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SELF-PERCEPTION
Nous regroupons sous le terme de « perception de soi » (Self-perception) les articles s’attachant à évaluer plutôt des aspects du Soi-moi. Les articles évaluant les perceptions que les enfants (entre 7 et 13 ans) ont d’eux-mêmes sont au nombre de 49 (cf. Tableau 1).
Leur grande majorité est constituée d’études transversales, elles incluent généralement un groupe d’enfants sans TDAH pour comparaison.
Il existe plusieurs axes pour appréhender les Self-perceptions des enfants. En effet, le modèle de Susan Harter, psychologue du développement, (Harter, 1999) fait intervenir cinq domaines de perceptions spécifiques à soi-même (social, comportemental, scolaire, de l’apparence physique et des compétences physiques) ainsi qu’une estime de soi globale. Cette approche constitue le socle théorique de la majeure partie des études répertoriées. Cela se traduit par l’emploi d’auto-questionnaires évaluant les perceptions des enfants dans ces domaines, c’est-à-dire en faisant intervenir leurs représentations internes du quotidien, sans support concret dans le protocole. Par ailleurs, une minorité d’études (Diener & Milich, 1997; Hoza et al., 2000, 2001; Milich & Okazaki, 1991; Ohan & Johnston, 2002; O’Neill & Douglas, 1991) s’intéresse aux perceptions de soi dans le contexte de la réalisation d’une tâche spécifique en laboratoire qui peut mettre à l’épreuve leurs compétences dans les domaines social, physique ou bien scolaire. Les enfants sont alors généralement invités à prédire leur performance à celle-ci et/ou à estimer leur réussite après l’avoir réalisée. Cet abord du concept de soi n’est pas inclus dans le modèle théorique de Susan Harter mais ces deux approches se complètent dans la mesure où l’utilisation d’auto-questionnaires fait appel aux représentations mentales que le sujet à de lui même d’un point de vue général sans limite de temps alors que la prédiction de sa capacité par rapport à une tâche a un caractère spécifique et ancré dans le présent avec la perspective pour le sujet d’une confrontation au réel.
Dans notre corpus d’études, plusieurs domaines d’intérêt des perceptions de soi ont été étudiés. On y rencontre très fréquemment les cinq domaines d’Harter ainsi que la valeur globale de soi et de façon plus rare d’autres aspects plus précis du comportement (distractibilité, contrôle émotionnel…) selon les questionnaires employés.
Principalement, on retrouve le Self Perception Profile for Children – SPPC (Harter, 1985), auto-questionnaire élaboré par Susan Harter et largement validé (Harter, 1985). Il s’agit d’un questionnaire composé de trente-six items portant sur la vie quotidienne, divisés en six sous-échelles pour évaluer les perceptions de valeur globale de soi, de socialisation, de compétences scolaire, du comportement, de l’apparence physique et des compétences motrices. L’enfant doit, dans un premier temps, choisir entre deux propositions formulées de façon neutre celle qui le décrit le mieux et ensuite indiquer le degré avec lequel celle retenue le caractérise (« à peu près moi » ; « tout à fait moi »), voir Annexe A pour la version française. Pour chaque proposition, un score de 1 à 4 est appliqué. Un score élevé traduisant une meilleure perception de soi.
En deuxième par ordre de fréquence, le Piers-Harris Children’s Self-Concept Scale – PHSCS est employé. Ce questionnaire, dont la création est contemporaine du précédent, est construit avec quatre-vingt items composés de questions dichotomiques. Il explore à travers six sous-échelles le concept de soi. Quatre concernent des domaines précédemment décrits : la socialisation, les compétences scolaires, le comportement, l’apparence physique. Les deux autres sont plus en lien avec les affects : une sous-échelle étant dévolue à la « détresse émotionnelle » et une autre au sentiment de « bonheur » (Piers, 1984). Un score composite global de concept de soi est calculable.
