Etude ethnographique de la stratégie biodiversité de Storengy

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Analyse de la stratégie biodiversité comme réponse institutionnelle

Rapprochement des acteurs des deux champs institutionnels dans une recherche de légitimité réciproque

La stratégie biodiversité de Storengy a impliqué le rapprochement d’acteurs provenant de deux champs institutionnels : les sciences de la conservation et l’activité industrielle de stockage de gaz. Pour construire une stratégie cohérente et légitime, l’entreprise a mis en place des partenariats avec différents acteurs de la conservation de la biodiversité (ONG, bureaux d’étude, laboratoires de recherche). Le plan d’action volontaire de Storengy à la Stratégie Nationale pour la Biodiversité, qui constitue l’ossature de la stratégie biodiversité, a été construit avec l’appui du comité français de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). L’UICN est « une union démocratique qui rassemble les organisations les plus influentes du monde et les plus grands experts dans un effort combiné pour conserver la nature et accélérer la transition vers le développement durable » ( https://www.iucn.org/fr/a-propos). Depuis 2008, le Comité français de l’UICN et ENGIE ont noué un partenariat afin d’accompagner ENGIE dans l’intégration de la biodiversité dans sa politique d’entreprise. La même année, L’UICN France a créé le groupe de travail « Entreprises et Biodiversité » réunissant ses entreprises partenaires, des membres et des experts pour échanger et trouver des solutions pour impliquer les entreprises sur les enjeux liés à la biodiversité. Dans le cadre de sa stratégie biodiversité, Storengy a intégré ce groupe de travail et le responsable biodiversité en est devenu le président en 2018. En 2012, un partenariat avec le centre de recherche d’ENGIE (l’ENGIE Lab CRIGEN) et le MNHN a été mis en place dans le but d’élaborer une méthodologie facilement assimilable par l’entreprise pour évaluer et suivre l’état de la biodiversité sur son domaine foncier et lui donner des conseils de gestion pour la favoriser tout en prenant en compte les problématiques industrielles. Ces partenariats avec des acteurs mondialement reconnus dans le domaine de la conservation de la biodiversité permettent à Storengy de légitimer sa stratégie biodiversité en interne et en externe. Le responsable biodiversité a souvent utilisé cet argument lorsque la sincérité de la stratégie était remise en question lors de réunions sur site : « Nos démarches s’inscrivent vraiment dans une logique de long terme. On ne veut pas faire du one shot et du greenwashing. On s’appuie sur des organismes de référence, le MNHN, l’UICN. Faire des actions en s’appuyant sur le monde scientifique c’est très important pour ne pas faire n’importe quoi. » (Le responsable biodiversité lors d’un comité biodiversité)
Il nous a aussi expliqué que ces partenariats, qui engagent l’entreprise concrètement et sur le long terme étaient un moyen de sécuriser et pérenniser la stratégie biodiversité dans l’entreprise.
Pour les acteurs de la conservation, le but de ces partenariats est de sortir de l’« entre soi » pour mieux comprendre les marges d’action possible et agir concrètement dans le cadre de la transition écologique : « Le fait de rentrer dans les entreprises et de leur faire changer leurs pratiques c’est aussi une façon de faire appliquer les résultats de la recherche. On voit ce qui est possible ou non, quelles sont les contraintes concrètement. Ça me permet d’alimenter ce que je sais. Et quand on fait des préconisations on ne fait pas les mêmes quand on a tout ça en-tête que quand on arrive et qu’on ne connaît pas comment fonctionne une boîte. » (I30) « Je pensais que c’était vraiment là que je pouvais apporter quelque chose. Dans le sens où là j’étais pas dans un milieu de gens qui étaient déjà convertis à l’écologie mais avec des gens qu’il fallait accompagner pour les sensibiliser. Leur faire prendre conscience et leur donner des outils pour agir à leur niveau, en fonction de leurs contraintes et de leurs objectifs propres d’industriels. » (I31)
Ces partenariats peuvent constituer une source de légitimité sociale pour les acteurs de la conservation. Ils sont représentatifs de l’évolution des pratiques et des croyances qui s’opère dans ce champ où travailler avec des entreprises était avant considéré comme « pactiser avec le diable ».

