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Le centre d’Infectiologie Lao-Christophe Mérieux (CILM)
Ce centre, dont j’assure la direction scientifique, est le centre de référence au Laos pour le diagnostic des infections à HIV, hépatites virales et tuberculose. Nous présenterons ici quelques points importants pour comprendre comment nous avons pu développer notre travail de recherche dans un contexte unique.
C’est la Fondation Mérieux, sur une idée de Christophe Mérieux en 2005, qui a pris en charge la construction du Centre d’Infectiologie Lao-Christophe Mérieux (CILM) à Vientiane pour le Ministère de la Santé de la RDP Lao. Il est opérationnel depuis 2009.
De par sa fonction et sa localisation géographique, il a été complétement intégré au campus de l’Université des Sciences de la Santé, et participe aussi à la formation des étudiants en médecine dans le domaine de la biologie médicale.
Il comprend un laboratoire (BSL-2+, en cours d’une accréditation ISO 15189 : 2012), une bibliothèque, une salle de conférence et des espaces de travail pour les étudiants.
Les axes de travaux prioritaires retenus sont (Fig. 4) le VIH, les hépatites, la tuberculose et le développement de la recherche appliquée par le biais des analyses de routine. Ce centre contribue donc à élargir les capacités d’analyses médicales du pays en introduisant des nouveaux tests, ce qui réduit l’envoi des examens d’analyses à l’étranger, en Thaïlande en particulier.
Au niveau mondial
Des procédures de soins ne respectant pas les règles d’hygiène et l’utilisation de drogues injectables ont été les principales causes de nouvelles infections par le VHC, représentant la plupart des 1,75 millions de nouvelles infections en 2015 (taux d’incidence mondial : 23,7 pour 100 000).
L’OMS estime qu’en 2015, 71 millions de personnes vivaient avec l’infection par le VHC dans le monde, soit 1% de la population mondiale totale. Elle est inégalement répartie dans le monde. Les pays de la Méditerranée orientale affichent la prévalence la plus élevée (2,3%), suivie de l’Europe (1,5%) (25) (Fig. 11-12) (50, 51).
En terme de décès par les hépatites, l’OMS estime qu’en 2015, l’hépatite virale était responsable de 1,34 million de décès dans le monde sur 77 millions toutes causes confondues. Parmi ces décès, 30 % étaient le résultat de complications liées à l’infection chronique par le VHC. Sans traitement, l’infection à VHC peut entraîner une cirrhose (720 000 décès) ou un carcinome hépatocellulaire (470 000 décès). La mortalité due aux hépatites virales a augmenté de 22 % depuis 2000. À moins que les personnes infectées par le VHB et le VHC ne soient diagnostiquées et traitées plus précocement, le nombre de décès dus à l’hépatite virale continuera d’augmenter (25).
Bien que l’incidence de l’infection à VHC semble diminuer dans les pays développés, le nombre de décès global consécutifs à une infection à VHC augmentera au cours des 20 prochaines années (52).
En Asie du Sud-Est
L’épidémiologie du virus de VHC dans les pays d’Asie du Sud-Est n’est pas suffisamment étudiée. Plusieurs études faites en Asie révèlent une augmentation de la prévalence du VHC avec l’âge, peut-être en raison d’un dépistage plus récent et amélioré sur les produits sanguins et de l’adoption de pratiques d’injection plus hygiéniques (53, 54). La prévalence du VHC dans la population générale varie d’un pays d’Asie du Sud-Est à l’autre, allant d’environ 0,5 % à Singapour et à Hong Kong à environ 6 % au Vietnam ou en Thaïlande (55, 56) et plus de 10% au Myanmar (57), (Tableau 4) (58). La prévalence signalée en Chine est d’environ 2%-3%, ce qui représente environ 30 à 40 millions de personnes. L’incidence croissante du CHC dans de nombreux pays au cours de ces dernières décennies est probablement attribuable au VHC (59) parce que la vaccination universelle contre le virus de l’hépatite B a entraîné une baisse spectaculaire du CHC lié au VHB (60).
Le génotype 6 est très répandu en Asie du Sud-Est et présente une grande diversité dans les zones endémiques, il représente la variante dominante au Cambodge, au Laos, au Myanmar et au Vietnam. Les souches du génotype 6 du VHC isolées en Asie de l’Est étaient si divergentes qu’elles ont été initialement classées comme des génotypes distincts, désignés 7, 8 et 9 (57).
