La prise de conscience collective de l’impact néfaste sur l’environnement de l’utilisation des énergies fossiles a, au cours des dernières décennies, amené au développement de nouvelles technologies plus tournées vers les énergies renouvelables. Cela va de l’apparition de l’énergie éolienne et photovoltaïque dans les réseaux de distribution d’électricité, au développement de plus en plus rapide de véhicules électriques. Ce développement est d’autant plus rapide que les véhicules en question sont maintenant produits en série. Les véhicules électriques sont multiples. Dans tous les cas, le mouvement est permis par la transformation de l’énergie électrique en énergie cinétique. Là où ces véhicules vont, entre autres, se différentier les uns des autres c’est par rapport à leur source d’électricité, soit une batterie, soit une pile à combustible, soit les deux.
Au vu de leur importance croissante, ces deux technologies ont rapidement évolué au cours des 50 dernières années amenant à la possibilité de les intégrer dans des véhicules roulants. Nous allons ici particulièrement nous intéresser à la pile à combustible. Le principe de fonctionnement d’une pile à combustible, qui permet de produire de l’énergie électrique à partir d’une réaction chimique, a été découvert dès 1839 par Sir William Grove. Pourtant ces systèmes viennent seulement de devenir matures et donc commencent seulement à être utilisés dans des applications grand public. Cette longue gestation s’explique par différentes raisons, principalement la suprématie des moteurs à explosion qui a donc retardé le développement des véhicules électriques et donc des piles à combustible. Mais on peut aussi mentionner l’évolution des technologies qui en évoluant au cours du temps ont régulièrement entrainé des changements majeurs de technologie dans les piles à combustible. De nos jours, il existe près d’une dizaine de technologies différentes de piles à combustible avec chacune leurs besoins et leurs applications spécifiques. Par exemple, les piles à combustible utilisées dans les véhicules électriques sont le plus souvent des piles à membrane échangeuse de protons (Proton Exchange Membrane) dont la mise au point a eu lieu dans les années 1960 lors de la conquête spatiale. Leurs puissances modérées, leur faible température de fonctionnement et surtout leur rapidité de démarrage les rendent très adaptées aux véhicules. La lenteur du développement des piles à combustible ne peut s’expliquer par les seules raisons déjà citées, elle est aussi expliquée par la complexité et l’aspect multi-échelle d’une pile à combustible. En effet, au cœur de la pile, il y a des réactions électrochimiques qui permettent la production d’électricité. C’est l’élément central de la pile et son principe est connu de longue date. Par contre, afin de permettre ces réactions, il est nécessaire de créer un système complexe autour du cœur de la pile pour par exemple permettre l’apport des réactifs ou permettre le contrôle en température de la pile. Tous ces éléments autour du cœur de la pile sont indispensables au fonctionnement de la pile. L’ensemble de ces éléments et le cœur de la pile sont alors définit comme un système pile à combustible.
Aspect théorique de la conversion d’énergie
Dans un premier temps, nous allons présenter le principe de fonctionnement d’une pile et par extension celui d’une pile à combustible. Néanmoins, avant cela nous allons voir ce qui différencie une pile à combustible d’une pile « classique ».
Convertisseur d’énergie chimique en énergie électrique
Les piles à combustible sont des systèmes complexes permettant la transformation de l’énergie chimique en énergie électrique et thermique en faisant intervenir des réactions électrochimiques. Elles sont en ce sens semblables aux piles « classiques» et aux batteries qui font intervenir les mêmes phénomènes. Il faut noter que ces deux systèmes sont identiques, seule une différence sémantique les sépare. Dans la suite du manuscrit, seule la terminologie de batterie sera conservée, le terme pile étant réservé aux seules piles à combustible. Dans le cas des piles et des batteries, le phénomène fondamental est une réaction électrochimique au cours de laquelle un dégagement d’électrons se produit. Pour que ces réactions se fassent, il faut logiquement qu’il y ait des réactifs. C’est sur la gestion des réactifs que les piles et les batteries se différencient. Les batteries embarquent une quantité limitée de réactifs qui finira par s’épuiser, provoquant ainsi, l’arrêt de la production d’électricité. Même si, dans la plupart des cas, ces réactifs peuvent être régénérés par la recharge de la batterie par une source électrique extérieure. Cela empêche la production en continu d’électricité. Dans le cas d’une pile à combustible, les réactifs sont apportés en continu ce qui permet si l’apport de réactif n’est pas interrompu de produire de l’électricité sur des durées très longues. Cela permet alors de s’affranchir d’une recharge électrique de la batterie car les réactifs ne sont jamais épuisés. Il faut noter que, du fait de ces fonctionnements différents, les piles et les batteries ont des utilisations différentes. Par exemple, une batterie produira de l’électricité sur des durées plus courtes. Mais elle permettra des variations de production d’électricité violentes puisque, l’ensemble des réactifs sont déjà présents. A l’inverse, une pile pourra produire de l’électricité sur des durées plus longues, mais du fait de contraintes d’approvisionnement des réactifs, elle aura des difficultés à produire un courant électrique fortement instationnaire. De même, un système pile est à priori plus complexe que celui d’une batterie qui ne nécessite pas la mise en place de circuit d’approvisionnement en réactifs. Etudions maintenant le principe électrochimique qui permet la production d’électricité.
