forme les étoiles [i]. Cependant, la formation de la molécule d’hydrogène dans le milieu interstellaire est peu probable hors processus catalytique à la surface de grains interstellaires [ii] composés de carbone, de silicium et de glace. Les sources d’ions, quant à elles, ont des rendements qui dépendent de la concentration d’hydrogène atomique dans la source, concentration déterminée par les propriétés d’adsorption et de recombinaison sur les parois de celles-ci [iii]. Enfin, d’un point de vue théorique, les réactions de surface des atomes d’hydrogène ont attiré l’attention puisque la « simplicité » de cet atome en fait un candidat idéal pour les étudesmodèles des mécanismes et des dynamiques de réaction de système hors équilibre. Ainsi de nombreuses équipes à travers le monde ont étudié l’interaction de l’hydrogène, moléculaire et atomique, avec des surfaces métalliques (Cu, Ag…) ou de cristaux ioniques (NaF…), et des processus réactionnels jusqu’ici théoriques, comme le processus d’Eley-Rideal, ont été mis en évidence.
Toujours dans le domaine des plasmas, mais de ceux que l’on appelle froid, l’intérêt pour l’hydrogène ne fait que croître. Cette espèce semble avoir un rôle prépondérant sur la préparation, les propriétés et la durée de vie de dispositif à base de silicium utilisé en microélectronique et pour les cellules photovoltaïques.
Les propriétés optoélectroniques du silicium amorphe hydrogéné utilisé dans les applications énergétiques dépendent fortement de la composition des gaz utilisés. Alors que l’optimisation de ces couches minces fait parfois appel à des méthodes empiriques, une meilleure connaissance des mécanismes de réactions se déroulant sur ces surfaces faciliterait la compréhension des mécanismes de croissance de ces matériaux et aiderait à l’amélioration de leurs propriétés. Le rôle de l’hydrogène atomique nécessite une considération particulière, puisque son incorporation dans les cellules photovoltaïques affecte leur stabilité sous éclairement prolongé.
De part sa forte réactivité avec les liaisons pendantes du silicium, l’hydrogène atomique est utilisé pour passiver les surfaces de silicium. Sa présence dans les plasmas de dépôts, par décomposition du silane (SiH4) ou par introduction directe d’hydrogène moléculaire, amène à une occupation par adsorption des sites de surface, qu’il est nécessaire de libérer pour permettre le processus de croissance des couches minces. La réaction d’abstraction de l’hydrogène adsorbée par l’hydrogène atomique incident est susceptible de dégager ces sites. De même, le phénomène de « recuit chimique » observé sur les surfaces de silicium amorphe [iv] et microcristallin [v], permettant d’augmenter la stabilité des matériaux en diminuant leur concentration en hydrogène et en augmentant leur « cristallinité », implique ces réactions d’adsorption et d’abstraction qui cassent les liaisons Si-Si faible et permettent au réseau de silicium de se relaxer.
Si les processus fondamentaux menant à l’adsorption de l’hydrogène moléculaire sont étudiés depuis vingt-cinq ans sur les métaux, cela ne fait qu’une quinzaine d’années que le silicium a droit à cette attention. Les résultats obtenus ont permis d’établir quelques comportements généraux sur les métaux [vi], et d’affirmer la spécificité du silicium [vii]. Quant aux mécanismes qui régissent les interactions de l’hydrogène atomique avec les surfaces métalliques ou semiconductrices, ils ne sont l’objet d’études que depuis une dizaine d’années. De nouveaux canaux de réactions ont été mis en évidence, et si les mécanismes mis en jeu sur les métaux commencent à être bien compris [viii], ceux qui se déroulent sur le silicium sont encore très controversés [ix, x].
Si les premières expériences de ce type ont été réalisées au moyen de jets effusifs, la grande majorité des résultats obtenus ces quarante dernières années l’ont été avec des jets plus élaborés. En particulier, les jets moléculaires supersoniques qui génèrent des faisceaux de molécules ou d’agrégats monoénergétiques très peu divergents, utilisent une détente adiabatique au travers d’un orifice de petit diamètre [1, 2]. Une autre méthode consiste à réaliser un écoulement de gaz en régime moléculaire dans des capillaires, qui permet ainsi de créer des faisceaux fins de molécules ou d’atomes ayant une distribution d’énergie thermique autour d’une température désirée.
Etant donné les objectifs visés par ce genre d’expérience, il est impératif de minimiser les perturbations extérieures au système étudié, c’est à dire éviter toute contamination de la surface où se déroule l’interaction. Pour donner un ordre de grandeur, si la surface étudiée à un coefficient de collage de un pour une espèce donnée, à une pression résiduelle de 10⁻⁶ mbar cette surface sera recouverte d’une monocouche d’adsorbat en une seconde. L’échelle de temps d’une expérience étant bien supérieure à la seconde, ce type d’expérience nécessite des conditions d’ultravide (10⁻¹⁰ mbar).
Enfin, comme nous cherchons à détecter des produits de réaction diffusés par la surface, les techniques de détection utilisées doivent être sensibles aux très faibles densités de particules et permettre d’atteindre un rapport signal/bruit satisfaisant. Les plus communément utilisées sont la spectrométrie de masse, et les méthodes spectroscopiques laser telles que la fluorescence induite par laser ou l’ionisation multiphotonique résonnante.
|
Table des matières
INTRODUCTION
Références
CHAPITRE I. LES INTERACTIONS PARTICULES NEUTRES – SURFACES L’HYDROGENE EN INTERACTION AVEC LES METAUX ET LE SILIIUM
I.A. – INTRODUCTION
I.B. – PRINCIPE D’UNE EXPERIENCE D’INTERACTION PARTICULE – SURFACE
I.C. – LES INTERACTIONS PARTICULES NEUTRES – SURFACE
I.C.1. – Réflexion
I.C.1.a. – Réflexion élastique – diffraction
I.C.1.b. – Réflexion inélastique
I.C.2. – Adsorption
I.C.3. – Adsorption : chimisorption
I.C.3.a. – adsorption non dissociative
I.C.3.b. – adsorption dissociative
I.C.4. – Chimisorption : mécanismes d’adsorption
I.C.4.a. – adsorption non activée directe/indirecte
I.C.4.b. – adsorption activée
I.C.5. – Désorption
I.C.6. – Désorption induite : mécanismes de réaction
I.C.6.a. – Mécanisme de Langmuir-Hinshelwood
I.C.6.b. – Mécanisme d’Eley-Rideal
I.C.6.c. – Mécanisme de Harris-Kasemo ou d’atome chaud
I.C.6.d. – Désorption induite par collision (Collision induced desorption)
I.D. – INTERACTIONS HYDROGENE – METAUX, HYDROGENE – SILICIUM
I.D.1. – La molécule d’hydrogène et l’atome d’hydrogène
I.D.2. – Le système hydrogène – métal
I.D.2.a. – H2/métal
I.D.2.b. – H/métal
I.D.3. – Le système hydrogène – silicium
I.D.3.a. – Structure de la surface de silicium propre et recouverte de H
I.D.3.b. – H2/silicium
I.D.3.c. – H/silicium, premières approches
I.D.3.d. – H/silicium, études cinétiques
I.D.3.e. – H/silicium, études dynamiques
I.D.3.f. – H/silicium, approches théoriques
I.E. – CONCLUSION : SITUATION DE CE TRAVAIL DE THESE
Références
CHAPITRE II. LE DISPOSITIF EXPERIMENTAL
II.A. – INTRODUCTION
II.B. – DESCRIPTION D’ENSEMBLE DU DISPOSITIF EXPERIMENTAL
II.B.1. – Système de transfert et de maintien des échantillons
II.B.1.a. – Cannes de transfert (C)
II.B.1.b. – Manipulation des échantillons
II.B.2. – Chambre d’introduction des échantillons (A)
II.B.3. – Chambre de nettoyage et de caractérisation (B)
II.B.4. – Chambre de stockage (D)
II.B.5. – Chambre d’expérience (E)
II.B.5.a. – Description d’ensemble
II.B.5.b. – Manipulateur porte-échantillon
II.B.5.c. – Pompages
II.C. – DETECTION PAR SPECTROMETRIE DE MASSE
II.C.1. – Principe du spectromètre de masse quadripolaire (QMS)
II.C.2. – Description du dispositif QMS
II.C.3. – Modulation de faisceau
II.C.4. – Exploitation des mesures QMS
II.C.4.a. – Distributions angulaires
II.C.4.b. – Mesure de l’énergie cinétique moyenne des particules
II.D. – DETECTION PAR IONISATION MULTIPHOTONIQUE RESONANTE
II.D.1. – Principe de la technique REMPI
II.D.2. – Description du dispositif REMPI
II.D.2.a. – Le laser de pompe
II.D.2.b. – Le laser à colorant
II.D.2.c. – Génération de l’UV
II.D.2.d. – Trajet du faisceau UV
II.D.2.e. – Détection des molécules ionisées
II.D.3. – Optimisation du dispositif REMPI
II.D.3.a. – Optimisation de la puissance du laser UV
II.D.3.b. – Sensibilité du dispositif
II.D.4. – Exploitation des mesures REMPI
II.D.3.a. – Obtention d’un spectre REMPI
II.D.3.b. – Correction du signal ionique brut : instabilités laser
II.D.3.c. – Correction du signal ionique brut : variations de section efficace
II.D.3.d. – Détermination de la température rotationnelle des molécules
II.D.5. – Validation du dispositif REMPI
CONCLUSION
Télécharger le rapport complet