Etude de la durée de vie par fatigue des métaux cubiques à faces centrées

Localisation de la déformation dans les métaux cubiques à faces centrées

                   Le phénomène de localisation du glissement plastique est observé depuis plus d’un siècle. L’étude de [Kuhlmann-Wilsdorf et Wilsdorf 1953] est pionnière en la matière. Le relief de surface créé suite à une traction a été étudié dans des polycristaux et monocristaux d’aluminium, de cuivre, d’argent et de laiton. Une localisation de la déformation plastique sous forme de bandes de glissement a été observée pour toutes les éprouvettes. Depuis l’apparition des techniques de microscopie en transmission, de nombreux auteurs ont étudié la structure de dislocations subsurfacique des métaux et alliages. Un très grand nombre d’études ont été publiées pour différents métaux et alliages, conditions de chargements et de températures [Fourie 1970 ; Mughrabi 1970 ; Jin 1989]. Pour certains métaux déformés cycliquement, le lien entre formation de bandes en surface et structure des dislocations à cœur est clairement établi [Wang et al. 1984 ; Mughrabi et Wang 1988 ; Kwon et al. 1989 ; Polák et al. 1992]. Un exemple est présenté sur la figure 1.2 pour un polycristal d’acier 316L à taille de grain moyenne de 100 µm, sollicité pendant 5000 cycles sous air, sous Δεp/2 = 5.10-4 [Kruml et al. 1997]. Des BGPs sont formées en surface de l’éprouvette, celles-ci engendrent des extrusions caractéristiques de la déformation cyclique des matériaux cfc. Ce point est traité en détail dans la partie 1.3.2. La figure 1.3 présente les structures de dislocations pouvant être associées à ce type de bandes. Une localisation typique des structures planaires est visible sur les figure 1.3.a et figure 1.3.f. Des bandes de glissement avec une structure en échelle sont visibles sur les figure 1.3.b-e :
– une activation de deux systèmes de glissement conduit à la formation de bandes croisées (figure 1.3.c) ;
– des macrobandes sont visibles sur la figure 1.3.d ;
– une BGP avec une structure en échelle parfaitement définie est visible figure 1.3.e
Une vaste étude bibliographique a été réalisée dans le but d’élargir le lien entre formation de bandes en surface et structure de dislocations à cœur aux cas des métaux et alliages de structures cubiques à faces centrées déformés cycliquement. L’influence de plusieurs paramètres a été établie sur la formation de bandes de glissement en surface et à cœur :
– Formation de bandes de glissement dans des métaux et alliages cfc de haute à basse énergie de faute d’empilement (nickel, cuivre, acier 316L, alliages cuivre-zinc, alliages cuivre-aluminium, argent) ;
– Microstructures de dislocation dans les bandes de glissement de ces métaux et alliages ;
– Existence des bandes à très basse température (inférieure à la température ambiante) ;
– Existence des bandes à la température ambiante ;
– Existence des bandes à haute température (supérieure à la température ambiante).
Le lien entre structure de dislocations à cœur des matériaux et traces en surface a été démontré par de nombreuses études expérimentales. Le tableau 1.1 renvoie aux principales références de cette étude bibliographique. La partie supérieure de chaque cadre dédié à un matériau donne les références où des bandes en surface sont rapportées, dans la gamme de température correspondante. La partie inférieure de chaque cadre renvoie aux observations d’une localisation du glissement à cœur. Quelle que soit la température d’essai, une localisation du glissement sous forme de bandes de glissement est observé pour cette large gamme de métaux et alliages. L’énergie de faute d’empilement agit sur le glissement dévié des dislocations [Magnin et al. 1989 ; François et al. 1993 ; Goncalves 2018]. Une forte dépendance à la température de l’énergie de faute d’empilement a été mise en avant pour les métaux (et alliages) à structure cfc par [Rémy et al. 1978]. Malgré cela, l’ensemble des métaux purs étudiés (nickel, cuivre, argent) présentent des bandes de glissement avec des structures en échelle dans les grains bien orientés, quelle que soit la température d’essai. La formation d’une structure en échelle est le signe d’un comportement dévié aisé [Bretschneider et al. 1995 ; Buque et al. 2001 ; Li et al. 2011]. Les métaux purs présentent tous un comportement dévié, plus ou moins favorisé par l’énergie de faute d’empilement. Malgré l’influence de l’énergie de faute d’empilement sur le glissement dévié, certains des alliages étudiés (316L, alliages Cu-Zn et Cu-Al) présentent des structures planaires ou des structures en échelles dans les grains bien orientés. La formation des structures planaires est la conséquence du glissement difficile des dislocations vis [Lukáš et al. 1992a ; 1992b ; Li et Laird 1994c]. En fonction de la composition chimique de ces alliages, le caractère planaire ou dévié des dislocations est alors favorisé. Une compétition entre énergie de faute d’empilement et ordre à courte distance (short range order, SRO) se produit [Gerold et Karnthaler 1989a ; Li et al. 2011]. Une faible énergie de faute d’empilement n’est pas forcément responsable d’un glissement planaire des dislocations [Gerold et Karnthaler 1989a]. L’ordre à courte distance (SRO) devient le paramètre prépondérant sur le caractère planaire ou dévié du glissement [Gerold et Karnthaler 1989a ; Li et al. 2011].

