Les forêts naturelles malgaches regorgent de ressources encore mal connues et sous exploitées. Pour les essences de bois, plus de 4220 espèces ligneuses y sont rencontrées, dont 50 environs sont exploitées et près de 197 seulement ont été decrites (Rakotovao et al., 2012). Le bois, dont l’homme se sert depuis des millénaires, reste l’un des matériaux les plus utilisés pour la construction, la menuiserie et l’ameublement (Franz, 1958). De ce fait, les bois précieux tels que le bois d’ébène (Diospyros spp.), le bois de rose et le palissandre (Dalbergia spp.) qui sont très prisés sur le marché national et mondial, sont surexploités et se raréfient continuellement (Patel, 2007, Shuurman et Lowry, 2009 ; Ballet et al., 2010, Rajemison, 2013). Une des principales causes est le commerce illicite, suivi de l’exportation aux Etats-Unis, en Europe, et surtout en Chine (Laurence, 2008). Ainsi, les bénéfices rapides associés à leur commerce ont engendré une ruée vers ces bois, ce qui a décimé les quelques dernières forêts précieuses de Madagascar (Global Witness et EIA, 2010). Face à cette raréfaction des bois précieux malgaches, il s’avère nécessaire de veiller à la gestion durable de ces essences d’une part, mais surtout de commencer à rechercher des essences de substitution pour satisfaire les besoins des consommateurs en bois d’ameublement.
Selon Ramanakoto (2012), pour une recherche d’essence de substitution, non seulement l’essence doit avoir de bonnes caractéristiques technologiques adéquates correspondant à son utilisation, mais il faut aussi que l’essence plaise aux consommateurs. Les caractéristiques, « couleur », «texture » et « densité » du bois, appréciées par les consommateurs malgaches ont été alors identifiées. Cet auteur préconise avant tout le choix d’essences lourdes, de couleur tendant vers le jaune clair, à texture orientée bien visible et une surface lisse sans défauts. Pour ce dernier critère, Mothe (1985), a souligné qu’une des propriétés importantes du bois, notamment pour ses utilisations les plus nobles, est son état de surface, qui conditionne son aspect esthétique, mais aussi l’importance des pertes de matière lors des phases de finition du matériau.
Les conditions d’usinage ont un effet majeur sur la qualité de surface produite (Aiguilera et Zamora, 2009). L’étude de la relation « conditions de coupe et caractéristiques de l’état de surface produit », est alors importante pour comprendre le mécanisme de formation de diffénts types de surface. Plusieurs études (Goli, 2003 ; Khazaeian, 2006 ; Kilic et al., 2006 ; Hernandez et Cool, 2008, Ramananantoandro et al., 2014) ont travaillé sur l’optimisation des conditions de coupe pour améliorer la qualité de surface. Cependant, il n’existe actuellement aucun critère précis pour déterminer si la qualité d’une surface est bonne ou pas, notamment pour les essences autochtones et endémiques malgaches. Des études approfondies s’avèrent alors nécessaires afin de déterminer les critères quantitatifs permettant d’appréhender ce qu’est une bonne qualité de surface. La méthode utilisée a été basée sur la détermination de la préférence des consommateurs en matière d’état de surface des bois d’ameublement.
Présentation du milieu d’étude
Localisation
Madagascar comprend 22 régions qui sont à leur tour subdivisées en plusieurs districts, puis en communes et enfin en Fokontany. Le milieu d’étude de la préférence des consommateurs en bois d’ameublement s’est étendu sur 3 des 8 districts qui constituent la Région Analamanga (PRD – Région Analamanga, 2005), à savoir Antananarivo Renivohitra, Antananarivo Atsimondrano et Antananarivo Avaradrano. La ville d’Antananarivo, Capitale de Madagascar, rassemble le plus grand nombre d’habitants, près de 8% de la population malagasy (Helders, 2012 ; Rajemison, 2013). C’est également le plus important centre de consommation en bois de construction, d’œuvre et de service (Rajemison, 2013).
Milieu humain
Les caractéristiques de la population dans les trois districts choisis pour l’étude, Antananarivo Renivohitra, Atsimondrano et Avaradrano sont comme suit : en terme de répartition par sexe, le pourcentage des hommes est légèrement inférieur (49 %) à celui des femmes (51 %). En termes de répartition par âge, c’est une population relativement jeune, avec plus de 65% ayant moins de 25 ans (MAEP – UPDR, 2003 ). En termes de catégorie socio-économique, selon INSTAT (2011), la pauvreté touche 76,5% de la population malgache, près de 82% des ménages ont un revenu inférieur ou égal à leurs besoins fondamentaux, le SMIC étant de Ar 100000 (Julia, 2012 ; Parienti, 2012 ; Racl, 2013) et l’indice de développement humain (IDH 2011) de 0,480 (151°) (Helders, 2012). Moins de 20 % appartiennent à la catégorie des « plus riches ». En effet, la majorité de la population malgache est pauvre. Les ménages riches et moyens sont minoritaires.
Couverture forestière de la Région Analamanga
L’ensemble de la Région Analamanga est caractérisé par la faible superficie couverte en forêt primaire. La dégradation est telle qu’il ne reste plus que quelques lambeaux de forêt, juste à la limite orientale de la Province d’Antananarivo, à l’Est d’Anjozorobe passant par Ambatolaona jusqu’à Tsinjoarivo, à Ambatolampy et au Tampoketsa Ankazobe (MAEP – UPDR, 2003). La couverture forestière dans la région Analamanga a ainsi rapidement diminué de 1990 à 2010 . Les valeurs les plus faibles se rencontrent dans la région d’Itasy, les couvertures forestières les plus étendues se retrouvent dans la région Atsimo Andrefana. Concernant l’évolution de la couverture forestière durant la même période au niveau des huit districts composant la région Analamanga, le district d’Anjozorobe présente la plus grande superficie de couverture forestière tandis que c’est le district d’Antananarivo renivohitra qui en est le plus restreint.
