L’obésité est une maladie chronique évolutive qui, dans une grande majorité des cas, débute durant l’enfance ou l’adolescence puis tend à s’aggraver au cours de la vie. L’obésité à l’adolescence est un facteur prédictif de l’obésité à l’âge adulte. Elle s’accompagne alors de risques de morbidité et de mortalité accrus chez les sujets ayant été en surpoids à l’adolescence, même chez ceux qui rejoindront un poids normal à l’âge adulte [1]. La prévalence s’est accrue à un rythme alarmant. On estimait qu’en 2010, le monde comptait plus de 42 millions d’enfants en surpoids. Près de 35 millions de ces enfants vivent dans des pays en développement. Les enfants en surpoids et obèses risquent de rester obèses une fois adultes et sont plus susceptibles de contracter des maladies non transmissibles telles que diabète et maladies cardiovasculaires à un âge plus précoce [2]. La prévalence de l’obésité chez l’adolescent a augmenté au cours des dernières décennies dans de nombreux pays. Cette tendance relevée dans les pays industrialisés, s’étend désormais aux pays en développement comme le Sénégal [3]. Au Sénégal, une étude faite en milieu hospitalier a révélé une obésité parentale chez 56,8% des enfants enquêtés [3]. La prévention de l’obésité de l’enfant est un problème de santé publique. Une attention particulière doit être portée au dépistage et à la prise en charge précoce des enfants et des adolescents présentant les premiers signes de la maladie [3]. Actuellement, le Sénégal ne dispose pas assez de données épidémiologiques fiables relatives à l’obésité infantile en milieu scolaire. Face à cette situation il parait important de mener ce travail qui va porter sur l’étude du surpoids, de l’obésité et des facteurs associés au surpoids chez les élèves du cycle secondaire de Dakar.
PHYSIOPATHOLOGIE DE L’OBESITE
L’obésité est une maladie chronique. Elle évolue en plusieurs phases par des physiopathologies variables dans le temps. Lors de la phase de prise de poids, le déséquilibre de la balance énergétique est avant tout lié à des facteurs comportementaux et environnementaux, une sédentarité accrue liée aux transports modernes, aux activités type télévision et ordinateur, à l’automatisation des tâches domestiques et professionnelles. Ce déséquilibre peut aussi être dû à un excès d’apport énergétique via la disponibilité des aliments, la taille des portions, la densité calorique, les stimuli sensoriels alimentaires, la convivialité, les habitudes culturelles et sollicitations professionnelles, les troubles du comportement alimentaire [4]. Lors de cette phase de constitution, les adipocytes se chargent en triglycérides. Point important, la masse maigre augmente aussi, ce qui entraine une augmentation de la dépense énergétique. Des situations de stress intense sont associées à des prises de poids sans hyperphagie systématique et font suspecter un rôle du stress dans la régulation de l’équilibre énergétique [4]. Lors de la stabilisation du poids chez l’individu devenu obèse, le bilan d’énergie est équilibré. Le nouvel équilibre pondéral est alors défendu par des facteurs biologiques puissants qui mettent en échec les mesures pour faire perdre du poids. Au fil du temps se constitue une pathologie d’organe avec de profonds remaniements anatomiques, biologiques et fonctionnels qui concernent l’ensemble des cellules du tissu adipeux (hypertrophie puis hyperplasie des adipocytes, infiltration par des cellules inflammatoires, fibrose, sécrétions autocrines et paracrines). Il en résulte de profondes altérations du dialogue physiologique entre tissus adipeux et le reste de l’organisme[5]. Concernant les aspects génétiques, la majorité des obésités résulte d’une prédisposition génétique s’exprimant dans un environnement favorisant. Il s’agit d’une hérédité polygénique en interaction avec des facteurs comportementaux ou environnementaux, le niveau d’activité physique ou le type d’apport alimentaire. Dans de rares situations, il est possible d’identifier une anomalie génétique spécifique (obésité mono génique) correspondant en général à des situations où l’obésité est massive et a débuté précocement dans l’enfance. Elle est fréquemment associée à des anomalies morphologiques (des yeux, oreilles ou des extrémités), endocriniennes (hypogonadisme), neurosensorielles (rétinite, surdité) et à une impulsivité alimentaire ou un retard mental [4,5].
DEFINITION ET TYPES D’OBESITE
Définition de l’obésité
L’obésité correspond à « un excès de masse grasse entrainant des conséquences néfastes pour la santé ». L’obésité est définie comme maladie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1997, du fait de sa dimension épidémique et de son retentissement somatique, psychologique et socioéconomique [6]. Les différents seuils d’indice de masse corporelle (IMC) ont été définis par le niveau de risque en termes de morbido-mortalité correspondant à chaque tranche d’IMC à l’échelle d’une population.
Indice de Masse corporelle
En anglais Body Mass Index (BMI) exprimé en Kg/m2, est le rapport du poids à la taille au carré. L’IMC est utilisé pour classer les patients en surpoids et obèses car il est relativement corrélé à la masse graisseuse, les seuils qui définissent l’obésité chez l’adulte (>18ans) sont les mêmes quels que soient le sexe et l’âge .
