Trois genres de Cichlidae de l’Afrique, Oreochromis, Sarotherodon et Tilapia sont communément appelés tilapia. Ils présentent une large distribution dans le monde et se rencontrent dans tous les continents (Trewavas, 1983). La distinction de ces trois genres, les uns des autres, est faite en fonction de leur mode de reproduction et de leur régime alimentaire (Trewavas, 1983) :
– incubation des œufs sur substrat avec garde biparentale (couple), macrophytophage : Tilapia
– incubation buccale avec garde biparentale ou parentale, planctonophages : Sarotherodon
– incubation buccale avec garde uniparentale maternelle, planctonophage : Oreochromis .
Les Cichlidés, surtout les genres Oreochromis, Sarotherodon et Tilapia, représentent une production halieutique mondiale d’environ 700 000 tonnes, dont l’essentiel s’opère en Afrique (FAO, 2001). Connus dans le bas delta du fleuve Sénégal sous le nom de Wass, les tilapias présentent une chair très appréciée des populations locales. Oreochromis niloticus, Oreochromis aureus, Sarotherodon melanotheron, Sarotherodon galulaeus, Tilapia guineensis et Tilapia zillii sont parmi les espèces les plus capturées. Oreochromis niloticus niloticus (Linnée, 1758), objet de cette étude, présente un grand intérêt halieutique. Elle est capturée toute l’année dans les pêcheries dans le fleuve en général et du bassin de Diawling en particulier. Ce poisson, d’origine africaine (Fig. 1), a été, de tout temps rencontrée dans les bassins du Nil, du Niger, des Volta, du Sénégal et du Jordanie (Ruwet, 1982). Elle a ensuite été largement introduite partout dans le continent pour compléter le peuplement des lacs naturels ou des barrages déficients ou pauvres en espèces planctonivores pour développer la pisciculture. Elle présente actuellement une distribution géographique mondiale. Il est potentiellement utilisé en pisciculture dans les pays tropicaux et subtropicaux (Welcomme, 1988), elle est également élevée dans les lacs et fleuves d’Amérique et d’Asie.
La diagnose précise d’O. niloticus (Fig. 2) a, été réalisée par Trewavas (1983) sur la base de caractères morphologiques :
– une coloration grisâtre avec poitrine et flancs rosâtre et une alternance des bandes verticales claires et sombre ;
– la présence des bandes sombre et claire sur la nageoire caudale ;
– une nageoire dorsale longue à partie antérieure épineuse (12-14 épines) et à partie postérieure molle (16-18 rayons).
O. niloticus est une espèce à ovogenèse asynchrone et à ponte fractionné. Elle montre une faible fécondité et une période de reproduction très étalée (Peterson et al.2004 ; Kestémont et al.1989). Lorsque les conditions sont favorables, chaque mâle délimite un territoire et creuse un nid dans le quel une femelle dépose un lot des ovules que le mâle féconde immédiatement. Ces œufs sont repris par la femelle en incubation buccopharyngienne. Dans le fleuve Sénégal plusieurs familles de poissons ont été étudiées : Clariidae (Marquet et al., 1979), Characidae, (Reizer et al., 1972 a), Mormiridae (Reizer et al., 1973, 1977), Polypteridae (Reizer et al., 1972 b), Schilbeidae (Reizer et al., 1980). Diverse espèces appartenant à la famille des Cichlidae ont été examinées (Jensen, 1957 ; Rosemary et McConnell, 1958 ; El Zarka et al., 1970 ; Reizer, 1974 ; Thiaw, 1984 ; Pullin et al., 1982 ; Kolding, 1993 ; NDiaye, 1996 ; Pandaré & Sanogo, 1996 ; Balirwa, 1998 ; Duponchelle et al.,1999 ; Sanogo,1999 ; Koné et Teugel, 1999 ; Gomez -marquez et al,. 2003). O. niloticus du fleuve Sénégal a fait l’objet de quelques études lesquelles sont parailleurs partielles. Cette étude a pour objectif, de contribuer à la connaissance de la biologie d’Oreochromis niloticus. Elle porte sur la reproduction, la croissance et le comportement alimentaire d’Oreochromis niloticus en relation avec le suivi des facteurs de l’environnement, notamment la température, l’oxygène dissous et la conductivité.
