Ce travail est une recherche approfondie sur le couplage de la rhéologie, la tribologie et le pompage des bétons.
Sous les conditions de pompage normales, l’écoulement du béton dans la tuyauterie peut être considéré comme un régime laminaire. Théoriquement, les propriétés de cet écoulement peuvent être prédites en prenant en compte les paramètres rhéologiques du béton frais. Cependant, en réalité, cette prédiction n’est jamais correcte sans prendre en considération le comportement multiphasique du matériau. En effet, quand le béton est soumis à un gradient de cisaillement, ce comportement peut engendre un écoulement non homogène. Notamment, au contact avec la paroi du tuyau où le taux de cisaillement est maximal, la rhéologie de béton diminue fortement. En conséquence, une couche limite qui contient des matériaux fins se développe à cet endroit. Cette couche a une épaisseur estimée entre 2 mm et 9 mm et a des paramètres rhéologiques nettement inférieurs comparés au bloc de béton. C’est la raison pour laquelle la couche limite joue le rôle d’un lubrificateur qui permet au bloc de béton de glisser sur la paroi. Pratiquement, si l’existence de cette couche est négligée on surestimera les pertes de charge. Ainsi, la prédiction de la pression de pompage sera incorrecte.
L’effet de la couche limite est bien confirmé par quelques études. Cependant, la plupart de ces études se concentrent sur le béton traditionnel. Pour ce matériau, les propriétés de la couche limite peuvent être indirectement étudiées par le biais des essais tribologiques. Alors que pour le béton auto plaçant, des essais tribologiques ne sont pas évident à réaliser.
La technique de pompage
Le pompage du béton est une des techniques de mise en place du matériau utilisée depuis presque un siècle. Actuellement, elle est largement employée en construction neuve, en réhabilitation, réparation et transport de courte distance. La technique consiste à utiliser un système de pompage composé d’un ou plusieurs pompes et à refouler le béton dans une tuyauterie conduisant le béton à l’endroit désiré. Ainsi, nous pouvons citer quelques ouvrages très connus pour lesquels cette technique a été utilisée:
La grande arche de la défense
Les méga poutres ont été coulées sur place en pompant le béton à travers un système de tuyauterie allant jusqu’à 400 m de long et 130 m de haut. Le béton était pompé avec un débit de 40m3 par heure et une pression de 60 bars.
Le tunnel du TGV méditerranée à Marseille
C’est un chantier en zone urbaine donc le nombre de puits d’accès au sous-sol est limité. De plus, le gabarit réduit du tunnel avait rendu presque impossible l’utilisation des camions toupies pour le bétonnage. Ces toupies devaient parcourir une longue distance et transporter un volume important de béton. En conséquence, la solution pompage a été retenue pour la réalisation du tunnel. Le béton a, donc été pompé depuis deux puits espacé de presque 4 km. La pression a atteint 200 bars, ce qui a nécessité l’emploi des tuyauteries de haute pression ayant des diamètres de 120mm. Le débit enregistré était de 25 m3 par heure et le volume de béton pompé de 200 m3 par plot. Une pompe de distribution a été utilisée pour assurer la répartition du béton au droit des ateliers de bétonnage.
La tour Khaliffe à Dubai
C’est un ouvrage record par rapport à sa hauteur et par rapport au pompage du béton. C’est une tour de plus de 800 mètres de haut (600 mètres en béton suivie d’une partie métallique de plus de 200 mètres). Elle est basée sur une superficie totale d’environ 465 000 mètres carrés. La technique de pompage sans reprise a été retenue pour la structure béton. La pression de pompage nominale est de 200 bars. La tuyauterie de diamètre 150 mm est renforcée pour résister à la pression ainsi qu’à l’abrasion. Pour atteindre la partie la plus haute de la tour, le béton doit être acheminé dans les canalisations pendant 35 minutes.
Le système de pompage
Pompe
Selon Weber (1963) la première pompe à béton a été développée en 1913 aux états unis (Figure 1-4a). Le principe de fonctionnement de cette pompe est basé sur un piston poussé par une force mécanique. Le béton est remplie dans la trémie est puis distribué dans le ou les pistons qui se trouvent en dessous de la trémie par un mécanisme à guillotine (Figure 1-4b). Cependant cette pompe reste un prototype à cause d’un défaut de conception. 20 ans plus tard, la technique de pompage s’est beaucoup développée grâce à la naissance des premières pompes commerciales. Le développement a été boosté grâce au mécanisme hydraulique qui a remplacé l’ancien mécanisme mécanique ainsi qu’au principe de pompe à deux pistons pour augmenter la puissance (Weber, 1963).
Actuellement, les pompes sont divisées en deux catégories.
● La première catégorie
Il s’agit des pompes à pistons dont le principe est le même que celui décrit précédemment. Ce type de pompe permet d’obtenir des débits importants. Pour augmenter un peu plus ces derniers, un système de doubles pistons alternatifs est souvent utilisé. Il s’agit de deux pistons avec un décalage de phase. Quand un piston expulse le béton, le deuxième en aspire de la trémie. Ensuite, avec un système de valve, le béton est dirigé vers la sortie de la pompe .
