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Formation des vaisseaux sanguins chez l’adulte
Chez un individu adulte, les vaisseaux sanguins sont le plus souvent quiescents. Bien que les cellules endothéliales adultes soient moins prolifératives, elles peuvent cependant et dans des cas bien définis, former de nouveaux vaisseaux. Par exemple, l’angiogenèse est notamment réactivée au cours du cycle ovarien pour permettre la formation de l’endomètre ou encore lors de la cicatrisation d’un tissu. En dehors de ces phénomènes, la réactivation importante de l’angiogenèse est très souvent associée à une pathologie : le cancer par exemple. La progression tumorale dépend clairement du « switch angiogénique ». Les cellules tumorales ont la capacité de sécréter toute une variété de molécules pro-angiogéniques comme le FGF et le VEGF-A qui, à lui seul, peut initier l’angiogenèse tumorale au sein d’une vasculature quiescente. Les cellules tumorales sécrètent d’autres membres de la famille du VEGF comme le VEGFC, le VEGFD. Ces molécules induisent la formation de nouveaux vaisseaux soit par le recrutement de cellules endothéliales proches du site tumoral ou bien par le recrutement de cellules progénitrices des cellules endothéliales qui sont produites dans la moelle osseuse (Lyden et al., 2001) (Khakoo and Finkel, 2005) (Kopp et al., 2008). Au sein de cet environnement pro-angiogénique créé par les cellules tumorales, les cellules endothéliales sont perpétuellement stimulées et incapables de former des vaisseaux stables. Ces vaisseaux sont en effet tortueux, hémorragiques et de forme irrégulière. De plus, les péricytes sont très peu associés à ces vaisseaux et ne peuvent donc plus les stabiliser (Bergers and Benjamin, 2003).
Angiogenèse et thérapies associées
Inhiber la formation des vaisseaux sanguins au sein de la tumeur est une piste thérapeutique empruntée de nos jours. La molécule la plus populaire utilisée en thérapie anti-angiogénique est l’Avastin. Cet anticorps monoclonal, créé par l’équipe de Ferrara (Etats Unis), est un anticorps anti VEGF-A. L’effet de l’anticorps sur la vasculature peut paraître surprenant puisque le traitement induit une normalisation de la vasculature (Heath and Bicknell, 2009). Cette normalisation est en fait bénéfique car elle favorise l’acheminement de molécules antitumorales au site tumoral.
A contrario, dans certains cas, réactiver « artificiellement » l’angiogenèse chez l’adulte représente une thérapie essentielle pour sauver un membre de l’ischémie. Le traitement consiste en l’injection de cellules endothéliales progénitrices isolées de la moelle osseuse du patient stimulé par des cytokines ou des facteurs de croissances endothéliaux (Zampetaki et al., 2008) (Kirton and Xu, 2010).
En conclusion, la survie d’un individu est donc strictement dépendante de la vasculogenèse et de l’angiogenèse qui permettent la formation d’un réseau vasculaire fonctionnel. Au cours du développement, ce réseau permet la croissance des tissus via l’apport en éléments nutritifs essentiels. La formation d’un plexus vasculaire fonctionellement et structurellement mature est régie par un contrôle spatiotemporel extrêmement fin de facteurs pro- ou anti-angiogéniques. Dans le cadre de l’angiogenèse tumorale, cette balance est complètement modifiée. Chez des patients atteints d’ischémie, la formation de nouveaux vaisseaux reste une thérapie de choix pour sauver l’organe en question.
Stabilité de la cohésion interendothéliale : rôles des complexes jonctionnels
Structures jonctionnelles : généralités
Dans un organisme pluricellulaire, les cellules sont rattachées entre elles par diverses structures membranaires spécialisées qui assurent ainsi une cohésion de l’ensemble du tissu. Le rôle cohésif de ces structures jonctionnelles a une importance capitale au sein de tissu. Elles forment ainsi une barrière perméable avec l’environnement. L’épithélium et l’endothelium sont deux exemples qui illustrent parfaitement cette idée. Ces deux barrières naturelles permettent respectivement de compartimentaliser les tissus entre eux ou de séparer le sang des tissus sous-jacents.
