ETUDE DU BLANCHIMENT D’ARGENT

Le trafic de drogue ou de stupéfiants

                     Le trafic de drogue désigne les échanges commerciaux illégaux de substances psychotropes réglementées par différents textes au niveau national par la loi nº 97 ‐‐ 0 39 du novembre 1997 sur le contrôle des stupéfiants, de substances psychotropes et les précurseurs à Madagascar ou d’une criminalité organisée et au niveau international par les Conventions des Nations unies de 1961, 1971 et 1988 sur la lutte contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes. Le marché de produits psychotropes constitue depuis longtemps le marché considéré comme important comme en témoigne les guerres de l’opium22.
le trafic de drogue au niveau national Madagascar est connu depuis longtemps par sa vocation agricole avec ses vastes surfaces. De ce fait, on peut trouver des variétés des plantes y compris la drogue, jamala. Considérée comme un simple pays de transit du trafic de drogue, la grande Ile est devenue une plate‐forme de ce commerce illicite. Le volume des trafics ne cesse d’augmenter et on constate la parution de nombreux types de drogue à haut risque23, il existe plusieurs types de drogue à Madagascar : le «bona » venant de la partie sud de la grande île (Ambovombe, Betroka,…), il y a aussi « le fitsa » venant de Mahajanga, Antsiranana et enfin « le douglas » venant du sud‐est de Madagascar24. À part ces trois types de drogue locale, il y a aussi ceux venant de l’Europe comme de la France, de l’ Italie, de l’Asie comme l’héroïne, la cocaïne. Ce marché noir a pris de l’ampleur ces derniers temps. À titre d’exemple, le trafic de cannabis est vraiment une affaire très juteuse à Madagascar. Ainsi un litre d’huiles essentielles de cannabis, extraites de feuilles de cannabis, auprès des producteurs coûte 100 000 ariary. Ce prix est presque doublé, soit entre 200 000 et 600 000 ariary, une fois l’huile arrivée sur le marché local auprès des revendeurs25. La valeur de la marchandise serait centuplée, par rapport à son prix initial auprès des producteurs sur le marché international. Ainsi le litre d’huile essentielle de cannabis se négocierait, en effet, à 10 millions d’ariary à l’extérieur du pays26. La graisse ou goudron, extraite de résine de cannabis, vaudrait deux fois plus chère que l’huile essentielle c’est‐à‐ dire à 20 millions d’ariary le kilo. A voir ces différentes indications de prix, il n’est pas surprenant si les trafiquants ne reculent jamais devant rien pour protéger ce commerce très rentable et ne se lassent jamais à blanchir leur profit. Mais ce trafic peut aussi s’observer sur le plan international.
Le trafic de drogue au niveau international. Par son caractère transnational, le trafic de stupéfiants est d’envergure internationale. Il est étroitement lié au trafic des personnes et à la migration clandestine27. De ce fait, les migrants pour leurs droits de passage doivent porter une certaine quantité de produits stupéfiants dans l’autre frontière. Si les parcours ne présentent d’obstacle sérieux, les migrants peuvent les porter dans leur bagage28. Le trafic international de drogue procure des capitaux énormes à ceux qui les pratiquent et l’organisent. Au niveau international, on peut trouver comme l’héroïne, la cocaïne, le cannabis et autres. Mais si on reprend, le trafic de cannabis, selon l’organe international de contrôle des stupéfiants (OICS)29, le premier producteur mondial de cannabis est l’Amérique du Nord dont l’essentiel de cette production est réservé au marché local. L’Afrique est le deuxième producteur mondial de cannabis. La source principale des fonds blanchis provient du trafic de drogue, qui représente environ 50 à 80 % de l’économie de blanchiment30. À côté du trafic de drogue, le trafic d’armes et certaines formes du crime organisé comme trafic d’être humain, piratage prennent une part de plus en plus importante dans l’économie du blanchiment.