Le Laos présente une prévalence pour l’hépatite C plus basse que ces voisins, mais se situe dans une zone de haute prévalence de l’hépatite B et C. Un CHC par ces virus pourrait être significativement réduit par une prévention primaire et par un traitement précoce des patients atteints d’hépatite chronique. Le traitement des hépatites virales est un enjeu de santé publique important au Laos, mais aucune politique concertée de prise en charge de ces patients n’est développée. Beaucoup de nouveaux médicaments antiviraux sont disponibles dans le monde mais leur coût reste élevé. La prise en charge des patients atteints d’hépatite virale chronique au Laos n’est pas centralisée. Il n’existe pas de traitement standard ni de recommandation nationale, ni de guide thérapeutique.
Conclusion
Le problème principal du traitement de l’hépatite C est lié au retard du diagnostic et à la prise en charge des patients infectés. L’affection reste en effet peu symptomatique durant plusieurs décennies n’entraînant durant cette période aucune complication. Le VHC, bien que non cytopathique, induit une réponse immunitaire contre les hépatocytes infectés, provoquant des lésions hépatocellulaires et une hépatite chronique évoluant à bas bruit, pouvant aboutir au développement d’une cirrhose (20%), puis d’un CHC (1-4% par an en cas de cirrhose). Il faut donc traiter l’hépatite chronique C avant la cirrhose pour être sûr qu’elle n’évoluera pas vers le CHC 18-20. Pour le médecin, le manque de connaissances et les obstacles qui surgissent à tous les niveaux, depuis le diagnostic jusqu’à l’envoi chez le spécialiste, peuvent contrecarrer la prise en charge des hépatites C chroniques. Au niveau du patient, le manque de sensibilisation, la crainte des effets indésirables, une mauvaise adhérence, l’existence de co-morbidités, ou encore le coût du traitement, peuvent le rendre inefficace. Au niveau du gouvernement et des organismes payeurs, l’absence de promotion, de surveillance et de financement peuvent aussi interférer. Chacun de ces obstacles doit être pris en compte pour mettre en œuvre à grande échelle les traitements antiviraux adaptés.
L’OMS a adopté la Déclaration mondiale sur la santé en 2016 pour éliminer le VHC d’ici 2030. Les objectifs sont les suivants : réduire les nouvelles infections de 90% et la mortalité de 65% (Fig. 13) (50).
Pour atteindre ces objectifs, il y a eu une révolution majeure dans le traitement de l’infection à VHC, avec la disponibilité de plusieurs schémas oraux combinant des DAA de différents modes d’action. Ces traitements entraînent une augmentation de la réponse virologique soutenue qui atteint presque 100 % et réduisent la durée du traitement à une durée de 8 à12 semaines. Ces traitements présentent un profil d’innocuité favorable et une bonne tolérance. Les recommandations thérapeutiques doivent inclure un mode de vie sain (alimentation « méditerranéenne » et activité physique). Les patients atteints de cirrhose devront faire l’objet d’une surveillance (dépistage du CHC par échographie tous les six mois). Les programmes visant à éliminer le VHC doivent inclure un dépistage accru, l’aiguillage vers les soins et l’amélioration de l’accès aux traitements dans le monde entier (Fig. 14) (49).
Cancer du foie
Introduction
Le cancer primaire du foie comprend le carcinome hépatocellulaire (CHC), le cholangiocarcinome intrahépatique (CCA) et d’autres tumeurs rares, notamment le carcinome fibrolamellaire et l’hépatoblastome. La classification internationale des maladies (ICD, International Classification of Diseases) publiée par l’OMS distingue les différents types de tumeurs malignes du foie sur des critères histologiques (63):
• Le carcinome hépatocellulaire (CHC) (C22.0) touchant les hépatocytes
• Le cholangiocarcinome (CCA) (C22.1) touchant les cellules des canaux biliaires intrahépatiques
• L’hépatoblastome (C22.2) touchant des cellules embryonnaires du foie
• L’angiosarcome du foie (C22.3) touchant des cellules des vaisseaux hépatiques
• Les autres sarcomes du foie (C22.4)
• Les autres carcinomes du foie précisés (C22.7)
• Les tumeurs du foie, sans précision (C22.9)
• Les tumeurs malignes secondaires (métastases) ont été classées dans une catégorie à part (C78.7).