En plus de leur rôle adhésif, ces plateformes peuvent êtres modulables et deviennent de véritables structures de signalisation, modifiant profondément la biologie de la cellule. Les structures d’attachement sont matérialisées par diverses molécules d’adhérence transmembranaires. Le plus souvent ce sont les mêmes protéines de deux cellules voisines qui interagissent et permettent ainsi une liaison homophilique. Les molécules d’adhérence de l’épithélium ont été les premières étudiées et restent encore les mieux décrites. Elles constituent ainsi un modèle de référence. Les molécules d’adhérence épithéliales s’organisent de manière précise le long de la jonction ce qui confère à la cellule sa polarité. La première structure qui se trouve du côté le plus apical est la jonction serrée ou jonction étanche (Cf. Figure 11).
Les cellules établissent des contacts intercellulaires qui sont organisés en plateforme d’adhérence. La jonction serrée se situe du côté le plus apical des contacts intercellulaires. La jonction adhérente, le desmosome et les jonctions communicantes sont d’autres structures qui permettent le maintien de la cohésion intercellulaire.
Cette structure est suivie d’une jonction adhérente, de desmosomes répartis le long de la membrane basolatérale jusqu’au pôle basal. De plus, d’autres structures assurent des échanges entre cellules par la création de pores communicants entre cellules adjacentes : ce sont les jonctions communicantes (ou gap junction). Bien que l’endothelium présente de nombreuses similarités avec l’épithélium, l’organisation des structures jonctionnelles interendothéliales présentent une hiérarchie différente. Tout d’abord, les cellules endothéliales ne possèdent pas de desmosomes. De plus, les jonctions serrées et les jonctions adhérentes sont moins organisées et peuvent se superposer suivant le type d’endothelium étudié (Dejana et al., 2009).
La jonction serrée (TJ) interendothéliale
Présentation de la jonction serrée
La jonction serrée appelée également jonction imperméable est essentielle dans le maintien de la cohésion cellulaire. Elle empêche la diffusion de molécules présentes dans la lumière jusqu’aux tissus sous-jacents et restreint la fuite des lipides et des protéines entre le pôle apical et basolateral de la membrane plasmique (Harhaj and Antonetti, 2004). Cette structure se localise du côté apical de la membrane et peut être facilement visualisée en microscopie électronique puisqu’elle est dense aux électrons (Cf. Figure 12). La jonction serrée donne l’illusion d’une fusion des membranes de deux cellules voisines. Elle est principalement composée de trois différentes familles de protéines transmembranaires : les molécules de la famille des claudines incluant l’occludine, des molécules d’adhérence de la jonction (JAM, Junctional Adhesion Molecules) et les ESAM, molécules d’adhérence sélectives des cellules endothéliales (Endothelial cell-Selective Adhesion Molecules). Des protéines adaptatrices peuvent interagir avec ces protéines transmembranaires.
La jonction serrée est une structure adhérente se situant du côté apical de la cellule. Elle est caractérisée par la présence de différentes molécules transmembranaires comme la claudine, l’occludine et la molécule JAM (les molécules ESAM font également partie de la jonction serrée mais ne sont pas représentées sur ce schéma).
Les principales molécules de la jonction serrée
Les claudines
Les molécules de la famillle des claudines sont les protéines majeures de la jonction serrée. Elles sont capables de former des interactions homophiliques ou hétérophiliques avec d’autres sous types de claudine. Il existe 20 claudines différentes, cependant chaque claudine est spécifique d’un tissu en particulier. Elles présentent toutes la même structure et ont des similarités structurales avec l’occludine. Deux boucles forment la région extracellulaire de la claudine. La partie extracellulaire et plus précisément sa structure tri-dimensionnelle régule le passage des solutés au travers de la monocouche de cellules. La région extracellulaire est suivie d’une région transmembranaire et d’une queue cytoplasmique qui permet la liaison avec des partenaires protéiques comme les protéines ZO-1, ZO-2, ZO-3 (Zonula Ocludens), MUPP1 (Multi-PDZ Protein 1), PATJ (PALS1-associated TJ protein).
Au sein de l’endothelium, les structures jonctionnelles à base de claudine régulent le mouvement d’ions paracellulaires (Wallez and Huber, 2008). La claudine la plus abondante dans l’endothelium est la claudine-5. Elle est présente de manière ubiquitaire le long de l’arbre vasculaire, bien que plus exprimée au sein des cellules endothéliales de la barrière hémato-encéphalique. Sa fonction a été mise en évidence par des expériences d’invalidation génique chez la souris. Les souris déficientes se développent normalement mais meurent peu de temps après leur naissance. De manière surprenante, la déficience en claudine-5 ne modifie pas la structure des jonctions serrées, qui, cependant, deviennent plus perméables pour des petites molécules (Nitta et al., 2003). Très récemment, il a été mis en évidence que l’endothelium pouvait exprimer d’autres claudines comme les claudine-1, -3 (Neuhaus et al., 2008), -11 (Wessells et al., 2009), et – 12 (Belanger et al., 2007).
