Diabète en Afrique
L’Afrique n’échappe pas à cette augmentation de l’incidence du diabète sucré. On parle d’épidémie galopante pour le diabète de type 2. En 1901, Albert Cock, médecin missionnaire en Ouganda rapportait que « Le diabète est assez rare et très mortel ». Ce n’est qu’au début des années 60 que son existence a été affirmée. Par la suite, diverses études dans différents pays d’Afrique noir l’ont confirmé. Les données étaient basées sur des statistiques hospitalières. Les fréquences oscillaient entre 2 à 6% en milieu urbain [21]. En Afrique du nord, selon l’IDF édition 2012, un adulte sur 9 est atteint de diabète sucré avec une prévalence de 10,9% dont 52,9% des personnes diabétiques ne seraient pas diagnostiquées. En Afrique Sub-saharienne, le diabète était longtemps considéré comme une maladie rare. Pour les 20 prochaines années, l’Afrique sub-saharienne devrait enregistrer la plus forte augmentation mondiale du nombre de cas de diabète. Les prévalences actuellement observés en Afrique sub-saharienne laissent penser que la seule évolution démographique générera 9,5 millions de cas de diabète supplémentaires entre 2010 et 2030 [60, 43]. En 2013, 12,1 millions d’adultes étaient diabétiques dont 15% seulement ont été diagnostiqués. D’ici 2030, l’Afrique sub-saharienne devrait recenser 23,9 millions d’adultes atteints de diabète sucré [65, 43].
Rôle de l’insuline et implications de son déficit
L’insuline facilite le transport du glucose dans la cellule. La carence en insuline entraîne la mise en jeu de mécanismes de régulation dont le but est une augmentation de la pression intracellulaire du glucose. Ceci permet un passage de glucose vers la cellule afin de couvrir les besoins énergétiques. Dès lors l’équilibre habituel entre l’insuline et les hormones hyperglycémiantes disparait. A côté de la carence en insuline, il y a toujours une augmentation du cortisol, de l’adrénaline, du glucagon, de l’hormone de croissance. Il en résulte une hyperglycémie liée à l’augmentation du débit hépatique du glucose. Cette hyperglycémie est responsable de la symptomatologie du diabète : élimination de glucose par le rein dès que la glycémie dépasse le seuil rénal (environ 1,80g/l). Lorsque la glycosurie devient importante, le rein dilue ce glucose dans un volume d’eau plus élevé et la polyurie apparaît suivie d’une polydipsie destinée à compenser les pertes hydriques. Les cellules ne recevant pas assez de glucose suite à la carence en insuline, l’organisme fait appel à une deuxième source d’énergie : les corps cétoniques produits par le foie à partir des acides gras issus de la néoglucogenèse. Ceci se fait au dépend des masses musculaires et de la mobilisation des acides gras du tissu adipeux expliquant l’amaigrissement [94].
Les moyens non médicamenteux : l’éducation
Le diabète est une maladie chronique donc sa prise ne peut se concevoir selon un schéma traditionnel de relation soignant-patient. L’implication interventionnelle du patient lui-même est indispensable. C’est dans ce cadre que l’éducation thérapeutique des patients revêt un caractère primordial dans la prise en charge et le suivi du diabétique. Ceci a été démontré partout à travers le monde [17, 18]. Elle permet de prévenir et /ou d’éviter les complications aigues de la maladie diabétique et par la même occasion de diminuer la morbi-mortalité qui lui est liée. Elle a pour but de permettre au patient de participer à la prise en charge de sa maladie et de prévenir les complications grâce à la bonne connaissance de certaines règles et le respect de certaines contraintes.
Conseils hygiéno-diététique : La diététique est un élément essentiel dans le traitement du diabète et de ses comorbidités au même titre que l’activité physique et la prise de médicaments, en plus ses principes ont évolué. Il ne s’agit plus d’un régime hypoglucidique mais plutôt d’un régime normo glucidique modérément hypocalorique [91] grâce à une réduction des graisses et des boissons alcoolisées et une modification de la prise des glucides. L’alimentation du diabétique devrait répondre aux quatre objectifs suivants définis dans les recommandations de l’Association de Langue Française pour l’Etude du Diabète et des Maladies Métaboliques (ALFEDIAM) [74] :
– assurer un apport nutritionnel équilibré et adapté à chaque cas,
– éviter ou minimiser les fluctuations glycémiques,
– participer au contrôle des facteurs de risque,
– aider à réduire l’évolution des complications micro et macrovasculaires.
