Identification des enjeux majeurs
Les enjeux d’un projet sont définis comme les arguments qui pourraient favoriser ou remettre en question le projet. L’identification des enjeux majeurs fait référence aux avantages et inconvénients de ce projet tout en déterminant les principales préoccupations de divers acteurs dont les autorités administratives. C’est une étape essentielle dans la démarche méthodologique de l’EIE. Dans le cas de ce projet de recherche minière, les enjeux sont les suivants :
Sol : toute action qui perturbe le sol et les talus risque d’être un facteur d’érosion.
Tourisme : la construction et la réhabilitation de toutes pistes d’accès sur le site de recherche favorise le potentiel écotouristique de la région.
Economie : émergence des secteurs informels, opportunités d’emploi et création de richesse.
La région connaîtra une inflation.
Social : afflux de population et impact sur les infrastructures socio-économiques et sur les modes de vie locaux ; échanges avec des personnes étrangères (venant d’autres régions de Madagascar et d’Australie) pouvant causer l’acculturation ou la déculturation.
Végétation et biodiversité : le périmètre d’étude contient des mangroves, il est couvert par des savanes et par des forêts. La présence du projet aura des répercussions négatives sur la couverture végétale du sol, sur certaines espèces sauvages et sur leurs habitats naturels. Il y a également le risque d’empiètement sur les zones sensibles.
Disponibilité et qualité de l’eau : l’abondante utilisation d’eau dans les travaux de recherche minière (activité de pompage…) met en question la disponibilité de l’eau pour les villageois. Les boues et déblais de sondage affectent la qualité de l’eau.
Us et Coutumes
La croyance dans les traditions et dans la sagesse accumulée des ancêtres a façonné la culture malgache. Au détriment de la religion, les us et coutumes demeurent une caractéristique clé de la vie malgache. Chez les Sakalava ils prennent racine dans le culte des ancêtres. Les aïeux, notamment les fondateurs du village, restent présents dans le monde des vivants et sont respectés et vénérés. La terre leur appartient et toute entreprise envisagée par les vivants nécessite leur bénédiction. Les joro constituent le rituel le plus pratiqué pour vénérer les ancêtres. Il s’agit d’un sacrifice de zébus, précédé d’une prière et d’offrandes (généralement de l’alcool et du miel) dans les sites sacrés (un arbre, une pierre, etc.). Le joro est également pratiqué à l’endroit où une entreprise ou une maison projette de s’installer. Les rites sakalava sont généralement accompagnés de sacrifices de zébus, considérés comme des offrandes aux ancêtres, mais également comme signes de cohésion dans les communautés, car la viande est partagée à toute l’assistance et à tout le village. Les principaux fady ou tabous sont les suivants :
– Interdiction de travailler la terre le mardi,
– Interdiction de pêcher à la mer le mercredi,
– Interdiction d’enterrer les mardi et vendredi,
– Interdiction de travailler le sol des rizières pour les adeptes du roi le jeudi.
Les coutumes très appréciées et respectées par les gens sont :
– Enterrement la nuit pour les familles royales,
– Sons de tambour pour signaler des évènements royaux (décès, circoncision, naissance…),
– « rasa hariagna » : satisfaction des demandes des parents décédés, issus des rêves, par abattage de zébu (à partir du mois de septembre au mois de novembre),
– « tsakafara ou voady » : exécution d’une promesse faite,
– « soron-tany » en vue de demander à Dieu la pluie ou autre chose pour son bonheur,
– « harin-tanana » offrande annuelle aux parents décédés et selon les possibilités de la famille,
– « tambaro » : entraide pendant la récolte du riz ou du café, suivie d’abattage de zébus et organisation de festivités pour l’assistance.
– Première coupe de cheveux, première sortie d’enfants, circoncision (entre le mois de juin et le mois d’août).
Le tout est considéré comme une grande fête familiale où les « antsa gasy » (chanson typiquement malgache) font partie du programme. Il faut noter que ces us et coutumes sakalava ont donné une valeur importante à l’environnement, on peut citer entre autres :
– l’interdiction de pénétrer dans la forêt le mardi,
– la mise en défens des zones forestières réservées aux esprits (Tsigny et Tanimasina),
– l’obligation de consommer sur place tout animal tué dans certains lieux sacrés (Tany masina),
Lors des évènements symbolisant la cérémonie funéraire (Fanompoana) en cas de décès d’un membre de la famille royale :
– Un roi décédé ne doit pas être enterré pendant le dernier quart de la lune,
– Les hommes sont interdits de porter les pantalons, les chaussures, de couper les cheveux, de se raser la barbe et de prendre le bain,
– Les femmes doivent lâcher les cheveux sans les tresser ; il leur est interdit de porter des sous-vêtements, de prendre le bain et d’assister aux funérailles royales lors de la menstruation,
– Il est interdit de se plaindre de l’odeur nauséabonde dégagée par la dépouille mortelle d’un roi. Chacun doit éviter de faire sortir et de faire tomber des sueurs pendant tous les travaux de funérailles d’un roi ou de se sentir fatigué.