Contrairement à l’adulte, pour lequel il existe une valeur seuil unique de l’IMC pour le surpoids (IMC compris entre 25 et 29,9Kg/m2) et l’obésité (supérieur ou égal à 30 Kg/m2), chez l’enfant les seuils évoluent avec l’âge et le sexe du fait des variations de la corpulence survenant au cours de la croissance. L’indice de masse corporelle (IMC) est l’indice communément employé pour la classification du surpoids et de l’obésité [7].
Courbes de corpulence
Chez l’enfant, l’IMC varie au cours de la croissance, après une augmentation à la première année de vie, l’IMC diminue pour atteindre un nadir vers 4 à 6ans. La réascension de l’IMC qui intervient ensuite est appelée « rebond d’adiposité »[7]. L’obésité chez l’enfant est évaluée par des courbes de l’IMC qui sont tracées à partir de mesures recueillies à différents âges : les percentiles indiquent la position relative de l’IMC de l’enfant parmi ceux d’enfants de même âge et de même sexe [8]. Il n’existe pas un consensus quant à la définition de l’obésité ; plusieurs courbes de références de l’IMC sont disponibles .
Références de Must et al, 1991
Ces valeurs, publiées en 1991, ont été établies à partir de données recueillies de 1971 à 1974 dans le cadre des enquêtes de surveillance nationales américaines (National Health and Nutrition Examination Survey : NHANES I). Il s’agissait d’une enquête transversale ayant porté sur plus de 20 000 sujets âgés de 6 à 74ans. Les courbes de centiles ont été effectuées avec la méthode de régression pondérée localement. Les 85ème et 95ème percentiles de l’IMC sont généralement utilisés pour définir respectivement le surpoids et l’obésité chez les enfants. Bien que les auteurs aient présenté des données séparées par race, il est habituel d’utiliser les valeurs de référence pour l’ensemble de la population [13].
Références françaises de M-F Rolland Cachera et al. 1991
Les seuils correspondant étaient obtenus avec l’utilisation du 97ème percentile (P 97) pour définir le surpoids (obésité incluse), en tenant compte de l’âge et du sexe. Ces valeurs ont été établies à partir de données recueillies dans une cohorte d’enfants depuis l’âge d’un mois jusqu’à 15 ans et complétée jusqu’à 20 ans par les données d’une étude transversale de 1953 à 1960. Les courbes de références françaises de l’IMC comportent tous les rangs de centiles (du 3èmeau 97èmepercentile) définissant les zones d’insuffisance pondérale, de normalité et d’excès pondéral [9].
International Obesity Task Force (IOTF) en2000
Ses valeurs correspondaient aux courbes de centiles de l’IMC établies à partir de données de six pays (Brésil, Grande Bretagne, Hong-Kong, Pays Bas, Singapour et ÉtatsUnis) chez plus de 200 000 enfants examinés entre 1978 et 1993 [10]. La définition de l’obésité de l’enfant la plus utilisée actuellement est celle proposée par l’IOTF. La courbe de centiles passant par un IMC égal à 25Kg/m2 à l’âge de 18 ans permet de définir le seuil du surpoids, obésité incluse (IOTF 25) et la courbe des centiles passant par un IMC égal à 30Kg/m2 à l’âge de 18ans permet de définir le seuil de l’obésité (IOTF 30). L’IOTF définit ainsi pour chaque sexe et à chaque âge une valeur seuil de surpoids et d’obésité.
L’utilisation de la classification IOTF pour prédire l’apparition des facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires a été depuis validée aux États-Unis par Katzmarzyk et al (2003) [11]. Ces seuils ne concernent que les niveaux de poids supérieurs (surpoids et obésité) et non la zone de poids normal ou d’insuffisance pondérale[12]. L’utilisation des seuils IOTF est donc destinée à l’évaluation de la prévalence du surpoids et de l’obésité dans les études épidémiologiques et peuvent être complétées par les seuils de minceur de Cole et al. 2007 [12].
Références de l’Organisation Mondiale de la Santé
De nouveaux standards OMS ont été publiés en 2006 pour les enfants âgés de0 à 5 ans. Ces standards ont été complétés en 2007 par des références destinées aux enfants âgés de 5 à 19 ans en fonction de l’âge et du sexe. Ces derniers reprennent la base de données NHANES I de 1971 à 1974.Mais contrairement aux références présentées par Must et al en 1991, elles sont construites sur une base mensuelle au lieu d’annuelle, elle couvre tous les percentiles et toute la période de 5 à 19 ans, en continuité avec le standard des enfants de 0 à 5 ans [14, 15, 16]. Elles sont présentées sous deux modes d’expression :
o en percentile où le seuil de la situation de surpoids correspond à la frontière du 85ème percentile de la corpulence et l’obésité au 97ème percentile. L’obésité sévère se situe au 99ème percentile. Ce mode d’expression est peu utilisé pour les adultes.
o en z-score où ce mode d’expression standardisé de façon centrée et réduite, consiste à mesurer la taille et le poids d’un enfant et les comparer à la médiane ou la moyenne pour les enfants du même âge et du même sexe. Ainsi, on distingue pour les enfants de plus de 5 ans : le surpoids>+1 z-score, l’obésité >+2 z-score et l’obésité sévère > +3 z-score .