Le régime diabétique correspond à ce que les nutritionnistes conseillent à l’ensemble de la population et se compose comme suit:
L’apport glucidique : Sur le plan quantitatif, il doit correspondre à 50-55 % de la ration calorique totale et réparti en 3 repas. Sur le plan qualitatif, les glucides simples (sucreries, bonbons, chocolats et autres sucres raffinés) doivent être évités au profit des glucides complexes, dérivés de l’amidon.
L’apport lipidique Sur le plan quantitatif, il doit représenter 30 à 35 % de la ration calorique totale [91]. Il importe de se méfier des graisses « cachées ». En effet, l’apport lipidique ne se résume pas aux graisses d’assaisonnement, mais comprend les graisses contenues dans les autres aliments. Sur le plan qualitatif, on préconise un équilibre entre acides gras monoinsaturés, poly insaturés, saturés soit un apport de graisses saturées inférieur à 10 % de l’apport calorique total.
L’apport protidique : Sur le plan quantitatif, il doit représenter environ 15 % de la ration calorique totale. En cas de néphropathie diabétique, l’apport protidique doit être restreint à 0,8 g/kg/j pour diminuer la pente de décroissance du débit de filtration glomérulaire. Ainsi la diététique du diabétique et surtout du diabète de type 2 consiste en une modification de la qualité des nutriments. L’alimentation sera répartie en trois prises alimentaires principales. Il n’y a pas de régime alimentaire standard. Tout régime alimentaire chez un diabétique devra s’adapter au profil et à l’environnement du patient. Ce modèle de prise en charge diététique s’applique aussi à l’obésité. Ceci devra se faire dans un cadre d’éducation thérapeutique du patient où ce dernier deviendra l’acteur essentiel du succès du traitement.
Activité physique : L’exercice physique est aussi important pour le traitement du diabète en particulier du diabète de type 2 que le régime alimentaire.
L’activité physique régulière:
– Améliore la sensibilité à l’insuline, par exemple en augmentant la synthèse et l’utilisation du glycogène, l’activité des transporteurs du glucose ou leur phosphorylation,
– Améliore la respiration, les fonctions musculaires et articulaires,
– Diminue les dépôts de graisse, en particulier abdominale, liés à l’insulinorésistance et ses conséquences, avec fréquemment une perte de poids,
– Diminue la pression artérielle de repos comme à l’effort,
– Induit un profil lipidique anti-athéromateux avec augmentation de l’HDL et diminution des triglycérides,
– Augmente la fibrinolyse.
Les activités d’endurance ont de plus une action bénéfique sur l’ensemble des paramètres du syndrome d’insulinorésistance en particulier ses conséquences cardio-vasculaires (amélioration de l’hypertension artérielle) et métaboliques (abaissement des triglycérides et augmentation du HDL cholestérol). Avant de prescrire une activité physique chez un patient diabétique ayant dépassé la quarantaine il faudra :
– prendre la pression artérielle,
– faire un électrocardiogramme (ECG),
– faire un examen du fond d’œil surtout s’il est hypertendu,
– examiner les pouls.
L’activité physique devra être adaptée au profil et au gout du patient pour une réussite globale.