Dans la grande majorité des cas de cancers primitifs du foie, la forme histologique prédominante est le carcinome hépatocellulaire (CHC) (env. 85% des cas), suivi par le cholangiocarcinome (CCA) (env. 15% des cas). Les autres cas de tumeurs malignes hépatiques sont considérés comme rares, notamment le carcinome fibrolamellaire et l’hépatoblastome (64). Les caractéristiques moléculaires et cliniques du CHC et du CCA sont distinctes, mais ces affections présentent des facteurs de risque et des voies d’oncogenèse qui se chevauchent. Une meilleure compréhension des types cellulaires à l’origine du cancer du foie pourrait aider à explorer les mécanismes moléculaires de la carcinogenèse et les options thérapeutiques (65).
Epidémiologie
Le cancer du foie est le 5e type de cancer le plus fréquent chez les hommes et le 9e chez les femmes. En 2018, les estimations portaient à 840 000 le nombre de nouveaux cas à l’échelon mondial. Les 25 premiers pays ayant les taux les plus élevés de cancer du foie en 2018 sont indiqués dans le tableau 5 ci-dessous [https://www.wcrf.org/dietandcancer/cancer-trends/liver-cancer-statistics].
Les hommes représentent la population la plus touchée par le cancer du foie, puisqu’ils en sont 2 à 4 fois plus atteints que les femmes (66).
Le cancer du foie est principalement rencontré dans les pays du Sud, et plus particulièrement dans trois régions :
• Asie de l’Est (Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Japon, Taïwan)
• Asie du Sud-Est (Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Timor Oriental, et Vietnam)
• Afrique subsaharienne (regroupe 48 pays répartis sur le continent africain au sud du Sahara)
Près de 50% des nouveaux cas déclarés de cancer du foie dans le monde se trouvent en Chine, alors que l’Asie du Sud-Est arrive en seconde position avec 29.4% (22.2% pour les hommes et 7.2% pour les femmes) (67). La partie continentale de l’Asie du Sud-Est (Birmanie, Cambodge, Laos, Thaïlande, et Vietnam) est particulièrement exposée aux problèmes du cancer du foie (68) et présente les taux d’incidence et de mortalité les plus élevés des pays d’Asie du Sud-Est (69). En 2008, le cancer du foie représentait le 2ième type de cancer le plus fréquent et la 2ième cause de décès par cancer dans cette région.
Selon le Globocan1, le cancer du foie au Cambodge représente la première cause de décès par cancer tous sexes confondus, et constitue le cancer le plus fréquent et le plus mortel chez les hommes. Au Laos, le cancer du foie serait le cancer le plus fréquent et le plus mortel toutes catégories de sexe et d’âge confondues.
Le fardeau du cancer du foie augmente à l’échelle mondiale, et il pourrait y avoir 1 million de cas d’ici 2030 (67).
Principaux facteurs de risque
A l’échelle mondiale, l’infection chronique par les virus de l’hépatite B et de l’hépatite C représente le facteur de risque prédominant du carcinome hépatocellulaire, alors que l’infection par les parasites de la famille des Opisthorchiidae (Opisthorchis viverrini et Clonorchis sinensis) constitue le facteur de risque majoritaire du cholangiocarcinome. Cette dernière pathologie représente un risque particulièrement important au Laos car la consommation de poisson cru est une tradition solidement ancrée dans le pays (70). Au total, près de 80% des cancers du foie dans le monde sont causés par l’un de ces quatre agents infectieux (68, 71, 72).
D’autres facteurs de risque sont aussi responsables de l’apparition du cancer du foie, tel que l’alcoolisme chronique, les aflatoxines, les composés N-nitrosés, l’obésité, le diabète, les pesticides, le thorotrast (produit de contraste utilisé en radiodiagnostic), le tabac, les métaux lourds, les contraceptifs oraux, et certaines maladies hépatiques: cirrhose, stéatohépatite non alcoolique, hépatite auto-immune, cholangite sclérosante primitive, lithiase hépatique, maladie de Wilson (73, 74).
Les points communs sont indiqués en utilisant la même couleur. En plus de ces mécanismes, le virus de l’hépatite B (VHB) et l’aflatoxine B1 partagent la caractéristique d’affecter le génome – le VHB peut s’intégrer dans le génome hôte et l’aflatoxine B1 est un mutagène.
Pathogénèse du cancer du foie
L’hépatocarcinogenèse est un processus multifactoriel et séquentiel qui fait intervenir différents mécanismes selon le type de facteur de risque impliqué (VHB, VHC, aflatoxine, alcool). Ainsi, le virus de l’hépatite B induit le développement du carcinome hépatocellulaire par l’intermédiaire de voies directes et indirectes, puisqu’il est capable d’intégrer le génome de la cellule hôte et donc d’agir sur la croissance et la signalisation des cellules. Par contre, le virus de l’hépatite C n’intègre pas le génome de la cellule hôte et agit donc principalement d’une manière indirecte, en induisant une inflammation chronique, ainsi qu’une prolifération et une mort cellulaire (75).