Certaines autres échelles ont pu être employées de façon plus anecdotique et feront l’objet d’une description spécifique au moment opportun. Les études évaluant la prédiction ou le sentiment de réussite à des tâches spécifiques de laboratoire emploient des échelles de Likert ou une question fermée en oui / non.
Approche globale – Piers-Harris Children’s Self-Concept Scale (PHSCS)
Dans un premier temps, nous nous attacherons à décrire les études qui ont utilisé le questionnaire de Piers-Harris (PHSCS). Le questionnaire de Piers-Harris fait davantage appel à des énoncés descriptifs (ex : « les élèves dans la classe se moquent de moi » ; « je dors bien la nuit ») qui semblent moins faire appel à une réflexion de l’enfant sur lui-même et sur la façon dont il se perçoit. Dans cette échelle, le concept global de soi se calcule en faisant la somme des concepts par domaine.
Les études l’employant pour l’évaluation de la dimension globale de la perception de soi sont au nombre de trois (Elkins et al., 2011; Kurman et al., 2015; Treuting & Hinshaw, 2001). Les deux premières seront traitées dans les chapitres suivants concernant les analyses en sous-groupes car elles ne rapportent pas de mesures générales sur la population d’enfants atteints de TDAH. En 2015, Kurman et al. (Kurman et al., 2015) trouvaient une perception globale de soi significativement inférieures chez des enfants atteints de TDAH par rapport à un groupe contrôle. Le score global avait ici la particularité d’avoir été calculé sans prise en compte de la dimension scolaire, écartée par les auteurs du fait des difficultés importantes chez les enfants atteints de TDAH dans ce domaine.
Pour plusieurs auteurs (Harter, 1998), le concept de soi global s’appréhende distinctement des composantes par domaine. Ce concept de soi ne serait pas égal non plus à la somme des perceptions de soi par domaine. En effet, il peut correspondre à des agencements différents des self-concepts spécifiques aboutissant à une variété de profils selon les individus (Harter & Whitesell, 1996) et les environnements éducatif, social… Par exemple, la perception des compétences physiques interviendra différemment dans la composition du concept de soi global chez un enfant scolarisé dans une section sport-étude que dans un parcours scolaire ordinaire. Ainsi, il doit être évalué via une sous-échelle qui lui est propre, contenant des items spécifiques. Ces constations limitent donc la fiabilité du concept global de soi calculé à l’aide de la PHSCS. Le SPPC a une sous-échelle dédiée au concept de soi-global (« global self-worth »). Ce questionnaire a en outre l’avantage de ne pas présenter les réponses de façon dichotomique stricte (oui/non) mais en formulant chacune des possibilités « certains enfants… »/ « d’autres…» ce qui a pour effet de banaliser les réponses en en limitant l’intensité de leur valence positive ou négative. L’enfant a ensuite la possibilité de pondérer son choix « à peu près comme moi » / « vraiment comme moi ».
Approche globale – Self Perception Profil for Children (SPPC)
La Self-perception globale dans le SPPC correspond à une sous-échelle spécifique, indépendante des autres dimensions. Chronologiquement, la première étude ayant traité de l’estime globale de soi chez les enfants atteints de TDAH comparativement à des témoins avec cette échelle date de 1993. Ainsi, l’équipe d’Hoza (Hoza et al., 1993), sur des petits effectifs (27 patients/25 témoins), retrouvait des scores inférieurs chez les enfants atteints du trouble bien que la différence ne soit pas significative. L’année suivante et six ans plus tard, Ialongo et al. (Ialongo et al., 1994) puis Dunn & Shapiro (Dunn & Shapiro, 1999), mettaient en évidence une perception globale de soi significativement plus basse chez les enfants atteints de TDAH. En 2002, Ohan & Johnston (Ohan & Johnston, 2002) répétaient la mesure chez 45 garçons atteints de TDAH et 43 témoins. Bien que les scores de perception globale de soi étaient inférieurs dans le premier groupe, les résultats des tests n’atteignaient pas la significativité. Enfin, en 2005, Barber et al. (Barber et al., 2005) mettaient en évidence une diminution non significative de la perception de soi globale chez des enfants atteints de TDAH par rapport à des témoins.
