Effet des pesticides sur la santé et sur l’environnement
Les pesticides constituent un groupe hétérogène de produits chimiques. Ces produits sont principalement utilisés dans le domaine agricole pour améliorer l’agriculture. En effet, ce domaine doit faire face à une demande croissante pour l’alimentation (Bourguet et Guillemaud, 2016). Cependant les pesticides sont soupçonnés de présenter un risque pour la santé humaine et l’environnement (Kim et al., 2017 ; Islam et al., 2017). Ils sont des causes de morbidité et de mortalité élevées. Leur application affecte souvent les espèces non- ciblées. Ces produits chimiques affectent non seulement la culture et les animaux dans une zone spécifique, mais nuisent également l’équilibre de l’écosystème par la modification de la chaîne alimentaire et de l’écosystème. En raison des propriétés cumulatives de nombreux pesticides, ils circulent dans les écosystèmes et peuvent être accumulés par de nombreux organismes vivants et migrer à travers les chaînes alimentaires (Jayaraj et al., 2016). En outre le ruissellement et l’érosion peuvent être des voies d’entrée chimiques importantes dans les eaux de surface affectant ainsi les organismes aquatiques. Les produits chimiques persistants peuvent également s’accumuler par d’autres mécanismes, notamment l’absorption directe d’eau par les branchies ou la peau via l’absorption de particules en suspension et via la consommation d’aliments contaminés (Lushchak et al., 2018). La faune terrestre peut être exposée aux pesticides via la consommation d’aliments ou d’eau contaminée. En effet, plusieurs études ont rapporté que l’exposition directe ou indirecte aux pesticides entraîne des troubles neuromusculaires et une stimulation du métabolisme des médicaments et des stéroïdes (Subramaniam et Solomon, 2006 ; USEPA, 2010). Ces derniers exercent leur toxicité suite à la production exagérée de radicaux libres, ce qui favorise l’apparition et le développement de certaines pathologies y compris les maladies neuro-dégénératives, gastrointestinales, dermatologiques, cancer et asthme (Raanan et al., 2014 ; Koutros et al., 2015).
Le 2,4-D et le stress oxydatif
Des études récentes indiquent que l’exposition aux 2,4-D produit le stress oxydatif par la génération des radicaux libres qui est suggéré comme l’un des mécanismes moléculaires de la toxicité de ce pesticide (Tayeb et al., 2013 ; Nakbi et al., 2016). En effet, les EROs sont capables de réagir avec les protéines, les acides nucléiques, les lipides et d’autres molécules. Ceci entraîne des modifications de leur structure, se manifeste par des effets tels que l’inactivation des enzymes, la peroxydation des lipides et les lésions de l’ADN, pouvant finalement conduire à la mort cellulaire par nécrose ou apoptose (Bukowska, 2006 ; Maire et al., 2007 ; Lushchak et al., 2018). La production accrue des EROs et l’augmentation de la peroxydation lipidique, peuvent affecter les activités protectrices des antioxydants enzymatiques et épuiser le réservoir des molécules antioxydantes non- enzymatiques (Bongiovanni et al., 2011 ; Tayeb et al., 2013). Les produits de peroxydation lipidique peuvent modifier les propriétés physiologiques de la membrane cellulaire. Les changements oxydatifs dans les membranes sont le résultat de la polymérisation de protéines, ce qui aboutit à une augmentation de la rigidité de la membrane érythrocytaire. En raison de ce fait, les pesticides provoquent un déclin de la capacité de la membrane à se déformer. Le 2,4- D peut se lier à certains phospholipides, conduit ainsi à une perturbation des interactions physiques dans la membrane, ce qui augmente la disponibilité des lipides à la peroxydation (Bukowska, 2006). Le 2,4-D est connu par sa capacité à se lier aux protéines, d’autre part, il peut provoquer des perturbations dans la fonction cellulaire suite à la modification de l’activité des enzymes ce qui aboutit à la mort cellulaire. Di Paolo et al (2001) et Dakhakhni et al (2016) ont rapporté dans une étude sur des hépatocytes de rat que le 2,4-D a provoqué une modification la structure secondaire des protéines ce qui a conduit à une diminution de structures en feuille β et de la teneur en protéines associé à une perte de structure de la chaine lipidique de la membrane et la polarité des lipides avec la formation de composés carbonylés et une hypertrophie du foie.
