L’infection à VIH et le paludisme à Plasmodium falciparum constituent à l’heure actuelle, en Afrique au sud du Sahara, deux maladies infectieuses très répandues, et deux des plus importants problèmes de santé publique dans les pays en développement. Ils sont responsables d’une importante morbidité et de mortalité. Le paludisme est responsable d’une morbidité élevée, 300 millions de cas chaque année, mais également une mortalité élevée de l’ordre de 2 millions [37]. La plupart des cas survient en région Africaine où le paludisme est endémique dans la quasi totalité des pays. On estime que sur une population exposée de 530 millions d’habitants, 275 millions sont porteurs de plasmodium, ou hématozoaires. Le nombre de cas cliniques dépasse 100 millions. Le paludisme tue un enfant sur 20 avant l’age de 20 ans en Afrique subsaharienne. Ainsi en Afrique, le paludisme coûte cher en vies humaines, mais aussi en frais médicaux et en journées de travail perdues. D’où l’intérêt de toute étude la concernant.
Au Sénégal, où il sévit de manière endémique, avec une recrudescence des cas pendant la saison des pluies, Il constitue, selon les données épidémiologiques de la division des statistiques sanitaires, l’une des principales causes de morbidité (avec 35% des motifs de consultation) et de mortalité. L’infection à VIH/SIDA, très dévastatrice, représente un fardeau particulièrement lourd pour les pays Africains et constitue une entrave importante à leur développement. Partout dans le monde elle gagne du terrain, et constitue un problème de santé prioritaire. Au Sénégal le taux de séroprévalence est de 2% environ selon le programme national de lutte contre le Sida (PNLS) .
L’infection par le VIH entraîne une détérioration progressive du système immunitaire aboutissant à un syndrome clinique, suivi par l’apparition d’infections opportunistes et souvent par certaines formes de cancer. Et comme les maladies tropicales agissent elles aussi de façon importante sur le système immunitaire. Il importe d’examiner de quelle façon les maladies tropicales dont le Paludisme, influencent l’infection par le VIH, ou sont influencées par elle, et de déterminer l’impact potentiel de telles interactions sur la santé publique. Il existe un potentiel d’interaction entre le paludisme et l’infection par le VIH. En effet cette dernière peut réduire l’immunité antipalustre, le plus souvent suite à de graves infections. Inversement la déficience immunitaire causée par l’infection à VIH peut réduire la réaction immunitaire au paludisme et mener à une plus grande fréquence des accès palustres. Aussi cette déficience immunitaire influencerait – elle la chimiorésistance de Plasmodium falciparum et l’apparition des gènes de résistance.
En zone tropicale , une des caractéristiques essentielles de l’infection à VIH est son association fréquente avec les maladies parasitaires et infectieuses en général. C’est pour cette raison que des infectiologues cherchent, depuis quelques années à établir un lien entre l’expression clinique de ces deux affections.
DEFINITION
Le paludisme encore appelé malaria est une maladie parasitaire fébrile endémo-épidémique due à l’action pathogène de parasites hématozoaires appelés plasmodiums qui sont des protozoaires animaux appartenant au phylum des Apicomplexa, à la classe des Sporozoea, à la sous classe des Coccidia, à l’ordre des Eucoccidiida, au sous ordre des Haemosporina, à la famille des Plasmodiidae et au genre Plasmodium [20] C’est une érythrocytopathie transmise à l’homme par la piqûre de l’agent vecteur, un moustique, l’anophèle femelle. Ce sont des insectes diptères, nématocères appartenant à la famille des Culicidae ou Moustiques, à la sousfamille des Anophelinae et au genre Anophèles. Ce sont exclusivement les femelles d’anophèles qui sont hématophages et donc transmettent la maladie à l’homme, le mâle se nourrit de jus sucrés.
LES AGENTS PATHOGENES
Quatre espèces plasmodiales peuvent être agents du paludisme humain :
⇒ Plasmodium falciparum : découvert par Welch en 1887, c’est l’espèce la plus dangereuse, qui tue et qui est la plus répandue en régions chaudes. Il est l’agent de la fièvre tierce du paludisme des tropiques, de l’accès pernicieux et indirectement de la fièvre bilieuse hémoglobinurique. Sa longévité est de deux mois en moyenne ; elle atteint exceptionnellement un an.