Le transfert des fonds

            Le transfert des fonds quant à lui consiste à faire passer la somme illicite d’une banque ou établissement quelconque à un autre dans le cadre national ou international. La technique la plus utilisée dans ce cas est le virement bancaire. Dans ce cas de figure, les fonds sont transférés dans plusieurs pays, sur différents comptes de sociétés ou de particuliers afin de dissimuler la provenance de l’argent35. Aussi, le virement vise‐t‐il à verser de petites sommes en banques, afin qu’elles soient inférieures au seuil de déclaration de soupçon36. Après avoir converti ou transféré les biens, le blanchisseur passe à la seconde phase : l’empilement.

La détention ou l’utilisation des biens

               La détention ou l’utilisation des biens est le fait par une personne de détenir ou utiliser des biens tout en sachant l’origine criminelle des biens. Mais comme en matière de recel, le seul fait d’acquérir, détenir ou bien utiliser des biens dont on connaissait l’origine criminelle constitue un élément matériel du blanchiment d’argent. Et dans ce sens, l’article 1er c. de la loi du 19 août 2004 dispose que « l’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens, par une personne qui sait que les dits biens constituent un produit du crime38 au sens de la présente loi ».

Les participants directs

              On entend par participants directs ceux à qui peut être imputée la commission d’une infraction ou sa tentative42, pour en avoir personnellement réalisé les éléments constitutifs. Pour être plus clair, les participants directs ce sont ceux qui ont commis l’infraction d’origine. Ce sont l’auteur ou co‐auteur de l’infraction. De ce fait, ils ne font plus appel à un intermédiaire compte tenu de leur compétence professionnelle pour blanchir par la suite les produits illicites. D’ailleurs, une infraction comme le blanchiment d’argent est rarement commise par une seule personne : il y a aussi un ou plusieurs complices.

L’intention délictuelle des participants

             La plupart des textes répressifs comporte les termes « en connaissance de cause », « sciemment ». L’adverbe « sciemment » exige pour qualifier le délit, la preuve de la mauvaise foi, c’est‐ à‐dire la connaissance de l’origine de fonds placés ou gérés. C’est la connaissance réelle. Mais dans certain délit comme le blanchiment, la faute pénale peut consister à ne pas s’être instruit des règlements et à ne pas les avoir observés. Dans ce cas, l’intention délictuelle est présumée.
A. ‐ la connaissance réelle. La connaissance réelle s’entend par le fait de connaître que les fonds placés ou gérés proviennent d’une activité illicite. On ne peut pas se douter que les dits biens proviennent sûrement d’activités criminelles. Il y a de la mauvaise foi de l’auteur. Dans le cas d’espèces le blanchisseur fait partie de l’organisation criminelle. À titre d’exemple, le cas d’une société qui collabore de près avec les criminels pour amalgamer le fruit de l’activité criminelle et celle de la recette de la société. De même pour un avocat qui assiste une organisation criminelle pour placer le produit illicite dans un établissement financier. D’ailleurs, d’après une jurisprudence, « la seule constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l’intention coupable »
B ‐ la présomption de connaissance : Dans ce cas, le blanchisseur n’a pas connu l’origine des fonds objet de placement de manière explicite. En fait, il s’agit d’une présomption simple, susceptible de preuve contraire. » Pour obtenir la condamnation, par exemple, le ministère public doit démontrer que l’accusé s’est livré à des transactions financières, ou qu’il a transporté des fonds de pays en un autre, en rapport avec une activité illicite précise »48. Pour ce qui est des institutions financières, le fait de ne pas fournir une information complète sur l’identité de leur client constitue aussi une présomption de connaissance de l’origine de fonds et qui est passible de la sanction disciplinaire par la loi anti blanchiment et en sus subir la peine de blanchiment. Et ce, comme l’a montré la jurisprudence précédemment. Cette présomption de connaissance rentre dans le cadre du renforcement de la répression en matière de blanchiment. Vu que l’activité génère beaucoup de sommes, les individus ne manquent pas d’astuces pour éviter la répression. Pour éviter que de telles manigances puissent jouer en faveur de l’intéressé, la pratique de la présomption de connaissance a lieu. En la matière, la tendance est renversée. Ainsi, il n’appartient plus au Ministère public d’apporter la preuve de culpabilité, mais plutôt à la personne poursuivie de démontrer son innocence.