Extrusion ou extrusion-intrusion des bandes de glissements persistantes intragranulaires

                 Les extrusions et extrusions-intrusions des BGPs intragranulaires sont les plus observés par l’ensemble de la communauté scientifique et donc les mieux documentés et [Kim et al. 1991 ; Mineur 2000 ; Mu et al. 2013]. Ces bandes se forment dans des grains dont les vecteurs nprim et mprim (du système primaire) forment un angle proche de 45° avec la surface libre de l’éprouvette (figure 1.8). Ces grains sont qualifiés de grains de type B (nomenclature définie par [Brown et Miller 1973]). Cette configuration semble maximiser l’extrusion des BGPs à travers la surface libre des éprouvettes. Ces extrusions sont visibles sans préparation spécifique de la surface des structures/éprouvettes. Dans le but de les observer avec une précision nanométrique, une préparation minutieuse de la surface des éprouvettes est alors nécessaire (typiquement un polissage mécanique de type polimiroir) suivi d’un polissage électrolytique [Man et al. 2015]. [Man et al. 2003b] ont étudié les extrusions intragranulaires de quelques BGPs sélectionnées dans un polycristal d’acier 316L présentant une taille de grain moyenne de 100 µm.  Afin d’obtenir les hauteurs d’extrusions de ces BGPs pour différents nombres de cycles, la sollicitation cyclique a été stoppée le temps de réaliser des répliques extractives de la surface des éprouvettes. Ces répliques ont ensuite été analysées au microscope à force atomique (AFM), qui permet d’accéder au relief de surface, avec une précision quasi nanométrique (figure 1.9.b). Dès 20 cycles, les premières traces de localisation du glissement sont visibles en surface. Dès 100 cycles, la croissance des BGPs débute. A partir de 500 cycles, les BGPs s’extrudent à travers la surface libre à une vitesse constante moyenne de 0,025 nm/cycle (figure 1.9.b). Le profil typique des BGPs en surface est schématisé sur la figure 1.9.a. Les dimensions caractéristiques des BGPs sont décrites, à savoir leur longueur L (équivalente à la taille de grain) et leur épaisseur t tenant compte de l’angle qu’elles forment avec la surface libre. Les mesures de hauteurs d’extrusions mesurées par AFM le long d’une BGP en trois positions espacées d’environ 6 µm le long de sa grande longueur sont présentées sur la figure 1.9.b.