Résumé de l’approche globale
Les données issues de la littérature concernant le self-concept global chez les enfants atteints de TDAH s’orientent vers des perceptions proches mais plutôt en deçà des enfants sans trouble ou bien significativement inférieures. Aucune étude ne fait état de perceptions brutes qui seraient supérieures à la population générale.
Approche multidimensionnelle par questionnaires
Les approches multidimensionnelles de la perception de soi s’appuient sur le fait que les individus s’évaluent différemment selon les domaines. Au cours du développement, cette différenciation de la perception de soi évolue dans le sens d’une diversification et donc d’une augmentation du nombre de domaines jusqu’à l’âge adulte (Harter, 1998). Là encore, c’est le Self Perception Profile for Children qui est le plus employé avec ses cinq dimensions en plus de la valeur globale. A titre d’exemple, dans la version de ce questionnaire pour adolescents, trois dimensions supplémentaires sont investiguées (une distinction entre « amis proches » et « relations sentimentales » est faite).
Vingt-neuf études se sont intéressées à la perception de soi à travers un ou plusieurs domaines chez les enfants atteints de TDAH en comparaison avec des groupes témoins et font part des scores obtenus. C’est le domaine « social » qui est le plus investigué (apparaît dans 21 études) suivi des domaines scolaire et du comportement.
Approche multidimensionnelle – Piers-Harris Children’s Self-Concept Scale (PHSCS)
Dans un premier temps nous décrirons celles ayant employé le questionnaire de Piers-Harris. L’auto-perception de la compétence sociale du sujet y est mesurée par l’évaluation de sa propre socialisation. Tout d’abord, en 1989, la comparaison d’un groupe d’enfants atteints de TDAH à un groupe témoin par l’équipe de Horn (Horn et al., 1989), a permis de mettre en avant une perception de sa socialisation significativement inférieure chez les patients par rapport aux témoins. Ce résultat a été reproduit par Ostrander et al., en 2006 (Ostrander et al., 2006) chez 148 patients et enfin par Elkins et al., en 2011 (Elkins et al., 2011) avec un échantillon plus large de 253 patients pour 730 témoins. Kurman et al. en 2015 (Kurman et al., 2015) objectivaient une perception de la compétence scolaire significativement diminuée chez les patients.
Approche multidimensionnelle – Self Perception Profil for Children (SPPC) Années 1990
Comme pour l’évaluation globale de soi, le SPPC a également servi à l’évaluation de la perception que les enfants ont d’eux-mêmes par domaine (16 études). On trouve trois études réalisées dans les années 1990 (Dunn & Shapiro, 1999; Hoza et al., 1993; Ialongo et al., 1994). Elles objectivent toutes une auto-évaluation du comportement significativement plus défavorable chez les enfants atteints de TDAH. Concernant le domaine social, le score était significativement inférieur pour Ialongo et al., (Ialongo et al., 1994) et inférieur sans atteindre le seuil de significativité pour les deux autres. Il en est de même pour l’évaluation des compétences scolaires qui étaient significativement inférieure dans les études de Ialongo et al. et Dunn et al., et inférieure mais non significativement chez Hoza et al.
Sur le plan des compétences physiques et de l’apparence physique dont les perceptions ont été évaluées par Hoza et al. et Dunn et al., les résultats sont non significatifs.
Trois nouvelles études sont publiées au cours des années 2000 (Barber et al., 2005; Mikami & Hinshaw, 2006; Owens & Hoza, 2003) qui viennent corroborer les résultats déjà obtenus, mais avec des effectifs de patients plus importants. En effet, dans l’étude d’Owens & Hoza (97 enfants atteints de TDAH / 83 témoins), les perceptions des enfants atteints de TDAH de leur comportement étaient significativement moins bonnes comparées aux enfants témoins, tout comme pour Barber et al. Les scores de la dimension sociale étaient inférieurs mais pas de façon significative dans l’étude d’Owens et al. et significativement inférieurs dans l’étude de Mikami & Hinshaw (140 patients/88 témoins). Pour les compétences physiques dans l’étude d’Owens & Hoza, il n’y avait pas de différence significative entre les groupes.
