La recherche dans le domaine de la fusion nucléaire a pour objectif la mise au point un réacteur utilisant une source d’énergie primaire décarbonée et abondante, fondée sur la fusion de noyaux d’atomes légers, tels que l’hydrogène et ses isotopes, formant des noyaux plus lourds et dégageant une grande quantité d’énergie. Les réactions de fusion ne peuvent être réalisées que dans un milieu aux conditions extrêmes de température, de l’ordre de dizaines à centaines de millions de degrés. Peu après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ces réactions ont pu être obtenues avec la bombe H, de façon explosive et incontrôlée. Plusieurs approches sont actuellement explorées pour utiliser cette énergie à des fins domestiques. D’une part, la fusion par confinement inertiel consiste à chauffer une microbille de mélange d’isotopes de l’Hydrogène par un ensemble de lasers, afin de la porter aux températures nécessaires à la combustion. Plusieurs installations expérimentent cette technique, comme le National Ignition Facility aux États-Unis et le Laser MégaJoule en France. D’autre part, la fusion par confinement magnétique consiste à confiner un mélange de Deutérium-Tritium dans un champ magnétique intense et à le chauffer, sous la forme d’un plasma entièrement ionisé, jusqu’à atteindre un taux de réaction suffisant. Placées dans un champ magnétique, les particules chargées effectuent un mouvement en hélice qui s’enroule autour des lignes de champ. Le rayon de giration (rayon de Larmor) est très petit pour les valeurs typiques des champs magnétiques utilisés, assurant le confinement du mouvement des particules le long des lignes de champ magnétique. Pour ne pas perdre ces particules par leur mouvement parallèle, il suffit d’enrouler les lignes de champ sur elles-mêmes, dans une configuration magnétique de topologie torique. C’est l’approche retenue par deux familles de machines : les tokamaks, tels JET (Grande-Bretagne), ASDEX Upgrade (Allemagne), DIII-D (États-Unis) et Tore Supra (France), et les stellarators, tels LHD (Japon), TJ-II (Espagne) et Wendelstein 7-X (Allemagne). Actuellement, la construction en France d’un nouveau tokamak, ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor), mutualise les efforts de nombreux pays .
Un plasma confiné magnétiquement doit être chauffé de l’extérieur tant que les réactions internes de fusion ne suffisent pas à maintenir sa température. Pour cela, on peut faire interagir des ondes radiofréquence ou encore y injecter des particules neutres à grande vitesse. Une des difficultés rencontrées est la dégradation du confinement lorsque l’on cherche à porter le plasma à de très hautes températures avec de fortes puissances de chauffage. Ce phénomène est dû au transport de la chaleur du cœur du plasma vers le bord. Il a été identifié que le transport est majoritairement dû à des phénomènes turbulents (transport turbulent) et que la contribution du transport dû aux collisions entre particules est faible (transport néoclassique). Les mécanismes du transport turbulent ne sont pas encore tous compris. Il est néanmoins clairement identifié que le transport turbulent est régulé par le cisaillement des écoulements dans la direction à la fois perpendiculaire au champ magnétique et au petit rayon du plasma (direction perpendiculaire). Par exemple, un mode de confinement amélioré du plasma, le mode H, a été observé dans plusieurs machines. Il est caractérisé par la présence d’une zone de fort cisaillement des écoulements du plasma près de son bord. Une famille d’écoulements perpendiculaires cisaillants, les flots zonaux, a pour particularité d’être excitée par la turbulence. Un des mécanismes souvent invoqués pour interpréter la régulation de la turbulence par ces écoulements cisaillées est une interaction de type prédateur-proie entre l’intensité des flots zonaux, prédateurs, et l’intensité de la turbulence, proie.