Approvisionnement en bois de la Région Analamanga
Face à cet état de la couverture forestière, le marché du bois d’œuvre est alors contraint de se tourner progressivement vers l’exploitation des forêts de reboisement, notamment d’Eucalyptus et de Pin, et des plantations privées en substitution des sources de bois des forêts naturelles (Rasoamanana, 2007). Ainsi, le bois vendu sur le marché d’Antananarivo provient à 48% de la zone de Moramanga, à 25% de la zone de Toamasina, à 10% de Morondava, de Fianarantsoa (5%), Mahajanga (5%), d’Antsohihy (5%), et de Tuléar (2%) (Ramamonjisoa et Ratefiarivelo, 2006). La zone de Moramanga est donc l’une des principales zones d’approvisionnement d’Antananarivo en bois. En d’autres termes, 78% des bois sur le marché d’Antananarivo sont issus des forêts humides de l’est, et 22% sont exploités dans les forêts sèches (Vonimahefa, 1996 ; ONESF, 2009 ; Rajemison, 2013).
Etude des critères quantitatifs permettant une appréciation objective de la qualité de surface du bois usiné : les paramètres d’états de surface
La vérification des hypothèses a requis le passage par quatre étapes bien distinctes. En premier lieu, il a fallu choisir une essence permettant de bien apprécier l’état de surface du bois usiné. En second lieu, il a fallu procéder à l’usinage du bois en le découpant en plusieurs éprouvettes de façon à obtenir plusieurs états de surfaces allant de l’ébauche grossière à la finition très soignée. En troisième lieu, les différents paramètres de rugosité de surface et les défauts visuels de bois ont été mésurés. Enfin, une analyse sensorielle a été effectuée pour étudier les préférences des consommateurs sur les différents états de surface ainsi générés.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I. MATERIELS ET METHODES
I.1. Problématique
I.2. Hypothèses
I.3. Présentation du milieu d’étude
I.3.1. Localisation
I.3.2. Milieu humain
I.3.3. Couverture forestière de la Région Analamanga
I.3.4. Approvisionnement en bois de la Région Analamanga
I.4. Etude des critères quantitatifs permettant une appréciation objective de la qualité de surface du bois usiné : les paramètres d’états de surface
I.4.1. Choix de l’essence utilisée
I.4.2. Usinage des éprouvettes suivant un plan d’expériences
I.4.3. Mesure des différents paramètres d’état de surface
I.5. Détermination des critères d’appréciation de la qualité de surface : tests de préférence des consommateurs
I.5.1. Description des évaluations sensorielles
I.5.2. Critères retenus pour la typologie des consommateurs
I.6. Traitement des résultats
I.6.1. Etape 1 : Etude de la fréquence des différents niveaux des paramètres d’états de surface sur les bois usinés
I.6.2. Etape 2 : CAH ou Classification Ascendante Hiérarchique
I.6.3. Etape 3 : ACP ou Analyse en Composante Principale
I.6.4. Etape 4 : Etude des corrélations entre les préférences des consommateurs et les paramètres d’états de surface
I.6.5. Etape 5 : Regression linéaire et établissement des seuils de préférence
I.7. Schéma récapitulatif de l’analyse statistique
I.8. Cadre opératoire de recherche
I.9. Résumé méthodologique
CHAPITRE II . RESULTATS ET INTERPRETATIONS
II.1. Fréquence d’apparitions des différents niveaux des paramètres d’états de surface
II.1.1. Valeurs moyennes, minimales et maximales des paramètres d’état de surface mesurés sur les surfaces de bois usinés
II.1.2. Fréquence d’apparitions des différents niveaux des paramètres de rugosité et du profil primaire de la surface sPa
II.1.3. Fréquence d’apparitions des différents niveaux de paramètres d’ondulation
II.1.4. Fréquence d’apparitions des différents niveaux de défauts visuels
II.1.5. Corrélation entre les paramètres d’états de surface
II.2. Préférence des consommateurs sur les états de surface du bois d’ameublement
II.2.1. Profil du panel de consommateurs : répartition par âge et par sexe
II.2.2. Typologie des consommateurs enquêtés selon les critères socio-démographiques et leurs préférences
II.2.3. Statistique descriptive des notes de préférences visuelles et viso-tactiles
II.2.4. Préférence des consommateurs sur l’état de surface primaire, la rugosité et l’ondulation de surface du bois usiné
II.2.5. Préférence des consommateurs sur les défauts visuels de surface du bois usiné
II.3. Détermination des seuils de préférence
II.3.1. Corrélation entre les préférences des consommateurs et les paramètres d’états de surface
II.3.2. Régression linéaire entre les notes visuelles, les notes viso-tactiles et les paramètres d’état de surface corrélés avec les préférences des consommateurs
II.3.3. Détermination des seuils d’acceptabilité et de préférence indéniable des paramètres d’états de surface
CHAPITRE III . DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
III.1. Discussions
III.1.1. Sur l’approche méthodologique
III.1.2. Sur les résultats
III.2. Vérification des hypothèses de travail
III.3. Apports et intérêts de la recherche
III.3.1. Apports pour l’usinage et la finition en ameublement bois
III.3.2. Intérêts scientifiques
III.4. Recommandations et perspectives
III.4.1. Recommandations méthodologiques
III.4.2. Perspectives
III.4.3. Recommandations pratiques
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES