Etude de la conduction électrique dans les diélectriques à forte permittivité utilisés en microélectronique

Depuis l’invention du circuit intégré en 1958 [1], le principal vecteur de croissance de l’industrie microélectronique Silicium est la miniaturisation des transistors MOSFET . Ce composant est la brique élémentaire de tout circuit logique et concentre à lui seul une grande part des efforts de recherche et développement menés ces dernières décennies pour accroître les performances des circuits intégrés. Le premier bénéfice de la réduction d’échelle (ou scaling) se comprend intuitivement : une plus grande densité d’intégration permet de réaliser des fonctions électroniques plus complexes sur une même surface, et réduit ainsi le coût de fabrication unitaire de chaque transistor. En 1965, Gordon E. Moore édicta sa fameuse loi éponyme, prédisant une augmentation de la densité d’intégration des circuits d’un facteur 2 tous les 2 ans [2]. Cinquante années plus tard, force est de constater que cette conjecture s’est révélée exacte : un circuit Silicium contient aujourd’hui près d’un milliard de transistors (contre moins de 100 dans les années 1960) et l’électronique fait aujourd’hui partie intégrante de notre quotidien. L’augmentation du nombre de composants sur une puce ne suffit toutefois pas à expliquer la croissance exponentielle des performances des circuits intégrés au fil des générations 2 . Etablies à partir des équations de base de physique des dispositifs semiconducteurs, les lois de scaling à champ constant [3] montrent qu’une réduction des dimensions des transistors d’un facteur α > 1 conduit également à accroître leurs performances du même facteur α .

La fin du XXème siècle marque toutefois un tournant dans la réduction d’échelle des dispositifs semiconducteurs. Les dimensions caractéristiques des transistors approchent l’échelle nanométrique, et aux difficultés purement technologiques viennent s’ajouter des phénomènes électriques parasites, inhérents à la taille submicronique des composants. Le compromis entre performance et consommation du dispositif devient critique et les efforts d’optimisation se font différents selon qu’on considère un transistor à vocation haute performance (microprocesseurs par exemple) ou basse consommation (applications nomades). Réduire les effets dits “de canal court” est notamment un enjeu majeur : la réduction de la longueur de grille Lg (entre 50 et 60nm pour le nœud 90nm par exemple) induit une dégradation du contrôle électrostatique de la grille sur le canal, et conduit à augmenter le courant de drain à l’état off Ioff [4]. A une époque où seule l’architecture bulk est envisagée pour répondre aux exigences de la loi de Moore, les augmentations conjointes du dopage du canal et de la capacité de grille Cox s’avèrent être les seuls leviers technologiques pour limiter les niveaux de puissance dissipée à l’état off.

Néanmoins, à partir du début des années 2000, le scaling de l’oxyde de grille SiO2 se heurte à une limite fondamentale. Jusqu’alors négligeable pour des épaisseurs supérieures à 2 nm, le transport de porteurs par effet tunnel dans le SiO2 induit un courant de grille Ig important, et contribue à augmenter la puissance dissipée à l’état on par le circuit  .

Modélisation de l’effet de champ 

Historique

Dès 1970, Stern et Howard introduisent la simulation numérique Poisson – Schrödinger appliquée à l’étude de structures MOS [1, 2]. Les bases de la simulation autocohérente y sont posées, ainsi que diverses approximations analytiques, les moyens informatiques, à l’époque limités, ne permettant que difficilement la résolution numérique “exacte”. Ces études restent cantonnées à la simulation de l’effet de champ dans le substrat (diélectrique SiO2 non simulé), et en condition d’inversion électronique (cas nMOS).

Les effets quantiques dans une structure MOS induisent un décalage du barycentre de charges à l’interface du substrat. La zone désertée entre l’interface et le pic de charge est appelée darkspace. De l’ordre du nanomètre, la modélisation de cet effet n’était pas de première importance dans les années 1970, les dispositifs les plus avancés présentant des épaisseurs de SiO2 de grille de plusieurs dizaines de nanomètres.