L’OMS conseille d’utiliser l’expression en z-score parce qu’elle se prête mieux à des données statistiques résumées (moyenne, écart type) .
Facteurs associés au surpoids et l’obésité de l’enfant
Bien que résultant d’un déséquilibre de la balance énergétique entre les apports et les dépenses, l’étiologie du surpoids et de l’obésité commune (par opposition aux obésités secondaires) est complexe et multifactorielle. Il existe une prédisposition au surpoids et à l’obésité d’origine génétique, modulée par une éventuelle influence épigénétique. Les facteurs associés au risque de surpoids et d’obésité commune de l’enfant et de l’adolescent sont les suivants [17] :
o le surpoids et obésité parentale notamment de la mère au début de la grossesse ;
o lors de la grossesse : prise de poids excessive, tabagisme maternel, diabète maternel quel que soit son type ;
o l’excès ou défaut de croissance fœtale (macrosomie ou hypotrophie) ;
o le gain pondéral accéléré dans les deux premières années de vie d’autant plus important que la période de gain pondéral accéléré est longue ;
o les difficultés socioéconomiques des parents et un cadre de vie défavorable ;
o le manque d’activité physique et la sédentarité ;
o le manque de sommeil ;
o les attitudes inadaptées de l’entourage par rapport à l’alimentation (restrictives ou au contraire trop permissives) ;
o les facteurs psychopathologiques: dépression chez les filles, hyperphagie boulimique;
o les négligences ou abus physiques ou sexuels dans l’enfance ou l’adolescence;
o l’handicap (moteur ou mental) ;
o l’allaitement maternel semble avoir un effet protecteur de faible importance .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. PHYSIOPATHOLOGIE DE L’OBESITE
II. DEFINITION ET TYPES D’OBESITE
III. EPIDEMIOLOOGIE DE L’OBESITE
III.1-Dans le monde
III.2-En Afrique
III.3-Au Sénégal
IV. FACTEURS INFLUENCANT LE RISQUE D’OBESITE
IV.1Facteurs génétiques
IV.2 Facteurs environnementaux
IV.2.1. Allaitement maternel et diététique
IV.2.2. Sédentarité
IV.2.3. Niveau socio économique
IV.2.4. Résidence
IV.2.5. Durée du sommeil
IV.2.6. Poids à la naissance
IV.2.7. Rebond adipocytaire précoce
V. COMPLICATIONS DE L’OBESITE
V.1. Persistance de l’obésité à l’âge adulte
V.2. Complications cardio-vasculaires
V.3. Complications métaboliques
V.4. Complications respiratoires
V.5. Complications psychologiques
V.6. Syndrome métabolique
VI. PRISE EN CHARGE DE L’OBESITE
VI.1. Evaluation initiale
VI.1.1. Evaluer l’aptitude au changement
VI.1.2. Bilan de l’obésité
VI.1.3. Bilan de co-morbidités
VI.1.4. Gestion des phases du traitement
VI.2. Prise en charge diététique
VI.2.1. Bases de mesures diététiques
VI.2.2. Types de régimes
VI.2.3. Intérêt de diététique dans le traitement de l’obésité et ses complications
VI.3. Thérapie cognitivo-comportementale
VI.4. Activité physique
VI.4.1 Définition et bienfaits de l’activité physique
VI.4.2 Actions de l’activité physique sur l’obésité et ses comorbidités
VI.5. Traitement pharmacologique
VI.5.1. Traitement pharmacologique à action centrale
VI.5.2 Traitement pharmacologique à action périphérique
VI.5.3. Nouveautés
VI.6. Traitement chirurgical
VI.6.1 Indications
VI.6.2Contres indications
VI.6.3. Différentes interventions chirurgicales
VI.6.3. Avantages et inconvénients de la chirurgie
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. BUT ET OBJECTIFS
I.1. But de l’étude
I.2. Objectif général
I.3. Objectifs spécifiques
II. CADRE D’ETUDE
III. METHODOLOGIE
III.1.Type d’étude
III.2.Population d’étude
III.3.Echantillonnage
III.4.Définition opérationnelle des termes
III.5.Outil et technique de collecte des données
III.5.1.Outil
III.5.2. Technique
III.6.Saisie et analysedes données
III.7.Ethique
IV. PRESENTATION DES RESULTATS
IV.1. Etude descriptive
IV.1.1.Données générales
IV.1.2.Caractéristiques sociodémographiques
IV.1.3.Habitudes et mode de vie
IV.1.4.Sédentarité et activité physique
IV.1.5. Données anthropométriques et autres mesures
IV.1.6.Connaissances nutritionnelles
IV.1.7.Prévalence du surpoids, obésité incluse
IV.1.8.Prévalence de l’obésité
IV.1.9.Prévalence du tour de tailleexcédentaire
IV.1.10.Hypertension artérielle
IV.1.11Image de soi et ressenti par rapport à leur corpulence
IV.2.Etude analytique
V. DISCUSSION
CONCLUSIONS-RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES