Etude de l’influence de la porosité sur les propriétés électriques de dépôts réalisés par projection plasma

En 2000, le pétrole assurait à lui seul, plus de 39 % des besoins énergétiques français. Son importance dans notre économie et notre mode de vie justifie la concurrence actuelle et la recherche constante d’innovations dans le secteur pétrolier. Celles-ci permettent par exemple, de localiser de plus en plus précisément les roches riches en hydrocarbures ou encore d’en accroître le taux de récupération (actuellement 25 à 30 %). La société SCHLUMBERGER fournit des services techniques aux compagnies pétrolières pour les aider à localiser et produire les hydrocarbures. Pour cela, elle conçoit notamment des sondes géologiques destinées à mesurer les paramètres physiques des formations rocheuses. Pour effectuer ces mesures, deux électrodes (au minimum) conductrices sont nécessaires. Un matériau isolant doit être incorporé entre les différents éléments métalliques de la sonde. Ce matériau doit pouvoir supporter les conditions sévères d’utilisation de ces sondes (de – 55°C à + 185°C, 1500 bar, milieux corrosifs,…) tout en conservant ses propriétés isolantes.

Les céramiques sont des matériaux très réputés pour leurs propriétés d’isolation tant thermique (céramiques réfractaires) qu’électrique (céramiques diélectriques) ainsi que pour leur grande stabilité chimique. Elles constitueraient donc des matériaux particulièrement adaptés pour les sondes géologiques. Cependant, leur coût de production, la difficulté pour les mettre en forme ainsi que leur grande fragilité limitent leur utilisation sous forme de pièces massives et incitent à les développer sous forme de revêtements. Les pièces revêtues gardent aussi les propriétés internes du substrat, généralement métallique, tout en bénéficiant en surface des propriétés de la céramique.

La projection plasma est le procédé le plus utilisé pour réaliser ces dépôts céramiques. Pourtant, les dépôts plasma présentent une microstructure très particulière, riche en défauts. Les différents défauts cristallins et impuretés sont connus pour accroître la conductivité des céramiques, ce qui pourrait constituer un frein à l’usage de ces matériaux. Cependant, la projection plasma est le seul procédé permettant de réaliser des dépôts épais, sur de grandes surfaces pour un coût économique acceptable. Depuis 1997, dans le cadre d’une collaboration entre le centre Schlumberger Riboud Product Centre de Clamart et le Centre de Compétence en Projection Plasma (C2P) de l’Ecole des Mines de Paris, la possibilité d’utiliser ces matériaux est étudiée. Ces revêtements céramiques (en alumine pour cette étude) réalisés par projection plasma serviraient de composants isolants pour améliorer les performances des sondes géologiques.

Propriétés électriques des céramiques

Conduction électrique dans les céramiques

La physique du solide permet de distinguer trois familles de matériaux en fonction de leur structure électronique, suivant comment sont organisées et remplies d’électrons leurs bandes de valence et de conduction [KIN 60] (Figure I.1). Il existe des céramiques dans chaque famille [ALI 79].

Les matériaux métalliques sont caractérisés par une structure électronique où les électrons ne sont pas liés à un atome en particulier. Ils sont de bons conducteurs électriques. Le graphite, habituellement inclus dans les matériaux céramiques, ainsi que quelques carbures, se comportent, du point de vue électronique, comme des métaux.

Les matériaux semi-conducteurs caractérisés par l’existence d’un domaine d’énergies interdites entre les bandes de valence et de conduction. L’énergie minimale nécessaire à un électron excité pour passer de la bande de valence à la bande de conduction s’appelle l’énergie de « gap » Eg, ou largeur de bande interdite. Pour les semi-conducteurs, celle-ci est inférieure à 3 eV. A température nulle (0 K), la bande de valence est complètement remplie et la bande de conduction vide. A une température plus élevée, le gain d’énergie d’origine thermique permet aux électrons d’atteindre la bande de conduction. Le matériau devient alors conducteur. Ceci se produit pour les matériaux semi-conducteurs dits intrinsèques (Figure I.2). La présence d’impuretés dans le matériau perturbe le réseau cristallin et peut introduire des niveaux d’énergie intermédiaires dans la bande interdite. Ces niveaux peuplés de charges réduisent la quantité d’énergie nécessaire aux électrons pour quitter la bande de valence (semi-conducteur de type p : impureté de type accepteur ; pour l’alumine : Mg, Fe, Co, V, Ni) ou pour atteindre la bande de conduction (semi conducteur de type n : impureté de type donneur ; pour l’alumine : Ti, Si, Zr, Y [KRO 83]). Lorsque le transfert de charge est régi par les impuretés, on parle de semi conducteurs extrinsèques (Figure I.2). Cette sensibilité de la conduction électrique vis-à-vis de la température et du taux d’impuretés, fait que ces matériaux semi conducteurs sont très utilisés dans l’industrie microélectronique.

Un matériau isolant électrique peut-être considéré comme un semi-conducteur ayant une largeur de bande interdite d’au moins 3 eV. L’alumine est un matériau isolant : son énergie de gap est égale à 9,6 eV. Les charges présentes dans le matériau sont alors des trous dans la bande de valence et des électrons dans la bande de conduction.

Le seul isolant incontestable est le vide absolu. Un isolant parfait serait un matériau qui ne présenterait strictement aucune conduction dans un champ appliqué constant. Ce matériau ne contiendrait pas d’autres charges que les noyaux atomiques et les électrons des couches internes et des couches de valence complètes ou contiendrait des charges qui resteraient immobiles dans le champ. Les ionisations dues au rayonnement cosmique empêchent de peu les matériaux polymères de réaliser la première condition. La deuxième ne peut-être satisfaite que dans un environnement non cristallin. Malheureusement, les matériaux polymères n’ont pas toujours les propriétés mécaniques, thermiques, et de stabilité chimique pour répondre à toutes les applications. Dans de nombreux cas, les céramiques comme l’alumine sont préférentiellement choisies.

Caractérisation des propriétés électriques

Le terme « propriétés électriques » est vaste et comprend un grand nombre de grandeurs physiques susceptibles de les décrire. Nous nous limiterons ici à la description de celles utilisées pour les matériaux isolants réalisés par projection plasma, c’est-à-dire la conductivité (ou résistivité), la permittivité diélectrique et la rigidité diélectriques.

Résistivité 

La mesure de la résistivité d’un matériau isolant est très délicate. R. COEHLO a dit : « Malgré beaucoup d’efforts récents pour mesurer de façon indiscutable le courant permanent circulant au travers et à la surface des isolants, et au risque d’être prochainement contredit, force est de constater aujourd’hui qu’il s’agit là d’un des domaines où la fiabilité des résultats expérimentaux n’a pas suivi les progrès de la théorie » [COE 93]. Il existe une grande variété de types de mesures. Nous nous limiterons ici à présenter la plus simple qui est aussi la plus utilisée pour caractériser les dépôts plasma. Il en existe cependant plusieurs autres ([MEN 97] et [KAR 01]).

Tenue au claquage

Les céramiques diélectriques à base d’alumine sont couramment utilisées pour l’isolation haute tension. Le facteur limitant leur utilisation est le claquage diélectrique. Ce phénomène catastrophique conduit à une forte détérioration des propriétés mécaniques et diélectriques d’un isolant car associée à une fusion et une évaporation locale du matériau. Un défaut macroscopique de la forme d’un tunnel traverse alors le matériau de part en part.

La mesure de la tenue au claquage consiste à appliquer aux bornes d’un matériau isolant à l’aide d’électrodes, un champ électrique d’intensité croissante jusqu’à ce que le champ électrique atteigne une valeur seuil au delà de laquelle le matériau laisse passer le courant (on dit alors qu’il y a claquage). Ce champ seuil ramené à l’épaisseur du matériau est appelé rigidité diélectrique (en V.m⁻¹). La rigidité diélectrique est une des grandeurs les plus mesurées, normalisées et étudiées dans le domaine des isolants. C’est la plus mesurée pour les dépôts plasma, alors que les champs électriques mis en jeu lors de cette mesure sont élevés par rapport à ceux des conditions d’utilisation.

Lorsque des charges sont injectées dans un matériau isolant, il s’y produit une accumulation d’électrons et de trous. Ces charges induisent une polarisation et une déformation locale du réseau cristallin du matériau : accumuler des charges revient à accumuler de l’énergie. La résistance au claquage diélectrique dépend de la capacité du matériau à stabiliser ces charges. Lorsqu’il ne peut plus en stocker de supplémentaires, celles-ci peuvent se déstabiliser (quitter les pièges) brutalement et amorcer le claquage. L’énergie alors libérée est suffisante pour fondre et vaporiser localement le matériau [MEY 03].

