Étude des propriétés de propagationd’un laser à atomes

L’optique atomique 

L’optique atomique est une discipline qui a émergé à la croisée des chemins entre l’optique et la physique atomique. Au XIXème siècle déjà, Sir William Rowan Hamilton avait été frappé par l’identité de forme, entre le principe de Maupertuis déterminant la dynamique d’un mobile, et le principe de Fermat à la base de la propagation des rayons lumineux [1]. Pratiquement un siècle plus tard, en 1924 [2], Louis De Broglie a proposé de généraliser la dualité onde-corpuscule de l’optique à tout mobile d’impulsion p, en associant à ce dernier une longueur d’onde λ, selon la relation λ = h/p .

Le caractère ondulatoire de la matière a été mis en évidence pour la première fois en 1927 avec l’expérience de Davisson et Germer consistant à faire diffracter des électrons sur un cristal [3]. Ceci a donné lieu à la naissance de l’optique électronique, dont l’une des réalisations est le microscope électronique [4]. De même, rapidement, le caractère ondulatoire de neutrons a été mis en évidence [5]. En ce qui concerne les atomes neutres, la diffraction d’un faisceau thermique a été démontrée en utilisant un réseau optique [6] ou matériel [7]. On trouvera, en particulier dans [8], une introduction détaillée au domaine de l’optique atomique

Pour manipuler les atomes, différents composants optiques ont été développés. Ainsi, des lentilles magnétiques utilisant par exemple le champ créé par une configuration hexapolaire [9], ou encore des lentilles optiques jouant sur les déplacements lumineux atomiques [10], ont permis de focaliser un faisceau atomique. Cependant, le pouvoir focalisant de ces systèmes est d’autant plus fort que les atomes sont lents. Plus généralement, la manipulation des atomes est facilitée s’ils sont ralentis. L’essor de l’optique atomique a donc particulièrement bénéficié de la mise en œuvre des techniques de manipulation par laser, dont le développement a valu à leurs auteurs, Steven Chu, Claude Cohen-Tannoudji et William D. Phillips, le prix Nobel en 1997 [11, 12, 13]. Ainsi, de nouveaux composants sont apparus, avec par exemple le miroir à atomes, fondé sur la réflexion sur une onde évanescente [14, 15]. Conjugué avec un confinement transverse, la méthode a ainsi permis de faire rebondir les atomes plusieurs milliers de fois [16]. On se reportera aux articles rassemblés dans [17], pour une revue de différentes réalisations des éléments de base de l’optique atomique.

Au sein de l’optique atomique, un domaine d’étude particulier consiste à utiliser les ondes de matière pour réaliser des expériences d’interférométrie. On peut, par exemple, noter une expérience analogue à celle des fentes d’Young [18], ou encore la réalisation de l’analogue d’un interféromètre de Mach-Zehnder [19]. Une des applications possibles de ces techniques est la réalisation d’accéléromètres ou de gyromètres à onde de matière. Dans de tels systèmes, les atomes sont utilisés comme senseurs inertiels de grande précision. On trouvera dans [20, 21, 22] une introduction détaillée au sujet de l’interférométrie atomique, et de son application à de telles mesures. Toutefois, les sources atomiques utilisées jusqu’ici sont réalisées à partir d’échantillons d’atomes, qui, même s’ils sont refroidis, ne sont pas parfaitement cohérents. Pour améliorer les performances des interféromètres, on peut envisager utiliser des sources de meilleure cohérence, que sont les lasers à atomes.

Une source cohérente pour l’optique atomique : le laser à atomes 

Tout comme le laser [23] a ouvert de nouvelles possibilités en optique, on peut s’attendre à ce que les lasers à atomes jouent un rôle important pour l’optique atomique. En particulier par rapport aux autres sources, ils présentent deux avantages que sont une bonne cohérence et une bien plus forte luminance, c’est-à dire une forte intensité canalisée dans une direction donnée. Les lasers optiques sont issus d’une assemblée contenant un grand nombre de photons, tous stockés dans le même mode d’une cavité. Pour réaliser un laser à atomes, il faut donc disposer d’un nombre macroscopique d’atomes qui sont tous dans le même état quantique, c’est-à-dire dans un condensat de Bose-Einstein [24, 25]. Ce phénomène propre aux bosons et accessible expérimentalement à des températures de l’ordre du microkelvin, a été réalisé pour la première fois en 1995 [26, 27, 28] pour des gaz d’alcalins piégés. Son observation a valu l’attribution du prix Nobel de Physique en 2001, conjointement à Eric A. Cornell et Carl E. Wieman ainsi qu’à Wolfgang Ketterle [29, 30].

La cohérence spatiale des condensats de Bose-Einstein a été mise en évidence expérimentalement dans [31] : la superposition de deux nuages condensés présente en effet un signal clair d’interférences. Par analogie avec l’expérience d’optique des fentes d’Young, deux lasers ont été couplés de deux endroits différents d’un condensat et montrent, en se superposant, une figure d’interférence traduisant la cohérence des lasers à atomes extraits [32]. Outre l’étude des propriétés de cohérence spatiale précédentes, la cohérence temporelle du faisceau atomique a été mise en évidence [33], en observant l’onde stationnaire apparaissant à la réflexion d’un laser à atomes sur une barrière de potentiel. De plus, on pourra noter des expériences comparant les effets de statistique entre un nuage thermique et un condensat, comme une expérience de Hanbury Brown et Twiss atomique [34]. Enfin, un laser à atomes dans un régime d’interactions négligeables a montré un comportement statistique analogue à un laser optique [35]. Une détection, atome par atome du faisceau, à l’aide d’une cavité de grande finesse, a permis de mettre en évidence la statistique poissonienne du laser.

Notre dispositif expérimental a été développé dans le but de réaliser une source atomique cohérente, pour utiliser le laser à atomes dans des expériences d’interférométrie atomique. Une différence importante entre photons et atomes, réside dans le fait qu’aux faibles énergies que nous considérons, les atomes interagissent de manière collisionnelle dans le vide, à la différence des photons. Si ceci donne lieu à un nouveau champ d’investigation d’optique atomique non-linéaire [36], les interactions peuvent être gênantes pour des applications interférométriques de précision. Ainsi, il est primordial de caractériser précisément les propriétés de propagation des lasers à atomes, et de déterminer dans quelle mesure les interactions modifient leurs propriétés.

Réalisation d’un condensat de Bose-Einstein

La source d’atomes froids 

Une première étape vers la condensation de Bose-Einstein consiste à stocker un grand nombre d’atomes en un endroit donné et à une température bien plus basse que la température ambiante. Dans le cas du gaz dilué de Rubidium que nous utilisons, cette première étape est réalisée, en manipulant les atomes, à l’aide du champ électromagnétique fourni par des lasers, en association avec différentes configurations de champ magnétique. Les étapes de refroidissement laser que nous mettons en œuvre, sont fondées sur un échange d’impulsion entre l’atome et l’onde lumineuse. Ce phénomène est particulièrement efficace, puisqu’il nous permet d’obtenir des nuages d’une température de 60 microkelvins, alors que les atomes débutent le processus à une température plus d’un million de fois plus élevée (400 K).

Notre expérience d’optique atomique

La matière première : le Rubidium 87

Le Rubidium (Rb) est un métal alcalin découvert par R. Bunsen et G. Kirchhoff en 1861. Il est placé à l’intersection de la cinquième période et de la première colonne du tableau de classification de Mendeleïev. Il est en particulier très électropositif, ce qui tend à faciliter sa réactivité avec l’eau par exemple. Au laboratoire, il est stocké à l’abri de l’humidité dans des ampoules de verre . A l’état naturel, on le trouve à l’état de traces (1.5 %) dans des minerais comme la lépidolite sous la forme de deux isotopes : 85Rb (72.2 %) et 87Rb (27.8 %). C’est ce dernier isotope que nous manipulons, car il est plus facile à refroidir du fait de ses propriétés collisionnelles favorables. Bien que le jet issu de notre source  contienne les deux isotopes, les étapes de refroidissement par laser  sélectionnent via la longueur d’onde utilisée l’isotope 87, le Rubidium 85 jouant le même rôle que le gaz résiduel dans l’enceinte.

Le 87Rb est un boson puisqu’il est constitué d’un nombre pair de fermions : 37 électrons, 37 protons et 50 neutrons. Comme beaucoup d’éléments utilisés dans le domaine des atomes froids (H, Li, Na, K, Cs), il ne possède qu’un seul électron périphérique ce qui rend sa modélisation assez simple : ses propriétés chimiques comme physiques sont, dans une bonne approximation, celles d’un élément comportant un noyau effectif (noyau réel entouré des couches électroniques remplies) et un électron périphérique. Les niveaux électroniques correspondant à la transition S → P sont présentés dans la figure 2. Le couplage entre le spin S de l’électron et son moment cinétique orbital L donne naissance à la structure fine qui lève partiellement la dégénérescence de ces niveaux et fait apparaître les raies D1 et D2. Le couplage entre le spin du noyau effectif I et le moment cinétique total J de l’électron résulte en une structure hyperfine associée au moment cinétique global F. En particulier, on observe une levée de dégénérescence de l’état de plus basse énergie en deux niveaux fondamentaux F =1 et F =2 qui sont alors séparés par l’écart hyperfin ∆HF.

Les raies spectrales du Rubidium sont dans l’infrarouge proche (rubidus signifie rouge foncé en latin) autour de 780 nm. Cette caractéristique n’est pas pour rien dans le succès de cet élément pour la manipulation d’atomes par la lumière. On dispose en effet de sources laser performantes, compactes et produites en quantités industrielles (pour les lecteurs CD par exemple) à cette longueur d’onde : les diodes laser . Le fait que tous les niveaux hyperfins soient bien séparés va faciliter la manipulation optique de cet atome, puisque l’on va pouvoir précisément ne sélectionner qu’une seule transition tout en étant assez désaccordé des autres.

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Table des matières

Introduction
Première partie : Réalisation d’un condensat de Bose-Einstein
Introduction à la première partie
I La source d’atomes froids
I.1 Notre expérience d’optique atomique
I.1.1 La matière première : le Rubidium 87
I.1.2 Le système à vide
I.1.3 Les lasers et le banc d’optique
I.1.4 L’observation des atomes avec l’imagerie par absorption
I.1.5 Automatisation de l’expérience
I.2 La séquence de refroidissement laser
I.2.1 Le four à recirculation
I.2.2 Le ralentissement Zeeman
I.2.3 Le piège magnéto-optique
I.2.4 La mélasse optique
I.2.5 Récapitulatif de la séquence expérimentale
I.3 Caractéristiques de notre source
I.3.1 Flux atomique en sortie du four
I.3.2 Flux utile au chargement du piège magnéto-optique
I.3.3 Chargement du piège magnéto-optique
II La condensation de Bose-Einstein dans un piège ferromagnétique hybride
II.1 La condensation de Bose-Einstein
II.1.1 Un effet de statistique quantique
II.1.2 Effet des interactions : l’équation de Gross-Pitaevskii
II.1.3 L’approximation de Thomas-Fermi
II.2 Le piégeage magnétique
II.2.1 Le piège de Ioffe-Pritchard
II.2.2 L’électroaimant ferromagnétique hybride
II.2.3 Chargement et compression du piège
II.2.4 Durée de vie
II.2.5 Chauffage dans le piège magnétique
II.3 L’évaporation radiofréquence
II.3.1 Principe
II.3.2 Réalisation
II.4 Observation de la condensation
II.4.1 Transition vers la condensation
II.4.2 Analyse des images
II.4.3 Durée de vie et collisions à trois corps
Conclusion à la première partie
Seconde partie : Le laser à atomes
Introduction à la seconde partie
III L’onde de matière extraite du condensat
III.1 Méthodes de couplage des lasers à atomes
III.1.1 Couplage par déversement ou par effet tunnel
III.1.2 Les couplages radiofréquence et Raman
III.1.3 Différentes descriptions théoriques des propriétés de couplage
III.2 Description de champ moyen du laser à atomes
III.2.1 Équations de Gross-Pitaevskii couplées
III.2.2 Le continuum des états non piégés
III.2.3 Dynamique de couplage
III.3 Réalisation expérimentale
III.3.1 Mise en œuvre
III.3.2 Stabilité du biais magnétique
III.3.3 Effet des interactions sur le profil du laser
III.3.4 Dynamique non markovienne du laser
IV Propagation du laser à atomes
IV.1 Méthode de propagation dans un potentiel défini par morceaux
IV.1.1 Propagateur
IV.1.2 Procédure de calcul adoptée
IV.2 Propagation dans la zone du condensat
IV.2.1 Calcul de l’intégrale de propagation
IV.2.2 Calcul à partir de l’iconale
IV.2.3 La fonction d’onde du laser à la surface du condensat
IV.3 Propagation hors de la zone du condensat
IV.3.1 L’intégrale de Kirchhoff pour les ondes de matière
IV.3.2 Application à notre cas particulier
IV.4 Résultats de la propagation et comparaison à une simulation numérique
IV.4.1 Profils obtenus à une altitude donnée
IV.4.2 Profils de densité dans différents plans
IV.4.3 Effet de l’imagerie
V Régime paraxial de propagation
V.1 L’équation de propagation paraxiale
V.1.1 Séparation des degrés de liberté transverses et axiaux
V.1.2 Approximation d’enveloppe lentement variable
V.1.3 Paramétrage par le temps
V.1.4 Domaine de validité
V.2 Solutions générales
V.2.1 Potentiels considérés
V.2.2 Les solutions hermito-gaussiennes
V.2.3 Évolution des paramètres du faisceau : la loi ABCD
V.3 Propagation à l’aide des matrices ABCD atomiques
V.3.1 Expression des matrices de propagation
V.3.2 Méthode générale de propagation
V.4 Le facteur qualité M2
V.4.1 Définition
V.4.2 Invariance du M2 au cours de la propagation paraxiale
V.4.3 Propagation utilisant le paramètre complexe généralisé
V.5 Caractérisation expérimentale du laser à l’aide du M2
V.5.1 Méthode d’analyse
V.5.2 Résultat
Conclusion à la seconde partie
Troisième Partie : Un guide pour le laser à atomes
Introduction à la troisième partie
VI Un nouvel outil pour l’optique atomique
VI.1 Le piège optique
VI.1.1 Potentiel et taux d’émission spontanée
VI.1.2 La pince optique
VI.1.3 Mise en œuvre expérimentale
VI.2 Le laser à atomes guidé
VI.2.1 Principe
VI.2.2 Réalisation
VI.2.3 Observation de la dynamique du laser
Conclusion à la troisième partie
Conclusion

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