● La deuxième catégorie
Cette catégorie concerne les pompes à rotor. Par rapport au premières, celles-ci permettent de pomper en continue. En conséquence, les pertes de bétons résiduels et les risques de bouchons sont diminués. Le système se compose d’un tuyau souple placé sous vide dans une chambre cylindrique et d’un rotor muni de deux ou trois rouleaux de compression péristaltique (Figure 1-6). Le mouvement péristaltique du tuyau crée par la rotation du rotor fait avancer le béton. A cause de sa faible puissance et de son faible débit cette pompe ne s’utilise qu’en cas de pompage délicats de bétons spéciaux: le béton léger, le mortier, etc… La seule pièce à remplacer est le tuyau souple avec une durée de vie d’environ 100 heures de travail suivant la nature du béton à pomper.
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Table des matières
INTRODUCTION
Chapitre 1 : Etude bibliographique
1. La technique de pompage
1.1. Le système de pompage
1.1.1. Pompe
1.1.2. Tuyauterie
1.2. Relation pression-débit
1.3. Problèmes rencontrés lors du pompage
1.3.1. Amorçage de la tuyauterie de pompage
1.3.2. Stabilité du béton sous pression
2. Rhéologie du béton frais
2.1. Introduction
2.2. Lois de comportement rhéologique
2.3. Influence des paramètres de compositions sur la rhéologie
2.3.1. Influence des compositions
2.3.2. Influence du malaxage sur la viscosité plastique
2.4. Relation entre rhéologie et pompage
2.5. Rhéométrie
2.5.1. Méthode de rotation
2.5.1.1. Les rhéomètres à cylindres concentriques
2.5.1.2. Les rhéomètres à plaques parallèles
2.5.1.3. Les rhéomètres à cône et plaque
2.5.1.4. Rhéomètre type malaxeur
2.5.2. Méthode de tube
2.5.2.1. Viscomètre à capillaire
2.5.2.2. Viscosimètre à extrusion capillaire
2.5.3. Comparaison des rhéomètres de béton
2.6. Rhéomètres utilisés
2.7. Conclusion
3. Tribologie du béton frais
3.1. Introduction
3.2. Relation entre la rhéologie, la tribologie et le pompage
3.3. Tribométrie
3.4. Tribomètre utilisé
4. Couche limite et les effets sur le pompage
4.1. Introduction
4.2. Caractéristiques de la couche limite
4.3. Effets sur le pompage
5. Techniques de mesure du profil de vitesse d’écoulement des fluides
5.1. Technique de mesure pour une conduite fermée
5.1.1. Imagerie par Résonance Magnétique
5.1.2. Ondes ultrasonores – effet Doppler
5.2. Technique de mesure à surface libre
5.2.1. Vélocimétrie Laser Doppler
5.2.2. Vélocimétrie par Image de Particules
6. Conclusions et objectifs de recherche
Chapitre 2: Etalonnage du rhéomètre Tattersall MK-II par résolution numérique
1. Avantage du rhéomètre Tattersall MK-II
2. Inconvénient du rhéomètre Tattersall MK-II
3. Solution numérique
3.1. Outil de simulation
3.2. Equations gouvernant le comportement rhéologique du béton
3.3. Plan de simulation
3.4. Simulation du rhéomètre Contec Viscometer 5
3.4.1. Maillage
3.4.2. Résultats de simulation
3.5. Simulation du rhéomètre Tattersall MK-II
3.5.1. Maillage
3.5.2. Résultats de la simulation
3.6. Modélisation des résultats numériques
3.6.1. Méthode de modélisation
3.6.2. Résultats de la modélisation
3.6.3. Incertitude de la modélisation numérique
4. Comparaison avec le rhéomètre à mortier AntonPaar MCR-52
5. Comparaison avec le rhéomètre à béton Contec Viscometer 5
6. Discussions
6.1. Calibration par CFD
6.2. Taux de cisaillement dans le rhéomètre
6.3. Phénomène de faux rhéo-fluidifiant
7. Conclusions
Chapitre 3 : Influence des paramètres de composition sur les caractéristiques de la couche limite – Diamètre maximal des granulats
1. L’effet géométrique de la paroi
2. Formulation des bétons
3. Configuration de l’essai de mesure de profil de vitesse
3.1. Conception de l’essai
3.2. Longueur d’entrée hydrodynamique
4. Appareil de mesure
5. Déroulement de l’essai
6. Rhéologie et tribologie des matériaux étudiés
7. Résultats de la mesure de vitesse
7.1. Vérification de la longueur d’entrée hydrodynamique
7.2. Résultats de mesures du profil de vitesse par l’analyse PIV
8. Discussions
Chapitre 4 : Influence des paramètres de composition sur les caractéristiques de la couche limite – épaisseur maximale de la pâte
1. Influence de l’épaisseur maximale de la pâte
1.1. Définition de l’épaisseur maximale de la pâte
1.2. Formulation des bétons
1.3. Rhéologie des matériaux testés
1.4. Résultats de la mesure de vitesse
1.5. Discussions
2. Caractéristiques de la couche limite
2.1. Méthode de prélèvement de la couche limite du circuit de pompage
2.2. Rhéologie de la couche limite
2.3. Observations microscopiques MEB
2.4. Discussions
3. Conclusions
CONCLUSION