L’oxydation des protéines
Les EROs sont en effet capables de réagir avec différents acides aminés des chaînes de protéines, altérant également leurs fonctions. Leur oxydation aboutit à la formation de produits carbonylés et hydroxylés. En effet les EROs les plus réactifs avec les protéines sont le radical hydroxyle HO° et le peroxynitrite ONOO-. L’ion superoxyde O2°- est le moins réactif des EROs mais est suffisamment fort pour oxyder les groupements thiols (-SH) de la cystéine. En outre les acides aminés soufrés dont la cystéine et la méthionine, les acides aminés basiques (arginine, leucine) et les acides aminés aromatiques tels que le tryptophane, la phénylalanine et la tyrosine semblent être les plus vulnérables (Halliwell et Guterridge, 2008). Les EROs peuvent modifier les protéines soit par :
– Voie directe : c’est la fragmentation des protéines et la formation de produits carbonylés. En effet, les protéines peuvent être modifiées directement par les espèces réactives de l’oxygène conduisant ainsi à l’oxydation des acides aminés. Cette modification oxydative est réversible, traduite par la formation de disulfures, d’acide sulfénique et de méthionine sulfoxyde résultant de l’oxydation des chaînes latérales des résidus cystéine et méthionine, les plus sensibles à l’oxydation.
– Voie indirecte : par la glyco-oxydation (qui résulte de la formation d’une liaison covalente entre la fonction aldéhyde du glucose et les groupement amines des protéines) et de la peroxydation lipidique. Ces composés peuvent réagir avec les résidus lysine et arginine des protéines pour former deux classes de produits ; les AGE (produits de glycation avancée) et les ALE (produits de lipoxydation avancée) (Weiss et al., 2000 ; Stadtman et al., 2003). Les résultats les plus fréquents de modifications oxydatives des protéines sont les changements dans la structure des protéines et un dépliement partiel de la protéine se traduisant par une diminution de l’activité enzymatique, une susceptibilité plus forte à la dégradation protéolytique, de la stabilité à la chaleur ce qui aboutit à la mort cellulaire par apoptose (Reeg et Grune, 2015).
Les Glutathion-S-Transférases (GST, EC 2.5.1.18)
Les GST sont des enzymes de détoxification de la phase II, qui catalysent la conjugaison du glutathion (GSH) à une grande variété de composés électrophiles endogènes et exogène telles que les espèces réactives de l’oxygène (EROs) ou les xénobiotiques et les cancérogènes environnementaux (Nissar et al., 2017). Ils sont divisés en deux groupes : microsomal liés à la membrane et cytosolique, les GST humaines sont répartis en 8 classes selon leurs propriétés structurales (similarité des séquences nucléotidiques). On distinguera ainsi les classes : Alpha (α), Kappa (κ), Mu (µ), Omega (Ω), Pi (π), Sigma (σ), Thêta (θ) et Zeta (ζ) (Board et al., 2000 ; Umasuthan et al., 2012 ; Revathy et al., 2012).
Les polyphénols et la santé humaine
Les polyphénols sont des micro-constituants végétaux abondants dans nos aliments. Ces composés sont reconnus pour leur forte bioactivité qui se traduit au niveau de l’organisme par une large gamme de propriétés biologiques, y compris la protection contre les dommages oxydatifs moléculaires et cellulaires induisant par diverses pathologies (cancers, diabète de type 2, maladies cardiovasculaires et neurodégénératives) (Ozcan et al., 2014 ; Shahidi et Yeo, 2018). Leurs effets protecteurs ont été mis en évidence tant d’un point de vue épidémiologique qu’expérimental (Gaston, 2016). Ils ont la capacité de réguler une diversité de processus cellulaires et moléculaires par interaction avec des cibles protéiques (enzymes, récepteurs, facteurs de transcription), ce qui leur conférant des propriétés anti-athérogéniques, anti-inflammatoires, anti-thrombotiques, anticarcinogéniques et neuroprotectrices. Les polyphénols sont aussi capables de diminuer d’autres facteurs de risque des maladies cardiovasculaires impliqués dans le syndrome métabolique (hyperglycémie, taux de lipides élevé, insulinorésistance, obésité abdominale et hypertension artérielle) (Amiot et al., 2009). Ils peuvent agir comme des antioxydants de différentes manières via plusieurs mécanismes à savoir ; le piégeage direct des EROs, l’inhibition des enzymes génératrices d’EROs, la chélation des ions de métaux de transitions, responsables de la production des EROs et l’induction de la biosynthèse d’enzymes antioxydantes (Halliwell,1994 ;1997).