Années 2010
Le nombre d’études publiées dans la décennie suivante croît de façon importante puisque qu’elles sont onze (Bishop et al., 2018; Emeh et al., 2018; Emeh & Mikami, 2014; Fliers et al., 2010; Hoza et al., 2010; Jia et al., 2016; Jiang & Johnston, 2017; Linnea et al., 2012; McQuade et al., 2014; Murray-Close et al., 2010; Swanson et al., 2012) à évaluer les perceptions à l’aide du SPPC ou d’un test proche. En 2010, L’équipe de Murray-Close (Murray-Close et al., 2010) évalue 536 enfants atteints de TDAH au sein de la cohorte MTA (Multimodal Treatment of Attention deficit hyperactivity disorder study) et 284 témoins concernant leurs perceptions de leurs capacités sociales et de leur comportement. Les enfants atteints de TDAH semblent estimer plus défavorablement ces deux éléments (pas de test statistique réalisé). Hoza et al., en 2010, Swanson et al., en 2012 et Jia et al., en 2016 (Hoza et al., 2010; Jia et al., 2016; Swanson et al., 2012) investiguent les mêmes dimensions et semblent obtenir des résultats convergents bien qu’aucun test statistique ne soit rapporté non plus. Il en va de même pour Linnea et al., (Linnea et al., 2012) dans le domaine social. Entre 2014 et 2018, McQuade et al., (McQuade et al., 2014), Emeh et al., (Emeh et al., 2018; Emeh & Mikami, 2014), Jiang & Johnston en 2017 (Jiang & Johnston, 2017), renouvellent les mesures dans les domaines social et du comportement, sans différence significative avec le groupe témoins mais faisant état de scores qui paraissent inférieurs chez les patients. Enfin, l’étude Fliers et al. (Fliers et al., 2010) dans le domaine des compétences physiques, ne retrouvait pas de différence significative entre enfants atteints de TDAH et témoins dans les perceptions qu’ils avaient d’eux-mêmes. Huit ans plus tard, Bishop et al., (Bishop et al., 2018), ont utilisé le Pictorial Scale of Perceived Physical Competence for Children with Mild Mental Retardation – PSPPCCMMR, développé à partir du SPPC qui relevait des scores significativement inférieurs dans la perception des compétences physiques chez les enfants atteints de TDAH.
Résumé de l’approche multidimensionnelle par questionnaires
Les études ayant investigué le Soi d’un point de vue multidimensionnel grâce à des questionnaires sont nombreuses depuis 1989. Les domaines d’étude privilégiés sont les perceptions des enfants de leurs compétences sociales, scolaire et de leur comportement, trois domaines impactés dans le TDAH. Si la tendance semble en faveur d’une perception de soi moins bonne chez les enfants atteints de TDAH dans ces dimensions, un certain nombre d’études ne met pas en évidence de différence significative avec les témoins. Concernant les compétences physiques ou l’apparence physique, les données restreintes et divergentes ne permettent pas d’affirmer des particularités liées au trouble.
Approche multidimensionnelle par réalisation de tâches
Un troisième groupe d’études se distingue par sa méthodologie, qui consiste à évaluer la perception des enfants dans l’un des domaines précédemment décrit à partir d’une tâche spécifique en laboratoire.
