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Le cycle du carbone inorganique
Dans le cycle du carbone inorganique (Figure 2) les trois réservoirs de carbone sont : l’atmosphère, l’océan, et les roches sédimentaires carbonatées. L’océan et l’atmosphère sont considérés en équilibre. La source principale pour le réservoir « océan + atmosphère » est le CO2 provenant du volcanisme (continental et sous-marin). Le CO2 atmosphérique est consommé par l’altération des roches silicatées et carbonatées.
Ce CO2 atmosphérique transite par la végétation, puis les sols (où se produit l’altération des roches) et les fleuves avant de se retrouver dans les océans sous forme de Carbone Inorganique Dissous (CID), Carbone Inorganique Particulaire (CIP), Carbone Organique Dissous (COD) et Carbone Organique Particulaire (COP).
Les cycles du carbone que nous venons de décrire sont représentatifs du cycle « naturel » du carbone à l’échelle globale. Nous n’avons pas pris en compte les phénomènes anthropiques (déforestation, rejets industriels, …).
Afin de mieux comprendre ces processus d’érosion continentale et l’évolution du climat, de nombreuses études se sont focalisées sur l’estimation des bilans d’altération et de consommation de CO2 à l’échelle globale (Meybeck, 1979 ; Berner et al., 1983 ; Meybeck, 1986, 1987 ; Amiotte-Suchet et Probst, 1993a, 1993b, 1995, Gaillardet et al., 1997 ; Ludwig et al., 1998 ; Gaillardet et al., 1999, Amiotte-Suchet et al., 2003) et sur des grands bassin comme l’Amazone (Stallard, 1980 ; Probst et al., 1994 ; Mortatti et Probst, 2003) ou le Congo (Probst et al., 1992, 1994).
Garrels et Mackenzie (1971), Berner et al. (1983) ont montré que seule l’altération des silicates consomme du CO2, lorsque que l’on s’intéresse au cycle du carbone à long terme.
Meybeck (1986,1987) fut l’un des premier à déterminer les flux d’éléments exportés par les fleuves aux océans. Pour cela, il se base sur des études de petits bassins versants français, et détermine pour chaque type de roche une vitesse d’érosion. A partir de ces vitesses et de la proportion des différentes roches présentes sur les continents, il estime la charge de matière exportée par les fleuves. Cette méthode, améliorée par Nkounkou et Probst (1987) pour déterminer les bilans d’érosion du bassin du Congo, a été utilisée par Etchanchu (1988) sur le bassin de la Garonne.
En terme de bilan à l’océan, Ludwig et al. (1996a, 1996b) ont estimé un flux total de carbone de 710 teragrammes de carbone par an. Ce flux se décompose en 205 TgC/an (29%) de carbone organique dissous, 185 TgC/an (26%) de carbone organique particulaire et 320 TgC/an (45%) de carbone inorganique (principalement des ions bicarbonates).
LES ISOTOPES STABLES 12C ET 13C DU CARBONE
Expression des rapports isotopiques et fractionnement isotopique
Le carbone possède deux isotopes stables, 12C et 13C, et un isotope radioactif, 14C de demie-vie 5,7.103 années, d’abondance respective de 98.89%, 1,11% et 10-10% (Stumm et Morgan, 1996). Les mesures isotopiques sont exprimées sous la forme d’un rapport de l’isotope lourd sur l’isotope léger. Ce rapport est comparé avec celui d’un standard international et exprimé en ‰. Cette notation, δ13C, est définie par Craig (1954) de la manière suivante : δ 13 C = [(13 C/12 C )ech − (13 C/12 C)std ] *1000 (1) (13 C/12 C)
Pour les analyses isotopiques du carbone, le rapport isotopique du standard est celui des restes de fossiles d’une bélemnite de la formation Pee Dee (Crétacé de Caroline du Sud). Ce standard est noté PDB (Pee Dee Bélemnite).
