Etude des techniques et méthodes de traduction utilisées dans le livre Comme dans un rêve

Courte introduction à la traduction

      On peut se demander ce qu’est la traduction lorsque nous nous apprêtons à lire un mémoire portant majoritairement sur celle-ci. En effet, l’art de la traduction est traduire, « transposer » un texte d’une langue source – le suédois par exemple avec Faller fritt som i en dröm – à une langue cible, ici le français qui donnera Comme dans un rêve. La traduction tente, selon nous, d’être la plus fidèle et exacte possible (bien que certains traducteurs préfèrent utiliser leur créativité ou domestiquer la version source), cependant elle ne pourra jamais être parfaite mais sera du moins réussie comme il est dit dans l’article d’Adèle Van Reeth: « La traduction met le langage à l’épreuve du sens, la traduction est l’affaire de deuil : celui de la perfection à laquelle on préfère la réussite » (voir le lien « qu’est-ce que traduire ? » 2014). Ainsi, grâce à la connaissance du traducteur et de sa maîtrise de deux ou trois langues, celles-ci (les langues) peuvent être mises en relation et donnent une possibilité de partage entre les lecteurs de la langue source et la langue cible. Antoine Berman (1984), traducteur et philosophe français, dont Venuti s’est d’ailleurs inspiré, soutient l’idée que la traduction se doit, dans la langue-cible, d’être la plus exotique possible pour que le lecteur « cible » puisse apprendre quelque chose de la culture de la langue « source » : pour Berman, la culture se trouve dans le langage et apporte beaucoup d’exotisme à travers la traduction (voir le lien du blog d’Eccleshall, 2016). De plus, la traduction prend en compte certains critères, tels que la grammaire, le contexte, la culture, le vocabulaire, le style de l’écrivain. Dans Comme dans un rêve, Esther Sermage tente de reproduire au mieux le style littéraire de Leif G.W Person. Car ainsi, en se conformant au style de l’auteur Sermage applique ce qui est, selon nous, une des règles de la traduction. De plus, puisque le style littéraire de Persson ne nous apparait pas des plus créatif, car le roman relate un sujet des plus sérieux la possibilité de création de la traductrice est donc assez réduite et il lui est donc plus important d’essayer de se conformer au style littéraire de Persson. La traduction peut donc être vue comme un art concret, demandant une certaine exactitude et responsabilité du traducteur.

Les différentes méthodes et théories de traductions

     Dans le domaine de la traduction, il est possible d’observer un certain nombre de méthodes et de théories. Dans l’ensemble, nous pouvons compter avec Vinay et Darbelnet sept façons majeures de traduire (1958) : l’emprunt, le calque, la traduction littérale, la transposition, la modulation, l’équivalence et l’adaptation qui sont toutes expliquées dans le travail de Z. Raková portant sur les modèles de traduction du XX siècle. Les techniques de Vinay et Darbelnet permettent de comprendre comment traduire un texte simplement. Ainsi, leurs méthodes fournissent aux traducteurs des moyens clairs pour établir leur traduction en adaptant chaque méthode à un texte devant être traduit. Chacune de ces méthodes a une fonction spéciale. L’emprunt, qu’Esther Sermage utilise à plusieurs reprises dans son livre, consiste à utiliser un mot ou une expression du texte source pour le texte cible, comme par exemple : « Hur har Säpo löst det idag.. ? » devient « Comment la Säpo a-t-elle réglé le problème ?» (p.404). On l’appelle aussi la solution désespérée de la traduction comme le dit Jean-René Ladmiral (1979 :106). Le calque donne à la traduction un néologisme avec la structure de la langue source (1958 :64), comme par exemple « to fall in love » devient « tomber amoureux ». La traduction littérale est une traduction mot à mot à mot qui nécessite une grande ressemblance entre la langue cible et source ainsi que dans l’aspect culturel (1958 :65), commepar exemple : « Vad äter du ? » devient « Que manges-tu ? ». La transposition est le fait de passer d’une catégorie de grammaire à une autre grammaire mais sans pour autant que le sens ne change (1958 :66), comme par exemple de Vinay et Darbelnet « dès son lever » devient « as soon as he gets up ». La modulation est une technique qui change la forme du texte (1958 :66) comme l’exemple de Vinay et Darbelnet: « It is not difficult to… » devient « Il est facile de démontrer ». Enfin l’équivalence que nous avons beaucoup relevée dans la traduction d’Esther Sermage est une méthode par laquelle une réalité équivalente est rendue différente dans la traduction mais ayant le même sens (1958 :67). Par exemple tiré du livre de Leif G.W.Person : « Det är förmodligen slut med det mesta » devient « Ce serait la fin des haricots » (chapitre 28). L’équivalence est ainsi souvent utilisée pour traduire des expressions idiomatiques ou proverbes.

