Etude du réseau trophique de l’aire marine protégée tropicale et estuarienne de Bamboung, Sine Saloum

Les écosystèmes marginaux regroupent les récifs coralliens et les milieux estuariens et lagunaires (MEL). Par définition, ce sont des zones de transition entre les milieux continentaux et marins, qui par conséquent se caractérisent par l‟existence d‟un gradient tant sur le plan environnemental que structurel (Pritchard 1967). Les processus écologiques au sein de ces écosystèmes sont fortement régis par les facteurs environnementaux (Whitfield, 1999). Certains de ces paramètres physiques tels que la température varient suivant une échelle saisonnière plus ou moins régulière. D‟autres tels que la salinité et les apports nutritifs présentent, par contre, des variations moins prévisibles (Russel et Montagna, 2007), car dépendantes des phénomènes de marées et des épanchements rivulaires (Marchand, 1993). La stabilité des peuplements dans ces milieux est assujettie aux variations spatio-temporelles des conditions du milieu qui sont tamponnées par la capacité d‟adaptation des espèces et leurs traits d‟histoire de vie (Guiral, 1992; Simier et al., 2004, Barletta et al., 2005). La structure et la composition des peuplements de poissons, en particulier, sont généralement instables en raison d‟un renouvellement constant dû à l‟intrusion d‟espèces en provenance des milieux adjacents. Cependant, pour de nombreux estuaires à travers le monde, les peuplements ichthyens sont constamment dominés par des espèces d‟origine marine (Whitfield, 1999; Barletta et al., 2003 ; 2005; Simier et al., 2004; Selleslagh et Amara, 2008; Selleslagh et al., 2009).

Les MEL, vu l‟importance des apports nutritifs mixtes en provenance des marges continentale et océanique, sont le siège d‟une importante production primaire et secondaire (Nixon, 1981; Nixon et al., 1986; Lee, 1990). Ils figurent parmi les écosystèmes les plus productifs au monde et abritent une grande diversité faunistique (Costanza et al., 1997). De par leurs caractéristiques environnementales particulières, l‟abondance des proies et l‟hétérogénéité des habitats, ils constituent des zones privilégiées pour la croissance et la survie des juvéniles, et des habitats pour les adultes de nombreuses espèces de poissons à intérêt commercial (West et al., 1985). Les estuaires sont ainsi qualifiés de zones de nourricerie pour les juvéniles de poissons et les invertébrés (Blaber et Blaber, 1980; Nagelkerken et al., 2000, 2001; Dahlgren et al., 2006). La faible bathymétrie combinée avec la présence habituelle d‟une intense végétation de mangrove  (Nagelkerken et al., 2000; Nagelkerken, 2007) font également de ces milieux des zones de refuge contre la prédation (Leakey et al., 2008).

Aspects fonctionnels des peuplements de poissons et leurs évolutions

Les effets anthropogéniques, la pêche en particulier, sont les principaux facteurs de dégradation de la structure des écosystèmes (Jennings et al., 1995 ; Jennings et Polunin, 1996). En milieu aquatique, l‟exploitation intensive des ressources entraine une réduction substantielle de l‟abondance des espèces cibles et modifie la structure des communautés. En outre, de par ses effets sur les habitats elle entraine une modification de la structure de l‟écosystème dans son ensemble (Bianchi et al., 2000). Les espèces de plus grande taille sont plus ciblées par la pêche et elles se régénèrent moins vite en raison de leurs traits d‟histoire de vie (croissance et maturité sexuelle lentes, longévité plus élevée), par conséquent elles sont plus vulnérables à l‟effet de la pêche (Jennings et al., 1998 ; 1999). La modification induite par l‟effet de la pêche sur les spectres de taille au sein d„une communauté s‟accompagne généralement d‟une modification de sa structure trophique car les espèces de plus grande taille ont assez fréquemment les niveaux trophiques les plus élevés (Piet et Jennings, 2005). Plusieurs études ont montré qu‟en cas de mise en défens les espèces réagissent différemment à l‟effet de la protection en relation avec leurs traits d‟histoire de vie (Evans et Russ, 2004; Micheli et al., 2005). Les espèces de grande taille, en raison de leur plus grande vulnérabilité à l‟effet de pêche, répondent plus efficacement à la mise en protection.

L‟évolution de la structure fonctionnelle des peuplements de poissons suite à l‟interdiction de la pêche dans le bolong ainsi que la caractérisation environnementale de ce dernier ont, ainsi, été étudiées. Deux dimensions fonctionnelles (les catégories trophiques et bioécologiques) ont, dans une première étape, été prises en compte dans cette étude. Après la description des caractéristiques environnementales, la distribution saisonnière des biomasses au sein des différents compartiments fonctionnels a été examinée afin d‟appréhender l‟existence ou non d‟une structure temporelle stable. Enfin, les évolutions de la structure fonctionnelle du système en fonction de la durée de la protection ont été abordées.

Depuis deux décennies, la relation entre biodiversité et fonctionnement  des écosystèmes est, ainsi, devenue un nouveau paradigme qui occupe une place importante dans la littérature écologique (Naeem et al., 1994 ; Naeem et Li., 1997; Tilman et al., 1997 ; Loreau et Hector, 2001). Toutefois, il a été montré que la diversité fonctionnelle est la facette de la biodiversité qui explique le mieux le fonctionnement des écosystèmes (Díaz et Cabido, 2001 ; Naeem et Wright, 2003). La diversité fonctionnelle exprime la richesse en traits (attributs morphologique ou physiologique liés à des fonctions spécifiques) et la régularité ou l‟équitabilité de leur distribution au sein d‟une communauté, d‟une unité spatiale ou d‟un écosystème (Mouillot et al., 2005). La diversité fonctionnelle comporte, en outre,  une autre composante : la redondance fonctionnelle. Elle exprime le nombre d‟espèces présentes dans un milieu et qui exercent des fonctions biologiques (prédateurs d‟invertébrés benthiques, capteur de d‟azote organique) ou écologiques (résistance au stress) identiques. En pratique, le concept de redondance fonctionnelle est très controversé dans la mesure où les espèces ne sont quasiment pas interchangeables. Deux espèces peuvent être fonctionnellement identiques en terme de niche trophique (par exemple les piscivores) et diffèrent de par leurs temps de présence dans un milieu. En outre, des espèces peuvent être fonctionnellement redondantes dans certaines conditions environnementales et ne pas l‟être dans d‟autres (Allison et Martiny, 2008). La redondance au sein d‟un système ne peut être réellement admise que si après une phase de perturbation, les espèces qui persistent au sein d‟une guilde compensent la biomasse de celles qui sont disparues. Shannon et Cury (2003) ont par exemple montré qu‟au sein des communautés pélagiques de l‟écosystème d‟upwelling du Benguela, il y a une parfaite équivalence fonctionnelle entre les stocks de sardines et ceux d‟anchois.

Matériel et méthodes

Milieu d’étude

La réserve de la biosphère du delta du Saloum (RBDS) est située au Sénégal entre 13° 35‟ et 14°00‟ de latitude Nord et entre16° 00 et 17°00 de longitude Ouest, elle s‟étend sur une superficie de 334 000 ha dont 18 % (60 000 ha) de forêts de mangrove. La RBDS (Figure 3) comprend :
– une partie continentale constituée de forêts et limitée en aval par la mangrove et par les étendues de terre nue et salée communément appelés tannes
– une partie maritime constituée de trois grands groupes d‟iles (le Gandoul, les iles Bétanti et les iles Fathala) séparés par 3 principaux fleuves (le Saloum, le Diomboss et le Bandiala)
– une partie marine qui s‟étend en mer jusqu‟ au-delà de l‟isobathe des 6m.

La réserve comprend 7 sites déclarés forêts classées, dont 2 sont des forêts humides de mangrove (îles Bétanti et îles du Saloum) et les autres (dont Fathala, Djilor, Sangako) sont des forêts de savane sèche. Sur le plan faunistique, la RBDS abrite environ 100 000 oiseaux répartis en plus de 90 espèces, 114 espèces de poissons (Diouf, 1996) et plus de 188 espèces végétales ligneuses (30 % des plantes supérieures du Sénégal).