Effet de la déformation plastique

                       La plupart des études publiées dans la littérature traitant de la formation des BGPs et de l’initiation des microfissures induites par leur activité sont pilotées en déformation imposée. L’amplitude de déformation (totale ou plastique) imposée lors d’essais cyclique affecte directement les densités et proportions des sites d’initiation des microfissures et la durée de vie des éprouvettes. Dans le cas d’essais à forte amplitude de déformation, les durées de vie mesurées expérimentalement sont les plus courtes. Les mécanismes décrits ci-dessus sont alors perturbés car la plupart des grains présentent une forte activité plastique conduisant à la formation de nombreuses BGPs [Sauzay 2006]. Les observations montrent en général que le mode d’initiation intergranulaire est majoritairement représenté. [Morrison et Moosbrugger 1997] ont étudié l’effet de la déformation plastique sur des polycristaux de nickel à taille de grains standard (en moyenne 24 µm). Les essais ont été réalisés sous air, à température ambiante à des amplitudes de déformations plastique de Δεp/2=2,5.10-4 et Δεp/2=2,5.10-3 . Les durées de vies engendrées sont respectivement de 2,2.105 et 6,4.103 cycles et les nombres de cycles à initiation des microfissures de 1,45.105 à 1,7.103 pour les faibles et fortes amplitudes de déformations plastiques. Un mécanisme d’initiation de microfissures prépondérant est associé à chaque amplitude de déformation imposée. Pour les plus faibles niveaux de déformation plastique, une initiation localisée quasi-exclusivement le long des BGPs a été observée. A noter que lors des essais à forte amplitude de déformation plastique, une initiation le long des joints de grains impactés par des BGPs a été observée, ce qui est un mécanisme différent (figure 1.16 pour l’initiation transgranulaire et figure 1.17 pour l’initiation intergranulaire). Ces résultats ont été confirmés et élargis pour des polycristaux de nickel et d’acier 316L à tailles de grains moyennes respectives de 26 µm et 47 µm [Blochwitz et Richter 1999]. Les mécanismes d’initiation de microfissures ont été étudiés pour des amplitudes de déformation plastique variant de Δεp/2=2,5.10-4 à Δεp/2=1.10-3 . Les microfissures ont été comptabilisées en fin de vie des éprouvettes et sont présentées figure 1.20. Les nombres de microfissures de différents types sont indiqués dans les barres, les pourcentages correspondants sont visibles sur l’axe des ordonnées. Les mécanismes d’initiation sont identiques dans le cas du nickel et de l’acier 316L. L’amplitude de déformation plastique joue un rôle identique dans ces deux matériaux. Seuls les nombres de microfissures détectées varient entre ces deux matériaux : elles sont beaucoup plus nombreuses dans le cas du nickel que de l’acier 316L. De fait, la durée de vie du nickel est plus faible que pour l’acier 316L. Les différents types de fissures pouvant coexister au cours de la vie d’éprouvettes en acier 316L ont été étudiés par [Bataille et Magnin 1994]. Pour cela, des éprouvettes ont été sollicitées à des niveaux de déformation plastique de Δεp/2 = 4.10-4 et Δεp/2 = 4.10-3 jusqu’à rupture, avec de nombreuses interruptions des essais suivies d’observations. Bien que leur étude ne soit pas centrée sur les mécanismes d’initiation des microfissures, leur travail est instructif car de nombreuses fissures courtes à l’échelle de la microstructure (partie 1.2) ont été comptabilisées et suivies tout au long de la vie de ces éprouvettes. Trois types de fissures ont été observés :
– Type I : fissures dont la longueur est inférieure à une taille de grains (50 µm)
– Type II : fissures dont la longueur est comprise entre une et trois taille de grains
– Type III : fissures dont la longueur est comprise entre trois et dix taille de grains
Un dernier type de fissure existe, dont la longueur est supérieure à dix tailles de grains. Le nombre de ces dernières est très limité (une à trois par éprouvette). Elles n’apparaissent qu’au cours des dix derniers pourcents de la durée de vie des éprouvettes. Leur étude est donc peu pertinente à l’échelle d’une éprouvette de laboratoire (1.2). Le nombre de fissures de type I augmente dans les deux éprouvettes jusqu’à 70% de la durée de vie (figure 1.21). Lorsque le niveau de déformation plastique croît, un plus grand nombre de fissures de type II apparait. Ceci est dû au niveau de chargement et à la plus grande densité de fissures de type I, favorisant respectivement leur propagation ainsi que leur coalescence. Une 316L Nickel Nickel 316L

Aciers 316L et 316L(N) (γEFE = 30 mJ/m²)

                 La courbe de Manson-Coffin des aciers 316L et 316L(N) à différentes tailles de grains est présentée sur la figure 1.31. De très faibles, voir aucun, effets de tailles de grains sont mesurés pour des durées de vies inférieures à 105 cycles. Pour les plus faibles amplitudes de déformation plastique, les durées de vies semblent de plus en plus dépendantes de la microstructure. Les essais à faibles tailles de grains présentent alors les plus longues durées de vies. Des facteurs très importants sont attendus en comparaison des résultats sur éprouvettes de [Schwartz 2011] et [Vincent et al. 2011] (tous deux réalisés sur la même nuance d’acier 316L(N)) et celles de [Polák et al. 1994] pour une taille de grains de 113 µm. Une nouvelle fois, les aciers 316 présentent une anisotropie élastique, ce qui favorise les effets de dispersion dans le domaine des longues durées de vies.