L’émergence de tensions liées aux pratiques hybrides et la recherche de solutions à ces tensions

Du fait de l’opposition culturelle des deux logiques institutionnelles, les nouvelles pratiques « hybrides » ont fait émerger des tensions sur les sites notamment liées à l’aspect esthétique des espaces verts : « Au début ça a été compliqué parce que, vu qu’on ne coupait plus les pelouses à ras, il y a eu beaucoup de questionnements des gens du site qui avaient l’impression qu’il n’était plus entretenu. Donc ça a été une période difficile à passer. » (I18)
« Quand on a laissé pousser les herbes sur le site on aurait dit que c’était une zone abandonnée. C’est vrai que visuellement ça faisait bizarre parce qu’on était habitués à ce que ce soit nickel. » (I20)
Cependant, il semble que les sessions de sensibilisation animées par des partenaires externes ont permis à certains salariés de mieux comprendre les enjeux liés à la nouvelle gestion des espaces verts et de favoriser son acceptation. J’ai moi-même constaté cela lors d’un entretien avec un salarié d’un site sur lequel j’avais fait une présentation sur l’intérêt de protéger la biodiversité en expliquant la notion de chaîne alimentaire : « T’as l’habitude de voir des plateformes qui sont propres, nickel. Un mouton ça nettoie pas nickel, t’as des herbes qui restent, t’as pas le même résultat. Tu te dis « ça fait pas propre ». Moi je pense que c’est l’œil parce que partout on arrivait tout était nickel, propre. Tu voyais rien, mais t’aidais à la disparition de certaines espèces de plantes. Aujourd’hui je dirais pas que c’est normal, mais ça me dérange pas parce qu’on sait pourquoi on le fait. On sait que derrière on essaie de protéger un certain nombre de variétés d’animaux, d’insectes… Quand tu sais, tu comprends. Le fait de nous sensibiliser à ça on prend conscience. Quand t’es pas sensibilisé tu maîtrises pas tout ça. Tu vois on parlait de chaîne alimentaire. Quand tu viens mettre en place de la biodiversité on se dit « pfff ». Quand tu nous expliques qu’il y a une chaîne alimentaire et que quand tu enlèves un maillon ça dérègle un peu tout et ba ça prend du sens. Si tu viens mettre des produits dans la chaîne, c’est toi qui les récupères. » (I15)
Sur le terrain, l’abandon de l’utilisation des produits phytosanitaires a généré des difficultés techniques pour le prestataire d’entretien des espaces verts à traiter certaines zones sensibles en terme de sécurité industrielle : « Maintenant on a des petits arbustes qui poussent et au-dessus d’une canalisation tu n’as pas le droit d’avoir des arbustes à cause des racines qui pourraient l’endommager. Donc on va détruire un arbuste pour protéger une canalisation mais c’est pas toujours facile. Le gars il va me dire avec le matériel que j’utilise je peux pas les détruire. » (I25)
Le fait de diminuer la fréquence d’intervention sur les espaces verts a aussi généré des craintes parmi certains salariés qui l’ont associé à une augmentation des risques d’accidents, de piqures ou de morsures :
« Ca engendre un risque de piqure au niveau des insectes que ce soit guêpes, abeilles, tiques… Il y a un risque connu de la maladie de Lyme dans la région. »(I19)
« Il faut faire attention que ça amène pas trop de vipères parce que, par exemple, les gardiens qui font des rondes ils peuvent être embêtés. » (I1)
« Il y a des risques de chute de plein pieds, c’est pas pratique de marcher dans 20 cm d’herbe. C’est plus facile de marcher sur un truc tondu. Surtout quand il a plu le matin, qu’il y a de la rosée et qu’on a les pieds trempés. L’été quand il fait beau, c’est rigolo il y a les vipères… On essaie de faire attention. » (I6)
Aujourd’hui, concilier la prise en compte de la biodiversité avec les contraintes liées à la sécurité des installations, reste un défi que doivent relever quotidiennement l’équipe biodiversité, les collaborateurs des sites et les intervenants de l’entreprise d’entretien des espaces verts. Pendant ma thèse, cette question a été abordée de nombreuses fois à l’occasion des réunions du Comité biodiversité sur les différents sites. Le principal blocage porte sur l’entretien des zones concentrant de nombreuses installations comprenant des équipements en gaz, incompatibles avec l’utilisation d’engins à moteur thermique pour désherber mécaniquement. Cependant, des dérogations pour l’utilisation de pesticides sont accordées dans de rares cas. La recherche de solutions d’entretien alternatives repose sur le principe de co-construction entre Storengy, Terideal mais aussi les autres membres des Comités biodiversité (Conservatoires d’Espaces Naturels, LPO6, écologues locaux etc.). Ainsi, Terideal a récemment proposé une solution alternative au désherbage, consistant à implanter des espèces végétales « couvre-sol » qui empêcheraient les autres plantes de pousser. Cette solution est en cours d’essai sur plusieurs sites.