⇒ Plasmodium vivax : découvert par Grassia Felleti en 1890, surtout retrouvé en Amérique latine et en asie. Il est l’agent de la fièvre tierce bénigne : sa durée de vie atteint 3 à 4 ans.
⇒ Plasmodium malariae : découvert par Lavaran en 1881, c’est l’agent de la fièvre quarte, localisée en foyers, en zones tropicales. Il a une longévité de 20 ans
⇒ Plasmodium ovale : rare, est aussi l’agent de la fièvre tierce bénigne .
Les cycles parasitaires
Le cycle des Plasmodiums comporte une phase sexuée qui se déroule chez l’insecte vecteur, l’anophèle femelle, et une phase asexuée observée chez l’hôte intermédiaire vertébré.
La phase asexuée
Elle est caractérisée par la multiplication du parasite par schizogonie. On distingue deux types de schizogonie:
❖ la schizogonie exoérythrocytaire:
Lors d’une piqûre par le moustique contaminé, les sporozoïtes, cellules infectantes sont injectés dans la circulation sanguine. En quelques dizaines de minutes ils pénètrent dans les hépatocytes où ils se transforment en cellules végétatives appelées trophozoïtes. Grâce à des mitoses répétitives et à la différenciation de nouveaux germes unicellulaires infectants (ou mérozoïtes éxoérythrocytaires) le nombre de parasites s’accroît rapidement. La lyse de l’hépatocyte libère plusieurs milliers de mérozoïtes qui migreront via la voie sanguine vers les hématies. Chez P. vivax et P. ovale, les sporozoïtes peuvent rester à l’état de dormance dans les hépatocytes sous la forme d’hypnozoïtes et ne se développer qu’ultérieurement (périodes de reviviscence). La schizogonie éxoérythrocytaire qui dure 6 à 9 jours chez P. falciparum et 15 jours chez P. malariae est souvent asymptomatique.
❖ la schizogonie endoérythrocytaire:
Les mérozoïtes éxoérythrocytaires libérés des hépatocytes pénètrent dans les érythrocytes par un mécanisme complexe où ils évoluent en stade jeune trophozoïte ( » anneau » ou » ring « ), trophozoïte mature puis schizonte (forme de multiplication et de maturation). La rupture de la membrane du globule rouge par le schizonte mature (stade en rosette) libère les mérozoïtes qui vont envahir des hématies saines et initier un nouveau cycle de développement intracellulaire ou se différencier en gamétocytes mâles et femelles. Le cycle endoérythrocytaire dure 48 heures chez P. vivax, P. ovale et P.falciparum et 72 heures chez P. malariae. Les signes pathologiques du paludisme sont généralement détectés au cours de la schizogonie endoérythrocytaire: l’éclatement des globules rouges contenant les formes schizontes matures libère outre les mérozoïtes, de l’hémozoïne (pigment malarique provenant de la dégradation de l’hémoglobine) et des substances toxiques inductrices des accès fébriles caractéristiques de la maladie.
La phase sexuée
Les gamétocytes absorbés lors du repas sanguin d’un anophèle femelle subissent la gamétogenèse dans l’estomac du moustique. Le gamétocyte mâle différencie en l’espace d’une dizaine de minutes 8 microgamètes haploïdes et flagellés; c’est le phénomène d’exflagellation. Le gamétocyte femelle évolue en un macrogamète sans division nucléaire. La fécondation donne naissance à un zygote mobile (ookinète) qui traverse l’épithélium intestinal et s’enkyste entre la lamelle basale et les cellules épithéliales pour évoluer en oocyste.
L’oocyste subit une division réductionnelle suivie de mitoses multiples donnant naissance à des milliers de sporozoïtes. Après éclatement de l’oocyste, et par un tropisme mal connu, les sporozoïtes migrent dans les glandes salivaires où ils s’accumulent.