L’occludine
La molécule d’occludine est historiquement la première protéine mise en évidence au sein des jonctions serrées. Cette protéine possède quatre domaines transmembranaires qui forment deux boucles extracellulaires de taille similaire. La première bouble est impliquée dans l’adhérence intercellulaire alors que la deuxième est responsable de la résistance éléctrique transendothéliale. Trois domaines cytoplasmiques terminent la molécule. La partie intracellulaire est remarquablement conservée entre les espèces et interagit avec des partenaires cytoplasmiques comme la protéine ZO-1 ce qui lui permet d’être reliée au cytosquelette d’actine. Elle interagit également avec les protéines ZO -2 et -3 ainsi qu’avec une molécule des jonctions communicantes, la connexine-32. L’occludine s’associe à d’autres protéines intracellulaires des jonctions adhérentes comme VAP-33 (pour VAMP associated protein) (Lapierre et al., 1999). Cette protéine serait capable de réguler la localisation de l’occludine. La technique de double hybride a pu mettre en lumière d’autres partenaires potentiels cytoplasmiques de la molécule d’occludine comme la PKC- (Protéine Kinase C- ), la tyrosine kinase c-YES et la protéine p85 (Nusrat et al., 2000a). L’occludine n’est pas essentielle à la formation de la jonction serrée mais renforce la cohésion intercellulaire. En effet, les souris déficientes pour cette protéine présentent des jonctions serrées correctement formées (Saitou et al., 2000). Cependant, ces souris montrent un retard de croissance postnatale et présentent de nombreuses anomalies au sein de plusieurs tissus (inflammation, calcification du cerveau, atrophies testiculaires). D’autres protéines de la jonction serrée seraient alors capables de compenser l’absence d’occludine. Chez l’homme, la perte d’expression de l’occludine est associée à plusieurs pathologies. Une dissociation de la barrière hémato-encéphalique est alors remarquée, ce qui prouve que l’occludine augmente la force d’interaction entre les cellules endothéliales.
Les protéines JAM
Les molécules d’adhérence jonctionnelles (JAM, Junction Adherent Molecules) sont des protéines appartenant à la superfamille des immunoglobulines. Le domaine extracellulaire est formé de deux boucles de type immunoglobuline, suivi d’un passage transmembranaire. Leur domaine intracellulaire leur permet d’interagir avec différentes protéines telles que ZO-1, AF-6 et ASIP (Agouti Signaling Protein). Ce sont des protéines localisées à la jonction intercellulaire des cellules endothéliales mais également de certains épithelia polarisés. Les cellules circulantes comme les leucocytes et les plaquettes expriment également cette molécule.
JAM-C présente également une expression variée au sein du système vasculaire : elle est présente sur les cellules endothéliales vasculaires, les cellules endothéliales des vaisseaux lymphatiques et également sur les plaquettes, les Natural Killer (NK) et les cellules dendritiques.
JAM-B a une distribution plus restreinte puique présente uniquement sur certains types de vaisseaux. En effet, elle se localise à la jonction des cellules endothéliales de différents vaisseaux. Elle est néanmoins surtout exprimée au sein des cellules endothéliales qui constituent les veinules à haut endothelium ou HEV (High Endothelial Venules). Ces veinules post-capillaires sont le lieu de passage des cellules lymphoïdes de la circulation vers le système lymphoïde et les tissus.
Les molécules JAM exercent des interactions homophiliques, mais peuvent s’associer à d’autres protéines, notamment les intégrines présentes à la surface des cellules du système immunitaire comme les leucocytes. Ainsi, JAM-A permet l’adhésion du leucocyte sur la cellule endothéliale et facilite ainsi la transmigration leucocytaire. De plus, les protéines JAM sont également capables d’induire l’activation plaquettaire en les immobilisant à la surface des cellules endothéliales stimulées par des agents pro-inflammatoires.