Analyse de l’engagement des individus dans la stratégie biodiversité

Un aperçu des moteurs de l’engagement individuel dans la stratégie

Lors des entretiens, nous avons constaté que la plupart des salariés de Storengy impliqués dans la stratégie biodiversité avaient grandi en étant proches de la nature et que leur famille leur avait inculqué son respect : « J’ai grandi à la campagne, dans un petit village. On pêchait mais juste par nécessité pour manger. A l’époque c’était comme ça, tout était naturel, les gens ils tuaient des animaux mais pas pour le plaisir. J’allais aux pissenlits, on se nourrissait pratiquement de tout ce qui nous entourait […] J’ai été éduqué comme ça, mes parents m’ont appris des choses et j’ai appris naturellement. Ça fait partie des valeurs qu’ils m’ont inculquées, le respect de la nature. Tu vois, je suis pas croyant mais la nature j’y crois. » (I10)
« Depuis que je suis gamin, mon père m’a appris comme ça et j’ai continué comme ça.
Il était ouvrier agricole, je viens du monde agricole donc ça y fait beaucoup aussi. J’ai toujours été en contact avec la nature, ramasser les champignons, jamais de chasse, pêcher oui j’adore. » (I25)
« Même étant gamin j’ai toujours eu une attention sur les passereaux à la maison, que ce soit les rouges-gorges, mésanges, bouvreuils, c’était un plaisir l’observation des oiseaux. »(I3)
D’autres ont exprimé l’idée que de contribuer à la préservation de la biodiversité constituait un enjeu moral pour les générations à venir :
« Pour moi il y a des choses à transmettre à nos enfants, à nos familles, le patrimoine naturel ça en fait partie. Donc naturellement c’est des choses que je fais depuis toujours, être proche de la nature, être curieux, se promener ou faire attention à ne pas jeter des détritus n’importe où. C’est une partie de moi donc j’essaie de la transmettre. » (I18)
« J’ai envie de laisser quelque chose de propre. C’est assez dégradé comme ça, j’ai des mômes je veux qu’ils continuent à voir des beaux paysages. » (I22)
« L’idée c’est d’essayer de laisser une planète la plus propre possible aux prochaines générations. » (I24)

