Étude des mécanismes physico-chimiques de mise en suspension de contaminants particulaires lors de la dégradation thermique de matériaux représentatifs des installations nucléaires

PÉRIMÈTRE DE LA PROBLÉMATIQUE

Dans une installation nucléaire, les matières radioactives sont isolées de l’environnement par un système de confinement. Ce confinement varie selon le type et la forme de la matière radioactive, mais est généralement constitué d’une barrière de confinement statique (enveloppe métallique scellée, boîtes à gants, mur de béton, porte étanche), éventuellement complétée d’un système de confinement dynamique (système de ventilation à cascade de dépression et filtre à très haute efficacité). Il est particulièrement important de réussir à maintenir le confinement des matières en situation de fonctionnement normal, mais surtout en situation accidentelle, en particulier en cas d’incendie. Si les systèmes de confinement sont dégradés ou détruits, il existe alors un risque de rejet non contrôlé de matières radioactives dangereuses pour l’homme et l’environnement.

Ces systèmes de confinement sont généralement contaminés en surface interne par les matières radioactives avec lesquelles ils sont en contact. Cette contamination revêt des formes diverses selon le procédé concerné : particules solides, solutions et résidu séché de solution (sel). L’évaluation de la gravité d’un incendie dans une installation nucléaire est directement corrélée à la quantité de matière radioactive mise en jeu et potentiellement mobilisable par l’incendie.

L’objectif est donc de mettre en œuvre une démarche d’évaluation des rejets de matière nucléaire suite à un incendie susceptible de se produire dans une Installation Nucléaire de Base (INB), ne nécessitant pas la mise en place de moyens lourds et reposant sur des valeurs représentatives des situations d’incendie.

Une méthode simple de calcul visant à évaluer le terme source (activité totale rejetéedans l’environnement) dû à un incendie, a été proposée ainsi (Lacoue, 2001) :

? = ∑ ??,? = ∑ ???,? . ?0?,? . ?1?,? . ?2?,? . ?3?,? (1)

S : activité totale rejetée dans l’environnement (terme source) (Bq),
Si,j : activité du radionucléide i, sous la forme j, rejetée dans l’environnement (Bq),
Ati,j : activité totale du radionucléide i, sous la forme j, présente dans les locaux impliqués dans l’incendie (Bq),
C0i,j : fraction de l’activité du radionucléide i, sous la forme j, impliquée dans l’incendie,
C1i,j : fraction mise en suspension du radionucléide i, sous la forme j,
C2i,j : fraction des aérosols du radionucléide i, sous la forme j, non déposée dans le local,
C3i,j : fraction des aérosols du radionucléide i, sous la forme j, non déposée dans les voies de rejet,
i = radionucléide i,
j = forme physico-chimique j du radionucléide i.

ETUDES EXPERIMENTALES – MATERIAUX ET METHODES

Matériaux utilisés

Les travaux considérés ici se concentrent sur la dégradation des polymères constitutifs des boîtes à gants, à savoir le PMMA (polyméthacrylate de méthyle), plus connu sous l’un de ses noms commerciaux « Plexiglas », et le polycarbonate de bisphénol-A ou poly(4,4- isopropylidènediphénylcarbonate), dont l’un de ses noms commerciaux est « Lexan ». Ces deux matériaux sont des polymères amorphes transparents utilisés pour fabriquer les parois de boîtes à gants. Ce sont les plus présents en masse dans une boîte à gants. On rencontre également d’autres matières combustibles potentiellement contaminées dans les boîtes à gants, mais dans des proportions beaucoup plus faibles :

● Polychloroprène (gants),
● Polystyrène (joints de gants),
● Cellulose (mouchoirs en papier).

Le comportement du PMMA est de type non-charring (aucun résidu ne subsiste après la dégradation thermique, (SFPE Handbook, 2002)), alors que le PC est décrit comme intumescent (un résidu charbonné se forme et gagne en volume au cours de la dégradation (SFPE Handbook, 2002)).

La dégradation thermique des polymères dépend à la fois du polymère lui-même et de son environnement. Le PMMA synthétisé par voie radicalaire (la méthode la plus couramment rencontrée dans l’industrie) présente un comportement en dégradation thermique différent en fonction de la présence ou non d’oxygène (Kashiwagi et al., 1986, Laachachi, 2005). En absence d’oxygène, la dégradation se produit essentiellement par dépolymérisation, suivant une séquence de réactions (Manring : 1988, 1989, 1991 ; Manring et al., 1989) aboutissant à la production de monomère (méthacrylate de méthyle) gazeux (Ferriol et al., 2003) :
● scission des doubles liaisons en bout de chaînes,
● scission des liaisons anormales dites « tête à tête »,
● dégradation par transfert radicalaire à l’extrémité insaturée des chaînes polymères,
● scission aléatoire.

L’effet de la présence d’oxygène sur cette séquence réactionnelle n’est pas encore parfaitement bien compris. En particulier, l’oxygène peut, en agissant sur les radicaux, stabiliser ou favoriser la dégradation thermique en fonction de la température (Song et al., 1992 ; Laachachi, 2005).

A contrario, le polycarbonate se dégrade par une combinaison de rupture aléatoire de chaîne et de réticulation (Davies & Golden, 1965) ; la réticulation est une réaction des chaînes polymères, qui vont se brancher les unes aux autres pour donner à la suite de la dégradation thermique une structure solide charbonnée qu’on appelle char. Ce résidu, qui représente environ 24 % de la masse initiale  (van Krevelen, 1975), présente une structure poreuse car il se forme en même temps que les bulles de gaz de pyrolyse, composé notamment de CO2, de phénols, de carbonates, de méthane et de benzène (Feng et al., 2012). Là encore, l’influence de l’oxygène a été étudiée (Jang & Wilkie, 2005). Il apparaît, comme pour le PMMA, que l’oxygène modifie le phénomène de dégradation thermique, d’une part en favorisant le démarrage de la réaction et d’autre part en causant une oxydation du char à haute température. A défaut de pouvoir connaître spécifiquement le matériau utilisé pour la construction des boîtes à gants des INB, nous utiliserons les données présentées dans ce tableau, qui correspondent à des polymères sans additifs. La littérature comporte plusieurs études (dont Laachachi et al., 2005, Cinausero et al., 2008, Feng et al., 2012, Friederich et al., 2012) sur l’effet de certains additifs sur la dégradation thermique des matériaux.