Milieu humain
Sur le bien-être et la santé des populations riveraines : Les nuisances liées aux travaux de recherche concerneront les villages situés à proximité et ceux qui sont dans le périmètre minier : poussières et nuisances sonores, difficultés de déplacements, insécurité publique, blessures et traumatismes, bien que rares, liés aux accidents avec les véhicules et les engins de site et aux chutes éventuelles d’enfants dans les fosses.
– Maladies liées à l’eau : Déjà, en période normale, les sources d’eau des communautés sont très contaminées du point de vue microbiologique, dû à l’absence de points d’eau normalisés et sécurisés. En plus, les cas de maladies diarrhéiques et de dysenteries sont très nombreux. Cela s’explique notamment par une éducation à l’hygiène très peu répandue dans la région.
– MST et Sida : La présence de populations allochtones, notamment employées par les permissionnaires, des paysans susceptibles de gagner des sommes d’argent exceptionnelles, en comparaison de leurs revenus habituels, est autant de cause qui favorisera les relations sexuelles extraconjugales, encouragées par l’afflux des prostituées professionnelles ou occasionnelles venant des villes des alentours (Ambanja en particulier).
Sur la disponibilité des ressources naturelles pour la population:
– Prélèvements d’eau : Les ressources en eau disponibles pour la population, essentiellement issues des sources et des cours d’eau superficiels, pourront être fortement affectées par les travaux de recherche minière des points de vue qualitatif et quantitatif. En effet, le déversement accidentel des hydrocarbures risque de compromettre la qualité des eaux de surface, ainsi que les eaux de ruissellement qui contamineront les cours d’eau et la nappe phréatique. Les trous de sondage, les bassins de boues et de lavages créés sont responsables d’un rabattement de la nappe phréatique, qui est généralement peu profonde (bas-fonds alluviaux). Une unité de lavage peut en effet consommer jusqu’à 1000 m3 d’eau par jour (soient 100 m3/ h * 10 h/j). A l’instar des eaux de surface, les eaux souterraines affleurantes seront facilement contaminées par des germes d’origine fécale, notamment à partir des lieux d’aisances improvisés et non équipés de fosses septiques étanches ou d’autres dispositifs d’assainissement.
– Prélèvements de matériaux ligneux pour la construction : L’augmentation de la demande en bois de chauffe et de construction réduira également la disponibilité de ces ressources pour les populations riveraines, qui auront probablement à prospecter des zones plus éloignées pour satisfaire leurs propres besoins.
Sur les productions agricoles : Les nouvelles pistes nécessaires aux recherches minières s’ajouteront au réseau existant déjà dans la région, Ces pistes nouvellement créées faciliteront l’évacuation des produits agricoles.
Sur l’économie, les revenus des populations, les activités commerciales : Le projet aura des répercussions positives en terme de revenus des populations de la région de manière directe ou indirecte, grâce aux nouveaux emplois créés et induits par les activités de cette recherche minière. (Ex. main d’œuvre pour la construction des pistes d’accès) Le projet, en intégrant les acteurs locaux et leur savoir-faire, génère des emplois, s’inscrivant ainsi dans la politique globale de ces Communes concernées. D’une manière générale, la plus grande circulation de l’argent stimulera significativement le commerce, que ce soit dans les villages que sur le site de recherche et dans la ville d’Ambanja.
– Contribution aux recettes fiscales : En plus de la création d’emploi, et partant, l’amélioration du niveau de vie des employés, l’activité minière rapportera des redevances, des taxes et des droits aux niveaux local, régional et national. Comme ce projet de recherche de pyrochlore durera 10 ans, la Société CREM devra payer une somme de19.200.000 Ariary (dix neuf mille deux cent ariary) pour son périmètre composé de 48 carrés miniers.
Sur le patrimoine culturel : Les sites culturels et religieux (lieux de sépultures) pourraient se trouver dégradés directement ou indirectement par suite de l’activité de recherche minière. Cependant, ce genre de dommages se produit très rarement, étant donnée la grande sensibilité des populations malgaches pour ce qui touche au sacré et au culte des morts.