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE 1. LES PESTICIDES
1. Généralités sur les pesticides
1.1. Définition
1.2. Classification des pesticides
1.2.1. Selon leurs cibles
1.2.2. Selon leur nature chimique
1.1.3. Selon leurs utilisations
1.3. Effet des pesticides sur la santé et sur l’environnement
2. Les herbicides chlorophénoxyacides
2.1. L’acide 2,4-Dichlorophénoxyacétique (2,4-D)
2.1.1. Les formulations commerciales du 2,4-D disponibles en Algérie
2.1.2. Propriétés physico-chimiques du 2,4-D
2.1.3. La toxicité du 2,4-D
2.1.4. Métabolisme du 2,4-D
2.1.4.1. Absorption
2.1.4.2. Distribution
2.1.4.3. Elimination
2.1.5. Le 2,4-D et le stress oxydant
CHAPITRE 2. LE STRESS OXYDATIF
1. Définition
2. Les radicaux libres biologiques
3. Sources cellulaires des radicaux libres
4. Effets du stress oxydant sur les macromolécules biologiques
4.1. Peroxydation lipidique
4.2. Oxydation des protéines
4.3. Dommages oxydatifs de l’ADN
5. Implication du stress oxydant dans les pathologies
6. Les systèmes de défenses antioxydants
6.1. Systèmes antioxydants enzymatiques
6.1.1. Superoxydes dismutases (SOD : EC 1.15.1.11)
6.1.2. Glutathion peroxydases (GPx : EC 1.11.1.9)
6.1.3. Glutathion-S-Transférases (GST, EC 2.5.1.18)
6.1.4. Catalases (CAT : EC 1.11.1.6)
6.1.5. Les thiorédoxines (TRx) et la thiorédoxine réductase (TRxR)
6. 2. Systèmes antioxydants non- enzymatiques
6. 2.1. Glutathion
6. 2.2. Acide alpha-lipoïque
6. 2. 3. Mélatonine
6. 2.4. Acide urique
6. 2.5. Coenzyme Q 10
6. 2.6. Acide ascorbique
6. 2.7. Vitamine E (tocophérol)
6. 2.8. Les ligo-éléments
6. 2.9. Les polyphénols
6.2.9.1. Les polyphénols et la santé humaine
CHAPITRES 3. LE SÉLÉNIUM
1. Les propriétés physico-chimiques du sélénium
2. Les principales formes chimiques du sélénium
3. Importance biologique du sélénium
4. Utilisation du sélénium
4.1. Utilisation industrielle du sélénium
4.2. Utilisation médicale du sélénium
5. Métabolisme du sélénium
5.1. Absorption du sélénium
5.2. Transport du sélénium
5.3. Métabolisme du sélénium
5.4. Elimination du sélénium
6. Carence et toxicité du sélénium
CHAPITRE 4. APERÇU BIBLIOGRAPHIQUE SUR LA PLANTE ETUDÉE
1. Généralités
2. Le genre Thymus
2.1. Caractéristiques du genre Thymus
2.3. Description botanique de Thymus coloratus
2.3.1. Thymus munbyanus subsp. coloratus (Boiss. & Reut.) Greuter & Burdet
2.3.2. Noms vernaculaires
2.3.4. Description botanique de T. munbyanus Boiss. & Reut
2.4. Aires de répartition
2.5. Métabolites secondaires identifiées dans le genre Thymus
2.5.1. Les acides phénoliques
2.5.2. Les flavonoïdes
2.5.2.1. Les flavones
2.5.2.2. Les flavanones
2.5.2.3. Les flavonols et dihydroflavonols
2.5.3. Les huiles essentielles
2.6. Utilisations pharmacologiques de Thymus
PARTIE EXPÉRIMENTALE
CHAPITRE 5. MATERIEL ET METHODES
1.But et objectifs
2. Les produits chimiques
3. Matériel végétal
3.1. Présentation du site d’échantillonnage
3.1.1. Localisation géographique
3.1.2. Caractéristiques climatiques
3.2. Préparation de l’extrait
3.2.1. Préparation de l’extrait aqueux lyophilisé de Thymus munbyanus
3.3. Etude de la composition chimique de Thymus munbyanus
3.3.1. Dosage colorimétrique des composés phénoliques totaux
3.3.2. Dosage des flavonoïdes totaux