Principe électrochimique
Les piles font intervenir deux réactifs, un combustible et un comburant, intervenant dans deux demiréactions électrochimiques. Ces réactions électrochimiques peuvent intervenir sur des catalyseurs. Le siège de ces réactions est dénommé électrode. Les deux réactions sont les suivantes : le combustible est oxydé et le comburant est réduit. Ces deux réactions provoquent la libération d’ions et d’électrons. L’électrode où sont libérés les électrons est appelé anode. L’autre électrode est nommée cathode. Les deux réactifs sont séparés par un électrolyte imperméable aux réactifs, isolant électrique et conducteur ionique. Sous l’effet du champ électrique causé par les deux réactions, les ions traversent alors l’électrolyte pour aller d’une électrode à l’autre alors que les électrons vont de l’anode à la cathode à travers un circuit électrique externe créant ainsi un courant électrique. La figure suivante présente les différents éléments d’une pile.
Différents types de pile
Différentes technologies ont été développées au cours du temps, les technologies que nous allons présenter sont toujours utilisées de nos jours mais ont chacune leurs domaines d’applications. Elles se différencient par les réactifs utilisés et l’électrolyte mis en œuvre et qui impose les conditions d’utilisation des piles, notamment en termes de température, ce qui permet de les classer sous différents types. Ainsi, on distingue deux grandes familles : Les piles hautes températures qui sont composées des piles à oxyde solide (Solid Oxide Fuel cell, SOFC) et des piles à carbonates fondus (Melted Carbonate Fuel Cell, MCFC). Elles ont l’avantage de ne pas utiliser de matériaux nobles sur leurs électrodes et d’avoir une grande tolérance aux polluants dans les gaz réactifs. En contre partie, leurs hautes températures les limitent, à l’heure actuelle, à des applications statiques et stationnaires. Les piles basses températures qui sont composées des piles à acide phosphorique (Phosphoric Acid Fuel Cell, PAFC), des Piles alcalines (Alkaline Fuel Cell, AFC) et des piles à membrane échangeuse de protons (Proton Exchange Membrane Fuel Cell,PEMFC). La description des différentes piles s’appuie sur la littérature [1].
Description de la pile PEM
L’élément élémentaire d’une pile à combustible est appelé une cellule. Elle se compose de :
– En son centre, l’électrolyte, dans le cas d’une pile PEM, la membrane échangeuse de protons.
– De deux électrodes situées de par et d’autre de l’électrolyte, qui permettent les réactions chimiques.
– De deux couches de diffusion (Gas Diffusion Layer, GDL) posées sur les électrodes et qui permettent l’approvisionnement en gaz des réactifs vers les électrodes ainsi que la conduction des électrons.
– De deux plaques terminales qui permettent de maintenir l’étanchéité de la cellule, d’alimenter celleci en réactifs et de permettre le contact électrique entre les différents éléments. Elles peuvent également permettre la gestion thermique de la pile. Par exemple la chauffe de celle-ci quand la puissance thermique n’est pas suffisante, ou son refroidissement dans le cas contraire.
Electrolyte
Un électrolyte est un conducteur ionique et un isolant électrique. Il permet le passage exclusif d’ions. La différence de potentiel entre l’anode et la cathode provoque un entrainement des charges par électro-osmose. Comme l’électrolyte est un isolant électrique, seul les ions le traversent. Pour maintenir un équilibre électrique, les électrons sont alors contraints de parcourir le circuit électrique externe, ce qui crée le courant dans ce circuit. L’électrolyte a aussi le rôle secondaire d’empêcher le contact direct entre les deux réactifs. Il est donc fondamental pour le bon fonctionnement d’une pile à combustible. Dans le cas d’une pile PEM, il est constitué d’une membrane acide permettant l’échange d’ions en polymère (ionomère). Ces membranes permettent le passage des ions hydrogène, elles ont également une grande étanchéité aux réactifs, même si une légère perméabilité, qui risque d’impacter le comportement de la pile, subsiste (cf II.2.2). Plus la membrane est fine, plus le transport des ions est aisé mais plus la perméabilité aux gaz augmente. Il existe plusieurs types de membrane, mais les plus couramment utilisées sont les membranes de type Nafion, développées par Dupont de Nemours. Des membranes de ce type seront utilisées dans les piles étudiées dans ce manuscrit. Elles sont constituées d’un squelette en PTFE (Téflon) sur lequel sont greffées des chaines perfluorosulfonées. En présence d’eau, il y a séparation entre des phases hydrophobes, constituées du squelette perfluorocarboné (chaine –CF2-CF2) et des phases hydrophiles, où se trouvent les sites sulfonates et de l’eau. Des ions hydrogène peuvent alors s’associer aux sites sulfonates ( -SO3 -/H3O+). En présence d’un potentiel électrique au travers de la membrane, les ions vont migrer par électro-osmose avec les molécules d’eau, les groupes sulfonâtes demeurant fixes car liés à la structure en Téflon. Le phénomène d’électro-osmose sera décrit plus précisément par la suite (cf II.2.1.1). Néanmoins, nous pouvons voir que les mécanismes de transport des ions hydrogènes sont très fortement dépendants de l’hydratation de la membrane. Nous verons par la suite (cf III.3) comment est gérée l’humidification de la membrane.
Les membranes sont les éléments qui limitent la température de fonctionnement des piles. Par exemple, le fait qu’elles soient humidifiées fait qu’elles peuvent être dégradées à des températures négatives lors du gel et du dégel de l’eau [2][3]. De même à cause de problème d’humidification et de vitrification du polymère, les températures de fonctionnement sont de l’ordre de 70°C [4]. Des études sont en cours afin d’élever cette température de fonctionnement, ce qui aura pour effet d’augmenter la résistance aux polluants, et d’améliorer les performances en augmentant les cinétiques des réactions. Les membranes ont une épaisseur qui varie usuellement entre 20 et 25 µm.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Description théorique de la pile à combustible PEM
I.1 Introduction
I.2 Aspect théorique de la conversion d’énergie
I.2.1 Convertisseur d’énergie chimique en énergie électrique
I.2.2 Principe électrochimique
I.2.3 Différents types de pile
I.3 Les piles à combustible PEM
I.3.1 Description de la pile PEM
I.3.2 Réponse en tension de la cellule unitaire
I.3.3 Mise en stack
I.4 Conclusion
I.5 Bibliographie
Chapitre II : Description des phénomènes en présence lors du fonctionnement d’un stack de pile à combustible PEM
II.1.Introduction
II.2 Ecoulement de matière à travers la membrane
II.2.1 Eau
II.2.2 Gaz
II.3 Ecoulement des réactifs
II.3.1 Ecoulement des réactifs en amont du stack
II.3.2 Humidification des gaz
II.3.3 Ecoulements vers les plaques bipolaires
II.3.4 Ecoulements dans les plaques bipolaires
II.4 Dégagement de chaleur
II.5 Conclusion
II.6 Bibliographie
Chapitre III : Eléments composants le système pile à combustible PEM H2-Air et leurs fonctions
III.1. Introduction
III.2 Le système pile à combustible
III.3 Circuit des réactifs
III.3.1 Circuit d’air
III.3.2 Circuit d’hydrogène
III.4 Circuit de refroidissement
III.6 Circuit de commande
III.7 Rendements
III.7.1 Rendement faradique
III.7.2 Rendement système
III.7.3 Rendement global
III.8 Conclusion
III.9 Bibliographie
Chapitre IV : Pressure Swing Recirculation System
IV. 1. Introduction
IV. 2. Théorie
IV.2.1. Architecture
IV.2.2. Fonctionnement
IV.3. Etude analytique
IV.3.1 Modélisation
IV.3.2. Etude paramétrique
IV.3.3. Conclusion
IV.4. Etude Numérique
IV.4.1. Modélisation
IV.4.2. Etude paramétrique
IV.4.3. Conclusion
IV.5. Conclusion
IV.6. Bibliographie
Chapitre V : Etude expérimentale du Pressure Swing Recirculation System
V.1 Introduction
V.2 Banc d’essais
V.2.1 Architecture
V.2.2 Programmes de commande
V.3 Etude préliminaire de dimensionnement
V.3.1 Architecture de la boucle de recirculation
V.3.2 Allure du cycle de recirculation
V.3.3. Démarrage
V.3.4 Effet du volume
V.3.5 Effet de la pression sur les tensions de cellules
V.3.6 Conclusion et cahier des charges du prototype
V. 4 Architecture intégrée
V.4.1 Conception du réservoir
V.4.2 Essais de longue durée
V.4.3 Versatilité
V.4.4 Effet de l’azote
V.4.5 Conclusion et cahier des charges du prototype
V.5 Version finale du PSRS
V.5.1 Nouvelle architecture
V.5.2 Essais de longue durée
V.5.3 Bilan énergétique
V.5.4 Conclusion
V.6 Perspectives d’évolution pour le PSRS
V.7 Conclusion
V.8 Bibliographie
Conclusion générale
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