La simulation Poisson-Schrödinger s’est rendue indispensable à la fin des années 1980, une fois l’épaisseur d’oxyde en-dessous des 10 nanomètres et le darkspace non négligeable. Modélisant désormais les électrons et les trous [3], elle permet théoriquement de s’affranchir de l’approximation de la désertion totale grâce à la simulation conjointe des porteurs majoritaires et minoritaires au sein d’une même structure [4]. Simuler toute la zone de désertion (pouvant s’étendre jusqu’à 1µm pour les dopages les plus faibles) augmente néanmoins considérablement le temps de calcul par rapport à la simulation de la zone “quantique” proche de l’interface. Il faut attendre la fin des années 1990 et les travaux de A. Spinelli et A. Pacelli pour voir des simulations auto-cohérentes de la zone de désertion utilisant une méthode quantique proche de l’interface et une approche classique pour le reste de la zone simulée [5, 6].

Description du simulateur développé

Une connaissance accrue des empilements caractérisés (notamment de leur EOT) et la nécessité d’une description précise des charges confinées à l’interface justifient le développement d’un simulateur Poisson-Schrödinger au cours de cette thèse. Les principales caractéristiques du simulateur et les hypothèses considérées sont décrites ci-dessous :

1. La structure simulée est unidimensionnelle (1D) dans le sens du confinement et consiste en un diélectrique high-κ, un oxyde interfacial SiO2 et le substrat Silicium. L’étude expérimentale d’un empilement de grille étant en général réalisée sur des surfaces de grille importantes (de 10 × 10µm² à 100 × 100µm² dans notre cas), les effets de bord 2D ont été négligés [23]. De plus, l’inclusion des diélectriques dans la structure simulée permet de prendre en compte la pénétration des fonctions d’onde dans la grille.

2. La prise en compte conjointe des trous et des électrons dans la résolution autocohérente permet de simuler le comportement des porteurs pour toute courbure de bande, et ainsi traiter les régimes d’inversion, de désertion et d’accumulation sans distinction aucune. Pour chaque polarisation, l’auto-cohérence converge vers les profils de charge (en C.m⁻³ ) suivants :
– ρe(z) = ρeL(z)+ρeT(z) pour les électrons des vallées L et T respectivement,
– ρh(z) = ρhHH(z)+ρhLH(z) pour les trous lourds (HH) et légers (LH) respectivement si la bande de valence est approximée par une relation de dispersion parabolique,
– ρh(z) = ρhHH(z)+ρhLH(z)+ρhSO(z) pour les trous lourds (HH), légers (LH) et split-off (SO) respectivement si la bande de valence est décrite par une approche avancée k · p 6 × 6 (cf. point 4 de ce paragraphe),
– ρdopants(z) = cte pour les dopants ionisés, en considérant un dopage constant dans le substrat.

3. En fonction du niveau de dopage, l’étendue de Silicium simulée est ajustée pour prendre en compte la totalité de la zone de désertion et ainsi s’affranchir de l’approximation de la désertion totale. Par exemple, pour un substrat p, la zone de Silicium simulée avec Na = 2 . 10²³ m⁻³ sera de 200 nm, alors qu’un dopage Na = 1 . 10²⁰ m⁻³ nécessite de simuler 10 000 nm de Silicium.

4. L’équation de Schrödinger est résolue dans chacun des matériaux selon l’approche de la masse effective (c’est à dire en considérant une approximation parabolique des structures de bande). Dans le cas de la bande de valence, une description plus complète (issue de simulations k · p 6 × 6) est néanmoins proposée en parallèle de l’approximation parabolique.