L’ensemble contribue à l’apparition de foyers d’hépatocytes dysplasiques, devenant ensuite des nodules identifiables à l’imagerie, qui peuvent eux-mêmes dégénérer en carcinome hépatocellulaire si les altérations génétiques sont suffisamment importantes pour entrainer la transformation et l’immortalisation de ces cellules hépatiques (Fig. 15) (76).
Les points communs sont indiqués en utilisant la même couleur. En plus de ces mécanismes, le virus de l’hépatite B (VHB) et l’aflatoxine B1 partagent la caractéristique d’affecter le génome – le VHB peut s’intégrer dans le génome hôte et l’aflatoxine B1 est un mutagène.
Après une lésion hépatique provoquée par un ou plusieurs facteurs (virus de l’hépatite B, virus de l’hépatite C, alcool et aflatoxine B1), il y a nécrose suivie d’une prolifération des hépatocytes. Les cycles continus de ce processus destructeur et régénérateur favorisent l’apparition d’une maladie hépatique chronique qui culmine dans une cirrhose du foie. La cirrhose est caractérisée par une formation anormale de nodules hépatiques entourée de dépôt de collagène et de cicatrisation du foie. Par la suite, on observe le développement de nodules hyperplasiques, suivis de nodules dysplasiques et finalement de CHC, qui peuvent être classés en tumeurs bien différenciées, modérément différenciées et mal différenciées – cette dernière représentant la forme la plus maligne du CHC primaire (Fig. 16) (76).
Dépistage et diagnostic
Il est malaisé de diagnostiquer un cancer du foie à un stade précoce parce que les signes et les symptômes n’apparaissent souvent qu’à un stade avancé de la maladie. Les petites tumeurs du foie sont difficiles à détecter lors d’un examen physique parce que la plus grande partie du foie est couverte par la cage thoracique droite. Au moment où une tumeur peut être sentie, elle peut déjà être assez grosse. L’identification des populations à risque de développer la maladie et son dépistage sont donc d’une grande importance dans la prise en charge de la pathologie (77). Mais le test pourrait être recommandé pour certaines catégories de personnes, telles que les personnes à risque élevé de cancer du foie dû à une cirrhose (quelle qu’en soit la cause) ou à une hépatite B chronique (même sans cirrhose), les patients atteints d’infection chronique à l’hépatite C, de cirrhose alcoolique, d’hémochromatose génétique, de cirrhose biliaire primitive, de déficit en alpha1 antitrypsine, de stéatose hépatique non alcoolique, ou d’hépatite auto-immune. Les tests de dépistage les plus utilisés sont les analyses sanguines et des examens échographiques tous les 6 à 12 mois à l’aide d’alpha-fœtoprotéines (AFP). Certaines études ont montré une corrélation entre le dépistage et l’augmentation de la survie au cancer du foie (American Cancer Society, Last Revised: April 28, 2016)2.
Le diagnostic est principalement basé sur les techniques d’imagerie. L’échographie est souvent le premier test utilisé pour examiner le foie, puis viennent la tomodensitométrie [ou CT scan] l’imagerie par résonance magnétique [IRM] et la biopsie hépatique (78).
Malheureusement, dans les pays en voie de développement et en particulier au Laos, le dépistage est quasi-inexistant et le diagnostic se fait très souvent à des stades déjà avancés de la maladie (79).
Traitements
Le traitement du cancer du foie dépend du stade d’évolution. Le traitement peut inclure la chirurgie et les médicaments. L’âge et l’espérance de vie attendue suite au traitement doivent également être pris en compte dans la décision thérapeutique. La classification BCLC (Barcelona Clinic Liver Cancer) sert de référence internationale pour aider les praticiens à décider du type de traitement à adopter en fonction de la présentation clinique du cancer du foie. Cependant, cette classification est remise en cause dans son application « sur le terrain » par plusieurs chirurgiens en Europe, notamment en Italie, et en Asie, en Chine et en Corée. Une étude récente menée au Pérou suggère que cet arbre décisionnel pourrait ne pas être adapté à toutes les populations de patients atteintes de cancer du foie, notamment celles des pays en voie de développement, et devrait être contextualisée en fonction des observations cliniques faites parmi les populations (80).