Il existe plusieurs théories du claquage diélectrique.

Le claquage intrinsèque par avalanche d’électrons se produit lorsque le champ appliqué excite suffisamment les électrons de la bande de valence pour qu’ils puissent atteindre la bande de conduction et provoquer l’ionisation du matériau. Ce phénomène ne peut se produire avec l’alumine car il n’est observé que pour les matériaux à bande interdite étroite (inférieure à 3 eV) [CAR 88].

Le claquage thermique dépend des propriétés thermiques du matériau isolant. Lorsqu’un courant traverse un matériau très légèrement conducteur, l’effet Joule l’échauffe. Or, la conductivité d’un matériau augmente avec sa température. L’élévation de la température entraîne à son tour une augmentation du courant, qui augmente l’effet Joule, etc. Si la chaleur accumulée dans le matériau ne s’évacue pas suffisamment vite, un emballement thermique se produit alors pouvant conduire à la destruction du matériau lorsque, en certains endroits, celui-ci atteint sa température de fusion. Ce phénomène est observé pour des alumines déjà chaudes (à des températures généralement supérieures à 900°C [YOS 81]).

La porosité des céramiques peut également être la cause d’un claquage diélectrique par décharge lorsque le champ provoque une ionisation des gaz occlus. Ce phénomène est rencontré pour des matériaux ayant un taux de porosité supérieur à 5% [LIE 99].