Le fractionnement isotopique entre deux espèces correspond à un enrichissement ou un appauvrissement de l’espèce formée (1) par rapport à l’espèce initiale (2). Ce facteur d’enrichissement, ε, exprimé en ‰, s’écrit sous la forme : ε2(1)= (R1/R2 – 1) * 1000 (2)
Avec R1 et R2 les rapports isotopiques 13C/12C des espèces 1 et 2 respectivement.
L’expression du facteur d’enrichissement ε, en utilisant la notation en δ s’écrit : ε2(1)= (δ1 – δ2) / (1+ 0.001 * δ2)
Dans le système carbonaté (CO2-H2CO3-HCO3–CO32-), le passage d’une espèce à une autre s’accompagne d’un fractionnement isotopique. Ces fractionnements isotopiques sont bien connus et, dans la gamme de pH et de température des eaux de surface, ils sont linéairement dépendants de la température (Deuser et Degens, 1967 ; Mook et al., 1974 ; Zhang et al., 1995 ; Szaran, 1997,1998). Turner (1982) a déterminé le fractionnement isotopique lors de la précipitation de la calcite. Ce fractionnement, qui varie entre 0,35 et 3,37‰ à une température de 25°C, dépend de la cinétique de précipitation.
Pour notre étude nous avons choisi de travailler en utilisant les équations déterminées par (Zhang et al., 1995). Ces équations sont présentées dans le Tableau I.
Tableau I : Equations du calcul des facteurs d’enrichissement isotopique dans le système carbonaté (CO2gaz-CO2aq-HCO3–CO32-) en fonction de la température (d’après Zhang et al., 1995)
La photosynthèse
La première étape de la photosynthèse va consister à transformer la lumière en énergie électrochimique pour produire le NADPH (Nicotinamide Adénine Dinucléotide Phosphaté) et l’ATP (Adénosine TriPhosphaté). Cette énergie sera ensuite utilisée pour la réduction du CO2.
La seconde phase, qui a lieu dans le stroma, à l’intérieur du chloroplaste, va coupler le CO2 à un composé à 5 atomes de carbone, le Rubilose-1-5-biphosphate (RubPP) pour former deux molécules à 3 atomes de carbone (le phosphoglycirate, PGA). Ce processus s’appelle la carboxylation. La carboxylation est catalysée par une enzyme, la Rubilose-1-5-biphosphate carboxylase/oxygenase (RubisCO). Le PGA est ensuite réduit en triose-phosphate avec l’énergie contenue dans le NADPH et l’ATP. Ce dernier est exporté hors du chloroplaste, dans le cytoplasme, où il est utilisé pour le métabolisme cellulaire et la synthèse des sucres. Le RubPP est régénéré et alimente à nouveau le cycle. Ce cycle est appelé cycle de Calvin (Figure 4).
La majorité des plantes utilise le cycle de Calvin comme processus de photosynthèse. Ce sont les plantes dites C3. Le terme C3 vient du fait que le premier composé organique formé contient 3 atomes de carbone. Citons par exemple tous les arbres, les fougères, les mousses, les algues, le blé, l’orge, la pomme de terre, … qui sont des plantes de type C3.
Il existe un autre processus de photosynthèse que le cycle de Calvin : le cycle de Hatch-Slack. Lors de ce processus de photosynthèse, le CO2 est fixé au phosphoenolpyrunate (PEP) pour former des molécules à 4 atomes de carbone (acide oxalaacetique, acide malique …) sous l’action catalytique d’une enzyme appelée PEP carboxylase.
Ces molécules sont ensuite envoyées vers des cellules internes et sont décarboxylées. Le PEP retourne vers les cellules externes et le CO2 rentre dans un cycle de Calvin classique.
Les plantes qui suivent ce cycle photosynthétique sont dites de type C4. La végétation de type C4 est une végétation que l’on trouve dans les régions chaudes. Le maïs, le sorgho, la canne à sucre, le millet … sont des plantes en C4.
