HISTORIQUE DE LA PESTE
Depuis le début de l’ère Chrétienne, la peste a été responsable de trois grandes pandémies :
– au VIème siècle, la peste de Justinien a sévi dans tout le bassin Méditerranéen ;
– au XIVème siècle, la peste noire, partie de l’Inde a ravagé toute l’Europe, tuant plus de 25 millions de personnes ; ses derniers foyers ne se sont éteints qu’au XVIIIème siècle ;
– la dernière pandémie est partie de Mongolie en 1891, et grâce à la navigation à vapeur, a rapidement fait le tour du monde.
En Europe et dans tous les pays où l’hygiène est suffisamment développée, elle est restée limitée à quelques foyers portuaires, facilement éradiquée ; mais dans certains pays tropicaux, la peste s’est solidement implantée, au moins en tant que peste murine, susceptible à tout moment de redonner naissance à des cas humains. Dès 1894, Alexandre Yersin isole le bacille pesteux à Hong Kong ; deux ans plus tard, il définit avec Roux le rôle du rat, et un an après, avec Simond celui des puces. Mais ce n’est que tout récemment que l’importance épidémiologique des rongeurs sauvages a été démontrée, notamment par les travaux de Blanc, de Balthazar et des épidémiologistes Russes. Ces vingt dernières années, la peste sévit encore un peu partout dans le monde. La peste domine encore en Afrique et en Asie.
Peste bubonique
C’est la forme la plus fréquente et la moins grave.
• L’incubation est silencieuse. Elle dure 1 à 6 jours.
• L’invasion est brève. Elle dure 1 à 2 jours. Elle est marquée par un malaise général, des algies diffuses, des céphalées, des frissons et une ascension thermique rapide à 40°C.
• La période d’état est caractérisée par l’apparition de bubon. Le bubon est une adénite pesteuse. Son siège dépend de celui de la piqûre de la puce ; généralement inguinocrural, il est parfois axillaire, cervical ou sous maxillaire. D’abord lisse, ferme, arrondi, le bubon est rapidement noyé dans une importante périadenite qui le fixe sur les plans profonds et à la peau qui devient inflammatoire. De taille variable, il est toujours très douloureux. Au bubon, s’associe un syndrome infectieux sévère : fièvre en plateau à 40°C, sans dissociation du pouls, faciès vultueux, angoissé, abattement, voire prostration alternant parfois avec des phases de délire hallucinatoire ; troubles digestifs à type de vomissement ou de diarrhée, langue saburrale ou même soufrée, témoignant de la déshydratation sévère.
• L’évolution, même sans traitement est parfois favorable : vers le 8 ème 10ème jours, le bubon devient fluctuant puis s’ouvre spontanément laissant couler un pus franc ou une sérosité sanguinolente. Simultanément, les signes généraux et neurologiques s’amendent. Mais, la suppuration locale est interminable, la cicatrice importante et la convalescence longue. Dans un pourcentage variable de cas selon les épidémies et le lieu, la mort survient par état de choc. De nombreux complications émaillent l’évolution :
– complications locales, comme « le charbon pesteux » au point d’inoculation, les ulcérations et les thromboses vasculaires en regard du bubon ;
– complications générales: oculaire, méningé et surtout pulmonaire (broncho-pneumonie pesteuse secondaire grave).
Depuis les sulfamides et antibiotiques, la peste bubonique guérit en quelques jours, sans complication et généralement sans suppuration du bubon.
LE PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LA PESTE
Depuis 1992, les stratégies de lutte et les activités du programme ont été les suivantes:
– l’amélioration de la prise en charge des cas de peste par standardisation des fiches de déclaration de cas et de supervision ; l’acquisition de matériels de laboratoire, la formation du personnel, la désinsectisation préventive des foyers suspects et la sensibilisation des communautés ;
– la prévention d’une éclosion et d’une extension de l’épidémie par la dératisation chimique des zones à risque ; la surveillance de la peste chez les rats et les puces ;
– le renforcement du niveau central par la fourniture de véhicules, de mobiliers de bureau et des équipements informatiques.
Malgré l’appui financier apporté par la Banque Mondiale, le programme souffre d’une insuffisance de financement pour diminuer le taux de létalité national de 20% à 5% des cas confirmés. Le contrôle de l’extension de l’épidémie de la peste dans 850 centres de santé prioritaires n’est pratiquement pas réalisé. La dératisation mécanique préventive dans 16 districts de santé à haut risque a été effectuée partiellement. Pour la période 1995-1997, le coût du programme a été évalué à 1,5 millions de dollars Américain. Le projet CRESAN devait financer 88% du coût du programme soit 1,3 millions de dollars, la coopération Française : 0,1 million de dollars ( soit 9%), le reste étant à la charge de l’Etat Malagasy. Une évaluation du programme pour réajustement a été prévu au cours de l’année 1997. L’évaluation a été réalisée avec le service de lutte contre la peste et des responsables de l’IPM qui collabore avec le programme pour toutes le s activités de recherche et de laboratoire. L’évaluation a redéfini les objectifs quantifiés du programme, les stratégies et les activités à effectuer pour la période « après 1997 » en indiquant pour chaque activité programmée l’indicateur de suivi, le coût des activités et leur chronogramme d’exécution, les sources possibles de financement, le programme de formation locale du personnel, les indicateurs de performance du programme et les méthodes de mesures. L’évaluation a également permis de recentrer les objectifs et d’éliminer certaines activités, notamment la désinsectisation préventive dans les foyers à risque qui s’avère peu avantageuse du point de vue coût-efficacité. Les objectifs et stratégies de la période « après 1997 » sont les suivants :
• augmenter le taux de déclaration des cas.
L’amélioration du taux de déclaration peut être réalisée :
– par l’amélioration du recueil des données ;
– par l’amélioration de l’acheminement des prélèvements ;
– par le renforcement de l’équipement du laboratoire central ;
– et par l’amélioration de l’examen direct fait par les agents de santé.
• Diminuer le taux de létalité national de 20 % à 5 % des cas confirmés.
Cette diminution peut être obtenue par :
– la standardisation des protocoles ;
– la réalisation de recherches opérationnelles sur les schémas thérapeutiques ;
– l’acquisition de moto pour les agents de santé des 15 districts de santé prioritaires ;
– l’acquisition de matériels de protection ;
– la réhabilitation du bâtiment peste de l’hôpital d’Ambohimiandra ;
– la formation des médecins de 36 districts de santé concernés par la peste.
• Contrôler l’extension de l’épidémie de la peste dans 850 centres de santé prioritaires.
Le contrôle peut être assuré par :
– la conduite de recherche opérationnelle ;
– la dératisation mécanique préventive dans 16 districts de santé à haut risque ;
– la formation extérieure des médecins responsables.
• Mobiliser les communautés aux activités de prévention et de dépistage précoce.
La mobilité des communautés peuvent se faire par :
– la sensibilisation de la population ;
– la diffusion de guide technique, d’affiche et de dépliant ;
– l’émission de spots télévisés et radiodiffusés ;
– l’organisation d’une journée nationale de lutte contre la peste ;
– l’organisation d’un séminaire de santé publique sur la peste.
• Renforcer le service central
Le service central de lutte contre la peste peut être renforcé par :
– l’acquisition des matériaux informatique et bureautique ;
– la mise à disposition d’un budget de fonctionnement ;
– l’évaluation externe du programme en 2001.
CONCLUSION
La peste sévit encore de façon inquiétante au niveau de beaucoup de localité à Madagascar. La forme bubonique est apparemment beaucoup plus fréquente que les autres formes. L’étude que nous avons menée au Centre Hospitalier Antipesteux d’Ambohimiandra a permis de réaliser une analyse de la répartition des cas pesteux notamment dans la ville d’Antananarivo et environs. Durant l’année 2003, 9 cas de peste bubonique ont été enregistrés au Centre Hospitalier Antipesteux d’Ambohimiandra. La provenance des malades hospitalisés a permis d’établir une carte schématique des localités atteintes. Il s’agit essentiellement des quartiers d’Ambohitrakely, de Manjakaray, d’Ankorondrano, d’Anosibe, d’Andavamamba Isotry et d’Andohanimandroseza.La situation de ces quartiers qui forment une ceinture autour de la ville d’Antananarivo peut constituer un haut risque en cas d’explosion épidémique. Afin d’améliorer la lutte contre la peste dans la ville d’Antananarivo, nos suggestions portent sur deux points principaux : la mise en œuvre d’un programme d’IEC (Information Education Communication) renforcé dans la capitale et d’autre part la réalisation d’une campagne de dératisation au niveau des quartiers à risque.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIEGENERALITES SUR LA PESTE
1. Historique de la peste
2. Epidémiologie
2.1. Agent pathogène
2.2. Réservoirs des bactéries
2.3. Agent vecteur
2.4. Modes de transmission
2.5. Modalités épidémiologiques actuelles de la peste
3. Symptomatologie
3.1. Peste bubonique
3.2. Peste pulmonaire
3.3. Peste septicémique
4. Diagnostic
5. Traitement
6. Prophylaxie
7. Le programme de lutte contre la peste à Madagascar
DEUXIEME PARTIE ANALYSE EPIDEMIOLOGIQUE DE LA PESTE AU CHAPA
1. Cadre d’étude
1.1. Organisation du CHAPA
1.2. Le personnel du CHAPA
1.3. Capacité hospitalière
1.4. Budget de fonctionnement
2. Méthodologie
2.1. Méthode d’étude
2.2. Paramètres d’étude
3. Résultats
TROISIEME PARTIECOMMENTAIRES, DISCUSSIONS ET SUGGESTIONS
1. Commentaires et discussions
1.1. Les cas de peste hospitalier au CHAPA
1.2. Domicile et provenance des malades
1.3. L’âge des malades
1.4. Le sexe
1.5. La profession
1.6. Variations saisonnières
1.7. La prise en charge thérapeutique
2. Suggestions
2.1. Mise en œuvre d’un programme d’IEC/peste
2.2. Actions ciblées de dératisation
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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