Le système du BCLC se compose de cinq étapes :
• Stade 0 – la tumeur a un diamètre inférieur à 2 cm, la personne se porte très bien et a une fonction hépatique normale
• Stade A – une seule tumeur s’est développée, mais son diamètre est inférieur à 5 cm, ou il y a trois petites tumeurs de moins de 3 cm de diamètre ou moins, et la personne a une fonction hépatique normale
• Stade B – il y a de multiples tumeurs dans le foie, mais la personne va bien et sa fonction hépatique n’est pas affectée
• Stade C – l’une ou l’autre des circonstances susmentionnées, mais la personne ne va pas aussi bien et sa fonction hépatique n’est pas aussi bonne, ou lorsque le cancer a commencé à se propager dans le vaisseau sanguin principal du foie, les ganglions lymphatiques voisins ou d’autres parties de l’organisme
• Stade D – où le foie a perdu la plupart de ses capacités fonctionnelles et où la personne commence à présenter des symptômes de maladie hépatique terminale, comme une accumulation de liquide à l’intérieur de son abdomen.
Si le cancer est au stade A au moment du diagnostic, une guérison complète est possible. Les trois principaux moyens d’y parvenir sont les suivants :
• Une résection chirurgicale de la partie affectée
• Une greffe du foie
• Une ablation par micro-ondes ou radiofréquence
• Une chemoembolisation
Si le cancer est au stade B ou C, il n’est généralement pas possible de le guérir. Cependant, la chimiothérapie peut ralentir la progression du cancer, soulager les symptômes et prolonger la vie pendant des mois ou, dans certains cas, des années.
Si le cancer est au stade D au moment du diagnostic, il est généralement trop tard pour ralentir la propagation du cancer. Le traitement vise plutôt à soulager les symptômes de douleur et d’inconfort.
Recherche par l’analyse métabolomique de marqueurs plasmatiques chez les patients porteurs de VHB ou VHC chronique
Principe de la métabolomique
La métabolomique (81) est une technique de plus en plus utilisée et touche de nombreux domaines : la santé, la nutrition et également l’analyse d’extraits végétaux. Elle fait partie des méthodes chimiométriques qui mettent en relation des mesures faites sur un système, par exemple un échantillon, avec son état, défini par des grandeurs qualitatives ou quantitatives, par des méthodes mathématiques et/ou statistiques. C’est une technique qui permet l’étude des métabolites, molécules de faibles masses moléculaires, synthétisées à partir de protéines et qui participent au bon fonctionnement de la cellule ou d’un organisme, notamment au niveau de la croissance et de la défense. Le terme métabolomique définit l’analyse complète et quantitative de tous les métabolites d’un système. Si l’on s’intéresse à une partie des métabolites, par exemple une classe chimique particulière, on parlera de profilage des métabolites et enfin on utilisera le terme empreinte métabolique lors de l’analyse d’un grand nombre d’échantillons dans un but de classification (82). Deux approches sont distinguées en métabolomique :
Approche ciblée
Les méthodes ciblées se focalisent sur un nombre limité de métabolites. Ainsi, l’objectif est d’établir une relation entre l’état et les mesures qualitative et quantitative de certains métabolites d’intérêts ou de familles particulières de métabolites. C’est donc une approche a priori dont la principale limite réside dans le fait de devoir connaître au préalable les composés cibles. C’est pourquoi une approche non ciblée peut également être envisagée.
Approche non ciblée
Les méthodes non ciblées se basent sur l’ensemble des signaux détectables par une méthode physico-chimique. Elles assurent une détection d’un grand nombre de composés, sans recherche de caractérisation ou de quantification. Dans un second temps, les signaux d’intérêts sont identifiés à l’aide de méthodes d’analyses adaptées.
L’analyse complète des métabolites d’un système, comme un fluide biologique par exemple, est une entreprise très ambitieuse compte tenu du nombre de composés contenu dans les extraits biologiques. Néanmoins, la combinaison de méthodes d’extraction, d’analyse et de traitement des données permet d’obtenir un bon aperçu du métabolome d’un organisme. L’analyse métabolomique présente également l’intérêt de pouvoir identifier et quantifier des métabolites qui peuvent être mis en relation avec des activités biologiques ou un état physiologique.