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Table des matières

Introduction
Première Partie : LA MANIFESTATION DU BLANCHIMENT D’ARGENT
Chapitre préliminaire : L’infraction préalable ou sous‐jacente
Section 1‐ La corruption
§1‐Les personnes concernées
A‐ Les fonctionnaires et personnes assimilées du secteur public
B‐ Les dirigeants, actionnaires et employés des entreprises privées et membres des professions libérales
§2‐ le rapport entre la corruption et le blanchiment
Section 2‐ les divers trafics
§1‐ le trafic de drogues
A‐ le trafic de drogue au niveau national
B‐ le trafic de drogue au niveau international
§2‐ le trafic d’armes
Chapitre 1‐ le procédé de blanchiment d’argent
Section 1‐ les éléments matériels de blanchiment d’argent
§1‐ le placement
A‐ la conversion des biens
B‐ le transfert des fonds
§2‐l’empilement ou la dissimulation
§3‐l’intégration ou le recyclage
A‐ L’acquisition
B‐ La détention ou l’utilisation des biens
Section 2‐ l’élément moral du blanchiment
§1‐les participants à la commission du délit de blanchiment
A‐ les participants directs
B‐ les participants indirects ou complices
§2‐ l’intention délictuelle des participants
A‐ la connaissance réelle
B‐ la présomption de connaissance
Chapitre II‐ la mise en œuvre du blanchiment d’argent
Section 1‐ les transferts des fonds
§1‐ le transfert de fond illicite par le circuit bancaire
A‐ le virement bancaire
B‐ le paradis fiscal
§2‐le transfert de fonds par des circuits non bancaires
A‐ Amalgamation de l’argent sale aux recettes d’un commerce complice
B‐ déclaration de faux gains aux jeux
Section 2‐ La création des sociétés écrans
§1‐ les différentes formes de sociétés écrans
A‐ Les caractéristiques des sociétés écrans
1‐ la société de façades
2‐ la société fantôme
3‐ la société offshore
B‐ le fonctionnement du blanchiment à travers les sociétés écrans
§2‐ l’intervention des professionnelles dans le blanchiment d’argent
A‐ nature de l’implication de ces professions
B‐ la complicité des établissements financiers, les professionnels et les criminelsp
1‐ la complicité des établissements financiers avec les criminels
2‐ la complicité des professionnels avec les établissements
Conclusion partielle
Deuxième partie : LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT D’ARGENT
Chapitre I‐ la lutte contre le blanchiment d’argent au niveau national
Section 1‐ les dispositifs préventifs du blanchiment d’argent
§1‐ aperçu sur les dispositifs de prévention de blanchiment d’argent
A – Les professions assujetties aux dispositions de prévention
B‐ les transferts internationaux d’argent par des institutions financières et l’emploi d’espèce et titre au porteur
§2‐ la transparence dans les opérations financières
A‐ la transparence auprès des institutions financières
B‐ La transparence au près de change manuel
1‐Définition du change manuel
2‐ Les procédures à suivre pour assurer la transparence
a‐ L’autorisation préalable
b‐ Les procédures à suivre pour assurer la transparence lors de l’exercice de l’activité
b1‐ le devoir de vigilance relatif à la clientèle
b2‐ le devoir de vigilance relatif à la conservation de document
C‐ La transparence au niveau des casinos et établissements de jeux
1‐ les mesures de vigilance relatives à la tenue d’une comptabilité
a‐ L’intérêt de la tenue de la comptabilité régulière
b‐ Le délai de conservation de la comptabilité
2‐ Dispositions particulières pour l’établissement de jeux possédant plusieurs filiales