Un aperçu de l’influence de la stratégie biodiversité au niveau individuel

La mise en place de partenariats avec des scientifiques et des naturalistes a permis à certains salariés d’acquérir de nouvelles connaissances et ils ont modifié leur comportement envers la nature dans leur sphère privée :
« Ça m’intéresse, je suis curieux, c’est pas tous les jours qu’on parle des oiseaux. J’ai des nouvelles connaissances, comprendre le monde, la nature. Après j’observe dans ma vie de tous les jours, extra professionnelle. J’observe, si je vois des oiseaux dans les parcs ou les jardins, ça me donne plus d’indications. » (I14)
« Avant, par facilité, j’utilisais des produits phytosanitaires chez moi. Depuis les présentations, de voir qu’il y avait d’autres méthodes tout aussi efficaces et pas si contraignantes que ça qui existaient, ça m’a permis de les transposer à la maison.
J’utilise plus aucun produit. » (I4)
« Maintenant je suis attentif quand il y a certaines espèces de plantes dans mon jardin je prends des photos je demande à mon collègue si c’est une espèce protégée. C’est une façon de transcrire ce qu’on fait sur notre lieu de travail, d’être attentif à ce qui pousse chez nous. » (I20)
« C’est vrai que maintenant quand je vais dans la rue, dans la forêt, j’essaie d’identifier les oiseaux. Je me suis dit que j’allais prendre un bouquin sur la permaculture.» (I2)
Certains ont expliqué que de travailler sur ces thématiques leur permettait de créer de nouvelles interactions sociales et de sortir de leur routine de travail :
« Ça m’a permis de rencontrer de nouvelles personnes, j’aime bien. Ça nous sort de notre quotidien, de voir les mêmes têtes, les mêmes problématiques. » (I6)
« Ça m’a ouvert une palette de parties prenantes supplémentaires […] A priori il y avait peu de chance que je sois amené à travailler avec eux mais par le biais de la biodiversité je me retrouve à les appeler souvent à leur demander des conseils. C’est génial ! Tout ce qui est humain me plaira toujours. » (I22)
« C’est un avantage de pouvoir sortir un peu de son quotidien en allant vers des activités qui sont proches de la nature. Ça sort un peu de notre métier technique, ça permet de pouvoir s’évader de temps en temps sur d’autres activités. » (I20)
« Ça donne aussi une diversité dans les missions, c’est vrai que ça peut être embêtant d’être au quotidien sur des équations, des installations des fiches techniques, ça fait sortir de son quotidien. » (I2)
Les pratiques associées à la stratégie biodiversité sont perçues comme contribuant à un environnement plus sain notamment avec l’abandon des produits phytosanitaires : « D’un point de vue personnel je trouve que ça peut être que bénéfique. Être dehors sans produits phyto on a déjà plus ça sous le nez donc ça peut être que positif pour notre santé. » (I15)
« Les produits chimiques on connait pas forcément les contraintes et puis ça passe toujours dans la nature et ça fini par se retrouver dans la consommation des gens. C’est ça qui me gêne, parce qu’il y a des conséquences sur le long terme. Donc qu’on en utilise pas c’est bien. » (I19)
Une des personnes interrogées nous a expliqué que son implication dans la stratégie biodiversité a engendré pour elle une prise de conscience, un sentiment d’urgence voir d’anxiété :
« J’ai l’impression de comprendre beaucoup de choses, ça ouvre des portes. Ça te fait rencontrer des gens qui t’ouvrent à une autre perception du monde. Ça me fait flipper parce que j’étais bien dans mon coin mais tu te rends compte qu’il y a beaucoup de bêtises qui sont faites et que la pensée commune elle va complètement à contre sens. Ça va loin, ça part d’une idée où tu vas faire pousser des légumes et tu te rends compte que le monde il va complètement à l’envers […] Même le terme « écolo » il me gêne, il faut juste qu’on se sauve et y a que par ce biais là qu’on se sauvera. Parce qu’on est en train de creuser notre tombe, et si on creuse pas la nôtre on creuse à coup sûr celle de nos enfants et de nos petits-enfants. » (I26)
Pour d’autres, cela a engendré un désir de réorientation professionnel, voire une remise en question de leur carrière : « Et le fait de travailler sur ça…c’est super enrichissant. Déjà c’est un domaine que j’ai découvert et où j’ai beaucoup à apprendre encore. J’aimerai à terme me consacrer qu’à cette activité-là. » (I23)
Deux salariés sur site m’ont expliqué à la fin de l’entretien, une fois le micro coupé, que s’ils devaient revenir en arrière ils choisiraient une carrière en lien avec la biodiversité. L’un d’eux m’avait expliqué en entretien que son travail n’était pas en accord avec ses valeurs personnelles : « Moi des fois ça me fait un peu chier, j’ai l’impression de me trahir en travaillant parce que ça va pas avec ma façon d’être. Parce que moi l’environnement je le vois pas comme ça avec des rejets de fumées, avec des tracteurs qui t’arrosent tout. Moi la vie c’est pas ça, c’est vivre avec des choses saines. » (I10)