L’utilisation de l’équivalence et ses résultats

     L’équivalence permet d’aider à traduire « l’intraduisible », ou ce qui pourrait poser problème pour le lecteur dans la langue cible, car en effet, il n’est toujours possible de tout aliéner dans une traduction. Il y a, selon différents chercheurs et experts de traductologie, plusieurs sortes d’équivalence dans la traduction. Pour beaucoup, la traduction en elle-même est une équivalence, comme par exemple Nida disant que « la traduction consiste à produire dans la langue d’arrivée « l’équivalent naturel » le plus proche du message de la langue de départ » (voir le lien « De la linguistique à la traductologie », page 10). Selon Anthony G. Oettinger, la traduction est comme « le remplacement d’une langue […] par des éléments d’équivalents dans une autre langue » (voir le lien « De la linguistique à la traductologie », page 10). Ainsi, toute la traduction ne serait qu’une équivalence. Mais si nous nous penchons sur quelques exemples précis, il nous est aussi possible de voir des éléments plus complexes dans le domaine de l’équivalence dans la traduction. Pour commencer selon Vinay et Darbelnet : « deux textes rendent compte d´une même situation en mettant en œuvre des moyens stylistiques et structuraux entièrement différents. Il s´agit alors d´une équivalence. » (1958 :64). On peut donc utiliser cette technique pour traduire des expressions des interjections, des proverbes… Selon un autre chercheur en traduction, Krzysztof Hejwowski, il y-a plusieurs façons de voir l’équivalence : de façon descriptive, reconnue et fonctionnelle (2004). L’équivalent descriptif a pour but de donner une définition ou une explication au lieu d’utiliser le mot de la langue source. L’équivalent reconnu a pour but de traduire les noms des institutions, des organisations, de personnages célèbres… Enfin, l’équivalent fonctionnel remplace des éléments ou phénomènes connus dans la langue ou culture source par leurs équivalents dans la langue ou culture cible (ibid.). Ces équivalences de Krzysrof Hejwowski ne sont pas utilisées par la traductrice Esther Sermage dans le livre Comme dans un rêve puisqu’elle ne change pas les noms d’institutions, d’organisations et garde tous les détails pour, selon nous, donner aux lecteurs une sorte de connaissances des noms et institutions en Suède. Par exemple, nous pouvons retrouver à plusieurs reprises le nom de la « Säpo » déjà cité en exemple ou de « Systembolaget ». Mais malgré tous ces emprunts, nous avons pu observer, dans Comme dans un rêve, un grand nombre d’équivalences. Comme précisé précédemment, l’équivalence est une technique qui a pour but de rendre par exemple à une expression toute faite en suédois son équivalence en français. C’est donc plutôt en suivant Vinay et Darbelnet que Krzysrof Hejwowski que nous nous sommes penchée sur la traduction de Faller Fritt som i en dröm.

L’utilisation de l’emprunt et ses résultats

      L’emprunt est une technique de traduction assez controversée dans le milieu de la traduction. Elle est, quelque part, le contraire de l’équivalence. En effet, elle est parfois appelée « la solution désespérée de la traduction » comme le dit Jean-René Ladmiral : « Face à une lacune lexicale de sa langue cible, le traducteur peut avoir recours à la solution désespérée de l’emprunt, qui importe tel que le terme de source étrangère… » (1979 :106). L’emprunt peut aussi être vu comme un phénomène social, prouvant que les langues sont influencées par d’autres et adoptant les mots et expressions de chacune, Rezâ- Bâteni (2009) explique que « l’emprunt est avant tout un phénomène social. C’est le reflet de l’influence culturelle d’une société sur une autre. Les relations économiques, politiques et culturelles entre les communautés favorisent les échanges linguistiques entre les États, notamment au travers des échanges culturels » (Rezâ-Bâteni, 2009). Nous pouvons alors peutêtre nous dire que quelle que soit l’occurrence de l’application de l’emprunt dans une traduction, celle-ci sera vue comme le contact entre les peuples et leurs cultures. C’est dans ce cas que nous retrouvons dès lors une très grande influence de la langue anglaise dans la version originale de Faller Fritt som i en dröm. En effet, la langue anglaise faisant partie plus ou moins de la culture suédoise selon nous et la grande majorité des Suédois parlant anglais, la présence de cette langue dans le livre n’est pas surprenante. Dès lors, nous pouvons retrouver de long passage dans la version originale : « Okay, Lisa. As long as you keep yourself behind me. Promise ? ». Ces influences et passages anglais dans la version originale sont aussi retrouvés dans la version française. Mais l’emprunt est aussi utilisé en traduction pour décrire des concepts et idées ou bien même des institutions n’existant pas dans la langue cible. Il arrive aussi que le concept du mot traduit change dans la langue cible. Certaines expressions ou mots sont aussi uniques et n’ont pas de traduction pouvant refléter leur sens. L’emprunt est donc une autre technique de traduction qui se retrouve très régulièrement dans la version française de Faller fritt som i en dröm. Dans le roman, nous pouvons retrouver un grand nombre de notes en bas de page expliquant des mots en suédois que nous trouvons en grand nombre dans le livre français. La langue suédoise pose normalement des problèmes de compréhension, et voilà pourquoi Sermage leur donne une définition en français en note. Nous trouvons plus de vingt cas d’emprunt dans Comme dans un rêve, en anglais et en suédois. Bien que l’anglais ait de plus en plus d’influence sur la langue française, celle-ci ne serait pourtant pas aussi bien parlée qu’en Suède. En revanche, nous pouvons aussi remarquer que les répliques en anglais dans la version originale sont traduites dans des notes pour que le lecteur cible puisse comprendre le sens de ces expressions. En conservant l’anglais dans la traduction française, nous pouvons conclure qu’Esther Sermage a voulu montrer une face de la culture suédoise. Elle est restée fidèle à la version originale de Persson et offre ainsi au lecteur français une réalité de la culture suédoise.