Traitement de l’échantillon
La préparation de l’échantillon doit rester simple de manière à limiter les biais entre les échantillons et elle doit également permettre de conserver au maximum l’hétérogénéité de l’échantillon de manière à obtenir une bonne représentativité du métabolome étudié. Lors de la collecte, il est primordial de veiller à éviter la formation d’artefacts due à des réactions enzymatiques ou d’oxydation par exemple. C’est pourquoi les échantillons prélevés devraient être plongés dans un bain d’azote liquide puis conservés à très basse température (- 80 °C). De même, lors du séchage, il est possible de relancer ces réactions non désirées (83), c’est pourquoi la lyophilisation est préférée puisqu’elle s’opère à partir du matériel gelé. Cette étape permet in fine une meilleure conservation de la matière en raison de l’élimination de l’eau, et donc de la limitation des réactions enzymatiques.
La majorité des techniques analytiques utilisées dans une étude métabolomique est de type chromatographique (gazeuse ou liquide) et spectroscopique (RMN, MS, …). La spectrométrie de masse est essentiellement couplée avec une colonne de chromatographique gazeuse (GC-MS) dans le cas de l’analyse de composés (semi-)volatils, ou liquide (LC-MS) dans le cas de l’analyse de composés peu ou non volatils. La technologie la plus utilisée en analyse métabolomique reste la LC-MS car elle permet de séparer et de détecter une large gamme de composés. La spectrométrie de masse haute résolution (HRMS) est de plus en plus utilisée dans les analyses métabolomiques en raison de sa sensibilité élevée et de l’obtention d’une masse exacte, indispensable au processus d’identification. La source d’ionisation prépondérante reste l’ionisation par électronébulisation (ESI) puisqu’elle assure l’ionisation à la fois des composés polaires et peu polaires. Le principal inconvénient de cette technique réside dans la production importante d’adduits. Les principaux analyseurs associés sont la FT-ICR (Fourier Transform Ion Cyclotron Resonance), l’Orbitrap et le ToF (Time of Flight).
Traitement des données
Différents logiciels sont ensuite utilisés de manière à effectuer une détection automatique des informations spectrales et chromatographiques des échantillons analysés en UHPLC-MS et GC-MS, à l’aide de divers algorithmes afin de sélectionner les informations pertinentes. Ces derniers peuvent être libres ou commerciaux et les plus utilisés sont MZmine (84), XCMS (85) et la combinaison MS-DIAL
(86) et MS-FINDER (87). Des conversions des fichiers bruts sont souvent nécessaires avant introduction dans les logiciels, par exemple la conversion en .CDF avec le convertisseur DataBridge pour MZmine ou en .abf avec le convertisseur ABFconverter pour MS-DIAL. Le but final est d’obtenir par la suite une liste de pics caractérisés par leurs masses exactes et leurs temps de rétention chromatographique ainsi que leur intensité respective pour chaque échantillon analysé. Ce jeu de données servira aux analyses statistiques et à l’identification des composés à l’aide de bases de données. Deux approches de traitement statistique peuvent être mises en œuvre :
Une analyse non supervisée
Les méthodes non supervisées s’appuient uniquement sur les données spectrales et permettent de comprendre leur structuration. Elle assure une observation de la variabilité générale pour une étude globale des données brutes. La méthode d’analyse statistique non supervisée la plus connue est l’analyse en composantes principales (ACP). C’est la première étape de la démarche d’analyses multivariées avec aucun à priori de l’appartenance d’un échantillon à un groupe donné. Elle permet d’extraire et de synthétiser les informations essentielles des données en nouvelles variables appelées composantes principales, qui correspondent à une combinaison linéaire des variables originelles. L’ACP va alors permettre d’identifier les directions, c’est-à-dire les axes principaux pour maximiser la variance des données. Ainsi, elle conduit à la réduction des dimensions, généralement en 2 ou 3 composantes, permettant de visualiser graphiquement l’information en en perdant le moins possible. Ces composantes sont orthogonales les unes par rapport aux autres et permettent la formation d’un nouveau système de coordonnées pour la projection des échantillons. Le plan ainsi formé est appelé carte factorielle des individus (score plot en anglais). Chaque composante explique un certain pourcentage du jeu de données total. La présence de groupes représentés par la proximité des échantillons révèle leur similarité de comportement par rapport aux variables étudiées.
