Dans les écoulements en conduite, une partie de la puissance de pompage est utilisée pour vaincre le frottement à la paroi, accru en régime turbulent. Une réduction de ce frottement peut être obtenue par modification des propriétés physico-chimiques du fluide en écoulement. Ainsi, l’ajout de faibles quantités de certains additifs dans le solvant conduit à une réduction significative du frottement à la paroi en régime turbulent. Cette réduction peut atteindre jusqu’à 80 % comparée au solvant pur. Les additifs réducteurs de trainée sont principalement des polymères linéaires à haut poids moléculaire et des tensioactifs s’agrégeant en micelles en solution. Il apparait que seuls les agrégats ayant un très grand rapport d’aspect et une flexibilité élevée sont efficaces pour réduire la trainée. La réduction se produit en régime turbulent lorsque la solution est soumise à un fort taux de déformation. L’emploi des tensioactifs est désormais de plus en plus préconisé puisque les micelles, brisées sous l’effet d’un gradient de vitesse, peuvent se reconstituer loin des régions d’écoulement où les taux de déformations restent élevés, ce qui n’est pas le cas des polymères. Néanmoins pour que les tensioactifs soit efficaces il faut que les objets formés soient de forme cylindrique, donc la concentration en tensioactif doit dépasser la concentration micellaire critique. Les mécanismes d’action des tensioactifs sont pour une large part calqués sur ceux proposés pour les polymères. Deux hypothèses ont été avancées : la première considère que la viscosité élongationnelle, due à l’étirement des chaines, et son impact en proche paroi, est la cause première du phénomène. La seconde postule que c’est l’énergie élastique emmagasinée dans les macromolécules qui est responsable de ce phénomène. Par ailleurs, l’examen de la bibliographie consacrée à ce phénomène amène à constater qu’en dépit de leur évidente implication dans des problèmes pratiques de transport des hydrocarbures, les milieux organiques ont donné lieu à beaucoup moins de travaux scientifiques que les milieux aqueux. Cette carence d’informations est expliquée par la complexité des systèmes envisagés. Les difficultés d’études scientifiques rencontrées sont essentiellement liées à la nature de ces milieux.
Mise au point introductive et problématique
Depuis la découverte du phénomène de réduction de trainée (frottement hydrodynamique) par Toms en 1948 [1,2] lors de ses études sur la dégradation mécanique des polymères, ce phénomène ne cesse de susciter l’intérêt des chercheurs en raison de son importance économique. En effet, dans le domaine du transport des hydrocarbures, par exemple, le coût additionnel de transport d’un baril de produit à travers un pipeline, en utilisant des additifs réducteurs de trainée, peut être moins que 0,05$ [3]. Plusieurs études théoriques et expérimentales et des approches numériques ont été réalisées autour de ce phénomène [4]. Pourtant, il n’existe à l’heure actuelle aucun modèle universel pour l’expliquer. Un mécanisme complet devrait faire intervenir l’influence de la structure et de la composition des additifs, leur microstructure et les interactions molécules d’additif/solvant. Le travail proposé ici s’inscrit dans la continuité des travaux entamés par notre équipe sur cette thématique. L’effort consenti porte sur l’élaboration de nouvelles formulations susceptibles de réduire le frottement hydrodynamique aussi bien en milieux aqueux qu’en milieux organiques simulant les milieux pétroliers. L’étude repose sur une approche fondamentale en utilisant diverses techniques expérimentales électrochimiques, rhéologiques et optiques. Ces techniques vont nous permettre d’obtenir des informations riches et précises sur le comportement sous écoulement des solutions sélectionnées. En se basant sur des travaux antérieurs [5-8], nous nous sommes fixés comme objectif la mise en évidence, par la méthode de transport de matière au voisinage d’une électrode tournante, des caractéristiques de viscoélasticité souvent relatée dans la littérature comme étant responsable du phénomène de réduction de frottement hydrodynamique. Il a été rapporté que dans le cas d’un écoulement élongationnel comme celui créé au voisinage d’une électrode tournante, on observe une chute de courant en présence de l’additif ainsi qu’une transition du premier ordre sur le transport de matière reflétée par l’apparition d’instabilités de courant et d’un cycle d’hystérésis .
Réduction de la trainée par des additifs
Parmi les différentes solutions pour la réduction des pertes de charge en écoulement, l’ajout d’additifs (appelés DRA, Drag Reducer Additives) en quantité infinitésimale peut être d’une grande efficacité. Des réductions de perte de charge jusqu’à 80 % ont été observées. Il existe trois types d’additifs réducteurs de frottement qui ont fait l’objet de plusieurs études, à savoir les fibres, les polymères et les tensioactifs.
Les fibres
La réduction de la traînée a été observée avec l’addition de fibres sous écoulement. Elles peuvent être en nylon, en coton ou en papier et peuvent mesurer jusqu’à deux millimètres de longueur. Le phénomène a été observé pour la première fois par Forrest et Grierson dans les années 1930 [22]. Ce type d’additifs présente l’avantage d’être moins sujet à la dégradation mécanique et peut être séparé du solvant facilement par filtration. En revanche, une quantité importante d’additifs est nécessaire pour une réduction de traînée significative, qui est au maximum de l’ordre de 20 % dans la plupart des cas. D’après des visualisations faites au cours de l’écoulement, les fibres s’alignent dans le sens de l’écoulement, ce qui peut expliquer en partie le mécanisme de la réduction de la traînée.