Dans leurs travaux, G. BLAISE et C. LE GRESSUS [BLA 92-2] ont attribué l’origine du claquage diélectrique à la déstabilisation de la charge d’espace par une relaxation brutale de l’énergie de polarisation. Les charges injectées dans un matériau et piégées dans des sites forment une charge d’espace. Cette charge induit une polarisation du matériau qui reste stable tant que les charges restent en place. Si une perturbation extérieure (impulsion de champ électrique, variation locale de potentiel, choc mécanique ou thermique) vient libérer une partie des charges, un champ électrique apparaîtra localement autour de la zone dépeuplée. Ce champ à son tour provoquera un « dépiégeage » qui se propagera à l’ensemble des charges. Cette brusque relaxation de l’énergie de polarisation peut atteindre 5 à 10 eV et provoquer localement la fusion du matériau.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Glossaire
I. Eléments bibliographiques
I.1. Propriétés électriques des céramiques
I.1.1. Conduction électrique dans les céramiques
I.1.2. Transport des charges dans l’alumine
I.1.3. Caractérisation des propriétés électriques
I.1.3.1. Résistivité
I.1.3.2. Impédance et permittivité
I.1.3.3. Tenue au claquage
I.2. Céramiques projetées plasma
I.2.1. Mode de mise en forme des céramiques
I.2.2. Projection thermique
I.2.2.1. Principe du procédé
I.2.2.2. Source de chaleur
I.2.2.3. Atmosphère environnante
I.2.2.4. Nature du substrat
I.2.3. Projection par plasma d’arc soufflé
I.2.3.1. Torche à plasma d’arc soufflé
I.2.3.2. Choix de l’atmosphère de projection
I.2.3.3. Choix du plasma
I.2.4. Porosités de dépôts plasma céramiques
I.2.4.1. Etalement des particules
I.2.4.2. Porosité globulaire et défauts de contacts
I.2.4.3. Fissures
I.2.5. Caractérisation de la porosité
I.2.5.1. Mesures physiques non destructives
I.2.5.2. Observation bi- et tri-dimensionnelle
I.2.5.3. Modélisation et Simulation
I.3. Propriétés électriques des céramiques projetées
I.3.1. Céramiques utilisées
I.3.2. Influence des impuretés
I.3.3. Influence de la porosité
I.4. Conclusion
I.5. Références bibliographiques du Chapitre I
II. Matériaux et procédés
II.1. Matériaux
II.1.1. Poudres
II.1.2. Substrats
II.1.2.1. Obtentions de lamelles au sein d’un dépôt
II.1.2.2. Obtention de lamelles individuelles
II.2. Projection plasma
II.2.1. Installation de projection
II.2.2. Nature du plasma
II.2.3. Distance de projection
II.2.4. Montages
II.2.4.1. Montage utilisé pour l’obtention de lamelles individuelles
II.2.4.2. Montage plan pour APS
II.2.4.3. Montage cylindrique pour HPPS
II.3. Analyse microstructurale
II.3.1. Mesures de la porosité par la méthode des 3 pesées
II.3.2. Microscopie couplée à l’analyse d’images
II.3.2.1. Observation de surfaces
II.3.2.2. Observation de coupes
II.3.3. Mesures de microdureté
II.4. Caractérisation des propriétés électriques
II.4.1. Mesure de résistivité
II.4.2. Mesure d’impédance et de constante diélectrique
II.4.3. Mesure d’impédance en milieu liquide
II.4.3.1. Montage
II.4.3.2. Principe
II.4.4. Mesure de stockage de charges : la méthode SEMME
II.4.4.1. Principe de la mesure
II.4.4.2. Paramètres utilisés
II.4.4.3. Echantillons utilisés
II.5. Simulation tridimensionnelle de la microstructure et de ses propriétés
II.5.1. Création d’une image tridimensionnelle
II.5.2. Prévision des propriétés électriques
II.6. Références bibliographiques du chapitre II
III. Etude de la porosité des dépôts projetés
III.1. Microstructure des dépôts
III.2. Etude des pores
III.2.1. Evolution du volume relatif occupé par les pores en fonction de la granulométrie de la poudre
III.2.2. Evolution du volume relatif occupé par les pores en fonction de la distance de
projection
III.2.3. Evolution du volume relatif occupé par les pores en fonction du plasma
III.2.4. Conclusion
III.3. Etude des fissures
III.3.1. Evolution de la fissuration en fonction de la granulométrie de la poudre
III.3.2. Evolution de la fissuration en fonction de la distance de projection et du plasma
III.3.3. Conclusion
III.4. Conclusion
III.5. Références bibliographiques du chapitre III
IV. Propriétés électriques des dépôts
IV.1. Choix de 6 microstructures différentes
IV.2. Résistivités des dépôts
IV.2.1. Mesures de résistivités
IV.2.2. Résultats et interprétations
IV.2.2.1. Montage en série
IV.2.2.2. Montage en parallèle
IV.3. Mesure d’impédances et de constantes diélectriques
IV.3.1. Mesures d’impédance en atmosphère sèche
IV.3.1.1. Résultats
IV.3.1.2. Montage en série
IV.3.1.3. Montage en parallèle
IV.3.1.4. Discussion
IV.3.2. Mesures d’impédance en milieu liquide
IV.3.2.1. Mesures
IV.3.2.2. Interprétation des diagrammes de Nyquist
IV.3.2.3. Mesures après passage sous pression (imprégnation forcée)
IV.3.2.4. Conclusion
IV.4. Mesures SEMME
IV.4.1. Injections en surface
IV.4.1.1. Etude du courant de masse
IV.4.1.2. Etudes des miroirs
IV.4.2. Injections sur des coupes
IV.4.2.1. Etude du courant de masse
IV.4.2.2. Observation des miroirs
IV.4.2.3. Discussion
IV.4.3. Conclusion
IV.5. Conclusion
IV.6. Références bibliographiques du chapitre IV
V. Simulation tridimensionnelle de la microstructure
V.1. Etude de lamelles réelles
V.1.1. Morphologie des particules étalées sur un substrat lisse chauffé à 300°C
V.1.1.1. Répartition au sein du dard plasma
V.1.1.2. Microstructure des lamelles
V.1.1.3. Evolution de la morphologie des lamelles en fonction de la granulométrie de
la poudre projetée
V.1.1.4. Evolution de la morphologie des lamelles en fonction de la distance de
projection et de la puissance du plasma
V.1.1.5. Conclusion
V.1.2. Morphologie des particules étalées sur un dépôt
V.2. Simulation tridimensionnelle de la microstructure d’un dépôt
V.2.1. Simulation d’une particule
V.2.1.1. Particules étalées
V.2.1.2. Particules infondues
V.2.2. Simulation de l’empilement
V.2.2.1. Principe
V.2.2.2. Vérification expérimentale
V.2.3. Simulation des pores
V.2.4. Simulation de la fissuration
V.2.4.1. Fissures inter-lamellaires
V.2.4.2. Fissures intra-lamellaires
V.2.5. Simulation complète de la microstructure
V.3. Application : prévision des propriétés diélectriques du dépôt
V.3.1. Maillage de l’image 3D
V.3.2. Calcul de la permittivité
V.4. Conclusion
V.5. Références bibliographiques
CONCLUSION GENERALE

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