En 1991, O’Neill & Douglas (O’Neill & Douglas, 1991) évaluaient les prédictions de réussite des enfants dans une tâche de type scolaire (mémoire d’histoires) et montraient que les enfants atteints de TDAH sont significativement plus optimistes que les témoins. La même année, Milich et al. (Milich & Okazaki, 1991) confirmaient cette tendance dans le cadre de mots-mêlés. Dix ans plus tard, l’équipe d’Hoza (Hoza et al., 2001) proposait des évaluations pré-tâche scolaire de mots-mêlés. Aucun résultat significatif n’était trouvé, bien que les prédictions des enfants atteints de TDAH semblaient plus optimistes. L’étude d’Ohan et Johnston de 2002 précédemment citée (Ohan & Johnston, 2002), évaluait aussi les prédictions de réussite des enfants concernant une tâche scolaire (labyrinthe sur papier) et d’à quel point ils seraient appréciés par l’enseignant (aspect social). Les deux résultats montraient des scores plus faibles chez les enfants atteints de TDAH par rapport aux témoins, sans que la différence soit significative. Ces deux dernières études sont marquées par une sévérité du TDAH peu importante, ce qui pourrait être un élément d’explication concernant l’absence de significativité. On note également chez Ohan & Johnston que l’évaluation d’à quel point ils seraient appréciés par l’enseignant était corrélée positivement au score de self-perception globale, ce qui n’était pas le cas de la prédiction de performance scolaire. Les mêmes éléments en post-tâche étaient aussi évalués sans feedback ou après un feedback positif ou d’être dans la moyenne. Pour la condition feedback positif uniquement, les enfants atteints de TDAH diminuaient significativement leur évaluation d’à quel point ils avaient été apprécié par l’enseignant.
Deux études font état d’évaluations de soi chez les enfants atteints de TDAH supérieures à celle des témoins en rapport avec des tâches d’interaction sociale en laboratoire (Diener & Milich, 1997; Hoza et al., 2000). L’étude de Diener & Milich était centrée sur une tâche d’interaction sociale entre deux enfants ayant reçu la consigne de collaborer. Les enfants devaient faire des prédictions sur à quel point leur partenaire les apprécieraient et sur leur compétence à rencontrer des enfants de leur âge. Suite à une courte interaction, ils devaient ensuite évaluer à quel point ils avaient été appréciés par l’autre enfant de la dyade. Les résultats obtenus n’étaient pas en faveur d’une différence dans les prédictions entre les enfants atteints de TDAH et les enfants témoins. En revanche, après la tâche, les enfants atteints de TDAH évaluaient significativement plus favorablement à quel point ils avaient été appréciés par l’autre enfant.
L’équipe d’Hoza (Hoza et al., 2000), quand à elle, soumettait les participants à des interactions sociales contrôlées (échec et réussite) avec un enfant complice des investigateurs. Au cours de celles-ci, le participant avait pour consigne de se faire apprécier et de convaincre l’autre enfant de participer à un « camp ». L’enfant participant devait ensuite évaluer sa réussite aux objectifs sur la base de ses perceptions pendant l’interaction et d’un feedback fait par un assistant de recherche. Pour les deux objectifs, les enfants atteints de TDAH estimaient leur réussite supérieure à celle des enfants témoins.
Résumé de l’approche multidimensionnelle par tâche
Dans ces études employant des tâches en laboratoire, on retrouve une tendance un peu différente des résultats. En effet, de façon générale, apparaît un état d’optimisme chez les enfants atteints de TDAH au sujet de la perception de leurs compétences. La particularité de ce type d’approche est que l’enfant est amené à s’évaluer dans un objectif précis qui comporte un enjeu de réussite. Il est possible que cet angle de la perception de soi ne fasse appel tout à fait aux mêmes représentations de soi d’autant plus qu’un enjeu social peut être présent.
Autres méthodes
Un certain nombre d’études ont évalué les perceptions que les enfants atteints de TDAH ont d’eux-mêmes selon d’autres perspectives que les domaines identitaires de Susan Harter ou Piers-Harris. Nous les regroupons dans ce paragraphe.
D’autres échelles faisant intervenir des dimensions ont été utilisées : Culture-Free Self Esteem Inventory for Children – CSEI ; Self-Esteem and Self-Concept Evaluation. Multidimensional Scale of Self-Esteem – EMAE ; Self-Concept Scale for Children and Youth.
En 1989, l’équipe de Kelly (Kelly et al., 1989), évaluait l’évolution de l’estime de soi uniquement au sein d’un groupe d’enfants atteints de TDAH à l’aide du Culture-Free Self Esteem Inventory for Children – CSEI de Battle (Battle, 1981). Ce questionnaire évalue une estime de soi totale, et par domaines : générale, scolaire, sociale et parentale. Seuls les scores initiaux d’estime de soi totale (il s’agissait d’un essai clinique, les résultats spécifiques au médicament sont traités plus loin) étaient donnés et apparaissaient significativement inférieurs aux normes pour l’âge. S’agissant d’un score obtenu par cumul des sous-échelles, sa fiabilité apparaît modeste au même titre que celui du PHSCS.
Capelatto et al., en 2014 (Capelatto et al., 2014) ont employé la Self-Concept Scale for Children and Youth (Escala de Autoconceito Infanto-Juvenil, EAC-IJ, (Sisto & Martinelli, 2004). Elle est composée de 20 items répartis en concepts de soi personnel, social, scolaire et familial auquel il convient de répondre en « tout le temps », « parfois », « jamais ». Les résultats total et par dimension semblaient inférieurs aux témoins, sauf pour la famille (les attitudes dans le contexte familial) qui semblait plus préservée, bien qu’aucune comparaison n’atteignait la significativité. Certaines études sont davantage en lien avec la perception d’eux-mêmes centrées sur les manifestations du TDAH. C’est le cas de celles de Horn et al. et Rizzo et al.
Horn et al. (Horn et al., 1989), en 1989, ont étudié la perception de leur contrôle de soi (self-control). Et ceci, grâce à la Children Perceived Self Control Scale – CPSC (Humphrey, 1982) composée de 11 items attendant une réponse en oui/non. Ils sont composés de trois types : Personal self-control, Interpersonal self-control et Self-evaluation (exemple : « If my work is too hard, I switch to something else »). Les deux premiers sont essentiellement en lien avec des capacités d’inhibition, impactées dans le TDAH : «It’s hard to keep working when my friends are having fun » ; « When the teacher is busy I talk to my friends » , et le dernier plus en lien avec des capacités métacognitives « I know when I’m doing something wrong without someone telling me ». Chez les enfants atteints de TDAH, les scores obtenus font état de perceptions de ses capacités de contrôle significativement moins bonnes que chez les témoins. L’étude de Rizzo et al. en 2010 (Rizzo et al., 2010b), portait sur la perception des capacités de régulation des enfants via la SelfReg (Rizzo et al., 2010a) Des énoncés brefs faisant intervenir deux personnages aux comportements opposés sont proposés à l’enfant qui doit choisir celui qui lui ressemble le plus. Ensuite, il choisit l’intensité de l’adéquation avec lui-même sur une échelle de Likert. Pour la perception de la distractibilité, du contrôle émotionnel, des capacités d’inhibition et de l’activité motrice, les perceptions étaient significativement plus défavorables que les enfants témoins. Les autres domaines : attention soutenue, motivation et vitesse de traitement affichaient des scores plus défavorables mais non significativement différents.
Une dernière méthode singulière était retrouvée. Il s’agit de celle de Kurman et al. dans l’étude précédemment citée de 2015 (Kurman et al., 2015). A leurs mesures, ils avaient ajouté celle de l’estime de soi implicite, dans le but de s’affranchir d’une protection de l’ego qui pourrait se traduire par une estime explicite de soi élevée. Celle-ci a été effectuée par l’Implicit Association Test – IAT (Greenwald et al., 1998), qui mesure la force de l’association entre des représentations mentales. Il était demandé à l’enfant de classer des attributs dans des catégories Moi/Les autres ou Positif/Négatif, une réponse rapide étant considérée comme le reflet d’une association forte. L’estime de soi implicite des enfants atteints de TDAH était significativement plus faible que chez les enfants témoins avec une taille d’effet plus importante que pour l’estime de soi explicite. On remarque que l’impulsivité des enfants atteints de TDAH n’était pas prise en compte.