Les polymères
Les polymères ont été les premiers additifs à être largement étudiés en réduction de la traînée. Depuis Toms (1948), plusieurs travaux expérimentaux [24,25] et numériques [26-29] ont été menés. Il existe différents types de polymères susceptibles de réduire la traînée : les polyélectrolytes, les polyampholytes, les polyacrylamides modifiés hydrophobiquement. Des polymères de type polyoléfine ont également été développés pour être utilisés en milieu pétrolier (pipeline Trans-Alaska) dans les années 70 et en offshore dans les années 80 (Burger et al.) [30], afin de minimiser le coût en énergie et de baisser le nombre de stations de pompage le long d’un pipeline. Une concentration de quelques ppm (partie par million) est généralement suffisante pour réduire efficacement la traînée.
Les tensioactifs
La réduction de traînée par l’ajout de tensioactifs est connue depuis les années 50 [20,35-40]. Cependant, il existe peu d’études concernant ces additifs par rapport à la littérature consacrée aux polymères. Ce type d’additifs a un certain avantage : ils présentent une résistance aux dégradations mécaniques et par conséquent, une durée de vie plus importante que celles des polymères Les solutions de tensioactifs sont caractérisées par la présence de micelles qui ne se forment qu’à partir d’une concentration micellaire critique (CMC). Elles ne sont efficaces par rapport à la réduction de frottement que sur une certaine plage de température et de concentration où les micelles ont une forme cylindrique. Cela est attribué à l’alignement des cylindres suivant les lignes de courant lors de l’écoulement du fluide [13, 41,42]. C’est le comportement viscoélastique de ces solutions qui est responsable de ce phénomène [21, 43,445]. Le premier à avoir utilisé les tensioactifs comme additifs réducteurs de trainée a été Mysels en 1949 [2]. Depuis il a été découvert que les tensioactifs peuvent conduire à des pourcentages de réduction de frottement de l’ordre de 70% à 80% [35,45], et que les coefficients de frottements des tensioactifs peuvent être plus faibles que ceux des polymères [46]. Compte tenu des avantages que peuvent présenter ce type d’additifs, les études s’orientent désormais davantage sur les tensioactifs en tant qu’agents réducteurs de frottements hydrodynamiques.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Position du problème et étude bibliographique
I.1 Mise au point introductive et problématique
I .2 Réduction de la trainée par des additifs
I .2.1 Les fibres
I .2.2 Les polymères
I .2.3 Les tensioactifs
I.3 Mécanismes de réduction de frottement
I.4 Etudes sur la réduction de frottement en milieu pétrolier
I.4.1 Les additifs utilisés pour la réduction de frottement dans l’industrie pétrolière
I.5 Comparaison entre les additifs polymères et les micelles de tensioactifs
I.6 Les tensioactifs
I.6.1 Structures des tensioactifs
I.6.2 Auto-Assemblage des tensioactifs
I.6.2.1 Auto-Assemblage des tensioactifs en milieu aqueux
I.6.2.2 Assemblage des tensioactifs en milieu organique
I.7 Les polysavons
I.7.1 Classification des polysavons
I.7.2 Comportement des polysavons en milieux aqueux
I.8 Travaux antérieurs sur le XCn
Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre II : Matériels et méthodes
I.1 Rhéologie
I.1.1 Mesures en écoulement
I.2 Mesures en régime dynamique
I.3 Matériel utilisé
II. Electrochimie
II.1 Techniques stationnaires
II.1.1 Voltampérometrie
II.2 Technique transitoire
II.2.1 Chronoampérométrie
II.2.2 Spectroscopie d’impédance électrochimique (SIE)
II.2.3 Circuits électriques équivalents
II.2.3.1 Transfert de charge pur
II.2.3.2 Transfert de charges avec diffusion
II.2.3.3 Etat de surface
II.4 Matériel utilisé
III. Diffusion de la lumière
III.1 Principe de la technique
III.2 Diffusion statique de la lumière
III.3 Diffusion dynamique de la lumière
III.4 Traitement des données de diffusion dynamique de la lumière
III.5 Matériel utilisé
IV. Microscopie Cryo-MET
V. Chromatographie d’exclusion stérique (SEC)
VI. RMN
Références bibiographiques
Chapitre III : Systèmes en milieu aqueux
I. Synthèse du polysavon
I.1 Synthèse du précurseur (copo80)
I.1.1 Mode opératoire
I.1.2 Caractérisation
I.2 Quaternisation du copo80
I.2.1 Mode opératoire
I.2.2 Caractérisation par RMN 1H
II. Préparation des solutions
II.1 Milieu d’étude
II.2 Solutions en présence de KCl et MV
II.3 Solutions en présence de Brij
III. Diagramme d’état
IV. Etude structurale des solutions de 80C12
IV.1 Diffusion de la lumière
IV.2 Imagerie Cryo-MET
V. Etude des propriétés rhéologiques des solutions de 80C12
V.1. Viscosité
V.2 Viscoélasticité
V.2.1 Effet de l’ajout de MV
V.2.2 Influence de la température
VI. Systèmes hybrides : mélanges 80C12-C12E10
VI.1 Rhéologie des systèmes hybrides 80C12-C12E10
IV.2 Imagerie Cryo-MET des solutions hybrides 80C12-C12E10
VII. Etude électrochimique
VII.1 Etude en l’absence de 80C12
i) Les courbes I-E et tracés de Levich
ii) Spectroscopie d’impédance électrochimique
VII.2 Etude en présence de 80C12
i) Les courbes I-E et tracés de Levich
ii) Spectroscopie d’impédance électrochimique
Conclusion
Références bibliographiques
Conclusion générale
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