Généralités sur les tokamaks
La fusion nucléaire comme réponse à de nouveaux besoins en énergie
Les développements industriels et démographiques des sociétés humaines ont été accompagnés de besoins énergétiques croissant depuis plusieurs décennies. À plusieurs milliards d’individus sur Terre, il a été nécessaire de définir une politique énergétique afin de garantir l’approvisionnement et d’anticiper les conséquences de la consommation. À l’échelle de nations ou de regroupements de nations, les organisations politiques diversifient les sources d’énergie et recherchent le délicat équilibre entre celles-ci. Le concept de bouquet énergétique est né, cherchant à optimiser l’offre en tenant compte, par exemple, de la rareté et de la localisation des ressources, des contraintes et du coût de leur exploitation, de l’impact environnemental à différentes échelles de temps et d’espace, de l’opinion publique ainsi que de la qualité des relations internationales entre producteurs et consommateurs. Ainsi, les choix sont réalisés selon des facteurs techniques et humains. Le sol terrestre est un gisement considérable de matériaux utiles à la production d’énergie, mais certaines ressources sont consommées beaucoup plus rapidement que leur temps caractéristique de renouvellement, s’il peut être défini. On qualifie ces énergies de non renouvelables. On y compte les sources d’énergie majoritaires, de type fossile : pétrole, charbon, gaz naturel, gaz de schiste ou non fossile : uranium, thorium, etc., nécessaires à la fission nucléaire. Des efforts relativement récents cherchent à augmenter la part de la consommation énergétique liée aux énergies renouvelables, telles l’éolien, l’hydroélectrique, la biomasse, la géothermie, le solaire photovoltaïque et thermique, etc. Aucune solution universelle n’existe à ce jour : les énergies fossiles sont mises en cause pour leur contribution à la pollution atmosphérique et à l’effet de serre. Le gaz naturel, relativement prometteur, est mal réparti sur la planète et pose des problèmes géopolitiques. Dans le cas du gaz de schiste, les méthodes actuelles d’extraction du soussol sont contestées. La fission nucléaire résout en apparence les inconvénients des énergies fossiles mais son exploitation, dangereuse, demande beaucoup de rigueur, tandis que le traitement des déchets de la filière pose des défis encore non résolus. Les énergies renouvelables sont séduisantes mais sont difficiles à mettre en œuvre à l’échelle de la demande mondiale. Dans ce contexte, la recherche pour la production d’énergie à partir de fusion nucléaire prend tout son sens. Cette technique promet une production d’énergie à grande échelle tout en estompant fortement les difficultés associées à la fission (risques de défaillance et défi du traitement des déchets). Par ailleurs, les combustibles sont accessibles en grandes quantités sur Terre.
Principes de la fusion nucléaire
La fusion nucléaire consiste à faire fusionner deux noyaux atomiques pour former un élément plus lourd. De façon simplifiée, lors de la fusion de deux noyaux, deux forces sont en compétition : la force électrostatique, répulsive et à longue portée, et l’interaction forte, attractive et à plus courte portée. Le bilan d’énergie lié à la réunion des noyaux change avec la masse de ceux-ci . Pour les espèces les plus légères (de l’hydrogène au fer), un excédent d’énergie apparaît, sous forme d’énergie cinétique des produits de réaction ou de rayonnement. La réaction dégage une grande quantité d’énergie par nucléon, ce qui en fait une des sources d’énergie les plus concentrées. Pour les espèces les plus lourdes, le bilan énergétique est négatif. Pour cette raison, les projets de fusion nucléaire se concentrent sur les éléments légers tels l’hydrogène et ses isotopes, alors que la fission nucléaire n’est opérée que sur des éléments lourds.
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Table des matières
INTRODUCTION
1 Contexte – transport dans un plasma de tokamak et mode géodésique acoustique
1.1 Généralités sur les tokamaks
1.1.1 La fusion nucléaire comme réponse à de nouveaux besoins en énergie
1.1.2 Principes de la fusion nucléaire
1.1.3 Technique de confinement magnétique
1.1.4 Équilibre d’un plasma de tokamak
1.1.5 Écoulements
1.2 Transport
1.2.1 Transport néoclassique
1.2.2 Transport turbulent
1.3 Mode Géodésique Acoustique – contexte théorique et expérimental
1.3.1 Observation et identification du GAM
1.3.2 Prédiction théorique de la fréquence GAM
1.3.3 Excitation du GAM et interaction de celui-ci avec les flots zonaux et la turbulence
1.3.4 Amortissement linéaire du GAM
1.3.5 Structure radiale du GAM
2 Mesure par réflectométrie Doppler
2.1 La réflectométrie Doppler
2.1.1 Principe
2.1.2 Principes de la diffusion collective
2.1.3 Système électronique à détection hétérodyne
2.1.4 Propriétés du faisceau sonde
2.1.5 Propagation du faisceau dans un plasma non turbulent
2.1.6 Pilotage
2.1.7 Localisation de la mesure et tracé de rayon
2.1.8 Forme des spectres en fréquence
2.2 Mesure du profil radial de la densité électronique
2.2.1 Détermination de la densité par interférométrie
2.2.2 Détermination de la densité par réflectométrie
2.2.3 Traitement et assemblage des mesures de densité
3 Asymétrie poloïdale de la vitesse perpendiculaire des fluctuations de densité
3.1 Comparaison de la vitesse perpendiculaire des fluctuations à deux angles poloïdaux
3.1.1 Sélection des décharges pour cette étude
3.1.2 Mesures de V⊥
3.2 L’asymétrie de V⊥ est-elle liée à une asymétrie du potentiel électrostatique ?
3.2.1 Reformulation des résultats en unités de champ électrique parallèle
3.2.2 Effets de courants sur le champ électrique parallèle
3.2.3 Étude de l’équilibre parallèle des forces
3.2.4 Symétrie poloïdale du champ électrique radial dans une simulation GYSELA avec ripple
3.2.5 Conclusion
3.3 L’asymétrie de V⊥ est-elle liée au comportement des fluctuations ?
3.3.1 Des conséquences de l’orientation des fluctuations
3.3.2 Détection de fluctuations de vitesses de phase différentes
3.3.3 Conclusion
4 Détection et caractérisation du mode géodésique acoustique dans les signaux d’expérience et de simulation.
Application à un cas expérimental.
4.1 Détermination de l’évolution temporelle de la vitesse perpendiculaire des fluctuations de densité dans
l’expérience
4.1.1 Stratégie d’analyse
4.1.2 Présentation de l’analyse par classification en signaux multiples
4.1.3 Implémentation de l’analyse par classification en signaux multiples
4.1.4 Cas de signaux contenant également des variations de basse fréquence
4.2 Caractérisation de la dynamique des oscillations de vitesse perpendiculaire
4.2.1 Stratégie d’analyse
4.2.2 Transformée de Hilbert-Huang
4.2.3 Applications de la transformée de Hilbert-Huang
4.3 Étude des propriétés du GAM lors d’un changement de point de contact du plasma
4.3.1 Contexte d’étude : couplage des flots dans la SOL et le plasma de bord
4.3.2 Modification de l’intensité des GAMs
5 Comparaison des propriétés du mode géodésique acoustique entre expériences sur Tore Supra et une simulation gyrocinétique
5.1 Observation expérimentale des GAMs
5.1.1 Cadre de l’étude : scan adimensionel de la collisionalité dans Tore Supra
5.1.2 Identification du GAM
5.1.3 Détermination des profils de fréquence GAM dans l’expérience
5.1.4 Présence de paliers dans le profil de fréquence GAM
5.2 Observation du GAM dans une simulation GYSELA du cas haute collisionalité
5.2.1 Description de la simulation avec le code GYSELA
5.2.2 Paramètres plasma et protocole de normalisation
des grandeurs de GYSELA
5.2.3 Mesures du profil de fréquence GAM
5.2.4 Identification du GAM et répartition de son énergie
selon les modes poloïdaux
5.3 Discussion du désaccord entre expérience
et prédiction théorique
5.3.1 Variance entre les prédictions théoriques
5.3.2 Effets géométriques
5.3.3 Effets des impuretés
5.3.4 Effets du nombre d’onde radial du GAM, kr , lié à la propagation du mode
5.3.5 Effet de l’anisotropie en pression
5.3.6 Autres effets dont la contribution est faible
5.3.7 Synthèse
5.4 Propagation du GAM dans la simulation
5.4.1 Propagation de groupe
5.4.2 Synchronisation radiale de la phase du GAM
5.4.3 Discussion
CONCLUSION
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