REPARTITION GEOGRAPHIQUE
C’est en Afrique intertropicale, dans la ceinture de pauvreté du monde, où vivent 400 millions de personnes, que la situation est tout à la fois la plus préoccupante et la plus difficile à préciser. P .falciparum, agent du paludisme grave, y sévit en cohabitation avec P. malariae (10 à 15%) et, pour une moindre part avec P. ovale. En dehors de l’Afrique, 70 % des cas mondiaux sont observés dans six pays : l’Inde, le Brésil, l’Afghanistan, le Viêt-Nam, la Colombie, les îles Salomon[7]. En Asie, le paludisme sévit intensément avec la présence de Plasmodium falciparum et Plasmodium vivax. L’Amérique du nord est indemne de paludisme. Il existe par contre en Amérique centrale et du sud où il est en progression. En Océanie certaines îles sont atteintes. Compte tenu de la variabilité des différentes composantes du système épidémiologique (anophèle, parasite, homme, environnement) , le paludisme n’est pas une entité homogène. Et cette hétérogénéité du paludisme a introduit la notion de « faciès ». Le concept de faciès épidémiologiques a été établi pour l’Afrique de l’Ouest par P. Carnevale et Coll. [7], puis généralisé à toute la région afro tropicale par J. Mouchet et Coll. [5]. Dans cette notion de faciès sont intégrées les caractéristiques climatiques et phytogéographiques des grandes régions d’Afrique sub-saharienne (forêt, savane, sahel, steppes, plateaux et zones montagnardes).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS SUR LE PALUDISME ET L’INFECTION A VIH/SIDA
A – RAPPELS SUR LE PALUDISME
I. DEFINITION
II. LES AGENTS PATHOGENES
II.1 Les cycles parasitaires
III. REPARTITION GEOGRAPHIQUE
IV. RECEPTIVITE DE L’ HOMME AU PALUDISME
IV. 1 Résistance innée
IV. 2 L’immunité anti – palustre
V. INDICATEURS EPIDEMIOLOGIQUES
V. 1 Chez l’homme
V. 2 Chez le vecteur
VI. SYMPTOMATOLOGIE
VI. 1 Paludisme de primo – invasion
VI. 2 Accès intermittents palustres
VI. 3 Paludisme viscéral évolutif (P.V.E)
V. 4 Complications
VII. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE
VII. 1 Diagnostic parasitologique direct
VII. 2 Méthodes indirectes
VII. 3 L’apport de la biologie moléculaire
VIII. LES ANTIPALUDIQUES
VIII.1 Les schizontocides
VIII.2 Les gamétocytocides
VIII.3 Les antibiotiques
VIII.4 Autres produits
IX. PHARMACORESISTANCE
IX. 1 Définition
IX. 2 Historique
IX. 3 Mécanismes de la chloroquinorésistance
IX. 4 Principales causes de l’apparition et de la propagation
IX. 6 Evaluation de la pharmacorésistance
B – RAPPELS SUR L’INFECTION A VIH/SIDA
I. CHAPITRE I : LE VIH /SIDA EN GENERAL
1. HISTOIRE NATURELLE ET CLASSIFICATION
1.1. Histoire naturelle de l’infection à VIH/SIDA
1.2. Classification de l’infection à VIH/SIDA
2. LES VIRUS DU SIDA
2.1. Classification des rétrovirus et VIH
2.2. Propriétés structurales du VIH
2.3. Les cibles du virus
2.4. La réplication virale
2.5. Variation génétique
2.6. Transmission du VIH /SIDA
3. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH
3.1. Diagnostic indirect
3.2. Diagnostic direct
3.3. Le suivi biologique
4. LA PREVENTION DU SIDA
II. CHAPITRE II : LE SIDA DANS LES REGIONS TROPICALES
1. EPIDEMIOLOGIE
1.1. Les groupes à risque
1.2. L’ampleur du fléau
2. IMMUNOLOGIE
3. VIROLOGIE
4. ASPECTS CLINIQUES
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. CADRE D’ ETUDE
1. Le dispensaire municipale de Pikine
2. Le CHU de Fann
II. MALADES ET METHODES
1. Malades
1.1. Les cas
1.2. Les témoins
2. Méthodes
2.1. Recrutement des malades
2.2. Les techniques de laboratoire pour le diagnostic et la sérologie
2.3. Test de chimiosensibilité in vivo
2.4. Test de chimiosensibilité in vitro à la chloroquine par le DELI – test
2.5. Le génotypage de Plasmodium falciparum
III. RESULTATS
1. Etude des témoins
1.1. Population d’étude
1.2. Etude clinique
1.3. Aspects hématologiques
1.4. Aspects parasitologiques
1.5. Tests in vivo
1.6. Test de chimiosensibilité in vitro (DELI – TEST) à la chloroquine
2. Etude des cas (sujets paludéens, VIH positifs)
2.1. La prévalence
2.2. Observation
3. Génotype de P. falciparum cas et témoins
IV. DISCUSSION
V. CONCLUSION GENERALE
VI. BIBLIOGRAPHIE