Des techniques de classification peuvent également être utilisées pour mettre en évidence des groupes supposant l’existence de ressemblance entre les individus. Elles sont complémentaires de l’ACP. La principale technique est la classification ascendante hiérarchique (CAH). C’est un processus itératif qui permet la formation de groupes matérialisés par la suite sous forme de dendrogramme. Au départ, il y a autant de groupes que de variables, puis des fusions entre les groupes les plus similaires sont ensuite effectuées jusqu’à obtenir des groupes clairement distincts. En amont, un prétraitement des variables est généralement effectué, dont une normalisation afin de réduire la variance entre les variables et ne pas favoriser l’expression de certaines variables par rapport à d’autres. En effet, d’un point de vue biologique, les métabolites abondants ne sont pas nécessairement plus intéressants que les métabolites peu concentrés. Ces prétraitements permettent ainsi de réduire l’influence du bruit de fond et de se focaliser sur les informations biologiques pertinentes (88).
Une analyse supervisée
Les méthodes supervisées utilisent les données spectrales et une ou des informations quantitatives ou qualitatives basées sur l’état du système. Elles assurent une mise en relation des variables après retraitement et normalisation dans une optique de recherche de modèles prédictifs. Parmi les méthodes d’analyse supervisée se trouve la régression des moindres carrés partiels (Partial Least Squares [PLS] en anglais) basée sur les régressions linéaires. Une régression orthogonale (OPLS) peut également être utilisée. Dans ces modèles, une variable Y, nommée variable à expliquer, est exprimée en fonction d’une autre variable X, nommée variable explicative. La variable Y peut aussi bien être qualitative conduisant à l’application d’une PLS-DA (analyse discriminante) ou quantitative. Deux paramètres R²Y et Q² sont indicateurs de la validité du modèle. Le premier coefficient est à rapprocher de l’appartenance à différentes classes, tandis que le second reflète l’erreur de prédiction. Plus ces derniers sont proches de 1 et plus le modèle est robuste. Un test de permutation est aussi usuellement utilisé pour évaluer la robustesse du modèle. Ces modèles permettent de mettre en évidence les variables responsables de la discrimination des échantillons et couplés à des analyses biologiques, ils permettent d’identifier les variables potentiellement marqueurs d’un état physiologique donnée.
Contexte et objectifs :
Au Laos, l’accès aux diagnostics et aux médicaments nécessaires pour traiter ces infections s’améliorent, mais le manque d’information de la population et de formation du personnel de santé sont des obstacles majeurs à la prise en charge des hépatites.
Par ailleurs, il n’existe actuellement aucun marqueur biologique permettant à la fois la détection et la mesure de l’évolution de ces pathologies prédictives de l’apparition de complications.
Notre objectif est donc de découvrir dans des échantillons de plasma humain, des biomolécules exprimées lors d’infections virales, et caractéristiques de l’évolution de ces infections en cancer. Dans la « BioBank » du Centre d’Infectiologie Lao-Christophe Mérieux (CILM), nous avons accès à des échantillons de plasma bien identifiés de porteurs d’hépatites B et C. Des prélèvements de 3800 patients porteurs chroniques du VHB et de 1800 patients porteurs chroniques du VHC sont stockés depuis 2010. L’analyse spectrale combinée à de puissantes méthodes de calculs statistiques (métabolomique) appliquées à l’évaluation de ces plasmas infectés devrait donc permettre d’aider à définir les profils de métabolites spécifiques du pathogène (diagnostic) et de l’évolution clinique du patient (pronostic).
Nous espérons identifier des molécules ayant le potentiel de devenir des outils de diagnostic différentiel mais aussi capables de donner des informations sur l’évolution de la pathologie (outils dynamiques et pronostiques), permettant la mise en place de stratégies thérapeutiques et préventives adaptées.
Objectif général :
Identifier des biomarqueurs plasmatiques pronostiques d’une infection chronique au VHB ou VHC.
Objectifs spécifiques :
o Etablir une description épidémiologique et clinique d’une cohorte de patients infectés par le
o Mettre au point la technique d’extraction des métabolites pour l’analyse « Liquid chromatography–mass spectrometry (LC–MS) »
o Identifier des biomarqueurs plasmatiques d’une infection aux virus hépatiques VHB/VHC
o Déterminer la dynamique évolutive prédictive d’une détérioration clinique à l’aide de données échographiques couplées aux marqueurs plasmatiques
Matériels et Méthodes
Le protocole a été validé par le comité d’éthique du NIOPH (National Institute of Public Health) qui lui a donné l’autorisation n° 023/2016/NECHR, daté 19/10/2016.
Une autorisation d’importation de matériel biologique contaminé N°IE-2016-891 a été obtenue par le Ministère français chargé de la recherche, Direction générale de la recherche et de l’innovation, Cellule de bioéthique.
