Étude de la structure chimique et microbiologique de l’interface air-mer

L’interface air-mer – la microcouche de surface (SML)

La microcouche de surface (SML) ou film de surface correspond à l’interface entre l’eau et l’air (Liss, 1975). L’épaisseur de la microcouche dépend de plusieurs facteurs, comme la concentration en matière organique (Cincinelli et al., 2001), les conditions météorologiques (Liu & Dickhut, 1998) et la méthodologie d’échantillonnage (Garrett, 1967a), mais est opérationnellement définie comme le premier millimètre de la colonne d’eau (Macintyre, 1974 ; Hardy, 1982 ; GESAMP, 1995 ; Liss & Duce, 1997). L’interface air-mer est le siège d’échanges de matière et d’énergie entre l’Océan et l’Atmosphère (Hunter & Liss, 1981 ; Hardy, 1982 ; Carlson, 1993 ; GESAMP, 1995 ; Liss & Duce, 1997) (Figure 1).

La microcouche reçoit des substances gazeuses, liquides (pluies) et solides (particules et aérosols) qui proviennent de l’atmosphère et des apports continentaux.

Ces substances sont transportées vers la colonne d’eau par dissolution, sédimentation et l’hydrodynamisme. Les substances dissoutes et particulaires et les microorganismes dans la colonne d’eau sont apportés à la surface par diffusion, adsorption sur des bulles de gaz, convection et par la résurgence (upwelling) de l’eau sous-jacente. L’évaporation des composés volatils et la formation, par le vent, d’aérosols et de bulles de gaz transportent les substances de la microcouche vers l’atmosphère.

La cohésion de cette interface est assurée par les propriétés tensioactives de composés organiques, particulièrement les lipides (Romano & Garabetian, 1996). Les films organiques sont présents dans tous les milieux aquatiques. En général les films de surface sont fins et invisibles à l’œil nu ; mais quand le film de surface est concentré, grâce aux mouvements des courants par exemple, les ondes capillaires sont atténuées et le film devient visible comme une nappe de surface (surface slicks) (Dietz & Lafond, 1950; Garrett, 1967 a et b; Lafond & Lafond, 1972; Cini et al., 1983; Romano & Garabetian, 1996). La stabilité physique de la microcouche, résultant de la tension de surface et des propriétés tensioactives, permet la concentration des particules en suspension, organismes et substances diverses à la surface. La microcouche est ainsi considérée comme un environnement unique, caractérisé par une forte concentration de matières organiques, telles les protéines, les acides aminés, les acides gras et les lipides (Jarvis et al., 1967 ; Larsson et al., 1974 ; Marty et al., 1988), les hydrocarbures (Garrett, 1967 a ; Marty & Saliot, 1974), les nutriments (Goering & Menzel, 1965 ; Williams, 1967), les éléments métalliques associés à du matériel organique particulaire ou dissous (Piotrowicz et al., 1972). On note également de fortes concentrations en microorganismes (Blanchard & Syzdek, 1970 ; Marumo et al., 1971 ; Tsyban, 1971 ; Dahlbach et al., 1982 ; Hardy, 1982). Le rapport des concentrations des organismes, particules, composés chimiques dans la microcouche à celles trouvées dans l’eau sous- jacente est le facteur d’enrichissement (EF). Les processus physiques, chimiques et biologiques de l’interface air-mer ne sont pas limités à la microcouche de surface. Hardy et Word (1986) ont proposé une couche de surface structurée en plusieurs strates horizontales (figure 2).

La nanocouche de surface (< ~ 1 µm) est riche en composés organiques. La microcouche (< ~ 1000 µm) présent densités élevés en particules et microorganismes et la millicouche de surface (< ~10 mm) est habitée par des petits animaux, des œufs et des larves de poissons et d’invertébrés.

Le neuston 

La plupart de microorganismes habitent aux interfaces (Costerton et al., 1985 ; Schäfer et al., 1998) . L’adhésion des bactéries sur des solides est l’objet de plusieurs études (van Loosdrecht et al ., 1987 ; Martin et al., 1992 ; Busscher et al., 1995 ; Grasso et al., 1997). Le film de surface est aussi l’habitat d’espèces planctoniques, particulièrement adaptées aux conditions spécifiques de ce milieu (Hardy, 1982 ; Hardy & Apts, 1984 ; Hardy et al., 1987).

La concentration de matière organique dans la microcouche assure la nourriture nécessaire à la croissance des organismes qui habitent cette interface : le neuston (Naumann, 1917). Virus, bactéries, petites ciliés (Zaitsev, 1971), protozoaires (Norris, 1965), levures et moisissures (Kjelleberg & Hakansson, 1977), algues, larves, œufs et représentants (organismes) de tous les principaux groupes de plantes et animaux habitent, se reproduisent et/ou se nourrissent dans les couches de surface (figure2). En général la microcouche présente une forte concentration de microorganismes, beaucoup plus importante que les eaux sous-jacentes (Dahlbach et al., 1982).

Le virioneuston

Les virus sont la forme de vie la plus abondante dans l’environnement aquatique. Leur concentration dans l’océan est probablement supérieure à 1029 virus par litre (Wilhelm & Suttle, 1999). Les études sur l’importance écologique des virus sont récentes (Proctor & Fuhrman, 1990 ; Bratbak et al., 1990 ; Thingstad et al., 1993 ; Bratbak et al., 1994 ; Suttle, 1994) et le virioneuston reste très peu documenté (Tapper & Hicks, 1998). Les virus participent activement aux flux d’énergie et de matière dans le réseau trophique microbien. L’infection virale est signalée comme la principale cause de la mortalité des procaryotes dans les écosystèmes aquatiques (Fuhrman, 1999 ; Wommack & Colwell, 2000). D’ailleurs la lyse virale transforme la biomasse en matière organique dissoute (MOD), utilisée dans la production et la respiration bactériennes (Fuhrman, 1999). Cette production de MOD par la lyse virale affecte encore la structure de la communauté bactérienne (Lebaron et al., 1999 ; Middelboe, 2000 ; Riemann et al., 2000 ; Arrieta & Herndl, 2002). Les virus infectent également des organismes unicellulaires comme les flagellés et les algues. Dans les écosystèmes marins pélagiques, entre 6% à 26% du carbone fixé par la photosynthèse est transformé en MOD par lyse virale (Wilhelm & Suttle, 1999). La mortalité des espèces dominantes par lyse virale affecte la composition des communautés microbiennes et entretient la richesse en espèces (Thingstad & Lignell, 1997). Les virus sont aussi capables de transférer des gènes entre espèces (Jiang & Paul, 1996 et 1998 ; Paul, 1999 ; Brüssow & Hendrix, 2002).

Dans les eaux de surface, l’abondance et l’infectivité des virus sont affectés par les effets nocifs des rayons UV (Suttle & Chen, 1992 ; Wommack et al., 1996 ; Noble & Fuhrman, 1997 ; Wilhelm et al., 1998 a et b). D’autre part, les radiations solaires induisent le cycle lytique dans les bactéries lysogéniques (Freifelder, 1987).

Le bacterioneuston 

La microcouche présente une importante densité de bactéries métaboliquement actives (Sieburth, 1971 ; Bezdek & Carlucci, 1972 ; Carlucci et al., 1985). Le bacterioneuston est de 100 à 1000 fois plus abondant que les communautés bactériennes de l’eau sous-jacente (MacIntyre, 1974; Dahlbach et al., 1982 ; Hardy, 1982). Les bactéries jouent un rôle fondamental dans la structure et la dynamique des réseaux trophiques et dans les cycles du carbone et des nutriments inorganiques dans les environnements marins (Cho & Azam, 1988; Azam et al., 1983 ; Schauer et al., 2000). Le bactérioplancton est responsable de la transformation du carbone organique dissous produit par le phytoplancton en carbone organique particulaire (biomasse bactérienne), qui est consommé ensuite par les flagellés et les ciliées (Azam et al., 1983). Le bacterioneuston est essentiel dans la dégradation et la minéralisation de la matière organique d’origine naturelle et anthropique dans la microcouche (Tsyban, 1971 ; GESAMP, 1995 ; Walczak et al., 2001 a et b). Le bactérioneuston joue également un rôle important dans la dégradation des polluants toxiques concentrés dans la microcouche. Bien que l’importance des bactéries soit reconnue depuis plusieurs décades (Azam 1998, Ducklow, 2000), le nombre d’espèces bactériennes présents dans le bactérioplancton reste inconnu. Pendant longtemps, la petite taille des cellules bactériennes et l’impossibilité de cultiver la plupart (>99%) des bactéries présentes dans l’environnement (Jannasch & Jones, 1959 ; Olsen & Bakken, 1987 ; Amman et al., 1995) ont rendu difficile l’étude de l’écologie et de la taxonomie bactériennes. Des nouvelles technologies, comme la cytométrie en flux et les techniques d’empreintes moléculaires, ont permis l’approfondissement des études des communautés bactériennes (Woese, 1987 ; Marie et al., 1997).