Section 2‐ Les dispositifs répressifs du blanchiment d’argent
§1‐ La détection du blanchiment d’argent
A‐ La déclaration de soupçon
1‐ L’obligation de déclaration de soupçon
2‐ Les suites données à la déclaration de soupçon
a‐ La transmission de la déclaration de soupçon
b‐ Exemption de responsabilité du déclarant
B‐ L’autorité compétente pour recevoir les déclarations de soupçon : le Samifin
1‐ Les rôles du Samifin
2‐La structure du Samifin
3‐ Les techniques d’investigations
§2‐ Les sanctions contre le blanchiment d’argent
A‐ Les mesures proprement dites
1‐ aux personnes physiques
a‐ peines simples
b‐ peines aggravées
2‐aux personnes morales
B‐ La confiscation : peines complémentaires
1‐ La décision de confiscation
a‐ La confiscation dans le cas de condamnation définitive
b‐ La confiscation dans le cas où les faits ne peuvent donner une poursuite
2‐Le sort des biens confisqués
Chapitre II : LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT D’ARGENT AU NIVEAU INTERNATIONAL
Section1‐ Les textes internationaux de lutte contre le blanchiment d’argent
§1‐ Des Conventions aux Recommandations
A‐ Les Conventions ratifiées par Madagascar
1‐ La Convention des Nations Unies de 1988 contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes
2‐ La Convention de Palerme contre la criminalité transnationale organisée
B‐ Une Convention internationale non contraignante: les 40 Recommandations du GAFI
§2‐ La coopération internationale de lutte contre le blanchiment
A‐ L’Entraide judiciaire
1‐Les différentes formes de demandes d’entraide judiciaire
2‐ Objets de demandes d’entraide judiciaire
B‐ L’extradition
1‐ Les principes fondamentaux de l’extradition
a‐ L’influence de la nationalité sur l’extradition
b‐ La nature de l’infraction objet de l’extradition
c‐ Le principe de double incrimination
d‐ Le principe « non bis idem
e‐ Le principe de spécialité
f‐ Le refus d’extrader en cas de peine capitale
2‐La procédure commune aux demandes d’entraide judiciaire et aux demandes d’extradition
a‐ La transmission de la demande
b‐ Le contenu de la demande
Section 2 : Les problèmes de lutte contre le blanchiment d’argent
§1‐ Les problèmes au niveau interne : quant aux personnes assujetties
A‐ La banque ou la de la protection d’intérêt
1‐ Non déclaration de soupçon
2‐ Improbabilité de contrôle
B‐ Les opérations de change : des caractéristiques favorisants le blanchiment d’argent
1‐ Dominance du change manuel
2‐ Inertie des autorités responsables
C‐ Etablissements de jeu ou la voie béante pour le blanchiment d’argent
1‐ Difficultés de contrôle de l’origine de fonds mises en jeu
2‐ Contrôles axés sur d’autres points
a‐ Âge des participants
b – Existence de proxénetisme
§2‐ Problèmes de la lutte au niveau international ou du déséquilibre en matière de collaboration
A‐ Ineffectivité de l’entraide
1‐ Exécution aléatoire de commission rogatoire
2‐ Résultat inéquitable
B‐ Extradition incertaine
Section 3 : La lutte contre le blanchiment d’argent en droit comparé
§1‐ La lutte contre le blanchiment d’argent en France
A‐ Les dispositifs préventifs contre le blanchiment d’argent en France
B‐ Les dispositifs répressifs contre le blanchiment d’argent en France
§2‐ La lutte contre le blanchiment d’argent en Suisse
A‐ L’article 305 bis et 305ter du code pénal Suisse
B‐ Les règles contenues dans la loi fédérale
Conclusion partielle
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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