La molécule ESAM
La molécule ESAM est une protéine qui appartient à la superfamille des immunoglobulines. Cette protéine engendre des liaisons de type homophilique et calcium dépendante entre cellules endothéliales voisines. Elle est uniquement exprimée dans l’endothelium vasculaire et dans les plaquettes activées.
Son rôle pendant le développement vasculaire présente quelques contradictions. En effet, bien que cette molécule d’adhérence ne soit pas essentielle à la formation des vaisseaux chez les souris déficientes en ESAM puiqu’elles présentaient une vasculature comparable aux souris sauvages, in vitro, les cellules endothéliales issues des souris déficientes en ESAM n’étaient pas capables de s’organiser en tube sur une matrice de matrigel (Ishida et al., 2003).
Néanmoins, dans un contexte tumoral in vivo, cette protéine semble être important pour la formation de vaisseaux tumoraux. Les tumeurs induites dans des souris déficientes en ESAM sont moins vascularisées que les tumeurs implantées chez des souris sauvages. Ce phénomène s’explique par une mauvaise stabilisation des contacts cellulaires et une mauvaise cohésion des cellules endothéliales. Les cellules endothéliales ESAM -/- ont de grandes difficultés à migrer en présence de sérum ou en présence de FGF.
Enfin, il a été montré que ESAM joue un rôle dans l’extravasation précoce et spécifique des neutrophiles à travers la barrière endothéliale (Wegmann et al., 2006)).
Molécules d’adhérence n’appartenant pas à une structure jonctionnelle particulière
Bien que certaines protéines soient concentrées au niveau des contacts interendothéliaux, ces protéines ne sont pas considérées comme appartenant à une structure jonctionelle particulière. La protéine PECAM et la protéine S-endo-1 sont deux protéines illustrant parfaitement ces observations.
PECAM
Structure moléculaire de PECAM
PECAM, également appelée CD31, est une molécule d’adhérence transmembranaire de 130 kDa appartenant également à la superfamille des immunoglobulines. Au cours du développement, PECAM est exprimée à des stades précoces dans le blastocyste, dans les angioblastes et dans les îlots sanguins du sac vitellin. Son expression persiste tout au long du développement embryonnaire. Chez l’adulte, PECAM est principalement exprimée par les cellules endothéliales. Cette protéine constitue donc un excellent marqueur protéique des cellules endothéliales. Cependant, elle est également exprimée sur d’autres types cellulaires comme les leucocytes et les plaquettes (Newman and Newman, 2003). PECAM est localisée au niveau des contacts intercellulaires mais également au niveau du pôle apical de la cellule. Cette molécule peut s’engager aussi bien dans des interactions homophiliques entre cellules endothéliales voisines grâce à son domaine extracellulaire que dans des interactions hétérophiliques avec l’intégrine v 3, la molécule CD38 (ADP ribose nuclease) et la protéine CD177 (NB-1), exprimée par un sous-type de leucocyte. Grâce à un mécanisme d’épissage alternatif, différentes isoformes de PECAM existent. Chez l’homme, l’isoforme majoritaire est représentée par la forme entière alors que chez la souris la forme tronquée pour l’exon 14 et 15 est la forme majoritaire. Ces isoformes possèdent des propriétés adhésives différentes (Sheibani et al., 1999) et pourraient présenter des fonctions spécifiques au cours du développement vasculaire. En effet, il a été montré qu’il existe une expression différentielle des diverses isoformes au cours de l’organisation du réseau vasculaire (Wang et al., 2003).
PECAM est capable de transmettre des signaux intracellulaires qui sont principalement régulés par son domaine cytoplasmique contenant deux motifs ITIMS (Immunoreceptor Tyrosine Inhibitory Motifs). Chaque ITIM porte un résidu tyrosine pouvant être phosphorylé (Biswas et al., 2003). Ces motifs sont des points d’ancrage pour diverses molécules signalétiques comme des tyrosines phosphatases SHP-1 ou SHP-2 (Src Homology Phosphatase 1, Src Homology Phosphatase 2). Elle interagit également avec les caténines : la – et la -caténine (Cf. Figure 13).
Le domaine extracellulaire (en vert) est formé de 6 domaines de type Ig répétés.
Le domaine intracellulaire (en rose) est formé généralement de 7 motifs (10 à 16), qui correspondent aux différents exons du gène. Les domaines 13 et 14 contiennent les domaines ITIM qui une fois phosphorylés interargissent avec SHP-2. L’exon15 code le domaine de liaison à la ß-caténine phosphorylée et l’exon 13, celui responsable de la laison à la -caténine.