L’utilisation du gène codant l’ARNr 16S en phylogénie moléculaire (Woese, 1987) a permis une évolution significative dans le domaine de l’identification et de la taxonomie des bactéries. Les nouvelles méthodes biomoléculaires permettent une description plus précise de la diversité, de la structure et de la dynamique des communautés bactériennes (Muyzer, 1998). Pour survivre aux conditions extrêmes de forte incidence des radiations UV et d’importantes concentrations de polluants dans la microcouche, le bacterioneuston doit présenter des mécanismes de protection et/ou de résistance. L’écologie et la diversité du bacterioneuston restent peu étudiées. L’isolement des souches neustoniques peut permettre l’identification des bactéries résistantes aux radiations UV ou capables de dégrader certains polluants. Ces études présentent un grand intérêt pour les applications biotechnologiques.

Le phytoneuston 

Le phytoneuston rassemble une grande variété d’organismes de divers tailles et taxons. Les principaux composants du phytoneuston sont les cyanobactéries, les diatomées et les dinoflagellés. La cyanobactérie Trichodesmium est un organisme phytoneustonique très important dans la production primaire et la fixation d’azote atmosphérique (Carpenter & Romans, 1991 ; Letelier & Karl, 1996 ; Capone et al., 1997 ; Zehr & Ward, 2002 ; Rabouille et al., 2006). Les diatomées du genre Nitzschia et les dinoflagellés du genre Prorocentrum sont fréquemment observés dans la microcouche (Harvey, 1966 ; De Souza-Lima & Chretiennot-Dinet, 1984). Dans les eaux protégées et subissant un processus d’eutrophisation, la microcouche devient visible grâce à la forte densité (bloom) de Prorocentrum et d’autres espèces phytoneustoniques (GESAMP, 1995). Diverses études montrent que le phytoneuston présente une composition spécifique distincte de celle du phytoplancton (Willians et al., 1986 ; Hardy & Apts, 1989) .

En général le phytoneuston présente un facteur d’enrichissement qui varie entre 10 à 1000 (Nestrova, 1980 ; Hardy et al., 1988 ; Liss & Duce, 1997). Néanmoins, la photosynthèse du phytoneuston est inhibée par la forte incidence des rayons solaires dans la microcouche (Marumo et al., 1971 ; Hardy 1982 ; Willians et al., 1986). Les effets nocifs des rayons UV sur le phytoneuston sont indiqués par la forte concentration de phaeopigments retrouvée dans la microcouche (Hardy & Apts, 1984 ; Falkowska, 1999 b).

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Table des matières

Chapitre I – Introduction
I.1 L’interface air-mer – la microcouche de surface (SML)
I.2 Le neuston
I.2.1 Le virioneuston
I.2.2 Le bacterioneuston
I.2.3 Le phytoneuston
I.2.4 Le zooneuston
I.3 Les hydrocarbures de la microcouche de surface
I.4 Les radiations solaires
I.5 Objectives
Chapitre II – Présentation du site d’étude
II. Présentation du site d’étude – La Baie de Guanabara
Chapitre III – Méthodologie
III.1 Stratégie d’échantillonnage
III.2 Prélèvement des échantillons
III.3 Analyses microbiennes
III.3.1 Bactéries cultivables
III.3.2 Bactéries totales
III.3.3 Isolement de souches
III.3.4 Caracterisation moléculaire des isolats
III.3.4.1 Extraction de l’ADN
III.3.4.2 Amplification de l’ADNr 16S
III.3.4.3 Criblage génotypique des isolats par RFLP
III.3.4.4 Séquençage
III.3.5 SSCP
III.3.6 Expérience sur la résistance des souches aux radiations solaires
III.4 Analyses chimiques
III.4.1 Précautions prises au cours des manipulations
III.4.2 Séparation entre les fractions dissoute et particulaire
III.4.3 Extraction
III.4.3.1 Fraction dissoute
III.4.3.2 Fraction particulaire
III.4.4 Séparation chromatographique sur gel de silice
III.4.5 Méthodes de quantification et d’identification
III.4.5.1 Chromatographie en phase gazeuse (GC)
Chapitre IV – Résultats
IV.1 Analyses chimiques: les hydrocarbures de la microcouche de surface
IV.2 Analyses microbiennes
IV.2.1 Quantification des bactéries totales et cultivables
IV.2.2 Identification des bactéries
IV.2.3 Résistance aux radiations solaires
IV.2.3 La diversité du bactérioneuston (SSCP)
Chapitre V – Discussion
V.1 Les hydrocarbures à la microcouche de surface
V.2 Le bactérioneuston
V.2.1 Identification des souches bactériennes
V.2.2 La résistance des souches bactériennes aux radiations solaires
V.2.4 La structure populationnelle des communautés bactériennes
V.3 Discussion générale
Chapitre VI – Conclusions

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