Le processus de photosynthèse créé un fractionnement. La valeur de ce fractionnement varie selon le type de cycle photosynthétique (Farquhar et al., 1989). Craig (1953, 1954) fut le premier à observer que le δ13C des plantes (C3) est d’environ -28‰, indiquant donc un fractionnement avec le CO2 atmosphérique de l’ordre de 20‰. En effet, la signature isotopique du CO2 atmosphérique est en moyenne de –8‰. Deines (1980) reporte des valeurs du δ13C des plantes en C3 comprises entre –30‰ et –20‰. Pour les plantes en C4, c’est Smith et Epstein (1971) qui ont montré que ce fractionnement est beaucoup plus faible, entre 4‰ et 10‰. Le δ13C des plantes en C4 varie donc entre –19‰ et –8‰, avec une valeur moyenne de –12‰ (Mariotti, 1991).
Les plantes de types CAM (Métabolisme Acide Crassulacéen) ont un cycle photosynthétique intermédiaire entre le cycle de Calvin et le cycle de Hatch Slatch. Leurs signatures isotopiques sont aussi intermédiaires entre celles des plantes en C3 et en C4.
Les sols
La signature isotopique de la matière organique des sols est semblable à celle de la végétation (Peterson et Fry, 1987, Nadelhoffer et Fry, 1998). La matière organique a donc un δ13C en moyenne de -26‰ et –12‰ dans les sols dont le couvert végétal est de type C3 et de type C4 respectivement.
Le CO2 des sols provient essentiellement de la dégradation de la matière organique et de la respiration racinaire (éq. 7). La signature isotopique de ce CO2 est identique quelque soit son origine. CH2O + O2 = CO2 + H2O (7)
Les pressions partielles de CO2 dans les sols sont en général beaucoup plus fortes que celles de l’atmosphère, dues à ces processus de respiration et de d’oxydation de carbone organique. D’un point de vue isotopique, le fractionnement lors de la décomposition de la matière organique et lors de la respiration est négligeable (Amundson et al., 1998). Le CO2 produit a donc une signature isotopique équivalente à celle de la végétation présente sur le bassin, ce qui signifie que le δ13C varie entre –26‰ et –12‰ selon la proportion des plantes en C3 et C4 sur le bassin.
Cerling et al. (1991) montrent qu’il y a un fractionnement minimum de +4,4‰, lors de la diffusion de CO2 dans le sol. Le fractionnement est d’autant plus important lorsqu’on s’approche de la surface du sol. Ceci est du à une contribution de CO2 atmosphérique. Ce fractionnement est causé par la différence des coefficients de diffusion des deux atomes de carbone (12C et 13C). D’après Davidson (1995), ce fractionnement peut être moindre et dépend de la signature initiale du CO2 du sol.
Rightmire (1978) et Solomon et Cerling (1987) ont montré que la pCO2 et le δ13C de ce CO2 dans les sols varient de façon saisonnière. En effet, durant la période hivernale, lorsque l’activité biologique est réduite, les pCO2 dans les sols sont plus faibles. Ensuite, les pCO2 augmentent à nouveau lors du printemps et pendant la saison estivale. Ces variations sont aussi observables sur la signature isotopique du CO2. En hiver, le δ13C exhibe des valeurs peu négatives (enrichi en 13C), ce qui signifie une contribution moins importante du CO2 biogénique et donc une contribution plus importante de l’atmosphère. Et, dès que l’activité biologique reprend, le δ13C du CO2 a des valeurs plus négatives.
La signature du CO2 des sols varie entre –25‰ et –20‰ pour des régions avec une couverture végétale de type C3, et peut atteindre –8‰ en présence de végétation de type C4.
Altération des roches et eaux de surface
Le CO2 va percoler dans les sols et former l’acide carbonique (eq 8). Cet acide participe ensuite à l’altération des roches. CO2 + H2O = H2CO3 (8)
Dans le cas des minéraux silicatés, comme par exemple l’hydrolyse d’une albite (eq 9), 1 mole de CO2 va être consommée et il y a formation d’un ion HCO3-.2NaAlSi3O8 + 2CO2 + H2O = Al2Si2O5(OH)4 + 2Na+ +2HCO3- + 4SiO2 (9)
Pour les roches carbonatées, l’altération peut se produire à l’aide de l’acide carbonique ou bien d’un autre acide, provenant des pluies météoriques comme par exemple H2SO4. Prenons l’exemple de la calcite (CaCO3) : sa dissolution par l’acide carbonique (eq 10) va libérer deux ions bicarbonates. Le premier provient de la roche mère et le second du CO2 des sols. Dans le cas d’une dissolution avec un autre acide, comme H2SO4 par exemple, (eq 11), tous les ions bicarbonates proviennent de la roche mère.
CaCO3 + CO2 + H2O = Ca2+ + 2HCO3- (10)
2CaCO3 + H2SO4 = 2Ca2+ + 2HCO3- + SO42- (11)
Tous ces ions vont ensuite se retrouver dans les fleuves, formant la charge dissoute, et être exportés vers les océans.
A partir des signatures isotopiques des sources et des fractionnements isotopiques entre les différentes espèces, nous pouvons donc déterminer l’intervalle de variation du δ13C du CID dans les eaux de surface.
Le CO2 des sols a une signature qui dépend de la végétation. Prenons le cas d’une végétation de type C3 (qui est largement majoritaire), le δ13C de la matière organique est alors de –26‰, en moyenne. Le fractionnement est négligeable lors de la dégradation, puis il se produit un fractionnement de l’ordre de +4,4‰ (Cerling et al., 1991), du à la diffusion du carbone dans le sol. On a donc le CO2 avec une signature aux alentours de -21,6‰.
Lors des processus d’altération, nous avons vu que le CO2 est transformé en ion bicarbonate. Il y a donc un fractionnement lors des processus d’altération. Sur un bassin silicaté, les ions bicarbonates proviennent tous du CO2 du sol. La signature de ces ions est donc de –13,1‰ (en considérant une température de 20°C, le fractionnement entre CO2 et HCO3- est de +8,5‰, d’après Zhang et al., 1995). Sur un bassin carbonaté, le δ13C des roches est compris entre –5‰ et +5‰, en moyenne 0‰ (Keith et Weber, 1964). Lorsque la dissolution des roches s’effectue avec le CO2 des sols, la moitié des ions provient de la roche et l’autre moitié du CO2 du sol. Le δ13C des ions bicarbonates est donc la valeur moyenne des δ13C de ces deux sources, c’est à dire –6,5‰ (lors de la dissolution il n’y a pas de fractionnement entre le HCO3- et la roche mère, donc le δ13C du bicarbonate issu de la roche est de 0‰ et le δ13C du bicarbonate provenant du CO2 du sol est de –13,1‰). Si la dissolution se fait avec un acide autre que l’acide carbonique, le δ13C des bicarbonates est alors de 0‰ (puisque tous les ions bicarbonates proviennent tous de la roche mère).
Pour le CO2 atmosphérique, la valeur moyenne du δ13C est de -8‰ (Faure, 1986). Comme dans les sols, le fractionnement isotopique va enrichir en 13C les ions bicarbonates. La signature des ces ions sera alors de +0,5‰ (à une température de 20°C, d’après Zhang et al., 1995) pour être en équilibre avec le CO2 atmosphérique.
Tout ceci nous permet donc de considérer que le δ13C du CID dans les eaux de surface peut varier entre –25‰ et +5‰. Les gammes de variations théoriques dans les différents compartiments (végétation, sols, atmosphère, roches carbonatées et dans les eaux de surfaces) sont présentées sur la Figure 5.
COP, COD dans les fleuves
Les études sur la composition isotopique des matières organiques dissoutes et particulaires sont un peu plus nombreuses. Citons par exemple les travaux sur le bassin du Piracicaba au Brésil (Krusche et al., 2002), sur des bassins aux USA (Onstad et al., 2000 ; Bianchi et al., 2002), sur le Saint-Laurent au Canada (Barth et al., 1998) dans les bassins en Russie (Lobbes et al., 2000), sur le Sanaga au Cameroun (Bird et al., 1993, 1998). L’analyse isotopique des matières organiques dans les fleuves permet de tracer leur origine (Raymond et Bauer, 2001). La matière organique est soit allochtone, elle provient des sols, soit autochtone, elle est produite in situ (par le phytoplancton par exemple). Ces deux sources ont des δ13C différents et il est donc possible de les différencier. Le carbone allochtone a une signature isotopique qui dépend de la végétation présente sur le bassin. Elle varie donc entre –26‰ et –12‰ selon la proportion de plantes en C3 et C4 sur le bassin. Pour le carbone d’origine autochtone, le δ13C dépend de la signature isotopique du CO2. En effet, lors de la photosynthèse du phytoplancton, il se produit un fractionnement de l’ordre de 20‰. Donc, en considérant que le CO2 dans les eaux de surface est de l’ordre de –10‰, alors la signature isotopique des matières organiques produites est de l’ordre de –30‰.
CID dans les fleuves
A ce jour, seulement une vingtaine d’études, utilisant le δ13C, ont permis de mettre en évidence les sources et les processus qui contrôlent le CID dans les eaux de surface. L’ensemble de ces données est représenté sur la Figure 6 et les valeurs minimales et maximales pour chacun des bassins versants étudiés sont répertoriées dans le Tableau
II. On observe que les valeurs de δ13C mesurées dans ces études couvrent la large gamme de variations que nous venons de définir de façon théorique.
LES SITES D’ETUDES ET LES PRELEVEMENTS SUR LE TERRAIN
Les sites d’études
Cette étude sur la composition isotopique du CID dans les eaux de surface a été réalisée sur des bassins versants situés dans de nombreuses régions de la planète. La localisation de tous les bassins versants étudiés est présentée sur la Figure 7. Pour chaque bassin versant, une carte plus détaillée du bassin et des sites de prélèvements est présentée dans les chapitres suivants (chapitre III et IV). Deux bassins versants élémentaires ont été étudiés, le Mengong (Cameroun) et le Strengbach (France). Ensuite, les études réalisées sur les grands bassins fluviaux portent sur 24 fleuves : l’Amazone, le Paraná, l’Uruguay, le Colorado, le Negro, le Chubut, le Deseado, le Chico, le Santa Cruz, le Coyle et le Gallegos en Amérique du Sud ; le Nyong au Cameroun ; la Têt, l’Hérault et le Rhône en France ; le Gange, le Brahmapoutre, le Mahanadi, le Godavari, le Krishna, le Cauveri, le Nethravati, le Tapti et la Narmada en Inde. Ces études s’inscrivent dans le cadre de nombreux projets de recherche (cités plus bas).
Le bassin versant élémentaire du Mengong et le bassin versant du Nyong
Le bassin versant élémentaire du Mengong se situe dans la partie Sud du bassin versant du Nyong, au Sud du Cameroun. Les superficies sont respectivement de 0,6 et de 27800 Km².
Les bassins du Nyong et de Nsimi sont étudiés depuis 1994 à travers des projets de recherche Franco-Camerounais sur les écosystèmes du Sud Cameroun :
– DYLAT : DYnamique des couvertures LATéritiques des régions tropicales humides, IRD
– PROSE/PEGI : Programme Sol Erosion/Programme Environnement Géosphère Intertropicale, INSU/CNRS/IRD.
Ces programmes, grâce à des approches pluridisciplinaires, ont permis une meilleure connaissance :
– de l’organisation et du fonctionnement des différents réservoirs à l’échelle du bassin versant de Nsimi,
– des bilans de transferts,
– des processus d’altération-érosion en milieu tropical forestier humide.
Les campagnes de prélèvement pour les analyses isotopiques du carbone inorganique dissous ont débuté en mars 1998. Lors de la première année, il y a eu deux prélèvements hebdomadaires sur le bassin versant élémentaire du Mengong (un pour la source et l’autre pour l’exutoire). Sur le bassin du Nyong, quatre stations ont été choisies (deux sur le Nyong, une sur le Soo et une sur le Awout) avec un pas d’échantillonnage mensuel. Ces prélèvements ont été essentiellement réalisés par JL Boeglin et les chercheurs Camerounais. Les années suivantes (1999-2004), le pas d’échantillonnage est de 1 mois pour les six stations.
J’ai effectué les extractions et les mesures du δ13CCID pour les échantillons du Mengong (source et exutoire) en prenant un échantillon sur deux (d’où un pas d’échantillonnage de 15 jours) sur la période de mars 1998 à mars 1999. JL Boeglin et moi avons ensuite commencé les analyses sur les 4 autres stations du bassin du Nyong, toujours sur la même période.
Le bassin versant élémentaire du Strengbach
Le bassin versant du Strengbach se situe dans le massif des Vosges, à soixante kilomètres au Sud-ouest de Strasbourg. C’est un bassin forestier d’une superficie de 80 ha. Ce bassin est équipé depuis 1985 dans le cadre du programme DEFORPA (DEpérissement des Forêts et Pollution Atmosphérique).
L’étude de la composition isotopique du CID dans les eaux de surface de ce bassin concerne la saison 1994-1995. Un suivi hebdomadaire a été réalisé au niveau de l’exutoire du bassin. Cinq campagnes d’échantillonnage ont été réalisées (décembre 1994, mars 1995, mai 1995, juillet 1995 et décembre 1995) sur l’ensemble du bassin (6 stations depuis la source vers l’exutoire, et 4 piézomètres dans la zone saturée en fond de vallée). Les prélèvements et les analyses ont été effectués par Berger (1995) et Aubert (1996) lors de leurs stages de DEA sous la direction de JL Probst, au Centre de Géochimie de Surface (CGS) à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg. Cette étude a ensuite été publiée par Amiotte-Suchet et al. (1999).
Dans mon travail de thèse, j’ai repris ces résultats pour compléter les observations de Amiotte-Suchet et al. (1999), notamment sur la relation avec le carbone organique. Ensuite, nous utiliserons ces résultats pour une comparaison avec les observations d’un autre petit bassin versant, le Mengong, au Cameroun.
Les fleuves de Patagonie
La Patagonie est la région au Sud de l’Argentine. Elle représente les seules terres émergées de la planète à de telles latitudes. Huit fleuves traversent cette région d’Est en Ouest pour atteindre l’Océan Atlantique Sud. Les sources de ces huit fleuves se situent au niveau de la cordillère des Andes. Cette partie de la région est très humide, la végétation est principalement forestière. Au contraire, le climat sur les plateaux Patagons est semi-aride et la végétation est limitée à des herbacées.
Ce travail s’inscrit dans le cadre du projet européen PARAT (CEE-INCO/DC) sur l’étude des transferts des charges dissoutes et particulaires du Sud de l’Amérique du Sud vers le Sud-Ouest de l’Océan Atlantique.
Huit campagnes de prélèvement ont été réalisées entre septembre 1995 et novembre 1998 (septembre 1995, mai 1996, septembre 1996, décembre 1996, mars 1997, décembre 1997, avril 1998 et novembre 1998). Au cours de ces huit missions, les huit fleuves ont été échantillonnés à des stations proches de l’exutoire. De plus des prélèvements amont ont été réalisés lors de deux des missions (décembre 1996 et mars 1997). Les prélèvements ont été principalement réalisés par J.L. Probst, D. Gaiero, P. Depetris et S. Kempe.
J’ai réalisé l’ensemble des mesures du δ13CCID (extractions + analyses au spectromètre de masse) au CGS à Strasbourg.
Les bassins versants de la Têt, de l’Hérault et du Rhône
Les bassins de la Têt, de l’Hérault et du Rhône se situent dans le Sud de la France.
Ce sont des fleuves côtiers du Golfe du lion.
L’étude de ces bassin s’inscrit dans le cadre du projet ORME (Observatoire Régional Méditerranéen sur l’Environnement), qui a pour objectif de créer dans cette région une zone atelier sur l’impact des changements climatiques et anthropiques pour une gestion intégrée et durable. Les suivis des analyses sur la Têt, l’Hérault et le Rhône sont gérés et effectués respectivement par le CEFREM (Centre de Formation et de Recherche sur l’Environnement Marin) à l’Université de Perpignan, le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) à Montpellier et le CEREGE (Centre Européen de Recherche et d’Enseignement des Géosciences de l’Environnement) à Aix en Provence.
En ce qui concerne les isotopes du carbone, je m’occupe des échantillons venant des trois sites. Sur le bassin de la Têt, un suivi spatial et temporel a été mis en place.
Sur les bassins de l’Hérault et du Rhône, il y a seulement un suivi temporel à la station aval.
Les fleuves indiens
Dans le cadre d’une collaboration avec l’Inde, j’ai pu travaillé sur les neuf principaux bassins versants indiens : Gange, Brahmapoutre, Mahanadi, Godavari, Krishna, Cauveri, Nethravati, Tapti et Narmada. Ces neuf fleuves ont été échantillonnés lors de deux missions (l’une durant la saison sèche, en février 2001, et l’autre pendant la mousson, en août 2001) des stations proches des exutoires (1 prélèvement par bassin). Ces campagnes de prélèvements ont été réalisées par M. Balakrishna, qui a séjourné durant une année en séjour post-doctoral au LMTG à Toulouse.
Nous avons ensuite fait l’ensemble des analyses élémentaires et isotopiques au LMTG à Toulouse.
Les bassins du Paraná et de l’Uruguay
Le Paraná et l’Uruguay forment le Rio de la Plata pour se jeter dans l’Océan Atlantique Sud. D’une superficie totale (Paraná + Uruguay) de 3,1.106 Km², ce bassin s’étend sur l’Argentine, le Paraguay, l’Uruguay, le Brésil. C’est le deuxième plus grand bassin d’Amérique du Sud, derrière l’Amazone, et cinquième au rang mondial.
J’ai séjourné deux mois en Argentine, à l’Université des Sciences de Cordoba pour préparer la logistique et le parcours d’une campagne de prélèvement sur les bassins du Paraná et de l’Uruguay, avec les chercheurs argentins (P. Depetris et D. Gaiero). Cette mission a duré dix jours, en juillet 2001, durant lesquels nous avons effectué un suivi spatial des compositions chimiques des eaux de surface de ces deux bassins sur le territoire argentin.
J’ai ensuite réalisé toutes les analyses chimiques (élémentaires et isotopiques) au LMTG à Toulouse, au retour de la mission.
Le bassin de l’Amazone
Le bassin de l’Amazone, le plus grand bassin par sa superficie (6,11.106 Km²) et par son débit (6590 Km3/an), (Gaillardet et al., 1999), se situe en Amérique du Sud. C’est un bassin tropical. Dans le cadre du projet CAMREX (Carbon in the AMazon River Experiment), huit campagnes de prélèvements sur l’Amazone et ses principaux affluents ont été réalisées, entre 1983 et 1984. Le but de ce projet était d’améliorer nos connaissances sur le fonctionnement hydrologique et les transferts de matière sur ce très grand bassin. Au cours de ces missions les compositions isotopiques des différentes formes de carbone dans les eaux de surface (COP, COD et CID) ont été mesurées. Ces résultats ont été publiés par Quay et al. (1992) dans un article sur le cycle du carbone dans l’Amazone.
Dans mon travail de thèse, j’ai repris ces résultats pour approfondir les observations de Quay et al. (1992). Une synthèse de ces résultats avec ceux de Longinelli et Edmond (1983) sera aussi effectuée.
Les techniques d’échantillonnage
Les échantillons d’eau sont prélevés et stockés dans des flacons en polypropylène (PP) et dans une bouteille en pyrex pour les analyses de carbone organique dissous (COD). Ces flacons sont lavés selon les protocoles suivants :
Lavage de flacons en PP :
Stockage pendant une nuit avec du HCl 1N
Rinçage avec de l’eau MilliQ (3 fois)
Lavage des bouteilles en Pyrex :
Lavage avec HNO3
Rinçage avec de l’eau MilliQ (3 fois)
Pyrolyse pendant 2 heures dans un four à 500°C
Pour séparer le dissous du particulaire, nous utilisons des filtres en acétate de cellulose de 0,22 µm. La concentration des matières en suspension est déterminée à partir du poids des MES sur le filtre. Les filtres sont pesés au laboratoire avant d’aller sur le terrain.
A chaque station de prélèvement, nous avons collecté des échantillons d’eau mais aussi des sédiments.
¾ Les échantillons liquides
Les prélèvements dans le fleuve s’effectuent au centre de celui-ci à l’aide d’un seau, soit sur un pont, soit avec à partir d’un bateau.
Les mesures de pH, alcalinité, conductivité, température et oxygène (pour la mission sur le Paraná) sont effectuées sur le terrain.
Nous utilisons deux appareils de filtration : un petit (47 mm) qui fonctionne avec une pompe à main et un deuxième, plus grand (122 mm), qui fonctionne sous pression avec une bouteille d’azote. Dans les deux systèmes, nous utilisons des filtres en acétate de cellulose de porosité 0,22 µm. Les appareils sont rincés avec de l’eau MilliQ.
La première eau n’est pas récupérée et sert à rincer le filtre pour éviter d’avoir des rejets du filtre dans nos échantillons. Ensuite, nous collectons l’eau dans les différents flacons selon le type d’analyses. Les traitements pour chacun des flacons sont présentés dans le Tableau III. Les acides utilisés (HNO3 bi-distillé et HCl bi-distillé) ainsi que le HgCl2 sont préparés au laboratoire.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : LE CYCLE DU CARBONE ET LES COMPOSITIONS ISOTOPIQUES DES RESERVOIR DE CARBONE
I. Le cycle du carbone et les signatures isotopiques des différents flux et réservoirs
1. Le cycle du carbone organique
2. Le cycle du carbone inorganique
II. Les isotopes stables 12C et 13C du carbone
1. Expression des rapports isotopiques et fractionnement isotopique
2. Le système végétation–sol–eaux de surface
III. Utilisation des isotopes stables du carbone
1. Dans les sols
2. COP, COD dans les fleuves
3. CID dans les fleuves
CHAPITRE II : MATERIELS ET METHODES
I. Les sites d’etudes et les prélévements sur le terrain
1. Les sites d’études
2. Les techniques d’échantillonnage
II. Les analyses élémentaires
III. Les analyses isotopiques
IV. La mise en place de la rampe d’extraction de CO2
CHAPITRE III : ÉTUDE DE BASSINS VERSANTS ELEMENTAIRES
Introduction
I. Le bassin versant de Nsimi Zoétélé (Cameroun)
1. Présentation générale du bassin
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
II. Le bassin versant du Strengbach
1. Présentation générale du bassin
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
III. Comparaison des deux bassins versants
IV. Conclusion
CHAPITRE IV : LES GRANDS BASSINS VERSANTS
I. Le bassin du Nyong
1. Présentation du bassin
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
II. Les fleuves de Patagonie
1. Présentation des bassins versants
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
III. Le bassin versant de la Têt
1. Description du bassin versant
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
IV. Les bassins versants de l’Hérault et du Rhône
1. Présentations des bassins versants
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
V. Les bassins versants de l’Inde
1. Présentation des bassins
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
VI. Le bassin du Paraná et de l’Uruguay
1. Présentation du bassin
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
VII. Le bassin de l’Amazone
1. Présentation générale
2. Résultats
3. Discussion
4. Conclusion
VIII. Conclusion
CHAPITRE V : FACTEURS DE CONTROLE ET BILAN GLOBAL A L’OCEAN
Introduction
I. Sources et facteurs de contrôle
1. A l’échelle des petits bassins élémentaires
2. A l’échelle des grands bassins fluviaux
3. Variations du δ 13CCID dans les eaux de surface
II. Bilan aux océans
III. Conclusion
CHAPITRE VI : PREMIERS ELEMENTS D’UNE MODELISATION DE L’EVOLUTION DU
δ13CCID DANS LES EAUX DE SURFACE
Introduction
I. Présentation des deux modèles : δ-Carb et CARAIB
1. Le modèle δ-Carb
2. Le modèle CARAIB
II. Premiers résultats et discussion
1. Le modèle CARAIB
2. Le modèle δ-carb
3. Conclusion
CONCLUSION
REFERENCES
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