Les méthodes d’identification de la trame verte et bleue

Pour définir les continuités écologiques à préserver ou à restaurer, la TVB a été traduite à plusieurs échelles. A l’échelle nationale, un document cadre : « les orientations nationales Trame verte et bleue » (ONTVB, décret n°2014-45 du 20 janvier 2004), établit les objectifs principaux et les lignes directrices de la politique TVB. Au niveau régional, les ONTVB sont prises en compte dans les Schémas Régionaux de Cohérence écologique (SRCE). Les SRCE sont des documents qui comportent notamment : le diagnostic de la biodiversité et de ses interactions avec les activités humaines sur le territoire, une cartographie qui identifie les continuités écologiques, un plan d’action stratégique pour atteindre les objectifs de préservation et de restauration de la biodiversité. A l’échelle plus locale la TVB est déclinée dans les documents d’urbanisme (ScoT8, PLU9). En fonction des régions, différentes méthodes ont été utilisées pour cartographier les continuités écologiques de chaque sous-trame dans les SRCE.
Dans un premier temps, les réservoirs de biodiversité ont été identifiés en s’appuyant sur les zonages existants (Espaces protégés, sites Natura 2000, Zones Naturelles d’Intérêt écologique faunistique et floristique etc…). D’autres réservoirs non issus de zonages ont été déterminés sur la base de critères liés à la répartition de certaines espèces (espèces menacées, rares, emblématiques…) ou à l’occupation du sol avec des critères de types structurels : la forme (compacité), la surface ou la proximité à d’autres éléments des habitats. Une dernière méthode a consisté à identifier les réservoirs sur la base d’analyses multicritères reposant sur le croisement de plusieurs types de données : zonages règlementaires, perméabilité du milieu au déplacement des espèces, critères structurels (Sordello et al., 2017).
Pour les corridors écologiques deux types de méthodes ont été utilisées. La méthode d’interprétation visuelle qui consiste à identifier et à tracer les chemins les plus directs permettant de relier des réservoirs entre eux par photo-interprétation de cartographies aériennes ou de cartes d’occupation du sol. Le chemin tracé prend en compte l’occupation du sol plus ou moins favorable au déplacement des espèces considérées. La seconde méthode se base sur des traitements géomatiques. Une des techniques consiste, pour une espèce ou un groupe d’espèces données, à appliquer des coefficients de perméabilité aux différents milieux pour déterminer les zones leur permettant d’aller d’un réservoir à un autre le plus facilement. Cette méthode peut être appliquée à l’aide de logiciels de modélisation comme Graphab (Foltête, Clauzel, & Vuidel, 2012).

Etude de la biodiversité sur les plateformes de puits

L’objectif de ce chapitre était de mieux comprendre, comment, dans un paysage agricole relativement intensif, différents groupes taxonomiques répondaient à des éléments paysagers (haies et bandes enherbées) à une micro-échelle (les plateformes de puits), en relation avec le paysage environnant et leurs traits d’histoire de vie.
Le but était également d’éclairer Storengy sur la biodiversité observée sur les plateformes de puits et de la conseiller dans ses choix d’aménagements et de gestion pour favoriser cette biodiversité. Pour ce faire, en 2017, j’ai inventorié les plantes, les papillons et les oiseaux sur 33 plateformes de puits réparties sur 3 sites français de Storengy dans des paysages agricoles relativement intensifs. A partir de ces données, j’ai analysé l’effet des aménagements paysagers des plateformes de puits et du paysage environnant sur l’abondance, la richesse, la diversité de Shannon et les traits d’histoire de vie des papillons et des oiseaux.