Etude du milieu
Modifications récentes de l’hydro – système deltaïque mauritanien
Avant les années 70, le bas delta du fleuve Sénégal (Fig.3) était parmi les zones d’inondation les plus riches en ressources halieutiques en raison de divers mécanismes d’enrichissement et de diversification écologique liés à l’alternance d’inondations (Hamerlynck et al, 1997). Deux types de mise en eau existaient :
– à partir du mois d’août le fleuve reçoit les eaux de crue (eaux douces) qui repoussent progressivement les eaux marines puis envahissent les plaines d’inondations.
– la poussée des eaux marines par l’aval à partir du mois d’octobre ; l’eau de mer pénétrait progressivement vers l’amont dans le lit du fleuve et dans les principaux chenaux.
La sécheresse des années 70 et la construction du barrage de Diama destiné à empêcher les remontées d’eaux salées dans le fleuve et de la digue sur la rive droite destinée à créer une réserve d’eau douce permettant l’irrigation de périmètres agricoles dans la partie amont de la plaine, ont complètement changé le régime hydrologique du fleuve et de ses affluents. Le barrage, en empêchant la remontée de la langue salée agit sur l’alimentation et la circulation des masses d’eaux douce et marine de la zone. En amont, l’estuaire se trouve, de ce fait dessalé en permanence, ce qui se traduit par une perturbation du cycle hydrologique et par conséquent du potentiel halieutique et de la diversité biologique du bas delta. Le peuplement dulçaquicole et le peuplement estuarien ont subi une baisse considérable (Hamerlynck, 1996 ; Diagana, 1997). L’inondation permanente de la zone par l’eau douce a favorisé le développement d’une végétation aquatique (Typha, Tipha australis) et entraîné des effets secondaires pour l’ichtyofaune et l’avifaune (Hamerlynck, 1996). De plus, l’envahissement par la végétation limite considérablement l’exploitation de la zone par les populations autochtones.
Climat
Le bas delta se situe en zone sub-sahélienne à faible pluviométrie. Le climat y est de type sahélo-sahérien et comprend généralement trois saisons dans l’année :
– l’hivernage ou saison de pluies, chaude et humide, se situe entre mi-juin et mi octobre ;
– saison sèche froide, située entre mi-octobre et mi-février ;
– saison sèche chaude, située entre mi-février et mi-juin.
Pluviométrie
Le bas delta se situe dans une zone climatique caractérisée par de faibles précipitations. La moyenne à long terme des précipitations est d’environ 300 mm par an.
Température
Les températures de l’air, généralement très élevées, sont caractérisées par une large fluctuation entre le jour et la nuit. La température moyenne varie entre 25°C à proximité du littoral et 30°C dans le continent. Les températures minimales sont généralement enregistrées pendant les mois de décembre et janvier, alors que les maximales le sont pendant les mois de mai et juin.
Vents
Dans le bat delta, les vents sont de direction et de vitesses différentes selon les saisons, la direction dominante de ces vents est principalement du Nord ou Nord Ouest ver le Sud ou Sud-Est.
Période de reproduction
stades de maturation des gonades
Chaque fois qu’un poisson est disséqué, les gonades sont examinés et les caractères morphologiques portant sur la taille, l’aspect ferme ou flasque, la couleur, la visibilité des ovocytes à travers la membrane ovarienne sont notés. Les stades de maturité des gonades ont été identifiés par analyse macroscopique en se basant sur l’échelle de maturité de Legendre et Ecoutin (1989), la quelle comporte 7 stades chez les femelles et 3 chez les mâles.
Chez les femelles :
Stade 1 : individu immature ; les ovaires sont petits, collés au fond de la cavité abdominale, translucides et ont une consistance ferme, de plus ils ne présentent aucune vascularisation.
Stade 2 : individus en début de maturation ; les ovaires ont une couleur rose clair, sont fermes et quelques ovocytes sont visibles à l’œil nu.
Stade 3 : Individus en maturation ; à ce stade les ovocytes sont visibles à l’œil nu sous forme de très petits grains blancs.