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Table des matières

CONTEXTE INDUSTRIEL ET OBJECTIFS
CHAPITRE 1 BIBLIOGRAPHIE ET GENERALITES SUR LA FATIGUE 
1.1 Introduction
1.2 Pourquoi l’étude des fissures microstructurellement courtes ?
1.3 Localisation de la déformation plastique et extrusions
1.4 Initiation des fissures courtes
1.5 Effet de la taille de grains et du chargement sur la durée de vie en fatigue
1.6 Conclusions
1.7 Références
CHAPITRE 2 CARACTERISATIONS MICROSTRUCTURALES ET EN FATIGUE D’UN ACIER 316L : EFFET DE LA TAILLE DE GRAINS ET DE L’EPAISSEUR D’EPROUVETTE 
2.1 Introduction
2.2 Matériaux étudiés
2.3 Essais de déformation cyclique
2.4 Effets de la taille de grains et de l’épaisseur d’éprouvette sur le comportement cyclique
2.5 Conclusions
2.6 Références
CHAPITRE 3 ESSAIS CYCLIQUES INTERROMPUS PAR DES OBSERVATIONS AU MICROSCOPE ELECTRONIQUE A BALAYAGE (MEB)
3.1 Introduction
3.2 Préparation des éprouvettes et conditions d’essais cycliques
3.3 Observation de la formation et de l’extrusion des bgps
3.4 Observations et analyses des configurations microstructurales d’initiation des microfissures
3.5 Synthèse
3.6 Comparaisons aux observations de la littérature
3.7 Conclusions
3.8 Références
CHAPITRE 4 PREDICTION OF THE EFFECT OF PSB IMPINGEMENT ON GRAIN BOUNDARIES IN DUCTILE METALS: PART I – GB EXTRUSION ANALYSIS 
4.1 Introduction
4.2 Hypothesis of the finite element simulations
4.3 Prediction of the extrusion of PSBs through the Neighboring GBs in copper: effect of microstructure and crystallographic orientation
4.4 Discussion
4.5 Conclusions
4.6 Acknowledgements
4.7 References
CHAPITRE 5 PREDICTION OF THE EFFECT OF PSB IMPINGEMENT ON GRAIN BOUNDARIES IN DUCTILE METALS: PART II ‒ GB STRESS FIELDS ANALYSIS 
5.1 Introduction
5.2 Hypothesis of the finite element simulations
5.3 Prediction of GB stress fields induced by PSB impingement: effect of microstructure and crystallographic orientation
5.4 Discussion: Influence of the different assumptions on GB stress fields
5.5 Conclusions
5.6 Acknowledgements
5.7 References
CHAPITRE 6 PREDICTION OF THE EFFECT OF PSB IMPINGEMENT ON GRAIN BOUNDARIES IN DUCTILE METALS: PART III – MICROCRACK INITIATION 
6.1 Introduction
6.2 Hypothesis of the finite element simulations
6.3 Finite fracture mechanics prediction of GB microcrack initiation
6.4 Discussions
6.5 Conclusions
6.6 Acknowledgements
6.7 References
CHAPITRE 7 COMPARAISONS ENTRE PREDICTIONS ET OBSERVATIONS EXPERIMENTALES DE l’INITIATION DE MICROFISSURES INTERGRANULAIRES
7.1 Modélisation avancée de l’initiation des microfissures intergranulaires
7.2 Apport des calculs atomistiques pour la rupture intergranulaire
7.3 Comparaisons entre observations et prédictions de l’initiation du dommage intergranulaire
7.4 Discussion
7.5 Conclusions
7.6 Références
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
ANNEXES
9.1 Plans des éprouvettes
9.2 Données brutes des essais cyclique

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