Matériel et Méthode

Intérêt potentiel des plateformes de puits pour la biodiversité

Sur les sites industriels de Storengy, les plateformes de puits sont dispersées autour de la station centrale. Elles permettent la circulation du gaz du réservoir souterrain à la station centrale et au réseau de distribution. Ces installations ont une dimension d’environ 70m x 70m. En surface elles sont constituées d’un mélange de graviers et d’une fine couche de béton avec au centre une tête de puits bétonnée comportant les vannes de sécurité (Figures 20, 21). Depuis la tête de puits un tube métallique d’environ 10cm de diamètre plonge dans le sol jusqu‘à la bulle de gaz. Sur le domaine foncier de Storengy, les plateformes représentent une surface cumulée d’environ 215ha, soit 14% de sa surface totale. J’ai décidé d’étudier ces installations car contrairement aux réserves foncières, qui peuvent être amenées à disparaitre au profit de nouveaux projets ou vendues, celles-ci sont pérennes car indispensables à l’activité gazière. Sur certains sites, d’autres plateformes pourraient être amenées à être créées, il est donc important de trouver des solutions pour diminuer leur impact sur la biodiversité locale.
De plus, lors d’une visite sur un des sites de Storengy au début de ma thèse, j’ai découvert que les plateformes de puits pouvaient accueillir certaines espèces, notamment des oiseaux qui nichent dessus. L’écologue qui travaille sur les sites de Chémery, Soings-en-Sologne et Céréla-Ronde a observé l’Œdicnème criard Burhinus oedicnemus L. (Figure 22.) et le petit gravelot, Charadrius dubius Scopoli (Figure 23.) nichant sur des plateformes. Lors de mes inventaires, j’ai aussi recensé un couple d’Œdicnème criard sur une plateforme du site de Gournay-sur-Aronde et les agents d’espace vert m’ont confirmé leur présence l’année précédente. La composition en graviers plus ou moins déstructurée des plateformes, crée des espaces analogues aux milieux caillouteux que ces espèces affectionnent pour la nidification, notamment car ils permettent le camouflage des œufs et des poussins. Les plateformes ont un caractère très artificiel ; leur surface étant majoritairement minérale peu de végétation peut s’y développer et les grillages qui les entourent peuvent constituer un obstacle pour la faune. Cependant, pour favoriser leur intégration paysagère, notamment en milieu ouvert, elles sont parfois entourées de haies plus ou moins denses pouvant être utiles à quelques espèces. Certaines plateformes ont également été aménagées avec des bandes herbeuses en réimplantant le sol issu des travaux autour de la tête de puits et en y laissant la végétation se développer spontanément. Lorsque les plateformes de puits sont implantées en milieux artificialisés, comme dans un paysage d’agriculture intensive, et qu’elles comportent des aménagements paysagers (haies, bandes herbeuses, fossés), elles pourraient constituer des refuges, des lieux d’alimentation, de reproduction ou des corridors de déplacement pour certaines espèces de faune et de flore.

Sélection des plateformes de puits étudiées

Pour sélectionner l’échantillon de plateformes de puits de cette étude, un premier travail a consisté à répertorier les caractéristiques des plateformes des 14 sites de Storengy : présence ou non de bandes enherbées, de haies, paysage environnant. Ce travail a été réalisé en s’appuyant sur une cartographie du domaine foncier de Storengy réalisée par le bureau d’étude Engie Ineo Dexip et sur des images satellites. A partir de cet inventaire, les sites présentant exclusivement des plateformes avec et sans bandes enherbées et plus ou moins de haies ont été sélectionnés : le site de Gournay-sur-Aronde dans l’Oise, le site de Germigny-sous-Coulombs en Seine et Marne et les sites de Chémery et Soings-en-Sologne dans le Loir-et-Cher (Figure 24). Les sites de Chémery et Soings-en-Sologne étant gérés par le même chef de site, ils ont été considérés comme un seul et même site : Chémery-Soings. Sur ces 3 sites, les plateformes sélectionnées étaient distantes d’au moins 200m pour éviter un double comptage lors de l’inventaire de l’avifaune. 50 plateformes ont été inventoriées dont 17 entourées principalement de boisements et 33 principalement de champs cultivés.
Les plateformes entourées de boisements ont été exclues des analyses dans le cadre de l’article qui visait à étudier l’apport des aménagements associés à ces installations en milieu agricole. En effet, en forêt, nous faisons l’hypothèse que les plateformes ont plutôt un effet fragmentant, même si la présence de bandes enherbées pourrait contribuer à créer un biotope de type lisière potentiellement favorable à une biodiversité riche. Cette piste reste à être étudiée.
Pour répondre à mes questions de recherche, j’ai inventorié trois groupes taxonomiques représentant différents niveaux trophiques, précédemment observés sur les plateformes de puits, étant de bons indicateurs de la qualité des habitats et du paysage, connus comme étant impactés par les pratiques agricoles intensives et « charismatiques » afin de faciliter la communication des résultats au sein de l’entreprise. Les plantes, les papillons et les oiseaux ont été inventoriés sur les plateformes au printemps et à l’été 2017. Les oiseaux ont été inventoriés deux fois sur les mois de mai et juin selon le protocole STOC-EPS du Muséum en faisant un point d’écoute de 5 minutes devant la plateforme. Les papillons ont été inventoriés avec deux passages sur chaque plateforme, un premier en juillet et un deuxième début septembre. J’ai effectué un transect de 10 minutes sur la diagonale de la plateforme et identifié et compté les papillons dans une boîte imaginaire de 5m² autour de moi (Figure 25, 26.). La flore a été inventoriée en juillet, en même temps que les papillons, en faisant deux placettes de 5 quadrats de 1m² réparties aléatoirement sur la surface enherbée du puits.