Stade 4 : femelles en maturité avancée ; les ovaires continuent à croître et occupent une partie importante de la cavité abdominale. Ils sont très peu vascularisés, ils contiennent de petits ovocytes jaunes.
Stade 5 : individus mûrs ; les ovaires occupent toute la cavité abdominale. Ils contiennent de très gros ovocytes jaunes ou jaunes opaques. Les ovules sont expulsés à la moindre pression sur l’abdomen. C’est à ce stade qu’a lieu l’émission des produits génitaux.
Stade 6-2: stade après ponte ; les ovaires sont flasques. Ils ont l’aspect des ovaires au stade 4, mais se distinguent par la présence de gros ovocytes résiduels.
Stades 6-3 : dernière ponte ; les ovaires sont vides et ont une coloration brunâtre, ils ne contiennent plus que quelques ovocytes résiduels.
Chez les mâles :
Pour les mâles, les testicules ne présentent pas de différence significative de volume selon qu’ils sont matures ou non. Seulement trois stades ont été décrits :
Stade 1 : Immature. Testicules transparents, filiformes (absence de sperme).
Stade 2 : Testicules peu développés, rose (absence de sperme).
Stade 3 : mature et la laitance sort à la moindre pression de l’abdomen.
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Table des matières
I.INTRODUCTION
II. ETUDE DU MILIEU
II.1. Modifications récentes de l’hydro – système deltaïque mauritanien
II.2. Climat
II.3. Pluviométrie
II.4. Température
II.5. Vents
III. MATERIELS ET METHODES
III.1. Echantillonnage
III. 2. Le sexe-ratio
III. 3. Période de reproduction
III. 3. 1. stades de maturation des gonades
III.3.2. Le rapport gonado-somatique, le rapport hepato-somatique et coefficient de condition
III. 4. Taille à la première maturité sexuelle
III.5. Fécondité
III.7. Données environnementales
III.8. Age et Croissance
III.8. 1. Relation longueur totale (Lt)/longueur standard (Ls)
III.8. 2. Détermination de l’âge
III.8. 3. Période d’arrêt de croissance
III.8. 4. Relation taille/rayon de l’écaille
III.8. 5. Croissance linéaire
III.8.6. Courbe de croissance (Modèle de Von Bertalanffy)
III.8.7. Relation longueur/poids
III.8.8. Croissance pondérale
III.8.9. Indice de performance de croissance
III.9. Régime alimentaire
IV. RESULTATS
IV.1. Le sexe-ratio
IV. 2. Période de reproduction
IV. 2. 1. Maturation des gonades
IV. 2. 2. Evolution mensuelle du RGS
IV. 2. 3. Evolution mensuelle du RHS
IV. 2. 4. Evolution mensuelle du Kp et du Ke
IV. 2. 5. Taille et âge à la première maturité sexuelle
IV. 2. 6. Fécondité
IV. 2. 7. Diamètre ovocytaire
IV. 2. 8. Facteurs environnementaux du milieu
IV. 2. 9. Reproduction/environnement
IV. 3. Age et Croissance
IV. 3. 1. Relation longueur totale (Lt)-longueur standard (Ls)
IV. 3. 2. Période d’arrêt de croissance
IV. 3. 3. Relation longueur/rayon de l’écaille
IV. 3. 4. Croissance linéaire
IV. 3. 5. Courbes de croissance (Modèle de Von Bertalanffy)
IV. 3. 6. Relation longueur/poids
IV. 3. 6.1. Femelles
IV. 3. 6. 2. Mâles
IV.3. 6. Croissance pondérale
IV. 3. 7. Indice de performance de croissance
IV. 4. Régime alimentaire
IV. 4. 1. Etude qualitative
IV. 4. 2. Etude quantitative
IV. 4. 2. 1. Coefficient de vacuité
IV. 4. 2. 2. L’indice de réplétion
IV. 4. 3. Composition globale du bol alimentaire
IV. 4. 4. Variations saisonnières
V. DISCUSSION
V. 1. Le sexe-ratio
V. 2. Période de reproduction
V. 3. Taille et âge à la première maturation
V. 4. Fécondité et diamètre ovocytaire
V. 5. Croissance
V. 6. Régime alimentaire
VI. CONCLUSION GENERALE