Conclusion

      Après avoir étudié la traduction d’Esher Sermage, en ayant basé notre étude sur les équivalences et les emprunts utilisés dans le livre, nous pouvons conclure qu’Esther Sermage a su conserver dans beaucoup de détails le style particulier de Persson et les éléments rendant le livre exotique aux yeux des lecteurs ainsi qu’aliéné, mais a aussi su traduire de façon « domestique » lorsqu’il le fallait (avec l’équivalence). Celle-ci a su conserver les répétitions de son style, les idées que celui-ci a fait passer par rapport au pays et à la région de Norrland ainsi que dans l’utilisation du tutoiement etc… Malgré le fait que quelques équivalences ne ressemblent pas aux expressions suédoises, et soient plus proches de la domestication que de l’aliénation, il s’avère qu’elles portent le même sens et veulent délivrer le même message que ce que Leif G.W Persson voulait donner à ses lecteurs et pas n’influence en rien la lecture du lecteur cible. De plus, les internautes remarquant que la traduction est très marquée par la culture suédoise ainsi que sa langue et c’est une preuve de la réussite d’Esther Sermage qui voulait, selon nous, laisser cette marque suédoise dans sa traduction. Le travail de traduction conséquent de la traductrice nous permet alors de confirmer que le texte de la langue cible peut faire passer le même message que le texte de la langue source et peut donc donner aux lecteurs une possibilité d’apprendre plus de la culture du pays du texte source tout en leur laissant certain aspect de la langue cible (en note) si cela devait poser problème. Dans Comme dans un rêve, le lecteur aura eu l’occasion de lire plus sur la présence de la langue anglaise en Suède, aura pu apprendre les noms d’institutions ou de mots suédois écrits dans le livre. Le tutoiement aura donné au lecteur une autre vision de l’échelle hiérarchique dans ce pays. Puisque le vouvoiement est très important en France, pouvoir lire un texte écrit seulement avec le deuxième pronom du singulier peut apparaitre comme exotique pour le lecteur. De plus, lors de notre étude, nous aurons eu l’occasion de nous familiariser avec les techniques de traduction ainsi qu’avec les théories de Venuti et Berman. Nous aurons donc vu que l’aliénation a pour but de rendre la traduction étrangère. C’est-à-dire que le texte cible doit comprendre le plus possible d’éléments du texte source pour que le lecteur sente l’influence de la culture source dans son livre et la présence du traducteur. Nous aurons aussi vu que la domestication a elle pour but de rendre la traduction plus facile pour le lecteur du texte cible. En effet, celle-ci veut que le traducteur soit invisible et que chaque élément qui rende la lecture exotique disparaisse. Les méthodes de Vinay et Darbelnet auront aussi, tout au long de l’étude permis d’avancer dans nos recherches et de nous aider dans l’analyse de l’équivalence et de l’emprunt. Toutes ces méthodes auront contribué à nous aider dans notre analyse et nous montrer que la traduction d’Esther Sermage pourrait donc être qualifiée de traduction aliénée, nous faisant remarquer comment le traducteur réfléchit et peut, bien que dans un toute autre langue, réussir à faire passer les mêmes idées et opinions d’une langue étrangère.

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Table des matières

1. Introduction
1.1. But de ce mémoire
1.2. Le plan du mémoire
2. Cadre théorique de l’étude
2.1. Corpus étudié
2.2. Courte introduction à la traduction
2.3 Les différentes méthodes et théories de traductions
3. Les techniques de traduction utilisées dans le livre et les résultats
3.1. L’utilisation de l’équivalence et ses résultats
3.2 L’utilisation de l’emprunt et ses résultats
4. Réception du livre suédois par le public français
4.1. Méthode et corpus utilisés
4.2 Résultats de l’étude
5. Conclusion 
6. Bibliographie

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