Dispositifs

Mode et type de contamination

Les boîtes à gants présentes dans les usines et les laboratoires sont contaminées par les matières manipulées, majoritairement des poudres d’oxyde d’uranium UO2 et de plutonium PuO2 (Dorrian & Bailey, 1995, Vishwa Prasad et al., 2010). Afin de représenter la combustion de boîtes à gants contaminées, il est nécessaire de choisir un matériau simulant le comportement du contaminant. Généralement, dans les études macroscopiques, le choix du simulant est rarement justifié de façon physique. Néanmoins, nous pouvons identifier différents critères qui impactent le comportement des particules dans le contexte d’un incendie.

Le comportement thermochimique des matières soumises à des températures élevées est un paramètre important car nous pouvons nous attendre à des transformations physicochimiques comme dans le cas de l’oxyde d’uranium UO2 qui s’oxyde à des températures couramment rencontrées en situation d’incendie (Bouilloux, 1998, Creton et al. 2009, Poulesquen et al. 2007). Le PuO2 présente une stabilité thermique très élevée, il s’oxyde seulement au-dessus de 1800°C (Bouilloux, 1998). Dans un premier temps, il apparaît que le plus simple est d’étudier un contaminant thermiquement stable pour identifier les phénomènes physiques et les découpler d’éventuelles transformations physico-chimiques liées à l’oxydation. L’étude des transformations des contaminants tels que l’UO2 interviendra dans un second temps.

La granulométrie des particules impliquées est également un paramètre important à prendre en compte. Diverses études se sont attachées à caractériser la granulométrie des particules radioactives dans les installations nucléaires (Dorrian & Bailey, 1995, Cheng et al., 2004, Vishwa Prasad et al., 2010). Ces travaux donnent des valeurs de diamètres aérodynamiques médians en activité (DAMA) comprises majoritairement dans la gamme 1- 10 µm, avec un écart-type géométrique σg entre 1,4 et 3,7. Les valeurs observées correspondent aux recommandations de l’International Commission on Radiological Protection (ICRP) qui préconise une valeur par défaut pour l’exposition des travailleurs de 5 µm (DAMA) avec un écart-type σg=2,5 (ICRP, 1994). Le diamètre aérodynamique médian en activité peut être converti en diamètre aérodynamique médian en masse via l’activité spécifique (activité par unité de masse de contaminant) .

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Table des matières

INTRODUCTION
I. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE ET ETAT DE L’ART
I.1 Périmètre de la problématique
I.2 Etudes expérimentales – matériaux et méthodes
I.2.1 Matériaux utilisés
I.2.2 Protocoles expérimentaux
I.2.3 Dispositifs
I.3 Installations à petite échelle
I.3.1 Travaux d’Halverson, Ballinger et Dennis
I.3.2 Travaux de Pickering
I.3.3 Travaux de Fernandez
I.3.4 Travaux réalisé à l’IRSN
I.4 Installations à grande échelle
I.4.1 Travaux de Fernandez
I.4.2 Travaux de Buijs & Chavanne de Dalmassy
I.5 Analyse comparative des différentes études
I.5.1 Fraction mises en suspension
I.5.2 Cinétique d’émission
I.5.3 Analyse critique de l’état de l’art
I.6 Conclusion
II. MATERIAUX ET DISPOSITIFS EXPERIMENTAUX
II.1 Matériaux
II.1.1 Caractéristiques du polymère
II.1.2 Caractéristiques physiques et granulaires des particules
II.2 Dispositifs expérimentaux
II.2.1 Dispositif de dépôt
II.2.2 Dispositif de dégradation thermique
III. ETUDE EXPERIMENTALE DE LA MISE EN SUSPENSION
III.1 Etude macroscopique
III.1.1 Qualification de l’installation ARTEMIS
III.1.2 Résultats expérimentaux de mise en suspension
III.1.3 Récapitulatif des résultats macroscopiques
III.2 Etude microscopique
III.2.1 Piégeage des particules
III.2.2 Flux de bulles
III.2.3 Emission des particules
III.2.4 Conclusion sur les essais à l’échelle microscopique
IV. ETUDE THEORIQUE ET MODELISATION DU PHENOMENE
IV.1 Problématique posée et structure générale du modèle
IV.2 Modélisation de la dégradation thermique – ThermaKin
IV.3 Modélisation des phénomènes induits par la dégradation thermique
IV.3.1 Données d’entrée et importance du couplage
IV.3.2 Piégeage des particules
IV.3.3 Mise en suspension par bullage
IV.3.4 Remise à disposition des particules piégées et bilan de masse
IV.3.5 Entraînement des particules mises en suspension
IV.4 Méthodologie de codage et interfaçage entre les codes
V. RESULTATS EXPERIMENTAUX ET VALIDATION DU MODELE
V.1 Validation du modèle de dégradation thermique
V.2 Validation du modèle de piégeage
V.2.1 Variation de flux thermique
V.2.1 Variation de granulométrie
V.3 Validation du modèle de mise en suspension
V.3.1 Alumine
V.3.2 Carbure de tungstène
V.4 Conclusion de la comparaison
VI. CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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