CONCLUSION
Le diabète est un état d’hyperglycémie chronique lié à une carence absolue ou relative en insuline, en rapport avec des facteurs génétiques et ou environnementaux agissant souvent de concert. En Afrique, la prévalence du diabète est en augmentation, atteignant ou dépassant celle trouvée dans les pays développés. Le diabète de type 2 représente 90%. Il survient typiquement vers la quarantaine chez un sujet en surpoids avec des antécédents familiaux de diabète. Sa prévalence augmente parallèlement au vieillissement, à l’urbanisation et à la sédentarisation de la population. L’association du diabète de type 2 avec d’autres facteurs de risque cardiovasculaires tels que l’obésité viscérale, l’HTA, et les anomalies lipidiques expose au risque d’augmenter les maladies cardiovasculaires. Ces diverses anomalies se regroupent au sein d’une entité appelée syndrome métabolique Ainsi le terme « syndrome métabolique » constitue un ensemble d’anomalies métaboliques et de facteurs de risque vasculaires associés les uns aux autres Chez de très nombreux sujets. L’association d’autres facteurs comme le SM, augmente le risque vasculaire chez les patients diabétiques déjà à haut risque. Tout ceci traduit ainsi l’importance de ce problème. Ainsi à notre connaissance aucune étude n’a été réalisée jusqu’à ce jour dans notre service. Ce qui nous a incités à réaliser cette étude dont l’objectif était de décrire le syndrome métabolique chez les diabétiques de type 2 et les facteurs associés au centre hospitalier Abass Ndao de Dakar. L’objectif de ce travail était de décrire les aspects épidémiologiques, cliniques, paracliniques et thérapeutiques du syndrome métaboliques chez les diabétiques de type 2 au centre marc Sankhalé de l’hôpital Abass Ndao. Il s’agit d’une étude transversale descriptive portant sur les sujets diabétiques de type 2. Le recrutement de nos patients s’est fait sur une année. Etaient inclus dans notre travail, les patients diabétiques de type II au centre Marc Sankhalé durant la période d’étude. Les données ont été recueillies dans les dossiers des patients remplissant les critères d’inclusion pendant la période de l’étude. Les critères de la fédération internationale du diabète(FID) en 2009 ont été utilisés pour la définition du syndrome métabolique. Durant la période d’étude nous avons colligé neuf cent quatre-vingt-sept (987) patients au service de médecine interne. Parmi eux cinq cent cinquante-six 556 avaient un syndrome métabolique(SM) étaient diabétiques soit une fréquence de 56,33%. L’âge moyen était de 57,64 ans avec des extrêmes de 26 et 84 ans. La tranche d’âge [50-59] était la plus représentée avec soit 34,4%. Les sujets âgés de moins de trente ans représentaient 0,18%. Il s’agissait de 451 femmes (81,1%) et 105 hommes (18,9%) soit un sex-ratio (h/f) de 0,23. Le syndrome métabolique était plus présent chez les femmes avec 68,1% que chez les hommes (32,4%) donc une différence très significative de p=0, 0001. Les ménagères étaient les plus représentées avec 145 cas soit 27,8%. La durée moyenne du diabète est de 9,23ans avec des extrêmes allant de 0 à 38ans. 58 patients soit 10% avaient un diabète inaugural. Le diabète était supérieur à 10 ans chez174 cas soit 31%. Le traitement ADO était utilisé chez 262 cas soit 47,40%. Seize (16) personnes avaient un antécédent d’AVC soit 2,87%, 10 personnes (1,79%) avaient une dysfonction érectile. La glycémie capillaire moyenne était de 2,25. Une glycémie supérieure à 1,20 était notée chez 258 cas soit 46,40%. L’HbA1C moyenne était de 8,84%.243 cas soit 46,02% avaient une HbA1C supérieure à 7%. L’HTA était la composante la plus observée retrouvée chez 499 cas soit 89,74%, suivi l’hypoHDLémie avec 74,82%. Le tour de taille moyenne était de 96,37cm avec des extrêmes allant de 80 à 127cm. Le surpoids était retrouvé dans 55,7% de la population soit 213 cas. L’obésité était retrouvée dans 42% soit 161 cas. Une pathologie associée était notée avec (21) cas d’asthme soit 3,78%, (10) cas avaient une goutte, 7 cas soit 1,26% avaient une PR, 6cas soit 1,08% une hypothyroïdie. Une anémie a été observée chez 51 cas soit 9,2%. Il s’agissait d’une hypertrophie auriculaire gauche (HAG) chez 43 cas soit 7,73%, une hypertrophie ventriculaire gauche chez 35 cas soit 6,29%. Une hyperuricémie était retrouvée chez 120 cas soit 28,91%. Concernant les critères du SM en dehors du diabète et de l’obésité abdominale, l’HTA-Dyslipidémie était la composante la plus représentée avec 259 cas soit 46,6%, HTA seul 250 cas soit 45%, HTA-Dyslipidémie-TG avec 32 cas soit 5,8% et HTA-TG 15 cas soit 2,7%.
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Table des matières
INTRODUCTION
A. GENERALITES SUR LES DIABETES
1. DEFINITIONS
2. CLASSIFICATION DU DIABETE SUCRE
2.1. Nouvelle classification
2.2. Ce qui est modifié dans cette classification
3. EPIDEMIOLOGIE DU DIABETE
3.1. Répartition géographique
3.1.1. Diabète dans le monde
3.1.2. Diabète en Afrique
3.1.3. Diabète au Sénégal
3.2. Répartition selon l’âge et le sexe [61]
4. ETIOPATHOGENIE
4.1. Biosynthèse de l’insuline
4.2. Rôle de l’insuline et implications de son déficit
4.3. Diabète de type 1 (DT1)
4.4. Prédisposition génétique au diabète de type
4.5. Mécanisme d’auto immunité
4.6. Les facteurs d’environnement
4.7. Le Diabète de type 2 (DT2)
4.7.1. La prédisposition génétique
4.7.2. Altération de l’insulinosécrétion et de l’insulinosensibilité
4.7.3. Facteurs environnementaux
5. DIAGNOSTIC
5.1. Circonstances de découverte
5.1.1. Dépistage systématique
5.1.2. Dépistage dirigé
5.1.3. Manifestations cliniques
5.2. Critères Diagnostiques du Diabète sucré
6. PARAMETRES DE SURVEILLANCE DU DIABETE SUCRE
B. SYNDROME METABOLIQUE
1. Définitions du syndrome métabolique
1.1. Définition originale de Reaven (1988)
1.2. Définition de l’organisation mondiale de la santé (OMS : 1998-1999)
1.3. Définition du National Cholesterol Education Program Adult Treatment Panel III (NCEP-ATPIII : 2001)
1.4. Définition du groupe Européen de l’Etude de l’Insulinorésistance (EGIR : 2002)
1.5. Définition de l’International Diabetes Federation (IDF : 2005) (70)
1.6. Définition de l’American Heart Association Heart, Lung and Blood Institue (AHA/NHLBI: 2002) (70)
2. Physiopathologie du syndrome métabolique
2.1. L’obésité
2.2. Particularités du tissu adipeux
2.3. Les éléments sécrétés par les adipocytes
2.4. L’insulinorésistance
2.5. La dyslipidémie
2.5.1. Hypertriglycéridémie
2.5.2. Modification du LDL-cholestérol
2.5.3. Modification du HDL- cholestérol
2.6. L’hypertension artérielle
2.7. Les facteurs génétiques
2.8. Les facteurs comportementaux
3. Conséquences cliniques du syndrome métabolique
3.1. Le risque cardiovasculaire
3.2. Risque de diabète de type 2
C. PRISE EN CHARGE
1. Buts
2. Moyens
2.1. Les moyens non médicamenteux : l’éducation
2.2. Les moyens médicamenteux
2.2.1. Antidiabétiques
2.2.2. Traitement médicamenteux des autres facteurs de risque
3. Modalités du traitement de l’hyperglycémie
D/ TRAVAUX PERSONNELS
1 Objectifs
1.1. Objectif général
1.2. Objectifs spécifiques
2 METHODOLOGIE
2.1. Cadre d’étude
2.2. Type d’étude
2.3. Population d’étude
2.4. Critères d’inclusion
2.5. Critères de non inclusion
2.6. Procédure de collecte des données
2.7. Variables de l’étude
2.8 Définition opérationnelle des données
3. RESULTATS
3.1. Résultats globaux
3.1.1. Données épidémiologiques
3.1.1.1. Fréquence
3.1.1.2. L’âge
3.1.1.3. Le genre
3.1.1.4. Situation matrimoniale
3.1.1.5. La profession
3.1.1.6. La Provenance
3.1.2. Données cliniques
3.1.2.1. Etude du diabète
3.1.2.2. Facteurs de risque cardiovasculaires
3.1.2.3. Mesure de la pression artérielle
3.1.2.4. Données anthropométriques
3.1.2.5. Pathologies associées
3.1.3. Données paracliniques
3.2. Résultats analytiques
3.2.1. Répartition du syndrome métabolique selon l’âge
3.2.2. Syndrome métabolique et Genre
3.2.3. Syndrome métabolique et facteurs de risque cardiovasculaires
3.2.4. Répartition du syndrome métabolique selon la comorbidité
3.2.5. Syndrome métabolique et IMC
3.2.6. Syndrome métabolique et critères associés
E/ DISCUSSION
1. Méthodologie
2. Données épidémiologiques
2.1. Fréquence
2.2. L’âge
2.3. Le genre
3. Etude clinique
3.1 Etude du diabète
3.2. Facteurs de risque cardiovasculaires
3.3. Mesure de la pression artérielle
3.4. Indice de Masse Corporelle (IMC)
3.5. Profil des diabétiques selon les critères du syndrome métaboliques
4. Données paracliniques
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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