Résumé
L’évaluation des Self-perceptions par le biais d’autres méthodes concorde avec les premiers résultats observés sur les questionnaires. Les enfants atteints de TDAH semblent avoir de moins bonnes perceptions d’eux-mêmes ou proches des enfants sans pathologie y compris dans les domaines qui concernent la symptomatologie du TDAH. Par ailleurs, Kurman et al. relèvent un fait intéressant en tentant de s’affranchir d’un aspect possible de désirabilité sociale dans l’évaluation des perceptions. Les perceptions de soi implicites pourraient être plus défavorables que celles affichées explicitement.
Analyses en sous-groupes et de corrélations
Etudes prenant en compte un traitement
La majorité des études ne sont pas attachées à prendre en compte la présence ou non d’un traitement médicamenteux du TDAH chez les enfants, qu’il soit préexistant aux tests, contemporain ou objet spécifique des analyses. Le même constat est fait pour les autres thérapies. Les enfants bénéficiant d’un traitement médicamenteux ne recevaient généralement pas la dose le jour des tests mais rares sont les études mentionnant d’autres éléments. Certaines sont tout de même remarquables.
Médicament
Dans l’étude de Kelly en 1989 (Kelly et al., 1989), précédemment citée, l’estime de soi évaluée à l’aide du CSEI a été mesurée initialement, après l’annonce du diagnostic de TDAH, après un mois de méthylphénidate (les jours d’école) ou d’un placebo et de nouveau après 16 mois de traitement par méthylphénidate (MPH). S’il n’existait pas de différence significative entre les résultats des 4 premières catégories (générale, scolaire, sociale et parentale), l’estime de soi totale était significativement améliorée après 16 mois de traitement médicamenteux. Cette majoration du score total pouvait être attribuée à une augmentation de l’estime de soi dans les domaines général et scolaire. La prudence reste de mise compte tenu de l’effectif réduit (21 patients pour les évaluations à court terme, 16 pour celles à long terme) et de l’impact unique sur l’estime de soi totale qui correspond à la somme des dimensions.
Un essai clinique réalisé en 1994 (Ialongo et al., 1994) évaluait l’évolution des scores au SPPC dans trois groupes d’enfants atteints de TDAH recevant un placebo ou du méthylphénidate à faible ou plus forte dose (0,4mg/kg ou 0,8mg/kg) tous les jours de la semaine pendant 3 mois et demi et en comparaison à un groupe d’enfant sans pathologie. La tendance était à l’amélioration des scores d’estime de soi chez les enfants atteints de TDAH dans toutes les conditions sans implication significative du traitement médicamenteux. A nouveau, un manque de puissance n’est pas à exclure dans cette étude (n=12 pour le placebo, n=16 pour faible dose et n=13 pour la dose plus élevée).
En 1999, Frankel et al. (Frankel et al., 1999) ont réalisé à nouveau une comparaison des perceptions que des enfants atteints de TDAH avaient d’eux-mêmes selon qu’ils ne bénéficiaient d’aucun traitement médicamenteux ou qu’ils se voyaient prescrire un traitement psychostimulant par méthylphénidate (90%) ou autre (dextroamphétamine ou pémoline). C’est le questionnaire de Piers-Harris qui était employé. Les résultats montraient des scores significativement plus élevés chez les enfants bénéficiant d’un traitement médicamenteux pour les domaines comportement, scolaire, total, et au seuil de significativité pour les compétences sociales. La répartition des scores totaux (somme) au PHSCS différait significativement entre les deux groupes. En effet, dans le groupe sans médicament, 83,3% des sujets obtenaient un score total dans la moyenne ou inférieur à la moyenne attendue pour l’âge alors que dans le groupe traité, 65,8% des enfants avaient des scores hauts par rapports à la moyenne. En revanche, quelques critiques sont à émettre : la durée de traitement n’était pas connue et le groupe contrôle ne l’était pas par mise en place d’un placebo avec aveugle.