5. Les conditions limites en z = −tSiO2 − tHfO2 (interface métal – high-κ) et z = Lmax (en profondeur du substrat) sont considérées fermées : le transport de charge aux extrémités de la structure 1D n’est pas pris en compte (annulation des fonctions d’onde) et la charge simulée est considérée comme stationnaire. La seule prise en compte de la pénétration des fonctions d’onde dans les diélectriques de grille permet en effet de simuler la condition d’équilibre thermodynamique dans le canal, où les pertes par effet tunnel sont compensées par des sources infinies de porteurs, source-drain pour les minoritaires, substrat pour les majoritaires. Cela permet de s’affranchir d’une simulation 2D de tout le transistor MOS [24].

La perte de charges dans le métal est considérée négligeable et ne rompant pas l’équilibre : Palestri et al. [25] ont comparé différents simulateurs PoissonSchrödinger, prenant tous en compte la pénétration des fonctions d’onde, et différant par la nature de leurs conditions limites dans la grille. Des résultats très similaires montrent la pertinence de la simulation 1D avec conditions limites fermées.

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Table des matières

1 Introduction générale
2 Modélisation de l’effet de champ
1 Principe de la simulation Poisson-Schrödinger
2 Etat de l’art
2.1 Historique
2.2 Description du simulateur développé
3 Modélisation du confinement quantique
3.1 L’équation de Poisson
3.2 L’équation de Schrödinger
4 Résolution numérique de l’auto-cohérence
4.1 Convergence de la boucle auto-cohérente
4.2 Découpage quantique – classique de la structure simulée
5 Résultats et discussions
5.1 Impact de la pénétration des fonctions d’onde
5.2 Influence de la non-parabolicité de la bande de valence
6 Conclusions du chapitre 2
Bibliographie
3 Etude de la conduction dans un empilement nMOS HfO2
1 Mécanismes à l’origine du courant de grille
1.1 Technique de séparation de porteurs
1.2 Mécanismes de transport dans un diélectrique
2 Modélisation du courant tunnel
2.1 Modélisation de la transparence tunnel
2.2 Modélisation du courant tunnel 2D
2.3 Modélisation du courant tunnel 3D
2.4 Influence de la pénétration des fonctions d’onde
3 Identification des mécanismes de conduction
3.1 Description des échantillons et méthodologie expérimentale
3.2 Observations expérimentales
3.3 Conclusions
4 Extraction de paramètres en régime d’inversion
4.1 Extraction des épaisseurs physiques
4.2 Extraction des paramètres tunnel de l’empilement
4.3 Conclusions
5 Extraction de paramètres en régime d’accumulation
5.1 Préambule
5.2 Structure de bande d’un diélectrique
5.3 Extraction des masses tunnel Franz dans l’IL et le HfO2
6 Cohérence inversion – accumulation
7 Régime Fowler-Nordheim dans HfO2
8 Conclusions du chapitre 3
Bibliographie
4 Etude des additifs Magnésium et Lanthane
1 Etude de l’additif MgO
1.1 Introduction
1.2 Description des structures étudiées
1.3 Analyse des paramètres VFB et EOT
1.4 Analyse physique de l’empilement Magnésium
1.5 Analyse de la conduction électrique
1.6 Conclusion de l’étude
2 Etude de l’additif La
2.1 Description des empilements étudiés
2.2 Etat de l’art
2.3 Influence de l’épaisseur La2O3 (empilements C et D)
2.4 Influence du procédé de dépôt (empilements D et E)
2.5 Conclusion de l’étude
3 Conclusions du chapitre 4
Bibliographie
5 Modélisation d’interfaces non-abruptes
1 Modélisation des interfaces graduelles
2 Impact sur le confinement et l’extraction d’EOT
3 Impact sur la simulation du courant tunnel
3.1 Interface a : Silicium – SiO2
3.2 Interface c : HfO2 – métal TiN
3.3 Interface b : SiO2 – HfO2
4 Conclusions du Chapitre 5
Bibliographie
6 Conclusion générale

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