3.3.3. Dosage des tanins condensés
3.4. Evaluation de l’activitée antioxydante in vitro
3.4.1. Etude de l’activitée antioxydante : Méthode DPPHT
3.4.2. Etude de l’activité antioxydante : Méthode de blanchiment du β-carotène
3.4.3. Etude de l’activitée antioxydante : Méthode de réduction du Fer : FRAP
4.Traitement des rats
4.1. Animaux et conditions d’élevage
4.2.Répartition et traitement des rats
5. Sacrifices des animaux
5.1. Prélèvement sanguin
5.2. Prélèvement des organes
6. Dosage des paramètres biochimiques : hépatique et rénale
7. Dosage des paramètres hématologique : Formule de numérotation sanguine
8. Dosage des paramètres du stress oxydant
8.1. Préparation de l’homogénat de tissus
8.2.Dosage des protéines
8.3. Dosage du glutathion(GSH)
8.4. Détermination de la peroxydation lipidique par la mesure du taux du malondialdéhyde (MDA) au niveau tissulaire
8.5. Dosage des protéines carbonylées (PCO)
8.6. Dosage de l’activité enzymatique de la glutathion peroxydase (GPX)
8.7. Dosage de l’activité enzymatique de la catalase (CAT)
8.8. Dosage de l’activité de la superoxyde dismutase (SOD)
8.9. Dosage de l’acétylcholinestérase (AChE)
9. Étude histologique
10. Analyse statistique
CHAPITRE 6. RESULTATS & DISCUSSION
1.Études phytochimique et activité antioxydante de l’extrait aqueux de Thymus munbyanus
1.1.Études phytochimique
1.2. Activité antioxydante
1.2.1. Méthode DPPH
1.2.2. Méthode de blanchiment du bêta-carotène
1.2.3. Pouvoir réducteur du Fer (FRAP)
Discussion
2.Impact du 2.4-D sur les paramètres physiologiques, biochimiques et hématologiques : effets protecteurs de la supplémentation en extrait aqueux de Thymus munbyanus et /ou en sélénium
2.1. Effet du 2,4-D sur la santé générale des rats
2.2. Evaluation du poids corporel et du poids des organes
2.2.1. Poids corporel
2.2.2. Poids absolus et relatif des organes : Foie, rein, cerveau
Discussion
2.3. Etude des paramètres biochimiques
2.3.1. Effet du traitement sur les réponses des marqueurs biochimiques de la fonction hépatique
2.3.2. Effet du traitement sur le métabolisme glucidique et lipidique
2.3.3. Effet du traitement sur les réponses des marqueurs biochimiques de la fonction rénale
2.3.4. Effet du traitement sur les paramètres hématologiques
Discussion
3. Stress oxydant induit par le 2,4-D : Effets protecteurs de la supplémentation en extrait aqueux de Thymus munbyanus et/ou en sélénium
3.1. Effet du traitement sur les paramètres non-enzymatiques
3.1.1. Taux du glutathion réduit
3.1.2. Peroxydation lipidique
3.1.3. Taux de protéines carbonylées
3.2. Effet du traitement sur les paramètres enzymatiques
3.2.1.Activité enzymatique de la superoxyde dismutase
3.2.2. Activité enzymatique de la catalase
3.2.3.Activité enzymatique de la glutathion peroxydase
3.2.4. Activité enzymatique de la glutathion – S- transférase
3.2.5. Activité enzymatique du lactate déshydrogénase cérébrale
3.2.6. Activité enzymatique de l’acétylcholinestérase cérébrale
4. Etude histologique
4.1. Etude histologique du foie
4.2.Etude histologique des reins
4.3.Etude histologique du cerveaux
Discussion
CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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