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Table des matières

Introduction
1. Une érosion de la biodiversité d’origine anthropique
2. Evolution du cadre de la conservation de la biodiversité
3. Relations entre entreprises et biodiversité
Les pressions exercées sur les entreprises pour une prise en compte de la biodiversité dans leurs activités
Partenariats entre entreprises et organismes de conservation de la biodiversité
Intérêt de la prise en compte de la biodiversité pour les entreprises
Comment les entreprises prennent-elles en compte la biodiversité dans leurs activités ?
4. Terrain d’étude : l’entreprise de stockage de gaz naturel, Storengy
Impacts de l’activité de stockage de gaz sur la biodiversité
L’engagement de Storengy pour la conservation de la biodiversité
5. Objectifs de la thèse
Chapitre 1. Etude ethnographique de la stratégie biodiversité de Storengy
1. Méthode
2. Cadres théoriques utilisés
Analyse de la stratégie biodiversité comme réponse institutionnelle
Analyse de l’engagement des individus dans la stratégie biodiversité
3. Résultats
Analyse de la stratégie biodiversité comme réponse institutionnelle
Rapprochement des acteurs des deux champs institutionnels dans une recherche de légitimité réciproque
La stratégie biodiversité comme une logique « hybride » combinant logique de conservation de la biodiversité et logique industrielle SEVESO
L’émergence de tensions liées aux pratiques hybrides et la recherche de solutions à ces tensions
De l’intégration de la biodiversité dans l’activité de l’entreprise à une diffusion des pratiques dans d’autres entreprises?
3.1.4.1. Le « cadrage » de la stratégie biodiversité
3.1.4.2. Vers une diffusion des nouvelles pratiques dans d’autres entreprises ?
Analyse de l’engagement des individus dans la stratégie biodiversité
Un aperçu des moteurs de l’engagement individuel dans la stratégie
Un aperçu de l’influence de la stratégie biodiversité au niveau individuel
4. Discussion
5. Conclusion
Chapitre 2. Proposition d’outils à destination des entreprises pour une meilleure prise en compte de la biodiversité dans la gestion de leur domaine foncier
Partie 1. Evaluer l’état de la biodiversité sur les parcelles foncières d’un site d’entreprise et leur contribution aux trames vertes et bleus locales.
1. La trame verte et bleue un outil d’aménagement du territoire pour enrayer l’érosion de la biodiversité
2. Les méthodes d’identification de la trame verte et bleue
3. Les indicateurs de biodiversité
4. Le potentiel des sites de Storengy dans la mise en œuvre de la Trame Verte et Bleue.67
Article 1 : STOREVAL, un indicateur de valeur écologique à l’échelle de la parcelle à destination des entreprises
Partie 2. Construction d’une méthodologie pour évaluer les enjeux de biodiversité des territoires sur lesquels sont implantés les sites industriels
1. Objectifs de l’outil
2. Méthodologie
Les indicateurs utilisés
La méthode de discrétisation et le choix des classes
3. Résultats
4. Discussion et conclusion des deux parties
Chapitre 3. Etude de la biodiversité sur les plateformes de puits
1. Matériel et Méthode
Intérêt potentiel des plateformes de puits pour la biodiversité
Sélection des plateformes de puits étudiées
Inventaires de la faune et de la flore
Article 2 : Influence of industrial facilities on bird and butterfly communities in agricultural landscape.
2. Discussion
Discussion générale
Conclusion
Ensemble des références bibliographiques citées dans la thèse (sauf annexes)
Annexe 1. Article produit pour le colloque EGOS en 2018 à Tallinn
Annexe 2. Article produit en octobre 2019 sur les résultat

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