PECAM et ses partenaires cytoplasmiques
-caténine et SHP-2
À la suite d’un traitement au VEGF, la forme phosphorylée de la -caténine est capable d’interagir avec le domaine intracellulaire de PECAM. PECAM constituerait ainsi un réservoir de -caténine phosphorylée (Ilan et al., 1999). Ceci pourrait alors éviter la dégradation de la – caténine par le protéasome ou bien la translocation de la caténine dans le noyau, lieu où elle exerce son rôle de co-facteur de transcription (voir session « ß-caténine » page 30 de la partie D, 2, b). L’interaction entre PECAM et la -caténine peut être régulée par la phosphatase SHP-2. En effet, le domaine de liaison à la -caténine est très proche de celui de SHP-2. SHP-2 pourrait alors moduler la formation du complexe -caténine phosphorylée/PECAM. Une fois déphosphorylée, la -caténine libre pourrait participer à de nouvelles jonctions adhérentes (Biswas et al., 2006).
-caténine
PECAM peut également lier la -caténine. L’interaction est possible uniquement lorsque PECAM est phosphorylée, de préférence sur des résidus sérine ou thréonine (Ilan et al., 2000). Cette phosphorylation est effectuée via l’activation de la Protéine Kinase C (PKC). La phosphorylation induit alors un changement de localisation de la -caténine nucléaire, qui peut alors être transloquée du noyau vers les jonctions intercellulaires. Le recrutement de la -caténine permet l’interaction indirecte de PECAM avec la desmoplakine, ce qui permettrait à PECAM d’être reliée aux filaments intermédiaires comme les filaments intermédiaires de vimentine (Ilan and Madri, 2003). Ce phénomène permettrait la formation d’un lien physique entre la surface cellulaire et l’enveloppe nucléaire (Ilan et al., 2000). Également, l’interaction entre PECAM et la -caténine pourrait jouer un autre rôle. En effet, comme pour la ß-caténine, la -caténine est décrite comme étant un co-facteur transcriptionel (Maeda et al., 2004) (Shimizu et al., 2008). Ainsi, liée à PECAM, elle serait donc séquestrée par cette dernière et ne pourrait plus assurer son rôle dans l’expression génique.
Fonction de la protéine PECAM
Rôle de PECAM dans l’angiogenèse
In vitro, plusieurs études ont mis en évidence un rôle fort de PECAM dans l’angiogenèse. En effet, les cellules déficientes en protéine PECAM ou traitées avec des anticorps dirigés spécifiquement contre PECAM perdent leur capacité à former des structures vasculaires in vitro (DeLisser et al., 1997) (Cao et al., 2002) (Solowiej et al., 2003) (Dimaio et al., 2008). De plus, cette molécule d’adhérence joue un rôle clé au cours de la migration des cellules endothéliales (Cao et al., 2009) (O’Brien et al., 2004). D’une part, il a été montré que PECAM, en recrutant SHP-2 à la membrane, induirait une déphosphorylation des protéines des adhérences focales comme la paxilline et la vinculine. Ces déphosphorylations déstabiliseraient et induiraient un turnover des adhérences focales (O’Brien et al., 2004). D’autre part, PECAM pourrait réguler la formation de structures membranaires propices pour la migration comme les filopodes, en régulant l’expression de la petite protéine appartenant à la famille des Rho-GTPase : Cdc42. En effet, les cellules déficientes en PECAM ont un niveau d’expression pour Cdc42 très faible et ne présentent plus de filopodes (Cao et al., 2009).
In vivo, PECAM ne semble cependant pas jouer un rôle clé au cours du dévelopement et pendant la formation du réseau vasculaire. Les souris déficientes en PECAM se développent normalement et leur réseau vasculaire ne présente aucune anomalie majeure (Duncan et al., 1999). Seule l’angiogenèse post-natale de la rétine nécessiterait la présence de la protéine PECAM (Dimaio et al., 2008). En absence de PECAM, les vaisseaux de la rétine sont moins nombreux, plus dilatés et ne peuvent former un réseau branché. Ce phénomène s’expliquerait par une diminution de l’endogline, molécule critique pour la néo-vascularisation de la rétine (résultats non publiés par l’équipe de Shebani ). Ce résultat suggère que PECAM pourrait réguler l’expression de certains gènes.
Importance de PECAM dans la transmigration leucocytaire
PECAM au sein de la cellule endothéliale est surtout connue pour aider et favoriser la transmigration leucocytaire à travers la monocouche de cellules endothéliales (Garrido-Urbani et al., 2008). La liaison de la protéine PECAM de la cellule immunitaire avec la protéine PECAM endothéliale génère une interaction aboutissant à une coopération entre les deux types cellulaires qui permet alors la transmigration leucocytaire. Le domaine 1 du domaine extracellulaire de PECAM est le domaine protéique qui permet l’interaction entre les deux types cellulaire et la transmigration leucocytaire. En effet, la protéine PECAM soluble comprenant uniquement le premier domaine de type immunoglobuline provoque un blocage de la diapédèse des leucocytes et ceci aussi bien in vivo qu’in vitro (Liao et al., 1997). De plus, le traitement avec un anticorps dirigé spécifiquement contre ce domaine induit une agrégation des leucocytes au niveau de la surface luminale de la cellule endothéliale (Nakada et al., 2000).
Une fois ce premier contact formé entre la cellule endothéliale et le leucocyte, l’engagement de la protéine PECAM exprimée à la surface de la cellule endothéliale avec celle de la cellule leucocytaire induit chez le leucocyte la translocation de l’intégrine 6 1 du cytoplasme vers la membrane plasmique (Dangerfield et al., 2002) (Wang et al., 2005). Ce mécanisme permet de renforcer l’adhérence entre les deux types cellulaires et donc le passage du leucocyte.
Enfin, lorsque le leucocyte s’engage dans le processus de transmigration, PECAM favoriserait alors le passage du leucocyte à travers la membrane basale (Liao et al., 1995) (Wakelin et al., 1996)). Cependant, au fil des études, il s’est avéré que la régulation de la transmigration leucocytaire par PECAM était beaucoup plus complexe. En effet, en fonction du stimulus appliqué mais également en fonction du fond génétique des souris étudiées, la migration des leucocytes pouvait être différente (Woodfin et al., 2007b). Une si grande variation pourrait s’expliquer par le fait que PECAM n’est pas la seule molécule d’adhérence impliquée dans la transmigration leucocytaire. In vivo, les protéines ICAM-2 et JAM-A favorisent la transmigration leucocytaire indépendamment de PECAM (Huang et al., 2006) (Woodfin et al., 2007a) (Woodfin et al., 2009). Ces études démontrent donc que PECAM est, certes, impliquée dans la transmigration leucocytaire mais non essentielle au cours de ce processus.
S-endo-1 (ou CD146 ou Muc 18) : structure et fonction
Cette molécule d’adhérence appartient à la superfamille des immunoglobulines et a été découverte au sein de cellules de mélanome (Shih, 1999). Elle est exprimée dans les cellules musculaires lisses et dans les cellules endothéliales. S-endo-1 est localisée au niveau des contacts intercellulaires (Bardin et al., 2001) et s’engage dans des interactions homophiliques. S-endo-1 est une molécule importante pour l’adhérence interendothéliale (Solovey et al., 2001) et semble être impliquée au cours de l’angiogenèse (Yan et al., 2003). En effet, elle aurait un rôle dans l’activation de la signalisation pro-angiogénique et constituerait un véritable récepteur membranaire du signal au cours de l’angiogenèse tumorale. En réponse aux stimuli des cellules tumorales, S-endo 1 induit l’activation des protéines p38/IKK (I KappaB Kinase)/NF B (Nuclear Factor-Kappa B) (Zheng et al., 2009). Cette voie signalétique activerait alors des gènes pro-angiogéniques comme IL-8, VEGF, ICAM-1 (InterCellular Adhesion Molecule) et la MMP-9 (Matrix MetalloProteinase-9). L’activation de CD146 pourrait engendrer une autre voie de signalisation faisant intervenir le recrutement de Fyn qui est une kinase appartenant à la famille Src. Cette activation induirait une phosphorylation de la Focal Adhesion Kinase (ou FAK) et de la paxilline, principales protéines des adhérences focales.
La jonction adhérente
Généralités
Les jonctions adhérentes forment des ceintures d’adhérence au pôle apical des cellules assurant un ancrage fort des cellules entre elles ainsi qu’au cytosquelette d’actine. Ces jonctions, non seulement renforcent la cohésion mécanique des tissus, mais permettent également la contraction d’un anneau d’actine apical à l’origine de nombreux mouvements morphologiques au cours de l’embryogenèse. Les molécules clés de la jonction adhérente sont représentées par des molécules de la famille des cadhérines. Un chapitre complet est donc dédié à la description de ces molécules.
Les cadhérines constituent une large famille de glycoprotéines localisées à la surface des cellules. La plupart d’entre elles participent à des adhérences dépendantes du calcium. Elles jouent un rôle clé dans la formation des tissus solides (Takeichi, 1995) (Tepass, 1999) et leur expression séléctive est finement régulée au cours du developpement embryonnaire (Radice et al., 1997) (Stepniak et al., 2009). De plus, leur fonction adhésive est sélective. En effet, lorsque différents types de cellules sont mélangés, les cellules de même type sont capables de s’assembler. Ces interactions sont dites homotypiques. Cette association cellulaire se fait en fonction du sous-type de cadhérine qu’elles expriment. Les cellules forment ainsi des liaisons homophiliques (Takeichi, 1990). Chez les vertébrés, les cadhérines sont au nombre de 100, divisées en sous-familles. La partie extracellulaire d’une cadhérine est caractérisée par la présence de plusieurs domaines répétés d’environ cent dix acides aminés. Ce motif, nommé ectodomaine (ou EC), se présente sous la forme d’un module de type immunoglobuline et peut être répété entre cinq et trente fois. Une protéine est désignée comme cadhérine si elle possède ce module. La superfamille des cadhérines se compose donc de diverses protéines structurellement différentes. Nollet et collaborateurs ont proposé de classer les cadhérines en six sous-familles. Ce classement se base sur l’analyse phylogénique de la séquence du domaine EC1. Parmi toutes les cadhérines, ce domaine est très conservé (Nollet et al., 2000). Les six sous-familles de cadhérines (Cf. Figure 14) sont les cadhérines classiques (de type I ou II), les cadhérines desmosomales, les protocadhérines, les cadhérines à ancre GPI (pour glycosyl-phosphatidylinositol), les cadhérines de type Flamingo et les FAT cadhérines.
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Table des matières
INTRODUCTION
ÉTAT DE L’ART
I. LE RESEAU VASCULAIRE
A. Généralités
B. L’appareil circulatoire
1. Les artères et les veines
2. Les capillaires
3. Les vaisseaux lymphatiques
C. L’endothelium vasculaire
1. Présentation de l’endothelium et de ses principales fonctions
2. Description des différents types d’endothelium
a. L’endothelium des artères et des veines
b. L’endothelium des capillaires
D. Formation de l’endothelium et des vaisseaux sanguins
1. Développement embryonnaire
a. La vasculogenèse
b. L’angiogenèse
L’angiogenèse par bourgeonnement
L’angiogenèse « non bourgeonnante » ou IMG
c. Maturation et stabilisation du réseau vasculaire
2. Formation des vaisseaux sanguins chez l’adulte
3. Angiogenèse et thérapies associées
II. STABILITE DE LA COHESION INTERENDOTHELIALE : ROLES DES COMPLEXES JONCTIONNELS
A. Structures jonctionnelles : généralités
B. La jonction serrée (TJ) interendothéliale
1. Présentation de la jonction serrée
2. Les principales molécules de la jonction serrée
a. Les claudines
b. L’occludine
c. Les protéines JAM
d. La molécule ESAM
C. Molécules d’adhérence n’appartenant pas à une structure jonctionnelle particulière
1. PECAM
a. Structure moléculaire de PECAM
b PECAM et ses partenaires cytoplasmiques
-caténine et SHP-2
-caténine
c. Fonction de la protéine PECAM
2. S-endo-1 (ou CD146 ou Muc 18) : structure et fonction
D. La jonction adhérente
1. Généralités
2. Les cadhérines classiques
a. Organisation moléculaire et assemblage homophilique
b. Les caténines : partenaires cytoplasmiques des cadhérines classiques
La ß-caténine
La -caténine
c. La E-cadhérine
d. La P-cadhérine
e. La N-cadhérine
Généralités et localisation
La N-cadhérine et la formation de la jonction adhérente
Fonctions de la N-cadhérine
Formation des circuits neuronaux et maintien de la synapse
Migration cellulaire
Contrôle de la myogenèse
Régulation de l’ostéogenèse
Rôle dans l’apoptose
La N-cadhérine : une cible thérapeutique
La N-cadhérine dans l’endothelium
Une localisation subcellulaire originale
Fonctions de la N-cadhérine au sein de l’endothelium
– Recrutement des péricytes au cours du développement vasculaire
-Transmigration des cellules cancéreuses
f. La VE-cadhérine
Découverte et patron d’expression
Organisation de la VE-cadhérine à la jonction
Base moléculaire de la fonction adhésive de la VE-cadhérine : assemblage homotypique hexamérique
Fonctions de la VE-cadhérine dans l’endothelium
Rôle de la VE-cadhérine dans l’organisation du réseau vasculaire
Modulation de la survie cellulaire
Régulation de la prolifération cellulaire
Rôle de la VE-cadhérine dans le contrôle de la perméabilité paracellulaire
– Phosphorylation sur tyrosine du complexe adhérent à base de VE-cadhérine
et contrôle de la perméabilité
* Phosphorylation de la VE-cadhérine
* Phosphorylation des caténines
– Modulation de la perméabilité par l’internalisation de la VE-cadhérine
– Clivage de la VE-cadhérine et ouverture des jonctions
La VE-cadhérine et la régulation de la progression tumorale : une cible thérapeutique antiangiogénique de premier ordre
III. LES RADEAUX LIPIDIQUES : CENTRES ORGANISATEURS DE LA MEMBRANE CELLULAIRE
A. Historique de la découverte de la théorie des radeaux
B. Description du radeau
1. Composition en molécules lipidiques
2. Caractéristiques des protéines associées aux radeaux
C. La Cavéole : un sous-type de radeau lipidique
D. Propriétés des radeaux au profit de leur extraction
E. Les radeaux lipidiques organisent la biologie de la cellule
1. Les radeaux et pathologies associées
a. Réponse immunitaire
b. Cancer
c. Maladies neurogénératives
2. Organisation de l’adhérence cellulaire par les radeaux lipidiques
a. Organisation des molécules adhérentes
b. Organisation des molécules d’adhérence endothéliales
RESULTATS EXPERIMENTAUX
I. ÉTUDE DU ROLE DE LA N- ET DE LA VE-CADHERINE DANS L’ENDOTHELIUM.
A. Analyse de la localisation différentielle de la N- et de la VE-cadhérine
1. Contexte scientifique
2. Principaux résultats
3. Article: Unraveling the distinct distributions of VE- and N-cadhérins in endothelial cells : a key role for p120-catenin.
4. Résultats complémentaires de l’article
a. Analyse de la N-cadhérine des cellules endothéliales.
Partenaires associés
Conséquence de l’extinction de la N-cadhérine
b. Analyse des radeaux lipidiques des cellules endothéliales
c. Analyse des radeaux lipidiques épithéliaux.
d. Analyse de la VE-cadhérine des radeaux de cholestérol
Spécificité d’association
Profil de phosphorylation.
5. Discussion et perspectives
B. Étude du rôle différentiel de la N- de la VE-cadhérine dans l’angiogenèse
1. Contexte scientifique
2. Stratégie expérimentale
a. Construction et description des différentes VE-cadhérine murines mutantes
b. Modèles d’angiogenèse in vitro utilisés
3. Matériel et méthodes
4. Résultats
a. Modèles d’angiogenèse
Influence de l’invalidation de la VE-cadhérine sur l’organisation d’un réseau précapillaire : modèle en matrigel
Conséquences de l’invalidation de la VE-cadhérine sur la formation de la lumière endothéliale : modèle de vacuolisation
Modèle sphéroïde
b. Analyse de la double transfection : siRNA VE-cadhérine et VE-cadhérines mutantes
5. Discussion et perspectives
II. REGULATION DE L’EXPRESSION DE LA PROTEINE PECAM PAR LA VECADHERINE
1. Contexte scientifique
2. Matériel et méthodes
3. Résultats
a. Étude dans un modèle de différenciation endothéliale dérivée des cellules ES
Analyse protéique
Analyse des ARNm PECAM
Étude du mécanisme de régulation
Analyse épigénétique de l’expression de PECAM
Influence de l’adhérence à la MEC sur la régulation de l’expression de PECAM
b. Expression de PECAM dans des HUVECs déficientes en VE-cadhérine
4. Discussion et perspectives
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
GENERALES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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