Le Bolong de Bamboung, situé à 134 km au Sud de Dakar, est un affluent du Diomboss, l‟une des trois branches principales qui composent le complexe estuarien du Sine-Saloum . Sa superficie totale est de 6 800 ha et sa longueur est de 15 km pour une largeur qui varie suivant les zones entre 50 et 500 m, les profondeurs moyennes varient entre 3 et 10 m. En dehors de la zone aquatique correspondant spécifiquement au bolong de Bamboung, l‟AMP comprend une zone terrestre subdivisée en une partie marginale continentale et une partie riveraine. Les bords immédiats du bolong sont occupés par une forêt de mangrove dominée par les espèces du genre Rhizophora (R. racemosa et R. Harrisonii), tandis que les terres émergées sont occupées par l‟espèce R. mangle qui globalement domine les peuplements de palétuviers.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I : Aspects fonctionnels des peuplements de poissons et leurs évolutions
I.1. Introduction
1.2. Matériel et méthodes
I.2.1. Milieu d‟étude
1.2.2. Stratégies d‟échantillonnage
1.2.3. Présentation de la base de données
1.2.3.1. Données écologiques
Groupes trophiques
Groupes bioécologiques
1.2.3.2. Données environnementales
I.2.4. Evolution des peuplements de poissons
1.2.4.1. Extraction et analyse des données
1.2.4.2. Diversité fonctionnelle
1.2.4.2.1. Morphométrie et traits fonctionnels
1.2.4.2.2. Normalisation des données et traitement statistique
1.3. Résultats
1.3.1. Description du milieu
1.3.2. Evolution trophique
1.3.2.1. Evolution saisonnière
Saison chaude et humide
Saison froide et sèche
Saison chaude et sèche
1.3.2.2. Evolution Interannuelle
1.3.3. Evolution bioécologique
1.3.3.1. Evolution saisonnière
Saison chaude et humide
Saison froide et sèche
Saison chaude et sèche
1.3.3.2. Evolution Interannuelle
1.3.4. Diversité fonctionnelle
1.3.4.1. Groupes fonctionnels et redondance
Les zoobenthophages
Les brouteurs algivores-détritivores
Les prédateurs pélagobenthiques
Les ichtyobenthophages
1.3.4.2. Evolution des biomasses au sein des groupes fonctionnels
1.3.4.2.1. Biomasse absolue
1.3.4.2.2. Biomasse relative
1.4. Discussion
1.4.1. Description du milieu
1.4.2. Evolution des peuplements
1.4.2.1. Tendance saisonnière
1.4.2.2. Tendance interannuelle
1.4.2.3. Groupes fonctionnels
1.4.2.3.1. Nombre de groupes
1.4.2.3.2. Composition
Brouteurs algivores-détritivores
Prédateurs pélagobenthiques
Ichtyobenthophages
Zoobenthophages
1.4.2.3.3. Redondance fonctionnelle et biomasse
Chapitre II : Etude du réseau trophique
2.1. Base de l‟utilisation de l‟analyse des isotopes stables dans l‟étude des réseaux trophiques
2.1.1. Concepts de base
2.1.2. Notion de fractionnement isotopique
2.1.3. Notion de Turnover
2.1.4. Application à l‟étude des réseaux trophiques
2.1.4.1. Collecte des données
2.1.4.2. Préparation des échantillons au laboratoire
2.1.4.3. Analyse et expression des résultats
2.1.4.4. Traitement statistique
2.1.4.5. Synthèse des résultats
Peuplement
Réseau trophique
Manuscript A
Abstract
1. Introduction
2. Materials and methods
3. Results
4. Discussion
References
Chapitre III : Ecomorphologie
3.1. Synthèse des résultats
Manuscript B
ABSTRACT
INTRODUCTION
MATERIALS AND METHODS
RESULTS
DISCUSSION
REFERENCES
Conclusion générale

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