Population étudiée
De janvier 2010 à novembre 2016, le CILM a reçu 3 857 patients infectés par le VHB et 1 769 patients infectés par le VHC. Parmi ces patients, nous avons sélectionné un groupe présentant les critères suivants :
o Sexe : Masculin
o Age : entre 30 et 60 ans
o Porteurs d’hépatite B/C (avec un suivi régulier de la charge virale, CV)
o Prélevés au moins 5 ans auparavant (et toujours présents dans la biobank)
o Consentement éclairé compris et signé.
• Les données collectées sont : o Socio-économiques
o Histoire du traitement etabli par les médecins
o Laboratoire : la CV, bilan hépatique, AFP (résultat quantitatif) o Consommation de tabac
o Consommation d’alcool
o BMI (kg/m2)
o Maladies chroniques (HTA, DM) o Histoire familiale de cancer du foie
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE DU PAYS
1. Le Laos
1.1) Données socio-économiques
1.2) L’état sanitaire du Laos
2. Le centre d’Infectiologie Lao-Christophe Mérieux (CILM)
CHAPITRE-I : EPIDEMIOLOGIE DE L’HEPATITE B
1. Introduction
2. Au niveau mondial
3. En Asie du Sud-Est
4. Au Laos
ETUDE-1 : ETUDE EPIDEMIOLOGIQUE, RETROSPECTIVE DE LA SURVEILLANCE DE L’HEPATITE B AU LAOS
1. Contexte et objectifs
2. Matériels et Méthodes
3. Principaux résultats
4. Discussion et conclusion
Article 1: « A Seven-Year Retrospective Study on the Surveillance of Hepatitis B in Laos »
ETUDE-2 : ETUDE PROSPECTIVE, TRANSVERSALE SUR LA PERFORMANCE DE TROIS TESTS RAPIDES COMMERCIAUX POUR LA DETECTION DE L’AGHBs A VIENTIANE, LAOS
1. Contexte et objectifs
2. Matériels et Méthodes
3. Principaux résultats
4. Discussion et conclusion
Article 2. « Performance of three commercial rapid diagnostic tests for the detection of hepatitis B surface antigen (HBs Ag) in Lao PDR »
CHAPITRE-II : EPIDEMIOLOGIE DE L’HEPATITE C
1. Introduction
2. Au niveau mondial
3. En Asie du Sud-Est
4. Conclusion
ÉTUDE-3 : ETUDE EPIDEMIOLOGIQUE, RETROSPECTIVE DE LA SURVEILLANCE DE L’HEPATITE C AU LAOS
1. Contexte et objectifs
2. Matériels et Méthodes
3. Principaux résultats
4. Discussion et conclusion
Article 3. « Hepatitis C in Laos: A Seven-Year Retrospective Study on 1765 Patients »
CHAPITRE-3 : RECHERCHE DE BIOMARQUEURS DE L’EVOLUTION DES HEPATITES VIRALES PAR METABOLOMIQUE
I. Partie-1 : Cancer du foie
1. Introduction
2. Epidémiologie
3. Principaux facteurs de risque
4. Pathogénèse du cancer du foie
5. Dépistage et diagnostic
6. Traitements
II. Partie-2 : Recherche par l’analyse métabolomique de marqueurs plasmatiques chez les patients porteurs de VHB ou VHC chronique
1. Principe de la métabolomique
1.1) Traitement de l’échantillon
1.2) Traitement des données
2. Contexte et objectifs :
3. Matériels et Méthodes
3.1) Population étudiée
3.2) Prélèvements
3.3) Echographie abdominale
3.4) Techniques utilisées au laboratoire du Laos
3.5) Analyse métabolomique au Laboratoire PHARMA-DEV, Toulouse, France
4. Résultats
4.1) Résultats descriptifs des patients VHB et VHC
i. Caractéristiques Sociodémographiques de la cohorte sélectionnée
ii. Facteurs influençant l’évolution des hépatites VHB/VHC
4.2) Données biologiques
i. La charge virale (CV)
ii. Le bilan hépatique (dosage des aminotransferases, ALAT/ASAT)
iii. Le marqueur tumoral : Alpha-foetoProtein
4.3) Résultats préliminaires de métabolomique sur le plasma des patients VHB et VHC
DISCUSSION GENERALE ET PERSPECTIVES
1. Les hépatites virales
2. Mise en évidence de profils métabolomiques spécifiques
3. Conclusion et perspectives
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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