Programme comportemental
L’équipe de Mikami, en 2010 (Mikami et al., 2010), a évalué l’effet du Summer Treatment Programme – STP (Pelham Jr. & Hoza, 1996). Il s’agit d’un programme comportemental dédié aux enfants atteints de TDAH, d’une durée de huit semaines. Il comporte des temps d’enseignement et des activités quotidiens ayant pour but de travailler entre autres la résolution de problèmes, les habiletés sportives, les compétences sociales par le biais de renforcements positifs et de faire de la psychoéducation parentale. Au bout de sept semaines, les perceptions de soi dans les domaines social et comportemental avaient augmenté favorablement mais les résultats des tests n’étaient pas significatifs.
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Table des matières
INTRODUCTION
REVUE SYSTEMATIQUE DE LA LITTERATURE
I. METHODE
II. RESULTATS
1. SELF-PERCEPTIONS
i. Approche globale
1. Approche globale – Piers-Harris Children’s Self-Concept Scale (PHSCS)
2. Approche globale – Self Perception Profil for Children (SPPC)
3. Résumé de l’approche globale
ii. Approche multidimensionnelle par questionnaires
1. Approche multidimensionnelle – Piers-Harris Children’s Self-Concept Scale (PHSCS)
2. Approche multidimensionnelle – Self Perception Profil for Children (SPPC)
3. Résumé de l’approche multidimensionnelle par questionnaires
iii. Approche multidimensionnelle par réalisation de tâches
1. Résumé de l’approche multidimensionnelle par tâche
iv. Autres méthodes
1. Résumé
v. Analyses en sous-groupes et de corrélations
1. Etudes prenant en compte un traitement
2. Etudes prenant en compte les sous-types de TDAH ou les symptômes de TDAH
3. Etudes prenant en compte les comorbidités ou la présence d’autres symptômes
4. Etudes prenant en compte le sexe des participants
5. Etudes s’intéressant au rôle de l’environnement relationnel des enfants
6. Résumé des analyses en sous-groupes et des études de corrélations
2. BIAIS D’ILLUSION POSITIVE
i. Biais d’illusion positive : approche par tâche
ii. Biais d’illusion positive : approche par questionnaires
iii. Analyses en sous-groupes et de corrélations
1. Etudes prenant en compte la sévérité
2. Etudes prenant en compte l’effet d’une thérapie et possibilité de modification du BIP
3. Etudes prenant en compte le sous-type de TDAH
4. Etudes prenant en compte la présence de comorbidités ou d’autres symptômes
5. Etudes prenant en compte les performances cognitives
6. Etudes prenant en compte le sexe des participants
7. Etudes prenant en compte l’environnement relationnel
iv. Résumé de la partie sur le biais d’illusion positif
3. STYLE ATTRIBUTIF ET SUJETS CONNEXES
i. Style attributif
1. Notions générales
2. Données de la littérature
3. Résumé style attributif
ii. Théories de l’intelligence
iii. Métacognition
4. MEMOIRE AUTOBIOGRAPHIQUE
ETUDE DE LA CONSTRUCTION DE L’IDENTITE DANS LE TDAH – ECI-TDAH –
I. INTRODUCTION
II. MATERIEL ET METHODE
1. Plan de l’étude
2. Sujets
3. Critères d’inclusion
4. Critères de non inclusion
5. Critère d’exclusion
6. Evaluations réalisées et déroulement pratique de l’étude
i. Première Visite – V1
ii. Deuxième et Troisième Visites – V2 et V3
iii. Quatrième Visite – V4
7. Analyses
III. RESULTATS
1. Description des sujets
i. Caractéristiques sociodémographiques et cliniques (Tableau 8)
1. Caractéristiques sociodémographiques
2. Caractéristiques cliniques
2. Paramètres évaluant la construction identitaire
i. Self-perceptions – Self Perception Profil for Children
ii. Style attributif – Style causal de l’enfant
iii. Entretien de compréhension de Soi – ECS
1. Soi-moi
2. Soi-Je
DISCUSSION
I. GROUPE DE SUJETS
II. COMPREHENSION DE SOI
1. Soi-moi
2. Soi-Je
III. LIMITES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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