Sur la densité de population : Etant donné que la durée de cette recherche minière est de 10 ans environ, la carte de densité de la population subira d’importante modification. Non seulement, les populations autochtones auront tendance à se concentrer autour du site de recherche, en ne laissant que les vieillards demeurer dans leurs villages d’origine, mais la région connaîtra également une forte immigration de populations non originaires provenant d’autres régions. La pression anthropique est surtout le risque majeur pour l’écosystème forestier. Les activités de la population utilisent des ressources naturelles ne serait- ce que le bois pour la fabrication du charbon.
Programme d’information des Services de Santé
Il s’agit d’avertir les services de santé de l’occurrence des travaux avant et pendant les opérations, par le biais d’une visite aux CSB, hôpitaux. Les informations devront contenir les éléments suivants :
– brève description des travaux et de leurs objectifs ;
– dates de commencement et fin ;
– recommandation pour une vigilance accrue, et une préparation aux urgences pendant les recherches ;
– nom et coordonnée du contact (Responsable Environnement).
Contacts d’urgence
Définir clairement les responsabilités, une ligne de communication est essentielle pour assurer une réponse efficace aux situations d’urgence. Il est recommandé qu’un Responsable des Urgences soit nommé comme premier point de contact. Cette personne devra être responsable pour initier la réponse aux urgences. Le plan doit contenir les détails des contacts pour tout le personnel d’urgence et une description de leurs responsabilités. Cedi doit être développé par le promoteur, les autorités locales et les services de santé des agglomérations comprises dans le périmètre de recherche minière. Les principales responsabilités devront inclure :
– Un responsable environnement et un socio organisateur attachés à l’équipe chargée des travaux,
– Un responsable urgence (qui peut être le même que le responsable environnement),
– Un responsable médical à l’hôpital ou au centre de santé le plus proche (doit être mis au courant avant les travaux),
– Un responsable de la Gendarmerie Nationale responsable du secteur.
CONCLUSION
L’enlaidissement du paysage, la dégradation de la couverture végétale du sol , la perte de certaines espèces floristiques et faunistiques à cause de l’exploitation grandissante des ressources forestières, la diminution de la disponibilité en eau , la pollution atmosphérique, lesnuisances sonores, le risque d’érosion, le risque de propagation des maladies telles que IRA, IST SIDA, les conflits sociaux , l’insécurité rurale sont les principaux impacts potentiels qui résultent de la réalisation des travaux de recherche de pyrochlore dans la presqu’île d’Ampasindava. Pour remédier à ces problèmes, quelques mesures environnementales sont requises, à savoir l’établissement d’un climat de concertation avec les communautés locales, la préservation des éléments importants du milieu biologique, la restauration des sites abandonnés par le principe de revégétalisation, le respect des règlements vis-à-vis des zones sensibles, le recrutement des employés dans la zone d’implantation du projet, la conception des mesures de sécurité et plan d’urgence en cas d’accident. La mise en œuvre des mesures environnementales proposées doit être réalisée par les entités concernées prévues, et la surveillance de l’application reviendra à la mission de contrôle. Nantie de ses expériences internationales sur la gestion d’une mine moderne et les nouvelles technologies qui y sont liées, la société CREM va apporter un nouveau souffle sur le monde minier malgache. Néanmoins, une attention particulière devrait être menée vis-à-vis de la nature et de la population entière pendant et après la réalisation des travaux. Car les impacts qui découlent de ce projet ne restent seulement pas au stade de l’aspect physique de la nature, mais atteignent l’intégrité morale de la population qui y vit. En conséquence, le projet doit prendre plus de précaution et de prudence avant d’y apposer son premier pas. En effet, quelle que soit l’importance des avantages économiques pouvant résulter de ce projet, vus en terme de développement national, la société est encouragée à adopter toujours des comportements respectueux de l’environnement. A la fin de la recherche, une fois que la quantité de réserve soit connue et l’étude de faisabilité accomplie, la Société pourra poursuivre l’exploitation industrielle toujours en passant par une étude d’impacts environnementaux .
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Table des matières
I-2- Description technique du projet
II-1 Description du milieu physique
II-2- DESCRIPTION DU MILIEU BIOLOGIQUE
II-3 DESCRIPTION DU MILIEU HUMAIN
III-1 IDENTIFICATION DES IMPACTS POTENTIELS
III-2 Evaluation des impacts
V-1 Plan social
V-2 Plan d’urgence
Références bibliographiques
Annexes
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